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15/10/2010

La montagne magique

Bou - Iblâne

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La montagne légendaire

 

Souffle !Souffle ô Bou - Iblâne !

Rafraîchit l'air du plat pays

Car la belle n'est pas habituée à une telle chaleur !

Ô Bou - Iblâne ! N'était le froid, j'aurai planté ma tente sur ton sommet !

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Le « Moussa Ou Saleh », le plus haut sommet de Bou-Iblân, culmine à 3215 mètres .

Tout un cycle de légende est lié au massif de Bou-Iblâne, enneigé et inhabitable en hiver.  D'après une vieille légende « Moussa Ou Saleh » habitait Tlemcen. Il possédait un cheval et faisait preuve de prodiges. Un jour une fourmi l'a piqué. Il l'enferma alors dans un étui en roseau avec un grain de blé tendre. Au bout d'un an, elle n'a consommé que l'équivalent de sa tête de fourmi. Quand le Roi de l'époque l'a su, il ordonna séance tenante qu'on fasse venir « Moussa Ou Saleh ». Il s'adressa à ce dernier en ces termes :

- Puisque tu as emprisonné une fourmi innocente , tu seras emprisonné pendant un an !

-  A vos ordres, Roi du Temps : jugez comme bon vous semble ! lui rétorqua « Moussa ou Saleh ».

C'est ainsi qu'il demeura en prison pendant un an. Il demanda à sa mère de bien prendre soin de son cheval, de ne l'engraisser que de blé, en le gardant  à l'ombre, loin du soleil.

Le Roi, lui demande de choisir l'aliment qui sera le sien.

- Le lait dont je peux boire l'eau et manger le fromage..

Un jour, il leur dit :

- Il faudrait qu'on organise une fantasia !

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Au jour de la fête,il sella son beau coursier couleur d'ébène et prit d'assaut les remparts. Observant  son manège un gardien se met à crier :

-  Moussa s'enfuit ! Moussa s'enfuit !

A chaque étape ses poursuivants demandent aux gens :

- Un cavalier, est- il passé par là ?!

Invariablement, on leur répond:

- Nous n'avons vu passer qu'un corbeau portant une laine blanche à son bec !

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Le cavalier blanc continua ainsi sur son coursier noir jusqu'à la grande mosquée de Taza, où il fit ses prières. Il se dirigea ensuite vers le plus haut sommet de la région, où deux fossoyeurs ont déjà creusé une tombe :

- Que faites - vous ? leur demanda -t-il.

- Nous venons de creuser la tombe d'un homme de votre taille,. Veux - tu t'y mettre pour qu'on puisse mesurer si elle lui convient ?

- D'accord ! dit - il, en s'y glissant illico.

Ils lui firent alors sentir une fleur sauvage, et il en mourut d'une mort subite.

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Voilà pourquoi, à en croire la légende, on appela ce sommet du nom de « Moussa Ou Saleh ». Historiquement le nom de « Moussa Ou Saleh » évoque la vieille rivalité entre le roi fatimide de Tlemcen et les Baou Saleh du royaume de Nokour, qui florissait sur la basse Moulouya au 10ème siècle. Cette lutte inégale, n'est sans doute pas étrangère au développement de la légende de « Moussa Ou Saleh »,le plus haut sommet du Moyen Atlas. La renommée laissée par Moussa est telle, que cinq cent ans après sa mort, il se trouve encore cité par Ibn Khaldoun au nombre des illustrations du peuple berbère.

Le chant du pays se rythme au tambourin

Le rythme  de Bou Iblân scintille au firmament

La danse pastorale  est une  ondulation de la montagne

Hautes sont les cimes, limpides sont les sources

Drues, les  vallées de la montagne à Meskaddal

Où chaque année, on  célèbre les pâturages d'été...

Vertes, les prairies de la plaine d'Azaghar

Où chaque année, On  célèbre les pâturages d'hiver...

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Danse de la fraction Bni Waraïn des Bni Smint aux abords de Bou Iblân

La danse chantée  symbolise tout l'art musical berbère et se nomme  Ahidous , chez les Braber. Sa caractéristique est d'être une ligne ondulante. Cela symbolise - t- il l'ondulation des blés ? Ou bien plutôt celle des chaînes des montagnes ? L'Ahidous est la manifestation musicale et chorégraphique la plus complète de la montagne berbère dans le Moyen Atlas. Chez les Bni Waraïn, comme dans le reste du Moyen Atlas, le principal divertissement des adultes réside dans les réunions d'Ahidous, qui se forment parfois les soirs d'été au centre du village. Outre la rangée des participants, il y a le compositeur qui leur souffle le refrain qu'ils répètent indéfiniment, dénommé « Bou- izlân »,« bou-walloun ». Les danseurs esquivent rythmiquement les figures de l'Ahidous, entraînés par les « Bou-walloûn » - panctuant la courte et roque mélopée des notes brèves et sèches de leurs tambourins. Les joueurs se saisissent mutuellement les mains pour s'agiter ensuite en cadence avec frénésie.

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« On ne pratique cet Ahidus , nous dit Raho Qafo qu'à la saison des fêtes qui a lieu aux mois de juillets, août, septembre. Le chant que nous venons d'exécuter fait allusion aux pigeons que nous élevons à la maison et que nous dérobe l'aigle de la montagne. »

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« Notre Ahidus renchérit pour sa part Halbaj Bennacer, appartient à la région Maghraoua - Bni Waraïn. Son ère d'extension englobe Ras - Laksar, Berkine et Bou - Iblâne. Arabisé dans les années cinquante, notre Ahidus allait mourir. Nous l'avons ressuscité dans sa langue d'origine. Symboliquement, il se distingue, par la tenue, la mélodie et le rythme. On se distingue surtout par la langue amazigh. Et même si nous faisons partie du Moyen - Atlas, notre berbère est différent de celui du Moyen - Atlas. Mais l'Ahidus des Maghraoua et du Moyen -Atlas sont identique ou presque. »

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La similitude est frappante entre les belles mosaïques romaines de Volubilis et les tapis Bni Waraïn. Déjà, au 12ème siècle, Al Idrisi signale la qualité des laines produites en ce Moyen Atlas Oriental. Sous le règne du Sultan mérinide Abû Inan, les chroniqueurs vantent la beauté du tapis marocain, comparé aux parterres fleuris. C'est à l'art de tisser que se réduit toute l'éducation de la jeune fille Bni Waraïn . En ce Maroc des hauteurs enneigées, le tapis qui constitue le principal élément du trousseau de la mariée, permet une meilleurs isolation du sol. Au seuil de chaque maison, une air à battre. Au milieu de chaque air à battre, un poteau en bois de cèdre, auquel sont attachés, ânes et mulets, qui piétinent les gerbes en tournant en rond. C'est là, un procédé fort ancien, qu'on retrouve sur les bas-reliefs égyptiens. Pour séparer le bon grain de l'ivraie, on procède à l'aide de fourches au vannage, en lançant en l'air la paille que le vent porte au loin. Pour cette opération, le vent d'Ouest est considéré comme favorable : il n'y a pas de baraka dans les autres vents.

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Les premiers Almohades semblent s'être intéressés à la surveillance du couloir de Taza, séparant le Gharb de l'Oriental, en fondant et entretenant régulièrement le ribât de Taza, considéré alors comme véritable plaque tournante séparant le Maghreb central du Maghreb extrême. C'est là que le pouvoir Béni Mérine fut instauré. Les troupes Almohades furent attaquées et poursuivis à Guercif. Après une telle déroute, la prise de Taza « verrou du Gharb et maintenant sa clé », devenait une simple formalité ouvrant la voie à la prise de Fès par les mérinides au mois d'août 1248. C'est au 12ème siècle que s'amorce l'invasion Zénètienne , s'avançant des Hauts Plateaux et de Figuig vers la Moulouya : c'est ainsi que sont arrivés à l'Est de Taza et dans la basse Moulouya, les Maghraoua, les Bni Waraïn, ainsi que les autres tribus Zénètes, dans le sillage des pasteurs - nomades Béni Mérines. Le  territoire de ce qui reste des Maghraoua, se situe actuellement  entre Taza au nord et le massif de Bou - Iblâne au sud. C'est Ziri Ben Âtia, chef des pasteurs Maghraoua, qui a fondé Oujda, en 994. Les Maghraoua formaient jadis, une principauté alliée aux mérinides, au temps d'Abû Al Hassan et d'Abû Inan, les fondateurs des médersas de Taza et de Fès. Ce qui reste des vestiges Maghraoua, ne constitue qu'une fraction des tribus Zénètes Bni Waraïn. Au 13ème siècle, le territoire des Bni Waraïn, qui s'adonnaient alors au pastoralisme, s'étendait, entre Figuig au Sud et la vallée de la Moulouya au Nord. Mohamed El Mardi nous raconte ainsi comment les Bni Waraïn s'étaient établis d'abord au aux Tankraramt,en haut de Bou Iblân: : "D'après nos anciens, les Bni Waraïn, étaient venus à  l'origine de la région de Figuig et se sont établis au Tankraramt. Après y avoir séjourné là-haut des années et des années, ils ont commencé à se disperser :  Certains en direction de Tazarine, d'autres ont descendu vers Matmata, ou sont restés au sommet de cette montagne. Il y a aussi ceux qui ont pris la direction des Maghraoua ou sont allés s'établir aux rivages du Melloulou. Ils ont essaimé dans toutes les directions. C'est pour cette raison qu'un vieux dicton dit : « celui qui n'est pas passé par Tankraramt n'est pas waraïni. » Et ce n'est à partir du 16ème siècle, qu'on retrouve enfin les Bni Waraïn fixés dans ce Moyen Atlas Oriental, à l'Ouest de Bou - Iblâne, sur l'emplacement précis où vivent encore aujourd'hui leurs descendants.

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Maghraoua au sud de Taza

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Cheikh Abdellah Yahya des Bni Smint

Chez ces anciens pasteurs - nomades, le nom de « Douar », éveille l'idée d'un groupement de tentes disposées en rond. C'est au pied de Bou - Iblâne et de son ancien volcan éteint, que se situe Bni Smint, le village des hauteurs où nous a accueilli Cheïkh Abdellah Yahya :« Douar Bni Smint comprend trois fractions qu'on appelle ainsi : Aït Messaoud, Aït Hammad, Aït Âbboud. D'après ce qu'on nous a toujours raconté, ces trois fractions avaient un ancêtre commun. Trois fractions issues d'un seul ancêtre. Le douar Bni Smint est au pied du mont « Moussa Ou Saleh ». Il se situe entre les monts « Moussa ou Saleh » et Bennacer. Ici la maison a deux niveaux : le rez de chaussée, réservé à l'étable et aux fourrages. Et l'étage réservé à l'habitation et au magasin de stockage des céréales et de la nourriture. Le bétail est parqué dans la partie inférieure de la maison dénommée « Ifri », là où on stock les fourrages. Dans la partie supérieure se trouve Thanout, où on stock les grains, et Akham où se trouve la cuisine et la chambre où vit la famille. On donne à cette partie habitable de la maison le même nom qu'on donne à la tente de la transhumance. On accède par un étroit et rude escalier aux chambres de l'étage : l'une sert de cuisine, l'autre de grenier, et une troisième, Tamsrît, où l'on reçoit les invités. »

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Chez les Bni Waraïn, Taddart est le nom habituel de la maison. L'Arabe de la période anté - islamique employait déjà dar avec le sens de « bivouac ». L'importation du mot en Afrique serait le fait de tribus bédouines. Les Zénètes l'auraient adopté et transmis à leur tour aux populations transhumantes.

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Si ailleurs, dans le sud marocain notamment, l'air à batte est établi à la lisière des champs, ici, pour des raisons de sécurité, il est au seuil des habitations.C'est la Jmaâ qui nomme le fqih, chargé de recevoir et de conserver en dépôt les revenus de la mosquée. Située à la lisière du village, la vieille mosquée Bni Smint, est entièrement construite en bois de cèdre. Ce n'est pas uniquement un lieu de prières. Elle est tout à la fois une petite école, un refuge pour les passager, la demeure du taleb. Elle est dédiée à Sidna Jibril, l'archange Gabriel : c'est le patron des transhumants comme Sidi Bel Abbès est le patron des cultivateurs. Si pauvre qu'elle paraisse, elle possède des biens, un trésor, que gère un moqadam. Elle a ses troupeaux, ses terres, dont le produit permet de pourvoir à son entretien, à la rétribution du taleb. C'est sur ses fonds qu'on rachetait jadis au guerrier le cheval qu'il avait perdu au combat, et qu'on s'armait pour le jihad , et qu'aujourd'hui encore on fait des avances au cultivateur qui manque de semences, au pasteur dont la maladie a décimé le troupeau, au malheureux qu'une infortune a touché.

La vieille mosquée en bois de cèdre des Bni Smint

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La vieille mosquée en bois de cèdre des Bni Smint

Le transhumant considère la mosquée comme le « pieu du douar », son soutient moral et spirituel. Le proscrit est assuré de trouver avec un refuge, sa subsistance, et le pauvre, à sa mort, un linceul et des funérailles décentes. Elle l'avertit de tout danger, et à ce titre, il la révère autant qu'il la craint.

En plus des terrains de culture à la lisière du douar, les Bni Smint, disposent là haut au Jbal Jarrah, de terrain de parcours pour tout le monde, ainsi que des terrains de culture pour chacun. Quand arrive le froid, ils quittent la tente pastorale pour la maison en pisée. Et dés les prémices des premières neiges, ils se replient à nouveau sur leur douar, où commencent les préparatifs de la transhumance d'hiver vers la plaine, où seront entamés les labours.

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Selon la légende de la vieille bergère pétrifiée de froid avec ses vaux, pour avoir transgresser le tabou pastoral, en renversant le cycle naturel de la transhumance d'hiver:

La vieille bergère se déplaçait avec son troupeau vers la steppe de Taïzirt. En compagne de son mari, de son berger et de ses nombreux vaux. Quand les sept nuits froides de Hyân sont arrivées, elle dit à son mari :

-Il faut qu'on monte en haute montagne.(où ils possédaient une bergerie au Moussa Ou Saleh).

-On ne quittera ici, que si le grain est mûr, lui répond son mari.

Elle ordonne alors au berger :

- Vas en pâture, sur les terres de laboure, et ramènes - moi une vieille épis pour que je puisse faire croire à mon mari que la période des moissons est déjà là, et que nous devons entreprendre la transhumance d'été.

Après avoir  tâté la vieille épis, son aveugle de mari, il  lui dit :

- Il est temps en effet de transhumer au « Moussa Ou Saleh ».

Au bout d'un séjour de trois jours  là -haut,  Hyân est allé voir mars :

- Ô mars, toi qui préside au printemps ! Peux - tu me prêter trois jours de mauvaises augures, pour que j'en pétrifie la vieille ogresses ?!

C'est ainsi que mars avait accordé à Hyân, les trois jours de mauvaises augures, qui pétrifièrent, la vieille , son mari, son berger, et ses vaux.

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Le vieux genevrier du village Bni Smit, dénommé Taqqa en berbère

Un vieux genévrier est au cœur de ce village des hauteurs « Au milieu du douar, il y a un arbre dénommé « Taqqa » en berbère, nous explique notre hôte. Cet arbre a toujours été au milieu du douar, peut - être depuis quatre, cinq, voir six siècles au moins. C'est un arbre destiné aux prières de la petite et de la grande fête. Il est toujours au centre de la vie sociale du douar. » C'est sous ce genévrier millénaire, arbre à palabre consacré par les usages séculaires que la Jmaâ décidait aussi bien des affaires courantes que de la guerre.

Ces transhumants sont de farouches guerriers qui s'étaient toujours opposés aux envahisseurs venus de l'Est, les hordes hilaliennes et Maqil du Moyen Âge, les incursions turcs et au tout début du 20ème siècle, l'arrivée des colonisateurs Français comme le relate notre hôte Cheïkh Abdellah Yahya :« Il y avait un homme du nom de Mohamed Ou Qasso, originaire de douar Tighza, qui s'était réfugié ici, à l'arrivée des Français. Il a résidé ici avec sa famille jusqu'à la prise de Tamjilt. Une fois montés jusqu'ici, les soldats français ont commencé à égorger et à dilapider le troupeau du vieil homme sous ses propres yeux. Ses enfants prirent la fuite vers le Sahara. D'après ce que nous ont raconté les témoins oculaires, en partant d'ici, ils affrontèrent les français sur leur chemin à Oulad Ali. De là, ils continuèrent en direction du Sahara, mais à nouveau les français leur barrèrent la route au lieu dit « Tazegzaout », au djebel Aïachi : des indicateurs les ont trahi. Encerclés par l'armée françaises, ils ont lutté jusqu'à la mort. Les femmes et les enfants qui ont survécu, les français les ont ramené ici à Berkine. »

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Le cèdre de l'Atlas, espèce essentiellement montagnarde, garnît le sommet de Bou - Iblâne à plus de 2000 mètres d'altitude.

Arbre au port majestueux et à la vie séculaire, le cèdre peut atteindre jusqu'à 40 mètres de hauteur et 2 à 3 mètres de circonférence.

Arbre millénaire sur montagne légendaire, le cèdre est le symbole de l'éternelle jeunesse, puisqu'on en trouve des spécimens qui datent de 1200 ans. En raison de sa longévité, les anneaux transversaux du cèdre - qui témoignent des années sèches et des années humides -  ont permis aux chercheurs d'établir une chronologie pour mille ans d'histoire climatique du Maroc.

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Au Maroc, l'utilisation du bois de cèdre, comme matériel de construction et de décoration, remonte à l'introduction de l'art islamique avec les Idrissides, comme en témoignes les mosquées Qaraouyne et Al Andalous de Fès. La sculpture et la gravure sur cèdre, éclosent  à Marrakech avec la dynastie Almoravide. Mais il a fallu attendre le 13ème siècle et les mérinides, venus des steppes orientales, pour que le travail sculpté du bois de cèdre devienne un art à part entière. De nombreux éléments de boiserie, peints, sculptés , ou tournés, ornent mosquées, medersa, palais...Le travail du bois de cèdre à usage monumental attesté dès l'époque Idrisside, prend un développement considérable sous la dynastie mérinide. C'est l'époque des médersa, ces collèges du Moyen - Âge : c'est la période où triomphe l'art du bois de cèdre sculpté et peint.Il ne reste que îlots, de belles forêts de cèdres, qui s'étendaient autrefois aux alentours des hauts sommets : ils ont été décimés par des incendies dont certains sont restés légendaires. Selon une vieille légende qu'on nous raconte dans ces hauteurs de Bou Iblan, ; c'était un ogre qui aurait incendié la forêt de cèdre. Cet ogre vivait dans une grotte. Les gens de l'époque ne parvenaient pas à l'en déloger. Ils l'avaient affronté avec des armes. En vain. Ils décidèrent alors de recoure au feu. Asphyxié, il fut contraint de quitter son repère. En sortant le feu a pris dans sa fourrure. Et c'est ainsi qu'il mit le feu à la cédraie en période estivale. C'est ce qu'on nous raconte pour expliquer la dissémination de la cédraie de Bou - Iblâne.

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A mesure que l'on s'élève, on continue de voir jusqu'à 2000 mètres environ, le chêne vert mélangé à l'if, au genévrier oxycèdre - Taqqa en berbère - et la sabine thurifère - Awal en berbère - puis cette essence disparaît, et elle est remplacée par le cèdre : idîl en berbère.

Abdelkader Mana

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14/10/2010

La danse du baroud

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La danse du baroud

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Carnaval masqué chez les Ghiata

Ba Cheikh :"Ce carnaval a lieu chez nous à la fête du sacrifice. Au dixième jour après le sacrifice. Je dormais - seul Dieu ne dort jamais !- et je me voyais en rêve masqué dans une mascarade comme celle-ci!"

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Tous les villageois participent à ce pré théâtre populaire  dont les dialogues et les musiques sont entièrement improvisées avec leurs personnages burlesques dotés de baraka. Des offrandes sont recueillis par ces personnages burlesques et masquées au cours des tournées aumônières devant les hameaux.    Par Abdelkader Mana

Chez les Ghiata, le printemps revêt une exubérance certaine. Avec cette végétation luxuriante, ces chants d'oiseaux au creux des boccages et aux cimes des arbres, on comprend l'enthousiasme des anciens voyageurs andalous qui sont passés par là. C'est une fraîche oasis qui fait un agréable contraste avec les paysages dénudés de l'Est,  donnant à la campagne de Taza une dimension méditerranéenne particulièrement riante.

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Les jardins et  les vergers Ghiata entourent presque entièrement l'éperon et la ville de Taza. La végétation arborescente comprend surtout des oliviers : Taza produit une assez grande quantité d'huile et il y a de nombreux pressoirs au creux des vallons autour de la vieille cité. Une des caractéristiques des Ghiata est qu'ils mettent leurs maisons à l'abris des regards au fond des vallées, et non pas au sommet des montagnes comme font les berbères du sud pour faire face à l'ennemi venu de la plaine.

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On retrouve chez les pasteurs Ghiata de la montagne, la même fête carnavalesque qui s'observe à l'Aïd El Kébir, sous le nom de Bilmaun au Haut Atlas, de Boujloud, à Fès, et qu'on appelle Ba Cheïkh, chez les Ghiata, les Tsoul et les Branès dans la région de Taza. Le personnage essentiel s'y montre revêtu de peau de mouton ou de chèvre.Le sacrifice suivi de la mascarade constitue deux épisodes d'une même cérémonie. La peau dont le personnage est revêtu provient des victimes sacrifiées le premier jour de l'Aïd El Kébir.

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«  Ba cheïkh »,« Souna », la « fiancée » et  le « mari de Souna »

Le carnaval comporte trois principaux personnages :

« Souna », la « fiancée », «  Ba cheïkh » le « mari de Souna »,  convoitée par un troisième personnage masqué mais plus jeune :il dispute Souna à son aîné. Le quatrième personnage est celui du « juif » qui ravit « Sona », l'enlève et la fait disparaître pour exiger l'équivalent de la dote à sa restitution.

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Le carnaval d'Assad-Essdine

A Bachiyne , fraction Ghiata , le personnage masqué de Ba Cheïkhm , nous fit cette déclaration :

« Qu'Allah nous préserve des écarts du langage ! Amis ! Ce carnaval  légué  par nos ancêtres et  parents, continuons à le fêter ! Nous l'avions fêté avec feu Ali Zeroual, et avec Mohamed Bougrine, que Dieu ait son âme, et avec Ba Chiboub qui a soixante dix ou quatre vingt ans. J'ai joué avec Mestari Driss qui était presque centenaire, et je continue à apprendre aux jeunes.

Ce carnaval a lieu chez nous à la fête du sacrifice. Au dixième jour après le sacrifice. Je dormais - seul Dieu ne dort jamais !- et je me voyais en rêve masqué dans une mascarade comme celle-ci. Quand l'Aïd el Kébir arrive, on sacrifie une victime, et après avoir consommer méchoui et grillades, je m'accoutre de cette manière, je rassemble autour de moi les badauds, et je m'en vais de hameau en hameau où les villageois nous accueillent avec des offrandes : si quelqu'un souffre de rhumatisme par exemple, nous ne le soignons pas de notre propre volonté, mais par celle du Seigneur. Par la grâce d'Allah.Nous ne faisons que prier pour le malade. S'il guérit par la grâce divine, il offrira bouc et bélier.  Et Dieu accorde sa guérison. Ce n'est pas à moi que cette grâce appartient. Parmi cette assistance, chacun qu'il soit jeune ou vieux, possède sa propre baraka auprès de son Seigneur. Chacun sa part de grâce divine, qu'il mobilise en prières pour ce malade. On nous offre des céréales, on nous offre de l'orge, on nous offre des béliers. On va au devant des bienfaiteurs et ils nous accueillent avec joie. »
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Le carnaval d'après Maimoun Ali

On lui demande :

- l'amèneras tu avec ses cornes ?

 Oncle Ba Cheïkh :

- Il sera avec ses cornes !


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Passion des Dionysos

" Chacun sait comment le théâtre est sorti chez nous des mystères de la Passion qui se sont peu à peu mondanisés, écrit E.Doutté:  or nous savons pareillement que les carnavals du Maghreb ont engendré, , une sorte de théâtre rudimentaire, qui ne se borne plus au thème primitif, mais comporte, au Maroc par exemple, des représentations burlesques très variées. De semblables petites représentations sont rares en dehors de la fête de l'achoura et de la fête que nous avons seulement mentionné, du Roi des tolba, très analogue au carnaval et vraisemblablement d'origine semblable. Même la fête de l'achoura n'a pas , chez nos indigènes produit de véritable art dramatique : c'est à peine si on signale en dialecte zénatie les dialogues récités lors de la fête de l'achoura, du Ramadan etc. , par les membres du chaïb achoura, sorte de confrérie théâtrale et satirique qui a beaucoup de ressemblance avec les frères de la Passion et les Enfants sans soucis de la littérature française à la fin du Moyen - Âge."

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Nous avons filmé ce carnaval en 2006 à Bachiyne, fraction Ghiata située à la lisière de la montagne et la grande confédération des tribus Bni Waraïn : Un personnage identique à Ba Cheikh existe chez les Bni Waraïn voisins qui célèbrent également leur carnaval à l'Aïd El Kébir. En effet, parmi les types carnavalesques figure la soi-disant « fiancée de Bou jloud », Taslit ou Bou Jloud représentée par un homme déguisée en femme vêtue d'une magnifique handira.

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De semblables petites représentations sont rares en dehors de la fête de l'achoura et de la fête que nous avons seulement mentionné, du Roi des tolba, très analogue au carnaval et vraisemblablement d'origine semblable.

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Dans le nord du Maroc, le carnaval paraît également très répondu : nous savons qu'il existe à Tanger ; on l'a signalé à Fès, enfin il a été décrit en détail pour le Rif, pour les Djbala et pour la tribu des Zkâra. Dans le Rif on représente le Ba Cheïkh (mot qui veut dire, un chef et en même temps vieillard) : c'est un personnage âgé, avec une citrouille sur la tête, une peau de hérisson, en guise de barbe, deux défenses de sanglier de chaque côté de la bouche etc. à côté de lui sa femme est figurée par un individu déguisé, avec des fers à cheval en guise de pendants d'oreilles, un collier d'escargots au cou, un autre personnage représente l'âne, monture de Ba Cheïkh , derrière marche le juif, sordide caricature d'un fils d'Israël.

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Ce spectateur a l'allure du vrai Ba Cheikh dissimulé parmi le public

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Le personnage du soldat : ce quatrième personnage  ravit « Sona », l'enlève et la fait disparaître pour exiger l'équivalent de la dote à sa restitution.

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Carnavalesque d'El -Atrach
Pour Laoust, la cérémonie dont Ba Cheïkh évoque le souvenir nous reporterait à l'époque antérieure à l'invention du labourage où les berbères menaient la vie pastorale et où ils pratiquaient le culte du bélier, comme personnification du Dieu protecteur du troupeau. La victime sacralisée par son sacrifice, possède une baraka, sa peau en particulier jouit de la faculté  de guérir toutes sortes d'affections cutanée. On suspend les cornes aux arbres fruitiers, plus particulièrement aux grenadiers, dans le but d'augmenter la récolte de fruits. A la fin du 19ème siècle Frazer vit dans cette succession de sacrifice suivit de mascarade, dans cette juxtaposition de la douleur et de la liesse accompagnant la mort et la résurrection d'un Dieu de la végétation. Ainsi la nature fut régulièrement renouvelée, par cette célébration saisonnière.

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Boulebtaïn, en arabe et ilmen en berbère dont le pluriel est Bilmawn. Les deux termes signifient « homme vêtu de peaux ». Boujloud ou Bilmawn, ou encore Ba Cheïkh au nord du Maroc ; ce sont successivement les noms des personnages masqués du carnaval de l'Achoura et de la fête du sacrifice : personnage central de la procession masquée répondant selon les lieux aux noms de Boulebtaïn, Boujloud,Herma, en ville arabophone ou encore de Bilmawn et Bou-Islikhen au Haut-Atlas berbérophone.  Ces processions et mascarades s'intercalent entre le sacrifice et le Nouvel An. Ils sont liés à la fête du sacrifice dans la campagne et à celle de l'Achoura dans les villes. Pour Emile Laoust ces mascarades masquées  constituent les débris de fêtes antiques célébrant le renouveau de la nature, capturée par le calendrier musulman :« Au Maroc, des fêtes carnavalesques d'un genre spécial s'observent partout à l'Aïd el Kébir ; le personnage essentiel s'y montre revêtu de peaux de moutons ou de chèvres. Le Berbère n'aurait - il pas établi un rapport si étroit entre le sacrifice du mouton, ordonné par l'Islam, et la procession carnavalesque d'un personnage vêtu de peaux qu'il aurait vu en ces deux rites, deux épisodes d'une même cérémonie...L'Aïd El Kébir s'est substitué, en Berbérie à une fête similaire qui existait déjà et au cours de laquelle les indigènes sacrifiaient un bélier et se revêtaient de sa dépouille. Si l'on y rappelle que le bélier fut autrefois l'objet d'un culte dont le souvenir s'est conservé tard dans le pays, on voudra peut - être voir dans les mascarades actuellement célébrées à l'Aïd El Kébir, la survivance de pratiques zoolâtriques dont l'origine se perd dans les âges obscures de la préhistoire. »

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Masques et mascarades

Chez les Aït Mizan du Haut Atla, ces peaux sont plaquées à même sur le corps nu du personnage masqué. Celle qui lui couvre les bras est disposée de manière à laisser les sabots pendant au bout des mains. Sa figure noircie à la suie ou avec de la poudre disparaît sous une vieille outre à battre le beurre qui lui sert de masque. Sa tête  est agrémentée de cornes de vache ou coiffée d'une tête de mouton dont les mâchoires écartées par un bout de roseau lui font faire la plus horrible grimace. Une orange garnie d'un bouquet de plumes est souvent piquée à l'extrémité de chaque corne ; des branches de verdure lui couvrent parfois la tête ou les épaules. Enfin deux ou trois colliers, un immense chapelet aux grains fait de coquilles d'escargots, et de puissants attributs de mâle complète l'accoutrement du personnage hideux.  

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 Chez les Jbala on parle plutôt de Ba Cheikh, un vieillard lubrique à la barbe blanche, habillé de « haillons sordides », portant « une peau de bouc en guise de bonnet » et égrenant un chapelet de coquilles d'escargots. Ses organes génitaux sont bien mis en évidence : « une lanière de peau de mouton avec sa laine et deux aubergines entre les jambes, simulant les organes de reproduction ». Telles était les observations qu'avait noté Mouliéras au début du 20ème siècle, à propos de ce qu'il appelle le carnaval djebalien.

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 Moliéras décrit en ces termes les scènes burlesques des masques telles qu'elles se déroulaient devant chaque maison : « Une fois par an seulement a lieu ce carnaval. Il dure trois jours et coïncide avec la grande Fête des Sacrifices. Le premier jour, les masques se répondent dans les villages, vers midi, et ils commencent leur tournée aumônière, s'arrêtant devant chaque habitation, rééditant invariablement leurs farces après laquelle ils reçoivent ce qu'on veut bien leur donner : du pain, de la viande, des œufs, des poulets, des grains. Inutile d'ajouter que tout le village est à leur trousse, les entourant, les admirant, hurlant de bonheur quand se produit une grivoiserie plus épicée que les autres. ». Ce carnaval dont il ne reste que des débris dans les vieilles médina marocaine, reste encore vivace en haute montagne comme on le voit ici au Moyen Atlas oriental ,chez les Ghiata ,ou encore chez les Aït Mizane du Haut - Atlas.

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La danse du baroud
La danse du baroud est une danse rythmique. C'est par cette danse que se distinguent les tribus Ghiata d'une manière générale ; mais elle est tout particulièrement emblématique des Ghiata - Est. La danse du baroude a des prolongements dans l'Oriental marocain, à Guercif, Oujda, Berkane, jusqu'en Algérie, où on  retrouve une danse similaire. Lors du tournage d'un documentaire sur les Ghiata en 2006 le cavalier Ammar Beroual nous confiait :

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On peut se demander aussi si le nom des Ghiata ne provient pas de "Ghiata" (les hautboistes), parce que le hautbois est omniprésent dans leur musique...

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Dans sa « Reconnaissance au Maroc » le Vicomte Charles de Foucauld, raconte ces évènements en ces termes : « La fabrication des balles et celle de la poudre sont la principale industrie de la tribu : il y a 80 maisons où l'on s'y livre. Les Ghiata peuvent, je crois, mettre en ligne environ 3000 fantassins et 200 chevaux. C'est une tribu belliqueuse et jalouse de son indépendance.  Ses six fractions sont journellement en guerre entre elles, mais elles s'unissent toujours contre les ennemis communs. Il y a environ sept ans,Moulay El Hassan voulut la soumettre ; il marcha contre elle, à la tête d'une armée : ses troupes furent mises en déroute, lui-même eut son cheval tué dans la mêlée. Le combat eut lieu dans la montagne, sur les rebords de l'oued Bou Guerba. Ils ne marchent jamais qu'armés, et ont sabre et fusil : ici, chacun pour soi avec son fusil. »

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La fraction des Bni Snan,  est située à l'Est de Taza.  « La danse du baroud », nous l'avons hérité de nos ancêtres. Toutes les fractions Ghiata se distinguent par cette danse . Même si  chaque douar a son propre style.Les Ghiata - Ouest ne pratiquent pas cette danse , par contre ils chantent, en rythmant leurs chants de percussions. Mais quand ils ont un mariage, c'est à nos fantassins et à nos musiciens qu'ils font appel. Car, ce sont, nous autres , les Ghiata - Est qui pratiquent cette danse du baroud.Chaque année, nous portons un sacrifice aux chorfa d'Ouazzane et à Moulay Idriss Zerhoun. On passe deux à trois jours à ce moussem et jusqu'à nos jours, la fraction M'tarkat, reste fidèle à ce pèlerinage de Moulay Idriss Zerhoun.La danse du baroud se pratiquait après chaque victoire et au retour de chaque expédition guerrière contre les infidèles. C'est le leader du combat, sa tête de lance qui menait cette danse guerrière qui se déroulait au hameau jusqu'à l'aube. »

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Les Ghiata sont essentiellement montagnards. La partie de leur territoire située en plaine est très fertile, mais peu étendue comparée à l'épais massif montagneux : là sont leurs villages et leurs cultures, sur de hauts plateaux, dans de profondes vallées presque inaccessibles ; ces vallées sont d'une fécondité extrême, ombragées d'amandiers, et produisant de l'orge en abondance.

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D'après Az-Zaïani, qui fut gouverneur de Taza en 1787 et qui est l'auteur du Torjouman les Ghiata appartiendraient aux berbères Botr, ils seraient de la même famille que les Meknassa et les Mtalssa. Il est certain que les diverses fractions des Ghiata n'ont pas une origine commune. Les Riata ne parlent plus la langue berbère. Ils sont en réalité bilingues. Sauf la fraction montagnarde des Ahel Doula, qui sont en contact direct avec les Bni Ouarayen. Les Ghiata et  les Bni Ouarayen représentent les vieilles populations  stables de ces montagnes. Etant les premiers à être en contact avec les migrations en provenance d'Orient, les Ghiata, de même que les autres tribus de la trouée de Taza, ont été plus précocement touchés par l'arabisation que les autres tribus berbères du Maroc. p2.JPG

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« En hiver, l'huile se contracte. Quand le temps se réchauffe, les anciens disent que l'huile y ressemble au serpent : il faut la laisser chauffer pour se dilater. De même que quand il chauffe, le serpent sort, de même quand le grain d'olive chauffe, il donne davantage d'huile. Quand on procède au gaulage des olives, en fonction de son verger, le fellah peut faire venir quatre, cinq, ou six récolteurs d'olives, Il fait venir des femmes du douar, qu'elles soient âgées ou jeunes. On procède alors au gaulage des oliviers. Les hommes montent dans les arbres avec leurs gaule, et les femmes procèdent au ramassage au sol. Elles font la fête, les unes chantent, les autres poussent des you-you ... Mars - avril, est la période de pression de l'huile d'olive. Le temps s'y réchauffe. On y pratique le tour de rôle au pressoir à l'huile. A chacun son tour de rôle, ça équivaut à un jour ou trois selon les besoins de chaque  fellah. Il y en a qui ont besoin de quatre voir cinq jours, mais chacun doit attendre son tour de rôle, pour moudre sa récolte d'olives. Exactement comme les tours d'eau : il y a celui qui irrigue deux heures ou trois, qui est sa quotte part, puis il cède au suivant dont c'est le tour d'eau en fonction de ses besoins. »
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Le pressoir à l'huile d'olive appartient à toute la tribu. On y amène la récolte d'olives de toutes parts. Tout ce qu'on a au douar on l'amène au pressoir pour y être moulu, nous explique M'hamed Lamsieh qui veille sur l'un des principaux pressoirs à l'huile d'olive situé à ciel ouvert au creux d'un ravin fleuri de marguerites et de coquelicots:

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Depuis les versants nord de la montagne Ghiata , où existent des sources importantes, et d'où les oueds dévalent les pentes, l'eau de la montagne est amenée, par une canalisation, au sommet de l'éperon sur lequel est construit Taza. L'eau était acheminée vers la ville par des canalisations à ciel ouvert. Le tiers de cette eau était accordé en main morte à la  grande mosquée de Taza ainsi qu'à  ses bains maures. Cette seguia se trouvait sous le contrôle des Ghiata qui n'hésitaient pas à la couper tenant toute la ville à leur merci. De la Martinière qui est  passé près de cette ville en 1891, a constaté que les Ghata exerçaient une domination absolue dans la vallée de l'innaouen, à cette époque. Le vicomte Charles de Foucauld de passage à Taza en 1883, a aussi signalé l'état misérable des citadins cruellement opprimés par les Ghiata.  Aujourd'hui encore, le cavalier Bécharine que nous avons rencontré lors de notre tournage se souvient :

«Toute la production agricole locale est destinée à Taza. Elle n'est pas commercialisée ailleurs. Elle est destinée à l'autosuffisance de la médina de Taza. Que cette production agricole soit maraîchère, céréalière, ou d'huile d'olive, c'est ici que résidait à l'époque la source d'alimentation de la ville.

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  La fraction Bni Bou Qitoun entoure Taza de toute part.

Selon un cavalier du nom de Bécharine :« L'avènement de Moulay Idriss fut troublé par des guerres. Pour lui marquer leur soutient, la fraction Bni Bou Qitoun accompagnée de ss esclaves avaient planté ses tentes auprès de la sienne à Fès  .

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Bataille au sommet de Roman Lazarev
Ayant attiré ainsi l'attention de Moulay Idris celui-ci aurait  demandé : Qui sont ces gens là ? On lui a répondu : « Ce sont les Ghiata ». « Non, leur rétorqua-t-il, ce sont des « lighata », « les secours de la religion ».  Depuis lors, on les appelle « Ghiata », et leur fraction qui campait auprès d'Idris 1er , « Bni BouQitoun »(littéralement les descendants de l'homme à la tente de toile)
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Idris Premier, Roman Lazarev

Les Ghiata se disent les « aides par excellence de la dynastie Idrisside » . Encore de nos jours,on peut recueillir chez eux, cette tradition  selon laquelle,  Idris 1er leur aurait donné ce surnom qui signifie  « le secours de la religion. »

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Lorsqu' en effet, Idris 1er, fuyant les Omeyyades, s'est réfugié au Maroc pour se fixer à Volubilis, parmi les tribus berbères gagnées à sa cause à la fin de l'année 788, on cite les Ghiata et les Miknassa , parmi les premières tribus ralliées à sa cause. C'est probablement sous son règne que les Miknassa commencèrent à construire Taza.

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Le cavalier Krirech nous dit : «  On raconte qu'Idriss 1er a  appelé les « Ghiata » à son secours , c'est le sens et l'origine de leur nom qui signifie « secours »  en arabe. Il y a les Ghiata- Est et les Ghiata- Ouest. Le territoire de ces derniers s'étend de oued Bouhlou au col Touaher. Et celui des Ghiata - Est , de col Touaher à Ahl Doula. Les Ghiata - Est se composent des fractions suivantes : Bni Bou Qitoun, qui entourent Taza de toutes parts, Bni Ouajjan, Bni Bou Ahmed, Bni Snan, Galdaman, Ahl Doula. »

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 Région de passage et de contact à travers les siècles, le couloir de Taza abrite des tribus arabisées tels les Ghiata, qui sont cités dans ces régions depuis au moins l'arrivée de l'Islam au 7ème siècle. L'histoire montre d'ailleurs, que les grandes migrations et les conquérants ont souvent emprunté cette route. Le couloir de Taza, constitue de tout temps une voie de communication importante entre les steppes désolées des hauts plateaux de l'Oriental marocain et les riches plaines du Gharb. Sur le chemin du pèlerinage à la Mecque, « Triq Sultan » était ponctuée de Kasbah, à la fois étapes de caravanes et forteresses défensives face à l'ennemi héréditaire en provenance de l'Est que ce soit les Abdelwadides de Tlemcen ou plus tard, les Turcs.

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En 1680, Moulay Ismaïl, plaça en différents points de la route d'Oujda à Fès, des garnisons chargées d'assurer la sécurité des communications, dont celle de M'soun. Ces kasbah -garnisons avaient pour mission de faire face au péril turc établi en Algérie.

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La kasbah de M'soun occupe une position stratégique importante reliant l'Est et l'Ouest du Maroc à l'entrée de la trouée de Taza. Historiquement, elle reliait Tlemcen à Fès à travers Taza. On dit qu'elle fut construite du temps de Moulay Ismaïl. On dit aussi que Jilali Bouhmara fut blessé dans une bataille ici - même. C'est à partir de là que sa trace fut perdue et qu'on n'entendit plus parler de lui.

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La kasbah de M'soun est occupée le 11 mai 1912par l'armée Française en provenance d'Algérie. Avec l'occupation de la kasbah de M'soun, une réaction se produit chez les Mtalsa ; des feux apparaissent dans la montagne, et le soir - même les français subissent une attaque. A la fin du mois d'avril 1912, les émeutes de Fès provoquent l'effervescence sur la rive gauche de la Moulouya ; les tribus sont rassemblées à M'soun. Le 26 juin 1912, les troupes françaises s'installent à Guercif. C'est dans ces conditions, qu'il était devenu possible aux troupes coloniales de réaliser la jonction tant souhaitée entre le Maroc Oriental et le Maroc Occidental.

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Lyautey et Moulay Hafid d'après Roman Lazarev

Pour M'hamed Chlioueh, moqadem de la cavalerie Ghiata :

« A partir de 1912, la France a occupé la kasbah de  M'soun aux environs de Taza. Ils sont restés là quelques jours avant d'entamer leur marche en direction de Taza à travers oued Boulejraf situé dans la commune de Galdaman. A partir de là les Ghiata les ont attaqué ainsi qu'à Galdaman, jusqu'au lieu dit « Lamtiq » situé dans la commune de Bab Boudir. C'est là qu'ils ont entamé leur guerre contre le colonialisme, à Galdaman et chez les Branès, et ce jusqu'à l'avènement de l'indépendance du Maroc en 1956. »

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C'est en effet , à l'oued Boulajraf que les troupes françaises, en provenance d'Algérie ont rencontré les premières résistances marocaines, comme le soulignait, le 8 mai 1914, le capitaine Caussin, dans son journal de route « vers Taza » : « Des hauteurs de Jbala part un feu nourri. Le convoi se rassemble et fait une courte halte en avant de l'oued Boulajraf. Notre marche rapide et inattendue réveille les douars voisins de la piste. Il est décidé un mouvement simultané des troupes en provenance du Maroc Oriental et du Maroc Occidental pour alléger l'effort réciproque. »

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Les Français parcourent la région avec un groupe de 2300 hommes. Pourtant cela n'intimide pas les Bni Waraïn : le 9 avril 1912, à la pointe du jour, environ 2500 guerriers foncent sur la reconnaissance de Mahiridja. Dés le début le combat prend une allure très violente, l'action s'étend peu à peu sur un fond de huit kilomètres : 200 morts côté marocain et 28 tués côté français. Les Bni Waraïn restent déterminés et très hostiles, et ne songent nullement à dissoudre leur rassemblement à Bou Yaâcoubat. D'ailleurs une Harka des Ghiata et Houwara, formée dans la région Taza - Msoun, vient les appuyer ; en fin avril 1912 ; elle s'installe à Safsafat sur le Melloulou , puis vers le 10 mai 1912, elle atteint la Moulouya à Sidi Bou Jaâfar. Les forces des dissidents s'élèvent alors à environ 4500 combattants. Vers la fin de 1913, le commandement décide d'installer un poste provisoire à Mahiridja, qui sera achevé, comme l'indique la plaque commémorative, deux ans plus tard, en 1915. Cette mesure a pour but d'interdire les pâturages d'automne du Maârouf des Bni Waraïn.

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Dans son journal de route « vers Taza », le capitaine Caussin poursuit :

« Ce jour du 10 mai 1914 va marquer une date mémorable dans l'histoire de notre conquête marocaine. La grande voie de pénétration, l'antique « Triq Sultan » va s'ouvrir devant nous. Les Rhiatas de l'Est cherchent à sauver la face :une ère nouvelle commence pour le Maroc. A travers les champs et les jardins où les oliviers répondent une ombre bienfaisante, le convoie s'achemine vers la ville. Des montagnes qui semblent l'encercler, une vaste kasbah profile au sommet d'une crête ses murs rougeâtres. Une immense clameur salue cette vision encore lointaine :Taza !Taza ! Tout un chacun se sent  puissamment attiré vers ces hautes murailles encore estompées par la brume matinale. Ce soir nous camperons dans Taza la mystérieuse. »

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La bataille d'après Roman Lazarev

Par le passé, les Ghiata assiégeaient la ville et lui coupaient eau et nourritures. Les citadins ne pouvaient sortir sans l'accord des Ghiata. Alors, ils portèrent plainte auprès de Hassan 1er qui attaqua avec sa Mehella, les Ghiata dans ces montagnes. Il y avait beaucoup de brouillard, ce jour là, de sorte que l'expédition s'arrêta à « Bouguerbane » sans parvenir aux hauteurs de « Ras el Ma ». L'attaque eut lieu un vendredi. »

Au milieu du mois de septembre 1874, Hassan 1er entra à Taza. Les tribus de la province lui envoyèrent aussitôt des députations. Le souverain se montra bienveillant, sauf envers les Ghiata auxquels il reprochait d'opprimer constamment les citadins ; il infligea aux fractions les plus compromises d'entre eux, une forte amende, qu'ils payèrent sans résistance. L'année suivante, Hassan 1er sorti de Fès, pour se rendre à Oujda. Il atteint Taza au mois de juillet et fit camper son armée vers Draâ Louz,(le bras des amandiers) au pied des montagnes Ghiata. La tribu ne consentit à verser qu'une faible partie des vivres qui lui étaient demandés. Le jeudi 20 juillet 1876 Hassan 1er lança ses troupes contre une fraction Ghiata. Le lendemain le Sultan tenta de pénétrer au cœur de la montagne. Les Ghiata avaient établi des barricades en travers de tous les passages. A un certain moment l'armée assaillante se trouva acculée à un profond ravin ; les Ghiata firent alors une violente contre - attaque. Le porte étendard tomba.

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Le poulain blanc de Roman azarev

Aveuglés par la poussière que soulevaient les chevaux et par la fumée de la poudre, les soldats se précipitèrent pêle-mêle dans le ravin et s'y écrasèrent. Il y eut bientôt dans toutes les crevasses un amoncellement de bagages et de cadavres d'hommes et de chevaux. Hassan 1er dut mettre pieds à terre pour sortir du terrain affreusement coupé, dans lequel avait péri la plus grande partie de sa cavalerie. Il laissa aux mains des Ghiata de nombreux trophées et avaient failli perdre ses femmes. Le Sultan parvint enfin à rallier ses troupes et les Ghiata se retirent au sommet des montagnes en abandonnant leurs villages et leurs vergers. Ayant reformer son armée, Hassan 1er, retourna dans la montagne sans rencontrer âme qui vive, puis il se porta à Oujda. A son retour les Ghiata se soumirent.

 

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Tabjia (canoniers) d'après Roman Lazarev

Après la mort de Hassan 1er le7 juin 1894, un agitateur se mit à parcourir la vallée de l'Innaouen, au courant de l'été 1902, en prêchant l'insurrection. Il était monté sur une ânesse, ce qui lui valu le surnom de Bouhmara. Ce personnage se faisait passer pour Moulay Mohamed, le frère du Sultan, et l'on ignora longtemps sa véritable origine. C'était en réalité un nommé Jilali Ben Driss Zerhouni. Il s'attribuait le nom de Moulay Mohamed afin de justifier sa position de prétendant au trône. Beaucoup de Ghiata, Hyaïna, Béni Wuaraïn , Tsoul et Branès proclamèrent Sultan le Rogui Bouhmara. Un caïd Mia et une vingtaine de cavaliers, envoyés dans la vallée de l'Innaouen pour arrêter le prétendant, durent prendre la fuite. Enhardit par ce premier succès Bouhmara, marcha sur Taza, à la tête de contingents Ghiata. Il dresse son camp sous le mur de la ville où il entra le 25 octobre 1902, après deux jours de pourparlers avec les notables. Le prétendant nomma un Ghiati caïd de Taza Plus tard, partisans de la première heure , ces mêmes Ghiata se soumirent à Moulay Hafid, et répondirent aux lettres de supplication de Bouhmara en pillant son Dar El Makhzen à Taza.

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Au plat pays  (« Azaghar »en berbère) de Galdaman, nous avons visté le douar de Aïn Lahjal, (litéralement « l'œil de la perdrix »)qui se compose de quinze à vingt Canounes et qui fait partie de la fraction Ahl Doula(« ceux de l'Etat », probablement surnommés ainsi parce que jadis ils était des guerriers au service du Guich d'une dynastie) . Le mont enneigé de Bou Iblan est la frontière palpable entre les Ghiata et leurs voisins Bni Wuarayen. Et c'est au niveau de ce hameau surnommé « œil de perdreau », que les Ghiata se trouvent en contact direct avec leurs voisins les montagnards berbères Bni Warayen. Un habitant de ce hameau nous dit avoir assisté à des mariages mixtes entre les Ghiata et les  Bni wuarayen, où ces derniers chantent en berbère alors que les premiers chantant en arabe.

Abdelkader Mana

05:04 Écrit par elhajthami dans Achoura, Le couloir de Taza | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : le couloir de taza | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

06/10/2010

La deuxieme guerre du Rif

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BOURED le 2 octobre 1955

On peut lire dans « la Vigie » du dimanche 9 octobre 1955 :« Ce matin une offensive de grande envergure à laquelle participent plus de 10 000 hommes, a été déclenchée. L'opération consiste en des mouvements d'encerclement de la tribu rebelle des Gzenaya. ». Dix bataillons français participaient à l'opération de prise en tenaille de la tribu rebelle des Gzenaya : des convois massifs remontaient vers le Nord à partir de Fès et de Taza.

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« Toutes ces montagnes ont fait face au colonisateur, ne serais-ce qu'à coups de pierres ! Ne serais-ce qu'à coup de pierres ! » Un résistant de Boured (fraction de la tribu Gzenaya du Rif).

Par Abdelkader Mana

« Le Rif est connu pour sa résistance nationaliste : depuis la lutte du chérif Mohamed Ameziane, mort en 1912, en passant par celle d'Abd - el krim- el- khatabi en 1921. Nos parents ont persisté dans cette voie de la résistance jusqu'à l'insurrection de 1955. Moi-même j'ai participé en 1955 à plusieurs attaques de l'Armée de Libération : à Bouskour, Aknoul, Mzizoui, et  Tizi N'Taïda à Had Jbarna. Nous avons poursuivi la lutte, en nous rendant à pieds aux quarante quatre saints de Taourirt. Nous avons lutté jusqu'au retour de Mohamed V. Une missive nous est parvenue du défunt Roi nous disant qu'un accord a été signé entre le Maroc et la France, et qu'il faut maintenant déposer les armes. C'est ainsi que nous nous sommes dispersés en rejoignant Rabat : certains pour les Forces Armées Royales, d'autre pour l'intérieur ou encore la police. Et jusqu'au jour d'aujourd'hui, nous sommes restés fidèles au serment. » Résistant rifain de Boured.

 

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Abdellah Qariyouh, ancien résistant Metalsa

L'Armée de Libération marocaine attaque le 2 octobre 1955 à partir de minuit, les postes avancés de l'armée française à Aknoul, Tizi Ousli et Boured. Les opérations sont commandées par Abbas Messaâdi, Abdellah Senhaji, et Belhaj. Beaucoup de combattants viennent de la farouche tribu des Gzenaya. Et dans cette région accidentée au cœur du Rif, que la grande presse avait surnommé « le triangle de la mort », les combats sont d'une extrême violence. Ni l'aviation, ni les tanks français ne peuvent intervenir efficacement contre les 2000 maquisards marocains.

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Boured et le piton de Bouzineb,lieux des opérations militaires se situent à la limite des zones occupées par la France et l'Espagne

 Le 15 juillet 1955 fut constitué un comité de coordination de l'Armée de Libération du Maghreb, comprenant quatre membres : Boudiaf,  Ben M'hidi, Abdellah Sanhaji et Abbas El Messadi. Le même jour fut arrêtée la date du premier soulèvement : le dimanche 2 octobre « à partir de 0 heure et pas avant ».Le choix de cette date, qui intéressait également les partisans d'Oranie, ne fut nullement influencé par le départ de Ben Arafa ce qui réduit à néant les conséquences politique qu'en tira Boyer de Latour qui affirma que « le départ de Ben Arafa devait être le signal d'une rébellion généralisée » et qu'il ne fallait « constituer un conseil de trône que quand les esprits seront calmés... »

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Mohamed Yaâgoubi, témoins Metalsa

« A la veille de l'indépendance un jurisconsulte de Kebdana, me confia 100 tickets - semblables à ceux des autocars-  pour que je les distribue aux habitants en contre partie d'un « Doro » par mois. Pourquoi ? Il m'expliqua que ces fonds,  sont destinés à Si Abd el krim, pour qu'il nous achète les armes. »  

  Voici maintenant ce que confie à l'auteur en 2008 ce même rifain issu de la tribu des Metalsa :

"D'après ce qu'on raconte, c'est Abd el krim qui avait envoyé les armes : on avait convoqué les négociants de Casablanca pour qu'ils  les transportent  - comme on fait avec la contrebande en provenance de Mellila et d'Espagne - afin de les distribuer ensuite, aux tribus, en vue de leur soulèvement. Mais les négociants ont refusé de convoyer les armes. Ils ont refusé de décharger les armes qu' Abd el krim  avait demandé de convoyer jusqu'à Casablanca. Ils  avaient peur ! Ils s'apprêtaient à renvoyer la cargaison en Egypte. Abd el krim leur dit alors :« Ecoutez, si les rifains ne réceptionnent pas les armes, personne ne les recevra à leur place ! Les rifains sont cupides ; donnez leur de l'argent et ils lèveront les armes ! ».

Ils déchargèrent alors les armes au rocher de Kebdani. De là, ils les sortirent en contrebande et les convoyèrent à dos d'hommes et à dos de mulets jusqu'aux aux centres des Béni Waraïn et de Taza. Mais aussi à ceux des Metalsa et des Gzenaya. Les responsables de chaque centre tenaient des réunions pour  réceptionner ces armes. Progressivement une date s'est dégagée pour l'attaque. Ils s'étaient dit : à telle nuit, chaque tribu attaquera son bureau des Affaires Indigènes. Ils s'étaient mis d'accord sur la nuit du samedi à dimanche 2 octobre 1955. Chez les Gzenaya, un mouchard est allé en avertir le capitaine : il avait assisté à leur réunion clandestine, et est allé immédiatement les dénoncer ! Il dit au capitaine : « Il t'attaqueront cette nuit ! ». Ce dernier réunit alors ses soldats et auxiliaires et les dissimula dans une grotte à Taourirt près de Tizi Ousli. La grotte contenait armes et  munitions . De sorte que quand les attaquants sont arrivés ils n'ont rien trouvé au bureau. Les Mokhanis n'étaient plus là. Il ne restait plus que des femmes. Plus personne à qui s'attaquer. Rien. Ils se mirent alors à dévaliser les lieux, emportant marmites et théières sur leur passage. Qui avait agi ainsi ? Les gens de Mezguitam et Driouch. Chacun avait sa propre section, qui se composait de 60 à 80 membres de l'Armée de Libération. Les attaques étaient prévues au même moment :  à 0 heure et pas avant . Elles devaient se produire simultanément à Aknoul, Tizi Ousli et Boured. Mais ils n'ont pu s'attaquer effectivement qu'à Boured et Tizi Ousli, et pour des raisons particulières, il n'y eut pas d'attaque à Aknoul.Quand aux Gzenaya, du côté de Boured, ils n'étaient au courant de rien. Ils sont allés s'attaquer au capitaine et à ses soldats. Ils ont tout saisi. "

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Le prestige d'Abd-el -krim est demeuré tellement intacte qu'on continue de lui attribuer à tord ou à raison tous les combats que le Rif a mené contre le colonisateur au 20 ème siècle..

Pour comprendre ces évènements, il faut remonter au mois de février 1947, lorsqu'au Caire, était fondé la première structure de coordination entre les mouvements nationalistes de la région : le « Bureau du Maghreb » chargé de préparer la propagande indépendantiste des pays d'Afrique du Nord. Le 31 mai suivant, le leader de la guerre du Rif, Abd - El - Krim El Khattabi, se réfugie en Egypte, après 21 ans d'exile à la Réunion et une évasion réussie. Il devient aussitôt la figure emblématique qui manquait aux émigrés maghrébins du Caire. Président d'un « Comité de Libération du Maghreb Arabe », proclamé le 9 décembre 1947, il publie le 5 janvier 1948 un manifeste soulignant la volonté inébranlable des partis nationalistes maghrébins de se consacrer à la lutte indépendantiste. On peut y lire ce qui suit :

« A une époque où les peuples s'efforcent d'assurer leur avenir, où les pays du Maghreb arabe tendent à recouvrir leur indépendance extorquée, et leur liberté perdue, il devient d'une nécessité impérieuse, pour les leaders politiques du Maghreb, de s'unir, et pour tous les partis de libération de faire bloc et de se soutenir réciproquement, puisque c'est là une voie qui nous conduira à la réalisation de nos buts et de nos espérances. Je me suis en effet mis d'accord avec les chefs et les délégués des partis auxquels j'avais fait part de l'idée de créer un Comité de libération du Maghreb arabe, composé de tous les partis de l'indépendance dans chacun des trois pays : Algérie, Tunisie, Maroc...Désormais, notre cause entre dans une phase décisive de son histoire. Constitués en un bloc puissant, nous sommes tous unanimes et aspirant au même but, qui est l'indépendance totale du Maghreb arabe, nous ferons face aux usurpateurs. »

La notion de « Maghreb Uni » se révèle à ce moment, très ancrée dans l'imaginaire collectif. La guerre du Rif des années vingt(encore prégnante dans les esprits), la débâcle Française de 1940, le mouvement de décolonisation post seconde - guerre mondiale, la création de la Ligue Arabe en 1945, fabriquent une chaîne mémorielle, des points nodaux de référence, des représentations unanimement partagées. Un même élan se dessine dans les partis nationalistes du Maghreb.

A la fin d'octobre 1955, un front fluide reprenait l'action non plus sur 30 mais sur 150 kilomètres. A la fin de 1955, la menace s'était aggravée, au point qu'il avait fallu abandonner pratiquement une zone de 30 kilomètres de large sur 20 de profondeur au Sud - Est de Tizi Ousli. Les partisans qui se comptaient désormais par milliers étaient mal armés mais bénéficiaient de l'appui de la population et pouvaient porter la guerre chez les Béni Snassen, en liaison avec les combattants algériens.

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En haut en pointillés les postes de contrôle Français, délimitant la zone Espagnole. En bas un fac simili de la presse coloniale de l'époque indiquant sommairement l'emplacement de Boured, de Tizi Ouzli et d'Aknoul...

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D'apres Ialatten , qui a participé  à l'attaque du bureau des Affaires Indigenes de Boured: " Un responsable  est arrivé de Nador pour nous informer que les armes allaient être envoyées d'Egypte par Abd el krim, et qu'elles seront convoyées par bateau jusqu'à Nador. Nous saurons par la suite que ces armes étaient  déchargées au rocher de Kebdana. De là la cargaison a été acheminée à Aïn Zorah, d'où on a procédé à sa répartition : une première livraison alla aux Marmoucha, une seconde à Berkine, une troisième à Mzguitam, et une quatrième à Tizi Ousli.Après une période de mise en sommeil, l'attaque a débuté par Tizi Ousli. D'autres batailles eurent lieu du côté de Taza, à Berkine et chez les Marmoucha." La déposition de Mohamed V était à l'origine de l'insurection:

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Iâllaten, résistant Gzenaya, ayant participer à l'attaque du poste de Boured

«Le jour où nous avons appris la déposition de Mohamed V, tout le monde s'est mis à pleurer : hommes, femmes, enfants, adultes. Et qu'avons - nous  fait ? Nous avons rejoint les nationalistes. Nous avons prêté serment à leurs chefs. Ceux-ci sont allés chercher les armes, qu'ils introduisent à Nador. Abbas Messaâdi et les autres résistants : tels Abdelaziz Aqodad, Hassan Zekriti, Allal Amqri, El Ghabouchi, Aqjouj, Bouqoullan , et le sergent Abdessalam.Tous  avaient prêté serment de lutter pour la bonne cause.Abbas Messaâdi avait introduit les armes à Nador. Chaque chef de section a emporté deux armes, pour entraîner sa cellule à leur maniement. Chacun  avait rejoint  son douar avec un fusil et un revolver. Les éléments qui devaient participer aux entraînements militaires étaient triés sur le volet. Ils s'étaient engager à garder jalousement le secret. Les entraînements se faisaient  de nuit aux environs de nos douars. »

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Le sergent Abdessalam d'Aknoul qui commandait une armée de libération du Rif composée pour l'essentiel de déserteurs de l'armée française qu'ils ont quitté avec armes et bagage pour retourner leurs fusils contre le colonisateur qu'ils servaient jusqu'à la veille de l'indépendance...Selon un resistant de Boured , c'est à cause des déserteurs que la France avait été  vaincue. Ceux qui  retournaient leurs armes contre leur propre bataillon, quand survenait  une attaque des maquisards. Ils changeaient brusquement de camp en retournant leurs armes contre les français. C'est de cette manière que la France  avait été vaincue. 

 Un bilan établi par les partisans, le 6 octobre 1955, insista sur l'effet de surprise et surtout sur la saisie de 380 armes. Il estimait à 71 le nombre de victimes de l'offensive, en majeure partie européennes.

Plus grave pour l'occupant français la rébellion des montagnards sédentaires des Aït Seghrouchen et des  Marmoucha , occupant le versant Sud du Moyen Atlas dans la massif du Jbel Bou Iblane. L'attaque d'Imouzzer des Marmoucha fut l'épisode le plus sanglant de l'insurrection. Le chef de circonspection des Affaires Indigènes  commandant le poste avait été prévenu par un Marocain de l'imminence d'un coup de force...mais il ne  crut pas au renseignement qui lui a été donné.Les rebelles tuèrent dix européens et cinq goumiers. Ils purent emporter une grande quantité d'armes. On craignait que le mouvement gagna la haute Moulouya.

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Les troupes françaises qui opèrent dans « le triangle de la mort » - Aknoul - Boured - Tizi Ousli - ne trouvèrent pas de groupements ennemis à affronter. Si elles purent occuper les trois points du triangle, la principale tâche revint au génie pour réparer, chaque matin, les sabotages nocturnes. Billote put tenir à Boured une conférence d'état - major. On n'en était encore qu'à une guerre de buissons.

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Boured-TiziOuzli-Aknoul: le triangle de la mort

Après la bataille du 2 octobre qui s'est déroulée « au triangle de la mort » -  Tizi Ousli - Aknoul - Boured - la majeure partie de la population de cette région s'est réfugiée en zone occupée par les espagnols.

Dans la nuit du 28 au 29 décembre 1955, une nouvelle offensive des rebelles dans le Rif révélait l'extension de la dissidence de plus de 40 kilomètres vers l'Ouest. Le général Agoustini, qui disposait de 15 000 hommes, dut entreprendre « une puissante opération de nettoyage » qui lui permit, de reprendre les positions abandonnées et de mettre fin aux attaques. Aux prises avec une guérilla insidieuse, les troupes d'occupation se sentaient impuissantes et découragées. Les désertions en masse des Marocains montraient aux Français vers qui allaient leur fidélité. On devait évacuer les goumiers en camions et sans armes. L'Oriental restait en état d'anarchie, le Amel d'Oujda se déclarait impuissant et les impôts ne rentraient plus. L'affaire du Rif exaspérait la tension entre la France et l'Espagne.

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Abbas Messaâdi , leader de l'A. L.N. pour le Nord et l'Oriental

D'après Waterbury : le gros des combattants n'excéda jamais 600 ou 700 hommes provenant des tribus Gzenaya, Bni Bou Yahi , et Bni Snassen. La plus batailleuse, celle des Bni Ouariaghel dont est originaire Abd-el-krim el khattabi, se tint à l'écart. Plusieurs des chefs furent acceptés par les tribus rifaines pour leurs capacités non pour leur origine : Dr.Khatib était né à El Jadida, Abbas Messaadi des Aït Ishaq, au Sud - Ouest de Khénifra, et Abdelkader Bouzar était un algérien interprète au Maroc.

 C'est ici - même qu'on avait élu Abbas Messaâdi, en tant que leader. . L'un des premiers leaders  à Bouskour fut le caïd Hassan, qui était auparavant militaire dans l'armée française et qu'on avait choisi pour son expérience des armes. Après avoir été nommé chef de l'Armée de Libération ; il était venu s'établir à Bouskour. Les patrouilles se composaient de cinq à dix membres qui harcelaient les postes français, jusqu'au cœur même de Taza. »

L'opinion française s'émut et dénonça la complicité de l'Espagne. Valino, qui n'avait pas oublié le silence de Guillaume, répondit sèchement qu'il n'en était rien. En réplique à Boyer de Latour, qui fait état de l'accord conclu, le 10 juillet 1926, lors de la guerre du Rif, qui prévoyait une concertation sur la situation des confins, il dénia la possibilité aux français « d'en appeler à un accord qui a été violé tant de fois par la France, qu'il peut être aujourd'hui considéré comme périmé ». Les européens redoutaient une insurrection généralisée.

Les services de renseignements de l'armée française au Maroc espagnol ne soupçonnaient pas que l'insurrection avait été préparée de longue date par des militants marocains et algériens associés pour une action commune dans la lutte pour la libération du Maghreb Arabe. Un colonel fut envoyé à Nador pour apprécier si la situation était sérieuse. Un tract a pour en - tête : « Vive l'Armée de Libération, vive le Maghreb Arabe, vive Mohamed V ».

Bataille rangée ,"Bin Sfouf"(d'entre les rangées" d'arbres)

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Témoignages recueillis par l'auteur à Boured en 2007

Voici les témoignages des résistants Gzenaya que nous avons receuillis l'été 2007 a Boured , ce village des hauteurs rifaines , non loin des ruines du bureau des affaires indigenes attaqué le 2 octobre 1955 a 0 heure. Apres ce coup de force de la resistance eurent lieu plusieurs escarmouches dont la principale est la bataille dite de "Bin Sfouf" (d'entre les rangées d'arbres) sur les hauteurs strategique de Taineste qui surplombent en pays Branes le couloir de Taza :

« Nous étions des nationalistes. A  l'époque, il y avait la France. C'est Si Abbas Messaâdi, un des compagnons du Dr. Khattib, qui le premier a introduit les armes à Nador, où il a fait prêté serment aux leaders qu'il a désigné pour l'Armée de Libération Marocaine chez les Gzenaya : deux sont originaires de Tighezratine, Massaoud Bouqalla(aux environs de Malal), El Haj Mohamed Abeqri d'Ajdir, Ouqodad Si Abdlaziz(Oulad Ali Ben Aïssa), Si Abdelkader Ouqodad(Oulad Ali Ben Aïssa).

Si Abbas leur a dit :

  • - Chacun de vous doit amener deux personnes, pour qu'ils s'entraînent aux armes à Nador.

Ceci était arrivé le jour où la France avait déporté Mohamed V, qu'Allah l'ait en sa sainte miséricorde. Femmes et enfants pleuraient la déportation de Mohamed V par les Français. C'est à partir de là que l'Armée de Libération Marocaine a commencé à recruter aux douars où elle avait confiance. Ils ont fixé le rendez vous de l'attaque à zéro heures. Il y avait plus de cent militaires français au poste de Boured. Le poste qui surplombait l'oued Boured comprenait un capitaine et un adjudant français ainsi que des forces auxiliaires.   Vers minuit trente on s'est retrouvé au poste munis de haches. Nous avions entre treize et quinze fusils. Nous nous sommes emparé de 35 fusils du poste ainsi que de deux autres de la douane .Trois mokhazni sont morts lors de cette attaque ainsi que deux douaniers : l'un européen, l'autre  marocain. Il y eut aussi des blessés : Boujabli de Boured ainsi que l'adjudant européen. L'adjudant, le capitaine et les forces auxiliaires ont pris la fuite, soit à cheval soit à pieds. Pour notre part, nous avons capturé deux chevaux du poste des affaires indigènes. Ceci a eu lieu le 2 octobre 1955, et nous avons obtenu l'indépendance en 1956.L'Espagne nous a aidé, puisque les combattants se réfugiaient dans la zone qu'elle occupait. La France ne pouvait pas franchir cette frontière.Après cette attaque la France a envoyé de grands renforts de Mernissa et d'Aknoul.  La légion, les goums, les chars bombardaient et les fantassins avançaient. Ils se dirigeaient vers le mont Bou Zineb qui constituait la frontière entre zone espagnole et zone française. Ils ont pris le poste de l'Armée de Libération Marocaine au mont Bouzineb. Sous pression les éléments de celle -ci se retirèrent en zone espagnole, et certains d'entre eux se sont cachés ici même à Boured. A ce moment là, 250 à 300 éléments de l'Armée de Libération, se sont dirigés vers Taïnest. A notre arrivée à Taïnest 40 déserteurs nous ont rejoint avec armes et bagages. C'était le cabrant Moulay Ali qui les avait amené de Taza. Avec ses soldats, il nous a amené des mitrailleuses et soixante mortiers. Il pleuvait. On errait dans la forêt.  Quelqu'un a  bousculé une grosse pierre : en roulant vers le bas, celle - ci  réveilla le poste Français de Bin Sfouf. Ils se mirent alors à tirer sur nous de nuit, à l'aide de bombes éclairantes et de mortiers. Le cabrant Moulay Ali s'écria :

  • - C'est une dénonciation; reculez! que chacun retrouve son poste!

 

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Mr.Ahmed Fellah, originaire de Boured ayant participé aux combats de "Bin -Sfouf"

 Quand nous avons reculé, quelqu'un est venu nous avertir que trois patrouilles ont quitté Taïnest et Mernissa. Effectivement, vers dix heures du matin, l'officier de Marnissa rencontre celui de Taïnest qui était accompagné de Mokhazni. Les militaires mettent leurs armes en garde à vous, et c'est à ce moment où ils ont commencé à prendre leur casse - croûte, qu'un dénommé Kharbouch, originaire de Kahf El Ghar, leur tira dessus à la mitrailleuse ,tuant ainsi six d'entre eux. Au cours de cet accrochage deux des nôtres sont morts. Je suis resté vivant. Ceci est arrivé à Bin Sfouf. A Taïnest, on a tué au moins treize légionnaires. J'en ai enjambé moi - même les dépouilles de quelques uns en fuyant vers l'oued. Une femme est sortie poussant des you - you, un légionnaire la tua sur le coup , son pauvre corps s'est mis à rouler jusqu'en bas. L'officier venu de Mernissa était bloqué avec le mokhazni qui l'accompagnait. Celui-ci sortit son revolver et tua l'européen, pour qu'il ne soit pas lui- même tué par l'armée de libération. On l'emmena avec nous à la cache où on préparait le pain au douar Timskan du côté de Malal chez les Gzenaya. Après cet incident, les avions sont arrivés. C'est à mon arrivée à l'oued Bin Sfouf que j'étais blessé à mon bras gauche.

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Oued Ouergha en contrebas: au loin le piton de Bouzineb

 J'ai vu un soldat qui se dirigeait au bord de l'oued, le long d'un champ de vigne. L'européen qui m'a tiré dessus était lui-même blessé au pied. Notre infirmier l'acheva à coup de pistolet. Puis il vint me rejoindre avec les déserteurs qui sont venus de Taza avec Moulay Ali.  L'infirmier me soigna d'abord, puis alla enlever à l'européen sa carabine, ses cartouches et son sac. En remontant, j'ai trouvé la jument de l'européen, fuyant vers Taïnest, portant munitions et mortiers, ainsi qu'une grande radio qui leur servait à communiquer du sol avec l'avion. L'Armée de Libération Marocaine a ainsi récupéré les caisses de munitions et la radio de liaison. C'est à ce moment là que j'ai rejoint le sergent Abdessalam d'Aknoul, qui commandait l'Armée de Libération. Il y avait là un autre blessé, parmi les déserteurs qui nous ont rejoint. On a mis les blessés, sur dos de mulet. Quand nous sommes arrivés en haut de la colline de Timskane, où se situait un poste de l'Armée de Libération, deux avions nous ont survolé. L'un des blessés me dit :

  • - Ils vont nous tirer dessus! Moi, je suis mort, toi, tu dois te dissimuler!

On s'est laissé tomber tous les deux de notre mulet, l'avion nous a tiré dessus, mais personne n'a été blessé. J'ai continué le reste du trajet à pieds. Lui fut  transporté sur un brancard par l'Armée de Libération . Quatre avions nous attaquaient ainsi que des tanks venus de Mernissa et de Taïnest : ils bombardaient de tous côtés dans la forêt et à l'oued Bin Sfouf. Aux membres de l'Armée de Libération qui voulaient prendre la fuite, Moulay Ali disait :

  • - Par Allah, vous devez revenir délivrer les vôtres; qui sont encore bloqués à l'oued Bin Sfouf.

Ils y sont revenus de nuit, ils ont ramené les blessés, laissant les morts sur place. On est resté là bas deux jours. Quelqu'un nous a averti que les goums ont l'habitude d'aller chercher du bois à la montagne de Bin Sfouf. Il y avait parmi nous Bouqoulla de Gzenaya, le sergent Abdessalam d'Aknoul et Allal de Tizi Ousli : chacun commandait à 50 ou 100 combattants. La plupart d'entre eux étaient des militaires qui ont déserté l'armée française pour rejoindre l'Armée de Libération Marocaine. Un légionnaire s'est enfui de Taza et vint nous rejoindre à Aknoul. C'est un européen que nous avons surnommé « El Yazid ».C'était à la proclamation de l'indépendance en 1956. On nous a ordonné de rentrer à Rabat,  où on nous a amené en train. J'étais à Âkkari. C'est là que j'avais décidé de m'engager dans les Forces Armée Royales.

- Quant à moi, je suis revenu à la maison pour m'occuper d'agriculture.»

Survolant le théâtre des opérations en avion le correspondant de la « Vigie Marocaine » écrit dans le numéro du jeudi 20 octobre 1955 :

  « J'ai survolé hier la zone des opérations, où les rebelles camouflés sont parfaitement invisibles. Au bout de l'aile, à le toucher, le poste de Bou Zineb, tout blanc, dans un mince berceau de verdure, dominait la crête. L'avion n'a pu survolé Bou Zineb, car le poste est aux mains des rebelles, et pour atteindre la petite enclave, il faudrait traverser le territoire espagnol. Allez donc trouver les rebelles dans ce paysage jaunâtre quand ils se sont couchés contre le sol, le visage recouvert par le capuchon de leur djellaba.... »

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  « Le jour du soulèvement, j'étais en compagnie d'Aqjouj . On s'est réparti les taches : toi, Bouqoullane,  tu attaqueras Aknoul. Et toi El Ghabouchi, tu attaqueras Tizi Ousli. Quant à vous,  Abdelaziz Aqodad,  Hassan Zekriti, et  Allal Amqri, vous vous attaquerez à Boured. Ils se sont donnés rendez-vous le 2 octobre. Chacun était accompagné de deux personnes. On a fait appel aux gens de toutes parts. Puis, on s'est attaqué au bureau. Notre commando s'est dirigé vers Boured, où nous avons rencontré des gens venus de toutes parts. On disposait de peu d'armes. Les armes envoyées de Nador étaient insuffisantes. Nous avons attaqué  Boured en le brûlant. Le capitaine s'est enfui en direction de Mernissa en traversant l'oued. Trois Mokhaznis des forces auxiliaires sont morts, ainsi que le gardien de la prison que nous avons tué après avoir défoncer sa porte. Boujbal reçu un coup du français dénommé « Boyer ». L'attaque a durée jusqu'à l'aube.Le lendemain des renforts militaires français arrivaient par Mezguitam et par Tizi Ousli forçant les gens à s'enfuir. Des bataillons sont arrivés de Mernissa et de Taza. Celui en provenance de Taza, nous l'avons affronté au lieu -dit « Ballouta ». Nous eûmes un accrochage avec lui, d'où nous avons ramené un soldat avec nous. Deux d'entre nous sont morts. Eux, ils ont eu trois morts parmi les forces auxiliaires . En effet, au lieu-dit « Ballouta », deux de nos Moujahidines sont morts : il s'agit de Si Ahmed Taherras et de Mohamed Hammadi originaire d' Inahnahen.  Voyant que les gens s'enfuyaient vers « Ma Ali », les bataillons français se mirent à bombarder « Ma Ali » et Bou Zineb. En effet, après que Boured soit brûlé, des renforts sont arrivés de Mernissa , avec  tanks et avions . C'est à ce moment qu'eut lieu la bataille. Les gens fuyaient vers la zone espagnole toute proche, en particulier ceux de Tamjilt et de « Ma Ali ».Les tanks bombardaient, les canons tonnaient. Nous nous réfugiâmes au sommet de Bou Zineb, avec les bataillons de légionnaires français à nos trousses, épaulés de leurs goumiers, et de leur Makhzen. Trois bataillons nous pourchassaient. Les gens s'enfuyaient, tandis que les tanks les bombardaient. Il s'agit de terroriser le pays, mais sans parvenir à leur objectif ce jour là. Ils ont dû reprendre une seconde fois, en vain. Ce n'est qu'au troisième jour qu'ils parvinrent à occuper Bou Zineb. »

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Bouzineb vu depuis Boured

"Alors que la répression s'abattait sur le Rif, un front fluide reprenait l'action sur 150 kilomètres.Il y eut d'autres batailles à Tifjaouine, à « Ma Ali », à Bou Zineb, à Bin Sfouf, et à  la Khatra de Bou H'doud : "Nous sommes partis à Bouhdoud, où  eut lieu une bataille. Après quoi, on s'est dit :  il faut partir à Taïnest. On devait  arriver la nuit - même à Taïnest. Une fois  à Taïnest - plus précisément au col de Taïda où eu lieu une autre bataille, et où nous avons enterré nos morts-  nous y retrouvons El Ghabouchi et le capitaine Abdessalam d'Aknoul. Il y avait là aussi Si Abdelaziz ainsi que les autres chefs de la résistance, tel le caïd Si Hassan - il était devenu caïd après la reddition de l'Armée de Libération. A ce moment là, il y eut beaucoup de déserteurs de l'armée française qui nous rejoignaient au maquis. Parmi ces déserteurs de l'armée française, je vous cite, le caporale Moulay Ali, qui nous a rejoint avec quarante de ses soldats. Il y a de ces déserteurs qui sont venus avec deux mitraillettes, ou avec un fusil mitrailleur et plus.

On était quelques 300 maquisards à se retrouver au lieu - dit « Imskane ». On nous demande :

- Savez vous, ce qu'on va faire cette nuit ? On va s'attaquer à Taïneste !

Des éclaireurs , nous avertirent que des patrouilles française font leur tour de garde par ici, et qu'il fallait se préparer à les affronter. Un originaire du pays insiste :

- Il faut absolument rentrer à Taïnest.

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Enjeu militaires de taille : Taïnest qui domine le couloir de Taza

Des indicateurs dénoncèrent notre présence aux français, qui tenaient  le poste avec leurs mortiers. Une petite averse tomba cette nuit. Nous avons pris l'initiative d'attaquer. Je n'avais qu'une carabine et  quelques grenades. J'avais aussi de la munition, qui m'avait été offerte par un déserteur de l'armée française. Auparavant, je n'avais que des grenades. Franchement.

A la veille donc de l'attaque du poste de Taïnest, une petite averse était tombée au cours de la nuit. Les soldats ne connaissaient pas les lieux. Nous avons traversé une forêt plus dense que celle - ci, où il faisait sombre. Au cours de notre progression un soldat a buté sur une pierre qui s'est mise à rouler par la pente jusqu'au lit de la riière, réveillant  les français qui se mirent à envoyer des signaux lumineux et à nous bombarder de mortiers.

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Notre chef nous  ordonna alors de reculer.

Nous reculâmes. J'accompagnais mon oncle Aïssa Ali, qui est mort que Dieu ait son âme. En fait, j'avais trois compagnons : mon oncle Aïssa et deux personnes originaires de Mallal. Tous deux sont morts au cours de ces combats. Nous étions inséparables.

Je me cachais derrière une pierre. Quand ils nous ont tiré dessus.  Bougoullan tomba sur le coup après avoir été atteint de plein fouet. Abdessalam Ben Zahra , également originaire de Mallal m'ordonna alors :

- Lèves-toi et diriges - toi vers l'oued!

On a couru tous les deux en direction de l'oued, en  enjambant les cadavres de légionnaires. Brusquement, du fond de la vallée, quelqu'un s'est mis à nous crier que les légionnaires  en provenance de Mernissa venaient de rencontrer, une section  en provenance de Taïnest, et qu'ils ont fermé le fuseau  près du panneau de brique .

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Celui - ci  indique  trois directions : celles d' Aknoul, Taïnest, et Marnissa. C'est là où les officiers français se sont rencontrés et où ils ont fermé le fuseau..

Tandis que les officiers prenaient leur casse croûte, les soldats veillaient aux armes. Je les voyais de mes propres yeux, je ne fabule pas. De l'autre côté, une femme sortait de sa maison. Elle est morte que Dieu ait son âme, mais après le début des accrochages. Celui qui avait ordonné la fermeture des fuseaux est le premier à commencer à tirer. Nous avions avec nous un déserteur de la 4ème armée, qui avait déserté avec Moulay Ali. Avec sa batterie fusil mitrailleuse,  il tirait sur quiconque bougeait de sa place, et l' abattait sur le champ ! Eux ils étaient au fond de la vallée et lui les narguait depuis le haut de la colline !

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Il tirait aussi d'un fusil à neuf balles. C'est l'une des armes qu'on avait apportées de Nador. Dés les premiers tirs, chacun s'est précipité dans le désordre le plus complet, sur la première arme à portée de la main, sans que ce soit nécessairement la sienne. Et ils se sont enfuis vers l'oued.

Celui qui avait le fusil mitrailleuse, sais - tu combien de gens, il avait abattu à partir de sa ligne de tir qui surplombait l'oued  et qui était encadrée de part et d'autre par un roseau ?  Sais - tu combien, il en a abattu, de ceux qui s'enfuyaient à travers une ruelle ? Quiconque la traversait était abattu sur le champ. Certains roulaient jusqu'à l'oued.

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En enjambant les cadavres de légionnaires, j'ai tenté de rejoindre le haut de la colline avec mon compagnon blessé au pied. Mais alors que je lui ouvrais la voie,  me voilà face à un français blessé au pied  de sorte que du sang ruisselait de son brodequin. J'ai dis à mon compagnon :

  • - Voici un légionnaire blessé!
  • - Où est - il?! Où est - il?!

Sachant que nous allons le suivre, le légionnaire se dissimula derrière un roseau, d'où il nous tira dessus. Atteint, mon compagnon s'éfondra sur le champ. Je fus blessé à la main pour ma part.

- Ne bouges pas d'ici! M'ordonne mon compagnon.

Puis il s'en fut le long de  la rivière, jusqu' à retrouver le légionnaire qui nous a blessé et l'acheva  d'un simple révolver. J'étais au milieu du guet.

- Restes là où tu es! M'ordonna à nouveau mon compagnon.

Une fois assuré de la mort du légionnaire, il lui retira sa carabine, sa ceinture à munitions, sa musette, et son capuchon. Il me remet  ceinture et  musette, et se mit à soigner ma blessure. Après avoir panser ma main, il m'ordonne d'escalader la pente en direction du centre qui se trouvait là haut où on rassemblait  les morts et les blessés.

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En raison de ma blessure, l'adjoint du capitaine Abdessalam me dit :

- On va te transporter sur la jument avec cet autre blessé de part et d'autre de l'étrier. Et on va vous accordé quelqu'un pour conduire la jument jusqu'au centre où vous pouvez vous restaurer et dormir.

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Il s'agit du centre de TimsKane. A peine étions - nous parvenus au sommet de la colline que voilà qu'arrivent les avions. Tandis que des tanks nous bombardaient du côté de Mernissa et du côté de Taïnest. Il n'y avait  plus que canonnades sur canonnades !

Le soldat blessé me dit :

  • - Que vas-tu faire maintenant? Moi, je ne peux échapper à la mort. Les avions qui arrivent vont te bombarder! Après un tour d'horizon, ils vont piquer et te bombarder! Cherche à te défendre en se jetant sous les racines d'un chêne liège! Ne t'occupes pas de moi, je suis déjà mort!

Effectivement, c'est en rase motte que les avions se mirent à nous tirer dessus. Affolée la jument s'est emballée. Le soldat lâcha la bride et se jeta sous le parapet de briques, en faisant le mort. Pour ma part, je me suis laisser  rouler sur une pente, et me suis dissimulé finalement sous un buisson touffu.

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 Témoignage d'Iâllaten Abdessalam, né en 1929 au douar Aferzaz(résistant) :

« Quand les Français, qui avaient déposé le Mohamed V, ont vu cet acharnement de la résistance, ils sont revenus sur leur décision inique, en permettant son retour au pays. C'était la fin du Ramadan, avec la fête de l'Aïd Essaghir. On était convié à une grande fête à Mzizou. Un avion venait de tomber à Saka avec trois aviateurs à bord. L'un est français, les deux autres sont allemands - prisonniers  chez les français depuis la seconde guerre mondiale ! Nous les avons  pris, et nous sommes partis à la grande fête de Mzizou. Les militaires étaient venus, les chevaux étaient venus. Quant aux ovins de la tribu, égorges et ne te gêne pas ! Plantes ta tente , manges ton méchoui, et boit à ta guise ! Après le grand méchoui, la fantasia !

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Cavaliers Metalsa de Aïn Zohra

Le jour du retour de Mohamed V, que Dieu ait son âme, il a ordonné l'armistice, « Cessez le feu ! »

Les gens nous ont rejoint à l'Armée de Libération. Ils sont restés dans le maquis, où ils ont lutté jusqu'au jour où nous avons reçu un message de Mohamed V disant en substance :

« La lutte armée est terminée; notre indépendance est acquise.»

Nous rendîmes alors nos armes, pour nous diriger vers Rabat.

Mohamed V était venu chez nous par la suite à Boured, où il avait prié sur nos martyres. Après quoi, il s'est  rendu à Tizi Ousli et à Aknoul. »

L'Armé de Libération du Maghreb

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Fantassin Bni Waraïne:L'Armée de Libération est restée à Bouskour, Tizi Ousli et Boured. Les Béni Waraïn avaient attaqué eux aussi leur  bureau de Tahla,  d'où  ils avaient ramener tout un arsenal, qu'ils avaient conservé jusqu'à ce que cette armée se soit constituée et renforcée.

L'Armé de Libération du Maghreb voulait combattre à la fois pour l'indépendance du Maroc, dont la première étape était la restauration de Mohamed V et pour l'indépendance de l'Algérie, en assurant son concours aux efforts des insurgés de l'Oranie. En faisant appel au patriotisme et à la religion, elle devait débaucher les soldats et les officiers marocains des unités françaises pour se procurer des combattants aguerris et surtout des armes.  Deux prestigieux militants algériens jouèrent un rôle considérable dans le développement de l'ALM et surtout de l'esprit qui l'inspira. Mohamed Boudiaf qui vint à plusieurs reprises à Tétouan, fut l'animateur et l'Arbi Ben Mhidi, à Nador, l'éducateur. Le marocain Sanhaji, le baroudeur, avait établi à Nador un centre d'entraînement d'où partirent les émissaires qui implantèrent des commandos dans les tribus entre Oujda et Fès, dont un militant de haute qualité Abbas Messaîdi, fut l'agent de coordination.

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Vestiges du poste avancé en montagne de Boured

Le 20 août 1953, le Sultan Mohamed V est destitué par les autorités Françaises. La résistance commence aussitôt à s'organiser. Mais les armes manquent. Pour en chercher dés le 27 août un responsable de l'Istiqlal, Abdelkébir El Fassi, prend contact à Madrid avec le Dr Hafid Ibrahim. A Rabat, lors de la prière du vendredi, un militant héroïque, Allal Ben Abdellah, a attaqué au poignard le Sultan fantoche Ben Arafa , installé par le général Juin. L'attentat a échoué, son auteur y laissa la vie. Mais son geste a renforcé la croyance en la résistance marocaine et inciter les sceptiques à la soutenir. Des émeutes ont eu lieu le 20 août 1955 à Kasbat Tadla, Boujad, Oued Zem et Khouribga. Le mercredi 28 septembre 1955, M.July ministre des affaires marocaines et tunisiennes évoque pour la première fois le départ de Ben Arafa. Mais ni le Conseil du Trône, ni le gouvernement ne répondaient plus à une situation qui les dépassait. La population marocaine, ne se contentait plus du transfert trop tardif de Mohamed V en France. Pour arracher la restauration immédiate du Sultan, les attentats individuels ou les manipulations collectives gardaient leur efficacité mais ne suffisaient plus. Des insurgés engageaient la guerre de reconquête du Trône par une armée de Libération dans le Rif et le Moyen Atlas. Et comme pour prouver l'inanité des demi-mesures le hasard voulu que l'insurrection coïncidât exactement avec le départ de Ben Arafa.

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Boured

Il faut attendre quasiment la conférence d'Aix-les-Bains (été 1955), où s'ouvrent des négociations sur l'indépendance du royaume, pour qu'apparaissent les contours d'une armée marocaine de libération nationale. Un « comité de coordination » de l'Armée de Libération du Maghreb(ALM) est constitué le 15 juillet 1955, à Nador, avec quatre membres : Ali Draïdi(Boudiaf), Ahmed Ben Mohamed ben Abdelkader(el-Mhidi), Abdellah(Sanhaji), et Abbas Ben Omar(el-Messadi). La date du premier soulèvement est fixée au dimanche 2 octobre « à partir de 0 heure et pas avant. » Un premier bilan, dressé le 6 octobre 1955, insiste sur l'effet de surprise et la saisie de 380 armes. Il évalue le nombre de victimes de l'offensive à 71, en majeur partie européennes.

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Vue de Bouzineb depuis Bourd

Marocains et Algériens établissent à Nador, un centre d'entraînement d'où partent les émissaires qui implantent des commandos dans les tribus situées entre Oujda et Fès. L'ALM entend combattre tant pour l'indépendance du Maroc, dont la première étape est la restauration de Mohamed V, que pour l'indépendance de l'Algérie en assistant les insurgés de l'Oranie. Elle se pose , de la sorte, en armée maghrébine. En faisant appel au patriotisme et à la religion, elle débauche des militaires marocains des unités françaises pour se grossir de combattants endurcis et se fournir en armes. Beaucoup répondent à cet appel.

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Ruines du poste de Boured

Le 1er octobre 1955, Boyer de Latour, le Résident général au Maroc, devait se résigner de voir Ben Arafa quitter Rabat pour Tanger. Dans la nuit du jour de départ de Ben Arafa, l'Armée Marocaine de Libération entra en action, à la frontière des deux zones d'occupation française et espagnole. Les postes de Tizi Ousli, Aknoul et Boured furent les premiers attaqués. Puis l'assaut prit de l'ampleur prenant l'observatoire de bou Zineb pour cible. Une troisième attaque fut entreprise en même temps par d'autres formations de l'Armée de Libération dans le sud de Taza qui s'emparèrent du poste d'Immouzer des Marmoucha dans le Moyen Atlas : le magasin d'armes permit aux résistants de récupérer 300 fusils mortier 60, plusieurs fusils mitrailleurs et plusieurs dizaines de pistolets mitrailleurs. Alors que d'autres commandos pénétraient dans l'Oriental à proximité d'Oujda, la tribu des Gzenaya se joignit à l'Armée de Libération et passa de l'autre côté de la frontière. Ce fut le commencement d'une deuxième guerre du Rif, après celle qui avait été déclenchée, et glorieusement menée, 35 ans auparavant, par Abdelkrim El Khattabi.

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Poste de Boured

Les 7 et 8 décembre 1952, les manifestations de Casablanca, organisées pour protester contre l'assassinat de Ferhat Hechad en Tunisie, se soldent par la mort de 60 Marocains et 6 Européens. Après l'attentat du marché central de Casablanca, le 5 décembre 1952, les principaux militants tentèrent, pas toujours avec succès, de passer au Maroc espagnol.  Abdellah Senhaji, qui devait jouer un rôle important dans la création de l'Armée de Libération Maghreb(ALM), put gagner El Ksar El Kébir (à 36kms au sud-est de Larache)où vivaient déjà 34 résistants qu'il groupa et organisa. Il existait alors à Tétouan un comité de réfugiés, où figuraient non seulement des gens du peuple mais des représentants des grandes familles fassies et des intellectuels occidentalisés, surtout soucieux de politique. Le conflit était inévitable entre les Istiqlaliens de Tétouan et les résistant d'El Ksar El Kébir et de Larache plus enclins à se battre même quand le Dr Abdelkrim Khatib fut rappelé de France pour mettre de l'ordre.

boured10.JPGL'ALM proclama dés le 30 juin 1955, qu'elle « ne déposera les armes qu'après la reconnaissance par la France officiellement et internationalement de l'indépendance du Maroc sous l'autorité du roi et de son leader Mohamed Ben Youssef ». Le choix n'existait plus qu'entre le retour immédiat de Mohamed V ou le chaos. Ainsi s'affirmait une divergence, lourde de conséquences, qui devait subsister même après la restauration du Sultan.

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Les organisations de résistance, jouissaient d'une certaine liberté de mouvement et d'action dans la zone nord du protectorat espagnol. « On se trouve en présence d'une action dirigée contre le Maroc depuis le Caire. » titre la « Vigie » de l'époque. Deux circonstances permirent en effet, l'essor de l'Armée de Libération Maghrébine : d'abord l'adhésion des égyptiens après l'avènement de Nasser qui leur a promis aide, et surtout le concours des chefs de l'insurrection algérienne... Enfin s'ajoute le changement d'attitude des autorités espagnoles qui, après avoir durement accueilli les réfugiés, admirent de les traiter en politique puis leur donnèrent toutes facilités pour organiser des commandos.  Les armes et munitions qui permirent les premières opérations de l'Armé de Libération du Maghreb , provenaient en partie des achats effectués en Suisse, en Belgique, en Allemagne, ou en Espagne, par Abdelkébir El Fassi,Abderrahman el Youssoufi et d'autres militants. L'autre partie de l'armement, qui semblait être la plus importante, provenait des actions conjuguées des dirigeants algériens du F.L.N. et des dirigeants marocains de' l'A.L.N. C' était la première fois que la solidarité Maghrébine cessait d'être un slogan pour se concrétiser dans le combat contre l'occupation coloniale. Le rôle du docteur Hafid Ibrahim, installé à Madrid depuis la fin de la 2ème guerre mondiale, avait été déterminant. Très souvent, et cela dés 1953, il avait contribué de ses propres deniers pour fournir aux résistants et maquisards les armes qui leur faisaient défaut.  En 1954, cinq mois avant le déclenchement de l'action, Ben Bella est à Berne. Une réunion a lieu à laquelle participaient avec lui, Ben Boulaïd, et Abdelkébir El Fassi. Ben Bella est chargé d'assurer la coordination avec la résistance marocaine. Abdelkébir El Fassi retourne aussitôt à Madrid pour informer le Dr Hafid Ibrahim que l'Union des trois mouvements maghrébins est en bonne voie. Quelques temps plus tard, Abdelkébir El Fassi présente au Dr Hafid Ibrahim des « gens gonflés à bloc ». Il s'agit de Ben Bella et Boudiaf. On se répartit les tâches : à l'Ouest du Maghreb, Boudiaf, à l'Est, Ben Bella.Boudiaf prend immédiatement la direction des affaires du F.L.N. au Maroc et s'installe à Tétouan, 15 rue Mandri. Il met également en place un P.C. à Nador et noue des rapports étroits avec les responsables marocains, notamment Laraki Ghani, Abbès Messaâdi, Belhaj Latabi, et Abdellah Senhaji.   Son premier souci bien entendu, est de trouver des armes. Il en achète d'abord à des espagnols. Le général Garcia Valino, haut commissaire du Maroc dit espagnol, n'ignore pas les opérations mais les tolère. Abdelkébir El Fassi, au retour de Berne, a pu avoir un premier entretien avec Gamal Abdel Nasser. L'entretien a permis au président égyptien de prendre une vue précise de l'ensemble de la situation au Maghreb : ce qui le décide en août 1954 à amplifier considérablement son aide aux mouvements de résistance.   Ben Bella gagne le Caire où se trouve Allal el Fassi,le leader de l'Istiqlal. Les évènements, dès lors, vont se précipiter. Nasser décide d'aider à fond. Reste à expédier les armes. En rade d'Alexandrie est ancré le yacht DINA, propriété de la reine Dina de Jordanie. Sans demander l'avis de l'intéressée, Ben Bella, aidé d'un commando algérien, s'en empare, recrute un équipage grec et embarque un important stock d'armes : fusils mitrailleurs, mitraillettes, fusils, grenades et munitions. Deux responsables sont désignés pour les convoyer : le Soudanais Brahim Nyal et l'Algérien Mohamed Boukharrouba qui deviendra plus tard colonel et célèbre sous le nom de Houari Boumedienne. Destination : Nador, au Maroc, encore dit « espagnol », où Boudiaf, on le sait, a installé une base. Le yacht est déjà en plein mer quand Ben Bella reçoit un télégramme d'Abdelkébir El Fassi : « surseoir à l'envoi du bateau ».Motif : il n'a pu obtenir l'accord des autorités espagnols au déchargement des marchandises. Mais il est trop tard pour reculer, et surtout les maquisards ont trop besoin de ces armes pour tenir compte de considérations diplomatiques. Ben Bella décide d'aller de l'avant. Boudiaf avertit s'est rendu à Nador avec Larbi Ben M'hidi et des responsables marocains (notamment Mohamed Ben Saïd, Saïd Bou N'aïlat, Abbès Messaâdi). Pour suivre de près l'opération, Boudiaf, gagne Tétouan en compagnie du Docteur Abdelkrim Khatib. Celui-ci qui deviendra un de ses plus fidèles amis personnels, arrivait de France pour prendre la présidence du Comité Marocain de la Résistance et le commandement de l'Armée de Libération Nationale marocaine, qui se constituait alors dans le Rif, avec Abbas Messaâdi, Abderrahman El Youssoufi, Abdellah Senhaji...

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Baie de Nador

N'ayant pas l'autorisation d'entrer au port, le  Dina longe la côte marocaine près de Nador, en quête d'une crique propice, mais s'échoue. On attend la nuit et les caisses peuvent être débarquées à dos d'hommes. Quelques uns seulement tombent à la mer et ne peuvent être récupérées. L'aventure, en définitive, se solde par un succès complet : Larbi Ben M'hidi réussi à acheminer une partie de la cargaison vers la Wilaya 5 où elle joua un rôle majeur dans les actions en cours.     Attaqué sur ce nouveau front, le gouvernement français engage avec les Marocains, les pourparlers d'Aix-Les-Bains.

L'agonie du Maroc Français

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" La déposition de Mohamed V était à l'origine de l'insurection

Sous le titre « L'agonie du Maroc Français » Pierre Boyer De Latour(ancien Résident général de France, en Tunisie et au Maroc) écrit dans son livre « Vérités sur l'Afrique du Nord », paru en 1957, soit deux ans après les évènements :

Dans la nuit du 1er au 2 octobre 1955 les postes français de Tizi Ouzli et de Boured situés en bordure de la zone espagnole furent attaqués par des commandos venus de cette zone ; celui de Boured, bureau des affaires indigènes, sans défense extérieures, fut enlevé, l'autre résista. De plus, l'observatoire de Bou Zineb situé en pleine zone espagnole et occupé seulement par quelques Goumiers commandés par un sous-officier français fut attaqué dans la nuit du 3 et enlevé lui aussi ; quelques hommes et le chef du poste parvinrent à s'enfuir ; ils racontèrent l'attaque. Un poste espagnol, voisin de moins de deux kilomètres du poste français n'intervint pas. Or la police dans sa zone appartenait bien à l'Espagne. Je laisse au lecteur le soin de conclure.  Dans la même nuit du 1er au 2 octobre et dans la journée du 2, le poste de Berkine, au sud de Taza fut aussi assailli. Mais il résista jusqu'à l'arrivée des renforts venus de Guercif. Les agresseurs prirent la fuite.  Le poste des Immouzar des Marmoucha, dans le Moyen Atlas, avait lui aussi été attaqué et l'affaire était plus grave. Le chef de circonscription des Affaires Indigènes commandant du poste avait été prévenu par un Marocain de l'imminence d'un coup de main, car une bande d'étrangers armés circulait dans le pays ; malheureusement il ne crut pas au renseignement qui lui avait été donné. Il ne prit pas de précautions sérieuses et les dispositions prescrites dans son poste allaient amener un désastre. La garnison était composée du 22ème Goum marocain, soit environ 180 hommes mais tous désarmés. L'officier avait fait conserver armes et munitions enchaînés au magasin, ne laissant de fusils qu'au poste de police. Attaqué par le commando ce dernier se défendit ; mais il n'était composé que d'une dizaine d'hommes ; des assaillants parvinrent à se glisser jusqu'au magasin, y pénétrèrent et emportèrent armes et munitions. Le lendemain été jour de souk, de nombreux Marmouchas s'y rendirent. Une quarantaine d'hommes du commando avec les armes volés se trouvèrent au milieu d'eux ; chacun se précipita pour prendre une arme ; il faudrait ne pas connaître les Berbères pour croire qu'il en aurait pu en être autrement. Plus de 300 fusils, un mortier de 60, 10 fusils-mitrailleurs et 48 pistolets-mitrailleurs furent enlevés. D'autre part les villas des officiers  furent attaquées et brûlées, un contrôleur civil venu passer le week-end chez un officier fut tué et une voiture civile attaquée. Dix civils dont une femme d'officier et deux enfants furent tués.

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J'avais alerté toute l'aviation disponible, elle intervint et sauva le poste jusqu'à l'arrivée d'une colonne de secours qui dispersa les assaillants. La tribu des Marmoucha n'avait pas participé dans son immense majorité à ce coup de main. La colonne de secours composée d'un bataillon de la légion étrangère et du 1er Tabor marocain entreprit immédiatement une vaste opération de nettoyage. Dés le premier jour une quarantaine d'armes furent rendus. Je donnai l'ordre de constituer avec d'autres tribus des commandos armés pour donner la chasse aux dissidents. Les résultats au bout d'une quinzaine de jours furent excellents. J'envoyai sur place des officiers des affaires indigènes connaissant Bien les tribus, les Marmoucha rendirent une grande partie de l'armement dérobé et le commando qui était venu de la zone espagnole par les étendues désertiques de la vallée de la Moulouya, regagna le protectorat voisin où il renforça les éléments qui harcelaient nos troupes.   L'enquête prouva que le coup venait de la zone espagnole de connivence avec quelques individualités locales. La chose était normale car dans toute tribu marocaine il y a au moins deux clans, et si l'un est au pouvoir, l'autre désir le déposséder, tous les moyens sont bons pour y parvenir. Les haines particulières jouent sur le plan général. Sans aucun doute, un commando dont les chefs étaient Mimoun Ou Akka et Ahmed Ou Lhassen, Marmouchas réfugiés en zone espagnole, s'était dirigé vers Immouzer et avaient procéder à l'attaque du poste. L'armement du commando était anglais et avait été débarqué sur la côte dans le protectorat voisin. Une certitude se dégageait, largement confirmée depuis par les interrogatoires de prisonniers : tout ce mouvement avait été conçu et préparé par des agitateurs et des étrangers réfugiés dans la zone voisine. Les Espagnols ont hébergé les réfugiés, les ont munis de cartes d'identité, ont fermé les yeux sur la contrebande d'armes et ont laissé monter sans intervenir  toute une organisation qui n'avait pour but que de préparer un mouvement insurrectionnel en  zone française.   J'avais dégarni les autres régions du Maroc et fait affluer vers la zone nord de Taza d'importants effectifs. Nos troupes bordaient toutes les hauteurs à proximité de la zone espagnole. Les tribus, comme on aurait pu le craindre, n'avaient pas bougé à part une fraction de Gzenaya qui avaient été forcé de suivre le commando en zone espagnole.

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Immouzer des Marmoucha était calme, les armes volées rentraient ; sur le plan militaire je n'avais plus pour souci que la menace sérieuse que faisaient peser les bandes qui se situaient à la limite et à l'intérieur de la zone espagnole.

Pendant ce temps la presse arabe et espagnole de Tétouan se déchaînait contre la France. En gros titres les communiqués de l'armée de libération étaient publiés ; tel celui - ci paru le 3 octobre dans le journal AlOummah.

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L'Armée de Libération du Maghreb arabe annonce l'insurrection nationale bénie dans toutes les régions du Maghreb.

La guerre contre le colonialisme français s'étend de l'océan Atlantique jusqu'à l'intérieur des frontières de Tunisie.

Les premières batailles avec les forces françaises ont occasionnés la mort d'un grand nombre de soldats du colonialisme.

Les postes français demeurent encercler malgré l'intervention de l'aviation dans le combat. Les voies de communication sont totalement coupées.

Au nom de Dieu le Tout Puissant, le haut commandement au Maroc publie son premier communiqué sur la lutte sacrée.

Le but est : l'indépendance totale du Maroc et de l'Algérie et le retour de Mohamed Ben Youssef sur son Trône à Rabat.

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Le général Boyer De Latour publie un communiqué où il accuse l'Espagne par des termes à peine voilées, de passivité voire de complicité avec les menés de l'Armée de Libération dans le no man's land de la zone frontière. En somme l'Armée de Libération a bénéficié de rivalité entre l'Espagne et la France !

Le récit s'achève ainsi : « un jour je reçus une lettre d'un ami du Maroc qui se terminait ainsi : le Maroc Français est mort le 11 novembre à 16h.30.

C'était l'heure où mon avion décollait de l'aérodrome de Salé ! »

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« En ce mois d'octobre 1955 écrit pour sa part Ahmed  Balafrej, le début des opérations militaires de l'Armée de Libération, basée dans la zone Nord, sous occupation espagnole,précipite les évènements. Le gouvernement Français prend la menace au sérieux et décide précipitamment le retour de l'exil de Mohamed V et l'ouverture de négociation de Saint-Germain-en-Laye avec le Souverain marocain. Au début de 1956, un conseil restreint de la résistance se réunit à Madrid en présence de Allal El Fassi. D'une part, il a été décidé de déposer les armes dans la partie libérée, et ce conformément à l'appel de Mohamed V. Et d'autre part de poursuivre la lutte dans les territoires encore occupés au Sahara et l'aide aux combattants algériens. »

Le retour de Mohamed V

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"Le jour où ils ont déposé Mohamed V, nous étions dans une fête de mariage. On est venu nous en informé vers le coup de minuit. Le mariage se déroulait dans un douar par ici. Je faisais partie des convives. On nous dit :

« Levez - vous ! Mohamed V vient d'être déposé ! Cette nuit, Boured sera brûlé ! Allant - s' y ! »
Ce fut effectivement l'étincelle qui mit le feu aux poudres en ce jour du 20 août 1953, lorsque  le Sultan Mohamed V est destitué par les autorités françaises. La résistance commence aussitôt à s'organiser. Mais les armes manquent. Pour en chercher, dès le 27 août, un responsable de l'Istiqlal, Abdelkébir El Fassi, prend contact à Madrid, avec le Dr. Hafid Ibrahim.A Rabat, lors de la prière du vendredi, un militant héroïque, Allal Ben Abdellah, a attaqué au poignard le Sultan fantoche Ben Arafa, installé par le Général Juin. L'attentat a échoué et son auteur y a laissé la vie. Mais son geste a renforcé la croyance en la résistance marocaine et incité les sceptiques à la soutenir.

Le Maroc se dressait unanime dans ses villes et dans ses campagnes pour réclamer le retour de celui qu'il considérait comme son roi. Le souffle populaire balayait comme un ouragan les ultimes tentatives de conjuration. L'opposition au sultan perdait pied. Désormais pour la France, il ne s'agit plus d'écarter Mohamed V mais de précipiter son retour à Rabat. Après un séjour de Beauvallon, réduit par la hâte du gouvernement à une escale d'une journée, le sultan put mesurer l'étendue de son triomphe à Saint-Germain-en-LLay, le 1er novembre 1955. Il était désormais le maître du jeu. Ben -El-Arbi -El Alaoui, qui n'avait jamais quitté le Maroc, prit l'avion pour rendre hommage à son Souverain. Le Glaoui après avoir fait anti-chambre pendant plus d'une heure, obtint une audience de trois minutes et demi, au cours de laquelle il baisa, à genoux, la babouche du sultan, sous les feux des photographes. Mohamed V qui gardait la tête froide, pardonna en souriant. Le renoncement du Glaoui à la vie politique(12 janvier 1956), suivi bientôt de sa mort(23 janvier) marqua la fin du régime des grands caïds que Lyautey avait maintenu.

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Tsoul

Le Glaoui s'étant rendu compte, depuis le départ de Ben Arafa, que la partie était perdue, déclare le 25 octobre 1955 : « j'éprouve la joie du peuple marocain tout entier à l'annonce du retour en France de SM Mohamed Ben Youssef. Je fais mien le vœux de la nation marocaine, qui est la prompt réstauration de Sidi Mohamed Ben Youssef et son retour sur le Trône, retour seul à unifier dans l'ordre les esprits et les cœurs. » Avec elle s'effondrait le mythe des deux Maroc, de la fidélité des grands caïds et de l'influence religieuses des confréries. Pacha, caïds, cheikhs des zaouia, le Kettani en tête, rivalisaient de hâte et d'ardeur pour rentrer dans l'obédience et aussitôt l'Istiqlal réclama la restauration du Souverain. Les réactions populaires contre les caïds après le retour du Sultan montrèrent que le ralliement du Glaoui signifiait pour eux la fin du régime. Même Boyer de Latour comprit qu'il n'y avait plus d'autres solutions que la restauration de Mohamed V.

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Branès

Ce fut une foule en délire, contenue par les milices de l'Istiqlal et du PDI qui accueillit le roi, le 16 novembre 1955. Le peuple qui l'acclamait assumait avec fierté l'œuvre de restauration : « par les bombes et les revolvers, chantaient les femmes, nous avons conquis notre roi. » En plébiscitant le Souverain, la nation marocaine, rejetait tout compromis et faisait entrer l'indépendance dans les faits avant qu'elle ne fût dans le droit.. Le roi bénéficiait non seulement de son prestige d'imam mais d'une sacralisation populaire acquise par le martyre.

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Bni Bou Yahi

En mai 1956, un accord avec Paris permet au roi de réorganiser la police et de mettre sur pied plusieurs bataillons encadrés  par des officiers marocains et français. 6000 partisans de l'Armée de Libération Marocaine se joignent aux tirailleurs marocains de l'armée française. Cette jonction hisse les effectifs des Forces Armées Royales (FAR) à 30 000 hommes, placés sous l'autorité directe du jeune prince Hassan qui occupe la fonction du chef d'Etat Major. Les règlements de compte dans les rangs du nationalisme marocain, accélèrent cette montée en puissance. Ainsi l'assassinat de Abbas Messadi, en mai 1956, vraisemblablement organisé avec l'accord de Mehdi Ben Barka, provoque le ralliement de 5000 hommes de l'Armée de Libération aux FARS.

A Boured, un témoins nous signale cet évènement mystérieux , glaçant et incompréhensible : En 1958, le souk d'Imzouren, chez les  Bni Ouariaghel la tribu d'origine d'Abd-el-krim dans le Rif fut transformé en terre brûlée par les Forces Armée Royale. Les causes de cet évènement restent encore obscures à ce jour. Si la tradition orale l'évoque dans le Rif ; il relève encore de ces zones d'ombre dont les écrits historiques restent parcimonieux....

Abdelkader MANA

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11:28 Écrit par elhajthami dans Le couloir de Taza, Témoignage | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : le couloir de taza, gzenaya, la guerre du rif | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook