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05/02/2012

La route des mérinides

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La route des Mérinides

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C'est , par le Sud du couloir de Taza, que passait jadis « la route des mérinides » : la fameuse « Triq Sultan » qui unissait Fès au Maroc Oriental via Sefrou, Rchida et Debdou.  Les transhumants Bni Waraïn et Houwara Oulad Rahou sont arrivés au couloir de Taza dans le sillage des Mérinides depuis Figuig où ils nomadisaient jadis

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Au déclin des Almohades, leurs successeurs mérinides occupent Taza dés 1216, considérée alors comme « la clé et le verrou du Gharb », souligne l'auteur du Bayân : « Une fois installé à Taza, Abû Yahya, prince mérinide, fit battre les tambours et hisser les bannières. De toutes part, les chefs de tribus accompagnés de délégations vinrent lui présenter leur hommage. Car il avait auparavant occupé le rang d'émir au sein des tribus Banû Marîn, mais sans tambours ni étendards ».Vers 1227, les mérinides étaient devenus les maîtres incontestés de « toutes les tribus et campagnes situées entre le Moulouya et le Bou Regreg ». Cette époque est restée liée à des souvenirs de magnificence et presque de légende. On connaît le vieux dicton : « Après les Banû Marîn et les Baû Wattas, il ne reste personne ! ».

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Roman Lazarev

Ibn Khaldoun nous dit qu'à leur avènement, les mérinides ont détruit l'une des principales ressources de la région ; l'oléiculture. Dans cette région, les premières plantations d'olivier remontent aux Almohades, comme le souligne Ibn Ghâzi, au début du 15ème siècle :« Dans les bonnes années, écrivait - il, et avant que les Banû Marîn eussent commencer à ruiner le Maghreb extrême, lors de l'affaiblissement de l'autorité Almohade, la récolte des olives au Ribât de Taza, se vendait environ 25 000 dinars ».

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Bataille de Roman Lazarev

C'est non loin de cette vieille citadelle de Rchida qu' Abd el Haq,le  premier souverain mérinide, alors âgé de 73 ans, trouva la mort avec son fils, Abû Al Âlaa Idris, lors de la bataille contre les arabes Ryah, chargés par les Almohades de surveiller le couloir de Taza.  Sid Yaâgoub, le saint patron de Rchida, serait selon une légende dorée, un Idrisside qui priait dans les grottes de la Gada de Debdou, qui domine en falaise, la plaine de Tafrata. Moulay Ali Chérif le fondateur de la dynastie Alaouite est également passé par là. On dit même qu'à l'aube du 20ème siècle, le Rogui Bouhmara est arrivé un jour avec sa harka dans la plaine de Tafrata et aurait pris aux gens leur bétail. C'est là aussi qu'en 1914 les premiers bataillons français en provenance d'Algérie avaient établi leur avant poste ; le camp de Mahiridja.

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« Depuis la nuit des temps , le pastoralisme est le trait distinctif des Hawwâra Oulad Rahou et de leurs ancêtres, nous explique Abdellah  Bachiri. L'hiver, ils transhument dans la plaine de Tafrata et en période estivale , aux plateau de la Dahra, aux pacages steppiques de la Fhama, Et quand à nouveau l'herbe repousse drue, ils reviennent à la plaine de Tafrata. » Ce n'est que quand le pâturage fait défaut aux Hawwâra , qu'ils vont transhumer sur ces hauts plateaux de la Gada de Debdou. La tonte d'ovins a lieu chez eux vers la fin du printemps et au solstice d'été.  On prépare alors le pain du berger dénommé « Magloub », nom qu'on donne par extension à cette berceuse qui accompagne la tonte d'ovins :    

Ô berger ! Ramène la brebis à l'allure de gazelle !

La brebis au museau roux et au beau présage

Celui à qui, elle manque, meurt de faim

Et passe une nuit blanche à réfléchir !

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 « La tonte des moutons a lieu au printemps, nous dit le pasteur Nabil Khachani. Après s'être bien engraissés les béliers portent une laine abondante qui les étouffe en période estivale. On les allège alors de cette laine : c'est la période où nous séparons l'agneau de sa mère. Le matin de tonte, on prépare le pain du berger, ainsi que les laitages. C'est le petit déjeuner de ceux qui procèdent à la tonte des moutons. Après quoi on sacrifie un bélier châtré pour offrir à la communauté pastorale le couscous aux sept légumes avec de la viande bien rôtie. ».

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Située entre Figuig et la vallée de la Moulouya, la vieille citadelle de Rchida surplombe la plaine de Tafrata, là même où nomadisaient au 12ème siècle, les mérinides(Banû - Marine en arabe), ces Berbères Zénètes venus de l'Est. Dans sa généalogie des Mérinides« peuple qui gouverna le Maghreb et l'Espagne »[1] Ibn Khaldoun écrivait :« Les Banû - Marine, peuple dont la généalogie se rattache à celle des Zenata avaient leurs lieux de parcours dans la région qui s'étend depuis Figuig à Sijilmassa et, de là, au Moulouya...Les Banû-Marine parcouraient en nomades le désert qui sépare Figuig du Moulouya. Lors de l'établissement de l'empire Almohade, et même auparavant, ils avaient l'habitude de monter dans le Tell afin de visiter les localités qui s'étendent depuis Guercif jusqu'à Outat. Ces voyages leur permirent de faire connaissance avec les débris de l'ancienne race zénatienne qui habitait la région du Moulouya et de se lier d'amitié avec les Miknassa des montagnes de Taza et les Béni Waraïn tribu Maghraouienne qui occupait les bourgades d'Outat, dans le haut Moulouya. Tous les ans, pendant les printemps et l'été, ils parcouraient ces contrées ; ensuite ils descendaient dans leur quartier d'hiver, emportant avec eux une provision de grains pour la subsistance de leur famille. » 

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C'est au cours de ce tournage que nous avons visité Rchida, vieille citadelle qui surplombant la plaine de Tafrata au sud du couloir de Taza . Sa vieille mosquée remonte à Al Rachid, l'un des souverains mérinides : d'où ce toponyme de « Rchida », par référence au fondateur mérinide de la citadelle.

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Rchida

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Rchida est l'un de ces jalons qui reliaient à chacun des horizons, ce qui fut jadis « la route des mérinides ». D'après le Mûsnad d'Ibn Marzouq,Abû Al Hassan, le Sultan mérinide qui régna de1331 à 1351, et qui construisit la belle médersa de Taza, « créa un nombre d'enceintes et de Vigies tel, que si l'on allume un feu au sommet de l'une d'elles, le signal est répété sur toutes, dans une seule nuit, sur une distance que les caravanes mettent deux mois à parcourir de la ville de Safi au pays d'Alger... » CIMG1086.JPG

L'imam de la grande mosquée de la Zaouia de Rchida, nous disait que c'est là qu'étudiaient les quarante tolba de tous les horizons ; ils y affluaient de partout : des Branès, de Guercif, de Melloulou  :«les chorfa , ajoutait -il, veillaient à leur nourriture, et leurs oraisons portaient jusqu'au fond de la valée. Cette vieille mosquée fut édifiée du temps des mérinides. EIle fut restaurée par Sidi Ahmed Ben El Mamoune du temps du Sultan Hassan 1er qui y effectua la prière du vendredi en compagnie des chorfa.»

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Ils n'auraient fondé ce douar d'Admer qu'après l'avènement du saint patron de Rchida et son établissement dans ces hauts plateaux de la Gada de Debdou. Ce sont les descendants de ce saint et ses arrières petits fils qui habitent ce pays depuis des années et des siècles. les ADMER, les BNI KHLAFTEN, et RCHIDA sont les premiers habitants de ces montagnes et de ces terres .  Les anciens Berbères autochtones restaient cantonnés au flancs des montagne, tandis que la plaine de Tafrata était devenue le domaine où transhumaient les mérinides, ces Berbères Zénètes venus de l'Est, et dont faisaient partie les actuels Hawwâra. Quant aux arabes, de ces parages, ils étaient justes des pasteurs nomades se déplaçant avec leurs tentes.
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Nous avons retrouvé ici le même troglodytisme qu'à Taza, en particulier au village d'Admer, où les villageois habitaient eux aussi dans ces grottes dénommées « Kifan ». Situé au pied d'une falaise où sont creusées de nombreuses grottes, où étaient gardés à l'abri des maraudeurs, les richesses dont disposait la tribu, le douar Admer porte le même nom que la montagne sur laquelle il est adossé : Jbel Admer. Ce village troglodyte est situé non loin de Rchida ; la vielle citadelle mérinide qui domine en falaise la plaine de Tafrata .  terre qui a vu le passage de beaucoup de monde, nous dient les villageois d'Admer : les Banû Marîn, et les Banû  Wattass, du temps de leurs anciennes gloires. Dans ces temps révolus, qui avaient connu les anciennes batailles  mérinides et Wattassides, les gens  de ces parages n'habitaient que dans des grottes et sous des tentes. 

                                  Les différents étages écologiques de BERKINE

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L'homme vit soit au sommet des montagnes pour la transhumance d'été, soit le long des berges des rivières pour les labours et la transhumance d'hiver. De ce fait il possède deux logis : une bergerie de montagne et une bâtisse le long de la rivière.

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   La seule  ouvertures de cette cuvette de Berkine est ce sentier filant vers cet, « Abrid Romane », qui ajoute peut - être quelque intérêt nouveau, à la question toujours controversée de l'itinéraire suivi par Suetonius Paulinus dans son aventureuse expédition à travers le Moyen Atlas. Au fond de la cuvette, l'ancien volcan éteint « l'Ich- N'Aït -Aziz ». La largeur de son cône atteint près d'un kilomètre. Ses cendres éruptives couvrent toute une partie de la cuvette de Berkine. Les Berbères appellent cet ancien volcan du nom « d'Afoud » qui signifie ici, « celui qui est dépourvu de genou ». Un autre volcan existe au fossé oriental de Bou - Iblâne : « Ich-N'Aït Abdellah », du nom de la tribu qui s'est établie, là où il avait fait irruption, il y a de cela des millénaires. Jbel Bou Nacer avec ses plaques de neige quasi persistantes, ne procure que l'illusion d'un imposant château d'eau : la pente trop brutale de ses versants ne permet pas l'accumulation de trop grandes réserves. L'eau est néanmoins assez abondante pour suffire aux besoins d'une population, peu nombreuses et clairsemée.
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  En arrivant chez les Bni Hassan au printemps 1923, en un point d'appui qui débouche sur Berkine, les Français apprennent que la puissante confédération Marmoucha  viendra prêter son appui à Si Mohand Belgacem, qui a décidé de se retirer dans la montagne la plus inaccessible pour ne pas se soumettre aux colonisateurs. Pour ces derniers « il fallait en finir avec les Bni Jellidacène et pour cela atteindre dans son autorité l'agitateur Sidi Belqacem Azeroual en occupant Berkine, confluent des oueds Bni Mansor et Bni Bou N'çor qui commande l'accès à la zaouia du chérif et aux passages qui permettent aux Jouyouch  Bni Jellidacène de se répondre dans la zone de Bou Rached, la vallée du Melellou et de la Moulouya.
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« Dans ces parages, nous dit Aziz Bennaçerles chorfa de Sidi Belqacem sont connus depuis toujours pour leur pouvoir et leur bienfait. Leur baraka est grande : elle rayonne de jour comme de nuit. Leur réputation est ancienne, et quiconque se  rend chez eux est assuré du gîte et du couvert. Là bas, il y a une grande baraka. Le pays parait parcimonieux, pourtant il est en mesure de nourrir mille et une bouche grâce à la baraka. » La cuvette de Berkine constitue l'assise territoriale des Bni H'sen, fraction des Bni Jellidassen, littéralement "les fils du Roi", la principale tribu de la confédération Bni Waraïn au sud du couloir de Taza. Ils se distinguent par l'habillement de cérémonie en fine laine des moutons de la transhumance en hauts alpages

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 BERKINE

Une crête lumineuse, voici reluire au loin Berkine, comme une pincée de sel sur la montagne ! Elle surplombe cette vaste cuvette du Moyen Atlas Oriental. Des lignes de montagnes plus basses compartimentent la cuvette, y rendant la circulation mal aisée. La roideur des pentes, en favorisant un ruissellement intense, s'oppose à la fixation du moindre humus, comme on le remarque bien à l'absence de manteau végétal, dans ce paysage tourmenté aux allures lunaires.

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Le poste militaire Français établi à Berkine

Pour venir à bout de la résistance des Bni Jellidassen, les Français décident d'occuper Berkine, où ils établiront leur caserne en 1926. Mais Si Mohand, le chef de la zaouïa de Sidi Belqacem, leur farouche adversaire, aboutit avec les Marmoucha à la formation d'une Harka de 800 fusils sur l'oued Zobzit. Dans cet étroit compartiment de la « tache de Taza », il était l'âme obstinée de la résistance à la pénétration coloniale.

CIMG1173.JPG   Sur le chemin qui remonte de la plaine de Tafrata vers Berkine, nous rencontrons les gens du douar Bni h’ssan, connus pour leur tenue traditionnelle, leurs chansonniers, leurs hautboistes et leurs musiciens. Dans la commune de Berkine, ces Bni H’ssan, font partie de la fraction Ahl R’baâ,  des Bni Jellidassen, la plus importante tribu de la confédération des Bni Waraïn,

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La mosquée de Berkine

Leur agriculture paraît maigre mais elle contient de la baraka. Elle leur permet l’autosubsistance. Ils ont un bel élevage, et même si la forêt est insuffisante, elle a un rôle important à jouer. Ce sont les Bni H’ssan qui animent le marché aux grains de Berkine. Ils animaient depuis toujours et en tous lieux, festivités, fêtes de mariages et autres cérémonies.  Ce douar des Bni H’ssan, fait partie de la fraction Ahl R’baâ, de la commune de Berkine. Ils font partie de la tribu Bni Jellidassen, la plus imprtante de la confédération  Bni Waraïn

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Nous avons remonté l'oued Aït Bou Aziz en contrebas de Berkine et de Bou-Iblân, d'Est en Ouest jusqu'à la Zaouia de Sidi Belqacem qui a joué un rôle important de fédérateur des transhumants Marmoucha et Bni Waraïn dans la lutte contre la pénétration coloniale.

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Le thalweg  limoneux des oueds est souligné par un étroit ruban végétal où se retrouvent le jujubier buissonnant ou même arborescent, associé à des pieds d'alfa, des bouquets d'armoise blanche et quelques massifs de lauriers rose. CIMG1282.JPG

En ce haut pays, les eaux pluviales sont drainés par un collecteur unique, le Zobzit, sous affluent de la Moulouya, qui prend naissance à Berkine. A son amont deux cours d'eau qui suivent chacun une vallée parallèle au Bou - Iblâne. Ils portent chacun le nom de la tribu qui vit sur ses berges : Assif -n'Aït - Bou N'çor et Assif-n'Aït Mansour. Leur cours supérieur porte le nom d'Assif Ouloud(la rivière du limon). Les vallées des oueds Aït Bou N'çor et Aït Mansour s'ornementent de beaux rideaux presque ininterrompus de peupliers et de saules au troncs desquels la vigne enroule de loin en loin ses capricieuses torsades. Des essences plus modestes croissent dans leur voisinage : le câprier, le tamarin, le micocoulier (Taghzaz), dont on taille des planchettes - écritoires pour écoliers.

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" Vois la montagne ! Vois le pigeon ! Vois l'associé ! Vois le fumier ! »

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Les premières neiges tombent sur les montagnes, le pigeon annonciateur de l'hiver est de retour, le moment est venu de songer aux travaux agricoles, de rechercher son associé et de transporter le fumier sur les terres. Ils redonnent vertu à la semence en y incorporant les cendres de l'Achoura, ou en y jetant les grains de la première ou de la dernière gerbe de la récolte précédente. Ces grains passent pour être imprégnés de la baraka et incarnent les forces vives de la végétation.C'est à ce moment précis, en automne de l'année 2006, que nous avons entrepris un des tournages de la série « la musique dans la vie » : c'était dans la « tache de Taza », sur « la route des mérinides » à un moment où les fellahs fumaient la terre. C'est un dimanche, premier jour de la semaine, où les Berbères choisissent pour tracerleur premier sillon.

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Bien que fixé au 17 octobre de l'année julienne, les labours d'automne ne peuvent être pratiquement entrepris qu'aussitôt après la chute des premières averses. Mais la saison des pluies commence parfois si tard que le fellah doit reporter l'inauguration de ses travaux à une date beaucoup plus reculée, en fin décembre, parfois même au commencement de janvier.

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Une des caractéristiques des Bni Waraïn est d'avoir une maison, un terrain de culture et de parcours, en plaine et en montagne. Les zones d'habitat privilégiées sont les vallées des oueds où sont cantonnées la plupart des sources dont chacune est un centre permanent de chritallisation humaine.

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De sol cultivable la nature est extrêmement avare ; il faut arrêter la fuite des terres arables entraînée par le ruissellement en élevant des murettes en galets. On obtient ainsi ces terrasses de forme géométriques, en damiers irréguliers dont chacune est la propriété précieuse d'un chef de foyer.

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Pressoir d'huile d'olive

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Au bord de l'oued Aït Mansour , le laboureur Mohamed Mala, laisse tomber pour un instant  attelage et  charrue pour  venire nous entretenir sous un vieux eucalyptus:

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«On appelle ses rivages, le « verger d'Iswal ». Ils sont cultivés aussi bien par les descendants de Sidi Belqacem que par ceux des Bni Aziz. Mais rares sont ceux parmi les descendant de sidi Belqacem qui habitent au bord de l'oued à part le douar que vous voyez là - bas.  La plupart des gens possèdent des terrains de culture au bord de l'oued, mais leur maison se trouve là-haut dans la montagne : pour venir travailler ici, ils descendent de la montagne. Moi-même j'ai une propriété ici, au pays des Bni Aziz alors que ma maison se trouve là haut au Jbal Bni Bou N'çor, où  nous avons un peu de culture et un peu d'élevage. Des terres irriguées mais aussi  bour. En période estivale, nous semons le maïs, mais en cette période automnale nous semons plutôt le blé tendre et les fèves. Ce ne sont que de petites parcelles où nous cultivons aussi un peu de légumineuses pour nos foyers. On n'en met pas trop puisque nous n'avons que de petits lopins de terre. Et quand l'oued est en crûe, il emporte toutes nos cultures sur son passage.. » Tous les étages écologiques sont mis à contribution, aussi bien pour l'élevage que pour l'agriculture : des sommets enneigés aux vallées verdoyantes.

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Ainsi, une fois les labours et les semailles effectués en montagne au début de l'automne, on descend procéder aux labours de plaine en décembre et janvier.

On séjourne en Taïzîrt sous la tente, jusqu'en mai, époque de la moisson précoce(Bekri), puis celle-ci achevée, on reprend le chemin de la montagne, où une seconde moisson, plus tardive(Mazozi), attend d'être coupée à son tour.

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Tout le long des cours d'eau, nombreux sont les moulins à eau : on en dénombre quelques 83, rien qu'à Berkine. Le grain est versé dans une trémie, sorte d'auge carrée en palmier nain,large par le haut, étroit par le bas, et maintenu au plafond par des cordes.CIMG1330.JPG

Au dessus de la trémie est fixé un conduit en bois « lqandîl », par lequel le grain se déverse dans l'oeillard « Tît » d'où il descent pour être broyé par les deux meules.

L'usage est de laisser quelques grains dans l'œil du moulin : ce « souper du moulin » est considéré comme étant chargé de baraka.

L'eau amenée par un conduit tombe d'une hauteur de deux mètres sur une roue de 40 centimètres. L'appareil est mobile sur un arbre.

En ce début de la transhumance d'hiver,chacun apporte son grain à moudre en prévision des grands déplacements. Le meunier prélève un dixième sur chaque mouture.

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Automne précocement doré: par trop de lumière et de soleil...

A l'époque où les troupes françaises font leur première apparition au Maroc Oriental, l'autorité est détenue chez les Aït Jellidassen, par la famille des chorfa Aït Sidi Belqacem. C'est dans cette Zaouïa, que les gens de  tribus se rassemblèrent d'abord pour faire face à la pénétration française. Mais mitraillés par l'aviation et bombardés par les canons, ils finissent par se dissocier.

Aisi s'ouvre « le pays rond , des Aït Jellidassen, où suivant, la parole même de Si Mohand  Belqacem ; ne devait de son vivant réussir à pénétrer le guerrier français .. .

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En nous accueillant en haut de la colline où se trouve le sanctuaire, sur la rive droite de la rivière, le moqadem Abdellah Ben Ahmed, nous explique en ces termes en quoi consiste la gestion de la zaouïa de Sidi Belqacem Azeroual :

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«  À tour de rôle, la clé de la zaouia  est confiée à un moqadam durant cinq, six , voir dix ans. Grâce aux offrandes qu'il reçoit, il nourrit les étudiants en théologie venus de tous les horizons, ainsi que les pèlerins de passage. De la mi août à la mi septembre, quatre fêtes patronales ont lieu à Sidi Belqacem : le moussem des Bni Aziz, celui des Bni Bou N'çor, celui de Sidi Belqacem, et enfin celui des Bni Mansour. Ce sont les quatre principaux moussem. Les pèlerins viennent de toutes les fractions : d'Immouzzar des Marmoucha, d'Ahermoummou,de Tahla, des Maghraoua. Ils viennent aussi de la région de Taza, d'Oujda et de Taourirt : le moqadam les reçoit les nourrit gracieusement."

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A l'issue de cet entretien, les membres présents de la zaouia déclamèrent solennellement d'une voix grave, sereine et paisible, la sourate de la lumière :« Dieu est la lumière des cieux et de la terre. Sa lumière est semblable à une niche où se trouve une lampe. La lampe est dans un verre pareil à un astre étincelant qui s'allume grâce à un arbre béni : un olivier qui n'est ni de l'Orient ni de l'Occident et dont l'huile brillerait sans qu'un feu la touche, ou peu s'en faut.Lumière sur lumière. Dieu dirige vers la lumière qui il veut. Il propose aux hommes des paraboles. Dieu connaît parfaitement toute chose. »

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Le thème de la lumière est une des constantes de l'enseignement soufi, comme du Coran. C'est elle qui pénètre dans les cœurs qui s'ouvrent à Dieu. Elle se présente chaque fois comme une force spirituelle, un appel à la vie intérieur.

Abdelkader Mana

[1] Ibn Khaldoun :« histoire des Berbères », tome quatrième, p.25 et suivantes.

 

06:28 Écrit par elhajthami dans Histoire, Le couloir de Taza | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : le couloir de taza | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

04/06/2011

Taza la haute

T A Z A,sentinelle du Maroc Oriental

histoire,le couloir de taza

       On oublie trop souvent que le minaret de Taza est l’ancêtre des tours Almohades :  les formes architecturales de la Koutoubya et de Tinmel ont été élaboré dans ce sanctuaires almohades. Son minaret sobre et puissant reste le meilleur symbole de Taza. Depuis huit siècles, il monte la garde à la crête du plateau, au dessus des chemins qui mènent des plaines atlantiques aux steppes méditerranéennes et où se décida tant de fois le sort du Maroc.

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épigraphie Almohad de la nef axiale la plus décorée de la grande mosquée de Taza

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      Taza est une des positions maîtresse, une des clefs du Maroc. C’est la sentinelle du seul couloir passant entre le Rif et le Moyen Atlas reliant le Maroc Atlantique au Maroc Oriental. La grande route commerciale, connue traditionnellement sous le nom de « Triq Sultan »(voie Royale) - passage obligé vers Fès, d’un côté et vers Tlemcen de l’autre - qu’empruntaient les pèlerins à l’allée comme au retour de la Mecque : c’est  « la trouée de Taza ».. Le seul passage étroit entre les montagnes  était le lit de la rivière Innaouen, qui était facile à bloquer. D’où l’intérêt stratégique de Taza sur le plan militaire. Elle pouvait obstruer le passage à l’ennemi héréditaire venant de l’Est.

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Linteau de la medersa mérinide de Taza

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Le linteau de la porte atteste de la splendeur de ce petit collège, qui recevait ses subsides des biens en main morte de la Qaraouiyne   de Fès. Si la piété des princes mérinides se manifeste par ces collèges beaux comme des palais, c’est qu’ils en attendent une pépinière de gens efficaces pour leur gouvernement.La médersa est à la fois maison de science et asile de prière. Ce double rôle suffirait à la caractériser comme spécifiquement musulmane et médiévale. Au Maroc cette institution remonte au 13ème et 14ème siècle. On y enseigne les sciences religieuses et plus spécialement le droit qui fait partie de ces sciences. Les médersa qu’élevèrent les mérinides à Fès, Taza et Tlemcen, devaient restituer à la doctrine Malékite sa primauté compromise par l’hétérodoxie Almohade.

      Taza est l’un des rares sites, où l’on peut témoigner de la continuité de la présence humaine depuis la préhistoire. Les grottes de Taza  étaient habité dés l’époque néolithique, comme l’attestent  les fouilles de la caverne de Kifan El Ghomari : Ces fouilles ont mis à jour, les vestiges d’une faune aujourd’hui disparue : lion,  panthère, ours, rhinocéros, buffle antique, mouflon,  gazelle, chameau…. Des ossements d’animaux et d’homo sapiens fossile ainsi que des silex taillés, et des pointes de flèches.

         Citadelle islamique aux ruelles plus larges et moins labyrinthique que celles de Fès, et moins grouillante que celles de Marrakech, telle paraît Taza au visiteur. C’est la plus jolie ville du Maroc, à en croire Ali Bey qui la traversa en 1805 : 

« Les ruelles sont  belles, les maisons en bon état » et peintes à la chaux comme Chefchaouen. Lieu de fixité millénaire, retraite pour ermites et nécropole, elle est évoquée en ces termes par un vieux rabbin de Taza : « Nous regrettons surtout d’avoir été forcés d’abandonner les tombeaux de nos saints ancêtres. N’est – ce pas dans les grottes de Taza que nous avions l’habitude d’implorer la grâce divine en cas de malheurs publics. »

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Marqueterie du minbar de la grande mosquée de Taza

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Détails du minbar

histoire,le couloir de taza

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Le minbar de la grande mosquée de Taza est fait d’une marqueterie ornée de fines baguettes d’ivoire et de bois précieux,. Aujourd’hui bien mutilé, seules ses façades latérales permettent de juger de l’œuvre ancienne qui se déploie en entrelacs. On est tenté de croire que ce type de chaire est le résultat d’une évolution commencée au 12ème siècle. On se trouve là  face au minbar Almohade réparé au 13ème siècle par le Sultan mérinide Abou Yaqoub qui en dota la mosquée agrandie par ses soins.

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    Lorsque l’Islam s’implanta donc au Maroc, Taza avait déjà un long passé : elle était à tout le moins l’Agadir et la nécropole d’une tribu ou d’un groupe de tribus berbères. La seule chose sûre est que Taza est antérieure à l’islamisation du pays, soit à l’an 800. Elle existait déjà lors qu’Idris 1er s’installa dans le Maroc du Nord : il passa à Taza peu avant sa mort, en 790. Tous les historiens musulmans s’accordent à dire qu’à l’emplacement de Taza, il y eut d’abord un Ribat. D’après Ibn Khaldoun, ce Ribat, sorte de forteresse frontière occupée par les volontaires de la foi, a été fondé par les Meknassa du Nord, sous le règne d’Idriss 1er (788-803) qui islamisa les Ghiata et autres tribus berbères de la région de Taza.

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C'est de Tinmel dans le haut Atlas que les Almohad se sont lancés à la conquête de l'Andalousie et du Maghreb, en bâtissant sur leur passage la sentinelle de taza, là même où s'élevait un vieux ribât dévolu au jihad et à la guerre sainte

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        C’est de Tinmel que les Almohades se sont lancés à la conquête de l’Andalousie et du Maghreb, à travers Taza leur seconde étape. Parti de Tinmel, l’armée  d’ Abdelmou’mîn déboucha à travers le Haut et le Moyen Atlas sur Taza, qui devint son point d’appui pour sa campagne au Maghreb Central – toujours tenu par les Almoravides. Après la défaite de ces derniers près de Tlemcen, Tachfin l’Almoravide, au cours d’une marche nocturne, tomba du haut d’une falaise avec son cheval. C’est la première fois depuis longtemps, peut – être depuis toujours, que le Maghreb connaît l’unité politique sous des chefs issus de son sol. Et cette unification est l’œuvre de montagnards sédentaires. Le pouvoir du premier souverain Almohade s’étendait ainsi, depuis l’Îfriqiya jusqu’à l’Andalousie. Il régnait sur tous les grands centres de civilisation, et laissa à son fils un vaste empire qui comprenait tout le Maghreb et la majeure partie de l’Espagne musulmane.

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      Les travaux de Taza auraient été ordonnés par Abdelmoumen en  1135. Les murailles furent complétées en 1172 au voisinage de la tour sarrasine. Un siècle plus tard, vers 1249, le Mérinide Abou Yahya, s’empara de Taza après quatre mois de siège et fit remettre les fortifications en état.

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      La première moitié du 12ème siècle fut, dans l’histoire de la fortification marocaine, un moment décisif. Le pisé se substitua à la pierre, il paraît sous les Almoravides, il triomphe peu à peu sous les Almohades. Il semble que c’est une technique ancienne chez les montagnards de l’Atlas, qui savaient encore construire des ksours en cette matière.

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Partant de la nouvelle ville, on remonte par des escalier, la pente raide jusqu'à Baba Jamaâ qui donne accès au vieux Taza du haut

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Bab Jamaâ(la porte du souk du vendredi) est la principale porte d'accès à Taza la haute.Mais il existe d'autres portes aussi célèbres tel Bab Rih(la porte du vent) ou Bab zitoun(la porte de l'olivier) Taza est célèbre pour la qualité de son huile d'olive sans acide introduit dans ces parages depuis les almohades

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Ces murs de pierres s’accompagnent de tours rondes : tel se présente le mur de pierre de Taza. Il impose la tour massive des remparts Almohades et Mérinides. L’aspect de la fortification maghrébine s’en trouva fixé pour des siècles. Si les remparts Almoravides de Marrakech sont déjà en pisé, on les retrouve sous les Almohades avec les murailles qui couronnent le sommet rocheux de Taza. L’enceinte enveloppante, était selon les chroniqueurs, tel le halo encerclant la lune. Construits partie en pierres, partie en pisé, les remparts ne sont pas homogènes et appartiennent à des époques différentes.

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Le bastion élevé par les Saâdiens pour contrer le péril Turc qui menacait aux confins Est du maroc

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        Dans l’ensemble imposant que forment les fortifications de Taza du côté de l’Orient, une forteresse quadrangulaire attire immédiatement le regard, tant par sa masse que par sa disposition architecturale, Cette forteresse, encore aujourd’hui, appelée du vieux nom d’El Bastioun, est en effet la partie la plus intéressante de l’ancien système défensif. C’est le point fort de la place, le centre de résistance où converge tout le système des murs. C’est sur le Bastioun que repose toute la défense de Taza. Le reste de la citadelle, ville et kasbah, prisent, il pouvait encore continuer de résister. La lourde forteresse devenait en quelque sorte le pivot de la défense marocaine contre l’ennemi héréditaire de l’est.

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        A l’avènement d’Ahmed El Mansour, son premier acte fut de se poser , dès le début, en adversaire des Turcs. Or la place forte dont la situation nécessitait le plus impérieusement un armement défensif puissant était Taza. C’est à elle qu’el Mansour devait songer  tout d’abord, puisqu’il voulait fermer la porte aux Turcs. C’est donc à ce moment qu’eut lieu  semble – t – il la restauration des remparts de Taza, et leur adaptation aux nouvelles conditions de la guerre de siège, auxquelles répondait le Bastioun. On fixe vers le milieu du 16ème siècle, la date où fut construit le Bastioun

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   Le mausolée de Si El Haj Ali Ben Bari est le plus considérable de la plaine des tombeaux de Taza. L’édifice d’époque Mérinide, se situe au dessus de « Triq Sultan » qui, sortait de la ville. Sur le mur de l’édifice religieux, un panneau  porte cette  inscription  relative à la vie du saint : « Ceci est le Mausolée du Docteur Abou El Hassan Ali Ibn Bari Et- Tsouli Et- Tazi, » Si on se rapporte à l’Encyclopédie de l’Islam :

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      Ibn Barri, naquit vers 1262 à Taza, et qu’il est surtout connu par ses Dourar. C’est au méchouar que se situe la medersa mérinide, dont Abou El Hassan Ali dota la ville.

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     Au pied du minaret, la chambre du mouwaqqit qui sert de bibliothèque de la grande mosquée depuis les mérinides. On  y trouve un manuscrit du Coran qui remonte au règne Saâdien d’Ahmed El Mansour Dahbi à qui on doit la fortification connue sous le nom du Bastioun à Taza. Manuscrit magnifique sur du papier remarquablement calligraphié et enluminé avec des double pages dorées(à la fin et au commencement).

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Enliminures Royales léguées en main morte à la bibliothèque de la grande mosquée de Taza

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"kitab chifa", le livre de la guérison du Qadi Ayad, légué par Ahmed Al Mansour Dahbi à la bibliothèque fondée par Abou Inan, le grand sultan Mérinide

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Les chambres de mouwaqqit n’apparaissent au Maroc qu’au 13ème siècle. Malgré les remaniements qu’elle a subi, celle-ci semble bien être de fondation mérinide. On y trouve ainsi «Kitab Chifaâ »(  le livre de la guérison) du Qadi Ayad, en sa page de garde le seau d’Abou Înan le mérinide léguant ce manuscrit en main morte à la grande mosquée de Taza .

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Ce qui reste le long des frises, du style décoratif almohade se caractérise par des formes géométriques sobres aux lignes épurées et fermes comme ce fut le cas à la mosquée de Tinmel.

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Le style décoratif sobre de la grande mosquée de Taza, inspiré du modèle de la mosquée Almohad de TinmelComme à Tinmel, la mosquée Almohade était à neuf nefs réparties d’une manière symétrique. Harmonieuse combinaison d’anciennes traditions hispano – mauresques, et d’éléments nouveaux venus d’Orient.

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Abdelmou’mîne qui construisit Taza, jeta les premiers fondements des mosquées Almohades. Celle de Taza est antérieure à la Koutoubiya  puisqu’elle fut commencée dés 1135, et constitue ainsi  «  le prototype même de toutes les mosquées Almohades. »  Nous dit Henri Terrasse.

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 La nef axiale reste suivant la tradition almohade, plus décorée que les nefs communes. C’est bien entendu au mihrab que se trouvent les plus riches décors de toute la mosquée. Ainsi,à la grande mosquée de Taza, la hiérarchie du décor reste dans la tradition almohade. Nulle part qu’à la grande mosquée de Taza on ne peut juger des caractères généraux et des tendances du décor du 13ème siècle. Malgré les progrès de la géométrie et de l’épigraphie le décor de la grande mosquée de Taza reste avant tout floral. Il donne une importance nouvelle à la géométrie et à l’épigraphie. Tel se présente  la mosquée de Taza, chef d’œuvre de logique et de grâce solide, derrière lequel on sent vibrer l’âme d’un architecte de génie. L’agrandissement mérinide n’a fait qu’accroître la profondeur de la salle de prière. Et ce vaste oratoire, aux longues perspectives, tout noyé de pénombre malgré sa blancheur, est d’une beauté ferme et grave.

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Le grand lustre souligne la dignité éminente de la nef axiale. Dés sa construction, il fut célèbre. L’historiographie mérinide fait l’éloge de cette œuvre exceptionnelle de la bronzerie musulmane. Aucun lustre orné de cette taille n’a été signalé en Orient.

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  Les grandes cours des mosquées anciennes d’Espagne et du Maghreb furent très souvent plantées d’arbres. Le Sahn el Kébirde Taza perpétuait magnifiquement cette tradition. Les historiens nous apprennent qu’Abou Rebia y fut inhumé et la pierre tombale de ce sultan s’y voyait encore en 1923.

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 Le style des arcs, les motifs et les teintes des zellijs, la silhouette de la grande fontaine ne permettent pas de faire remonter ces aménagements au-delà de Moulay Rachid : on croirait volantier que ce fut ce premier souverain Alaouite qui donna au Sahn el Kébir son ordonnance actuelle. Cette immense cour baignée de soleil avec ses magnifiques figuiers est d’une poésie prenante. histoire,le couloir de taza

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 La vue des toits est aussi belle que celle des grandes mosquées du 12ème siècle. .Le Jamaâ El Kébir, la grande mosquée de TAZA, à laquelle ont déjà travaillé les Almohades, est agrandie par les Mérinides, les travaux étant terminés en 1294.Une inscription, en zellij noir, contigu à la Qibla, date les réparations et agrandissement  que fit faire le Sultan Mérinide . On y lit :

       «   Abû Ya’qûb, ordonna d’agrandir la mosquée par quatre nefs du côté de la Qibla et deux nefs, une orientale et une occidentale, ainsi que le Sahn qui est à l’Est de cette mosquée, car toutes ces parties étaient sur le point de s’écrouler. Commencés le  4 mars 1291, les travaux finirent le 29 octobre 1292. »

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   Les Almohades ont crée une véritable civilisation, et ne se sont pas contenté, de se faire les agents de diffusion de la civilisation Andalouse. Civilisation austère et énergique où les forteresses et les mosquées l’emportent sur les palais et les jardins, mais dont l’originalité et la grandeur ne sont pas contestables.   histoire,le couloir de taza

              À l’occasion du retour du pèlerinage de la Mecque, des séances de « Samaâ » sont animées, chez des particuliers à Taza. Et c’est à la tête de quatre cent pèlerins que de retour de la Mecque est mort, le 6 octobre 1269, Ali Shushtouri le grand mystique andalou qui marqua de son passage le Ribât de Taza. Cette sentinelle du Maroc oriental, était en liaison directe avec l’Andalousie via Sebta.: les poètes et mystiques andalous du 14ème siècle passaient par Taza pour se rendre à Tlemcen, à Bougie ou à Oran.  C’est lors d’un séjour à Taza que le célèbre vizir Grenadin Lissân Eddin Ibn El Khatib  avait appris le décès de sa mère en Andalousie.

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        La position de la médina de Taza, comme couloir de passage entre l’Est et l’Ouest du Maghreb, en faisait une étape où s’arrêtaient des personnages de renommée en provenance d’Andalousie comme Lissan Eddin Ibn El Khatib, le célèbre vizir et poète Grenadin. Il y est venu d’Andalousie avec ses coutumes, ses traditions et sa culture. On se souvient également du célèbre séjour d’Ibn Battouta, lors de son retour de Chine. Il existe encore une ruelle à Taza qui porte métaphoriquement son nom : c’est « Derb Cinî »(la ruelle du Chinois) . Comme Ibn Batouta était arrivé à Taza de Chine,  la ruelle où il séjourna fut baptisée « ruelle du Chinois » . 

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         Ce sont les confréries religieuses qui ont contribué à la sauvegarde ce patrimoine musical et littéraire andalou au Maghreb. Ces confréries allaient maintenir en vie une tradition musicale et poétique dans le cadre de leurs cérémonies, comme on le voit à Sidi Azzouz, où on chante la borda de  Bossiri. Personne ne connaît la période où avait vécu Sidi Azzouz, le saint patron de la ville, dont on dit qu’il aurait un parent enterré en Tunisie comme d’ailleurs le mystique marocain des Ghomara Abou El Hassan Chadili. L’artisan qui a peint la barchla de sa coupole a daté son œuvre du 3 ramadan  809 de l’hégire, soit le 2 novembre 1407.

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Taza, vendredi 26 nov. 2010:L’année dernière vers le coup de 13h, le sanctuaire de Sidi Azzouz, le saint patron de la ville, où nous avions enregistré une séance de samaâ en 2006 pour la série documentaire « la musique dans la vie », était dévoré par les flammes. Le ministère des habous et des affaires islamiques, qui a affecté un budget pour sa restauration n’avait plus aucune trace ni d’images du toit peint du sanctuaire. Le seul document dont les maâlem barchliya (peintres sur bois) disposaient pour restaurer à l’identique le toit peint disparu est le documentaire « Taza sentinelle du Maroc Oriental » dont j’ai supervisé pour le compte de la deuxième chaîne en 2006 ! Le chantre du samaâ local, M.Hamid Slimani qui me rapporte cette anecdote ajoute : « S’il n’y avait pas ton documentaire ; ils n’auraient pas été en mesure de restaurer la coupole en lui restituant sa décoration initiale !histoire,le couloir de taza

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       À Taza, les associations dévolues au samaâ œuvrent également pour l’épanouissement de la musique andalouse. Et cela d’autant plus que cette vieille médina maghrébine se prévaut d’une grande tradition dans ce domaine. Parmi les grands noms Tazis de la musique andalouse on peut citer entre autres, maître Haj Ahmed Labzour Tazi, mûnshid  et joueur de Rebab qualifié. Il se distingua par sa contribution à l’enregistrement de l’intégralité du répertoire de la Ala, avec le concours de l’UNESCO, et par une tentative sérieuse de transcription, souligne Ahmed Guettat dans son monumental ouvrage intitulé « empreinte du Maghreb sur la musique arabo – andalouse ». Parmi les autres grands noms figure celui de feu Abdessalam Lbrihi, ce natif de Taza qui se trouve parmi les auteurs ayant contribué au recueil du Haïk qui fut publié sous les règnes de Hassan Ier et de Moulay Abdelaziz. C’est d’ailleurs son fils Mohamed Lbrihi qui fonda, au tout début du XXe siècle, la première association de musique andalouse qui allait contribuer, d’une manière décisive, à la préservation de ce legs andalou au Maroc. Cet originaire de Taza, comme le mentionne un dahir de Moulay Abdelaziz, était devenu chanteur de Cour (moutrib al qasr). Il est mort en 1945. Il avait formé à la ala andalouse toute une génération de musiciens de Fès, à commencer par le plus fameux d’entre eux, El Hajj Abdelkrim Raïs. Les plus grands ténors de la musique andalouse ont donc été formés par un homme originaire de Taza. L’association qu’il avait fondée est actuellement présidée par son gendre Anas El Attar.

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Mrs. Mohamed Belhissi, homme de théâtre et Hamid Slimani, chef d'orchestre du samaâ, actuellement les principaux animateurs de la vie culturelle Tazie..

      L’un des grands noms du malhûn à Taza est le poète Mohamed Belghiti surnommé Btigua. Ce dernier animait régulièrement des soirées de ce genre poétique et musical à Fès et, dit-on, il connaissait par cœur quelque quatre cents qasidas, dont celle qui évoque la mort du Prophète ou encore « haoul lqiyama », le jour de la résurrection. Il avait composé des qasidas sur Taza dont l’une énumère les saints de la ville. C’est au cours de ces soirées qu’il organisait dans les Riad de Fès qu’il présentait ses nouvelles créations en matière de qasidas chantées du genre malhûn. Autre chantre du malhûn tazi, Belaïd Soussi, l’auteur de la qasida du ferran (le four public) et de cette chanson qui connaît encore un grand succès populaire (et que chante Mohamed El Asri) et qui a pour refrain :

Allah y l’ghadi l’Sahra jib li ghzal !

Ô toi qui t’en vas au Sahara, ramène-moi une gazelle !

 Autre succès de cet auteur tazi « lgaâda f’jnan sbil » (villégiature au jardin de Jnan Sbil de Fès) et « Ya man bgha zine » (ô toi qui désires la beauté !). C’est encore lui qui avait composé cette chanson nationaliste à l’occasion du retour de Mohamed V de son exil de Madagascar :

 Saâdi ziyant ayâmi, mahboub khatri jani !

Heureux sont mes jours, mon bien-aimé est arrivé !

 Il avait également composé des chansons pour des vedettes de la chanson marocaine tel Fath Allah Lamghari. Taza faisait partie des vieilles cités marocaines, telles Salé, Safi et Meknès qui produisaient du malhûn. Mais elle ne dispose pas actuellement d’un orchestre de malhûn déplore M. Hamid Slimani. Pourtant les habitants de Taza restent encore attachés au malhûn. Certains musiciens font, de temps en temps,  quelques tentatives pour faire revivre le malhûn. On entend donc du malhûn exécuté par les orchestres qui animent les fêtes de mariage, mais il n’existe pas d’orchestre spécialisé dans le malhûn proprement dit.

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       De par sa position entre Tlemcen et Fès, Taza est l’un des terreaux les plus fertiles au Maroc en matière de samaâ , un art du chant déclamé suivant les modes musicaux andalous, fondé sur la déclamation, les prières et les qasida mystiques. Parmi les grands noms Tazis de la musique andalouse on  cite, entre autres, maître Haj Ahmed Labzour Tazi, mûnshid  et joueur de Ribab qualifié. Il se distingua par sa contribution à l’enregistrement de l’intégralité du répertoire de la Ala, avec le concours de l’UNESCO, et par une tentative sérieuse de transcription, comme le souligne Ahmed Guettat dans son monumental ouvrage intitulé « empreinte du Maghreb sur la musique arabo – andalouse » . 

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     . Henri Terrasse a insisté à juste titre sur la part prépondérante de l’influence andalouse à Taza. D’où les monuments, d’où une certaine floraison littéraire où domine le poète et historien andalou Ibn El Khatib. Taza, était en liaison directe avec l’Andalousie via Sebta.: les poètes et mystiques andalous du 14èmesiècle passaient par Taza pour se rendre à Tlemcen, à Bougie ou à Oran.  C’est lors d’un séjour à Taza que le célèbre vizir Grenadin Lissân Eddin Ibn El Khatib  avait appris le décès de sa mère en Andalousie. Le grenadin   Lissân Eddin Ibn El Khatib y composa una qasida où il est dit :

 Taza le célèbre pays

 Pays où les jardins  reverdissent

 Pays où l’air est bon, où  l’eau est abondante

 Pays où la beauté est  resplendissante…

     Poète mystique andalou, né à Cadix vers 1203, ayant d'abord vécu au Maroc, avant de voyager en Orient, c’est à la tête de quatre cent pèlerins que de retour de la Mecque est mort ,le 6 octobre 1269, Ibn El Hassan Shoushtouri , le grand mystique andalou qui marqua de son passage le Ribât de Taza. Ce fut un des grands Washâh mystiques, qui parcourait les marchés et les foires en s’accompagnant d’un instrument en chantant ses Mouwashahâtes andalouses :

 « Un cheikh du pays de Meknès

 A travers les souks va chantant

 En quoi les hommes ont-ils à faire avec moi

 En quoi ai-je à faire avec eux ?... »

 Lors de l’un de ses voyages d’Andalousie au pays d’Algérie, au milieu du sixième siècle de l’hégire, ce grand poète soufi – maître du Samaâ’ et grand pôle mystique -, est passé par Taza , en tant que lieu de transit reliant l’Orient à l’Occident musulman. Il se rendait alors à Bougie où résidait le grand mystique Ibn Sabaâïn. Il est passé par la ville qui l’a séduite, et où il composa ce poème :

  J’ai  porté la coupe

 A l’ombre apaisantes de jardins

 Ce fut dans une citadelle à l’Est de Fès

 Douce était ma joie, vifs mes souvenirs

 Au point que j’en oublie les miens

 J’ai quitté la patrie pour la demeure des biens aimés

 Où on m’a  servi la coupe divine.

 Ce qui reste de Shoshtari, comme des maîtres spirituels qui lui ont succéder depuis, c'est cette actualisation poignante de l'instant, où ils veulent nous faire rejoindre l'éternel. « L'instant est une coquille de nacre close ; quand les vagues l'auront jetée sur la grève de l'éternité, ses valves s'ouvriront ». Il n'en disait pas davantage pour laisser comprendre qu'alors on verra dans quelles coquilles les instants passés avec Dieu ont engendré la Perle de l'Union. Ce à quoi fait échos Niyazi Misri, poète mystique turc du 17ème siècle :« Après avoir voguer sur la mer de l'esprit dans la barque matérielle de mon corps, J'ai habité le palais de ce corps, qu'il soit renversé et détruit ; »

 Oui, l'instant est une coquille de nacre  close ; quand les vagues l'auront jeté sur la grève  de l'éternité, ses valves s'ouvriront. Cette dimension mystique imprègne encore aujourd’hui la vieille médina de Taza, où les pèlerins de retour de la Mecque sont encore accueillis par le samaâ qu’y légua, il y a des siècles de cela le grand maître andalous du chant soufi.

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 En dehors de la médina, il n’y avait que des vergers, et des cimetières .La citadelle continuait à dominer de ses remparts la campagne alentour.On trouve dans Kitab El Istibcar une description curieuse de la ville dans la deuxième moitié du 13ème siècle. Elle est établie au milieu de grandes montagnes d’accès difficile ; les figuiers, la vigne, les arbres fruitiers de toutes espèces et le noyer y abondent. Les habitants sont des berbères Ghiata : « c’est une grande ville, située sur le flanc d’une montagne, et qui domine des plaines traversées par des ruisseaux d’eau douce ; elle est protégée par un rempart considérable de pierres jointes au mortier, et la durée en est assurée. » Ribat-Taza qui se trouve sur la route menant d’occident en orient, est aussi appelée  Taza.- Ez-Zaïtoun, en raison de l’abondance de l’olivier..Taza atteste la grande extension de la culture méditerranéenne de l’olivier qui remonte ici au temps du lime romain. Des silos creusés dans la médina recelaient des provisions de grain qui devenaient précieuses en cas de blocus. On y cultivait des vergers, des réservoirs y accueillaient des eaux de la hauteur en provenance Ras El Ma. La ville recevait en temps normal l’eau d’une seguia descendant des montagnes, alimenté par une dérivation de l’Oued Taza. En cas d’hostilités avec les tribus montagnardes, le premier soin de celles – ci été de  couper la seguia , afin de priver d’eau la ville[1] : les Ghiata n’y ont point manqué jusqu’au début du 20ème siècle. C’était une chose à laquelle Taza devait s’attendre fatalement à chaque siège. C’est d’ailleurs pour  la délivrer du blocus des Ghiata, que Hassan 1er s’était rendu à Taza en 1874.En dépit de la barrière du Rif, le Taza du haut  est une citadelle méditerranéenne par excellence du fait même de son histoire et de sa culture. Au pied de son éperon, le Taza du bas, la ville nouvelle, ne cesse de s’étendre sur ce qui fut jadis des jardins et des vergers.Abdelkader Mana    


 

           

 

28/10/2010

Au bord de la Moulouya

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Au Bord de la Moulouya
Echappée aux plis orientaux du Moyen Atlas où elle a sa source, la Moulouya irrigue de riches oasis, qui interrompent la monotonie désolée des steppes à l'Est de Guercif, ce pays de l'armoise et du vent. Guercif est un toponyme berbèrequi signifie le « lieu de rencontre entre deux oueds » ; celui de la Moulouya et du Melloulou, qui irriguent oliveraies et jardins potagers alentours.

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La région est une voie de passage obligatoire où depuis 1914, une ligne de chemin de fer relie Fès à oujda. On peut voir chaque jour serpenter dans ces étendues steppique ce petit chemin de fer qui fonctionne encore au charbon dans la partie orientale de son parcours.

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C'est par ces paysages steppiques des environs de Guercif, que commence véritablement, l'Oriental Marocain, qui s'oppose par son aridité aux plaines verdoyantes et humides du Maroc atlantique. Ici, on ressent davantage, les vents d'Est de la steppe, que les vents d'Ouest  du Gharb. C'est le territoire des Hawwâra Oulad Rahou, ces pasteurs nomades, attestés à l'Est de Taza, bien avant l'avènement des Idrissides.  Ils sont les propriétaires fonciers de la plaine de Tafrata et de celle du Jell,. Le statut de leurs terres est soit Melk soit Ârch. En plus du pastoralisme, la fabrication de l'huile d'olives est une des industries les plus importantes des Hawwâra Oulad Rahou.

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  Située sur l’axe de la grande voie ferrée qui traverse toute l’Afrique du Nord dans toute sa longueur, de l’Atlantique à Tunis, Guercif n’est que le centre d’échange entre le Tell et les hauts plateaux. Son intérêt de lieu d’échange entre Maroc Occidental et Maroc Oriental, prendra davantage d’ampleur avec la construction Maghrébine. Ce passage de l’Algérie au Maroc Occidental a été suivi par toutes les migrations en provenance de l’Est, y compris celle des Houara,cet îlot arabophone d’origine Zénète.

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 Le territoire des hawwâra Oulad Rahou est situé entre la kasbah de Mérada à l'Est et celle de M'soun à l'Ouest.Il semble que c'est dans les dernières décennies du 7ème siècle, à l'époque où les  berbères fuyaient les conquérants arabes que plusieurs fractions Hawwâra quittèrent la Tripolitaine, en s'étalant dans toute l'Afrique du Nord sous le commandement de Kusayla et ensuite de celui de la Kahina. A la suite de ces migrations, ils ont occupé, en s'infiltrant parmi les peuples berbères autochtones, certains territoires plus ou moins considérables, où ils vivaient, en cultivateurs sédentaires ou nomadisant dans des pays plats, sous l'autorité de leurs propres chefs. Selon l'auteur d'Al Bayân al-mûghrib, ces Hawwâra accompagnèrent à Tanger le gouverneur de cette ville, le futur conquérant de l'Espagne, Tarîq Ben Ziyâd , dont le rocher de Gibraltar porte le nom. Le nom - même de Melilia, signalé dés le 10ème siècle, provient d'une fraction Hawwâra.

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Mérada

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M'soun
Originaires de Tripolitaine, les Hawwâra ,constituent au Maroc des îlots arabophones, dans un contexte berbérophone : c'est le cas des Hawwâra oulad Taïma, agrumiculteurs au bord de l'oued Sous,  et de celui des Hawwâra Oulad Rahou, oléiculteurs  au bord de la Moulouya . Ces derniers sont d'anciens transhumants, ayant  servi jadis dans la cavalerie mérinide. Ils sont connus pour leur fantasia, leur hospitalité  et leur code d'honneur. Annuellement ils échanges des visites avec les  Hawwâra Oulad Taïma, leurs cousins de Sous.En 1321, nous dit un chroniqueur d'époque, le Sultan mérinide fit un séjour de trois ans à Taza, fortifia Taourirt, où il installa une garnison et bâtit l'enceinte de Guercif. Les ruines de Mérada remontent elles aussi  aux mérinides. En effet, vers 1385, l'Abdelwadide de Tlemcen, mena son armée sous les murs de Taza. C'est lors de sa retraite, qu'il avait détruit, cette Kasbah de Mérada, située en ce passage - clef , assurant la communication entre les vallées de Sebou et ceux de la Moulouya. 

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Aux environs de Guercif, la cueillette des olives s'accompagne de fêtes saisonnières qui viennent rompre pour un temps, la monotonie de l'existence ;  petits et grands y prennent part. Les femmes vont au travail en habits de fête ; elles chantent de vieilles chansons que les générations se transmettent ; des musiciens parcourent les olivettes, donnant des auditions ça et là.

Le souk hebdomadaire de Guercif

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C’est à Guercif que se tient chaque mardi, le marché hebdomadaire des fruits et légumes, auxquels se mêlent les savoureuses clémentines d’Aklim, en provenance de la riche plaine de Triffa voisine. C’est le marché le plus achalandé au Maroc Oriental, où viennent s’approvisionner,agriculteurs sédentaires des montagnes et pasteurs -  nomades des steppes et des hauts plateaux : ceux des Houara oulad Rahou,des Bni Waraïn, des Bni Bou Yahi, des Metalsa et d’ailleurs.

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C'est au cours du marché hebdomadaire de Guercif, qui se tient chaque mardi, que nous avons rencontré  Mr.Baghdadi Jelloul. Pasteur – nomade et oléiculteur, il nous a  déclaré : « Les Houara Oulad Rahou étaient des Berbères. Pasteurs plutôt qu’agriculteurs. Guercif, lui – même était un simple village agricole. Les Oulad Hammou Moussa, fraction Houara Oulad Rahou, étaient ses premiers habitants.  C'était parmi leurs notables, qu'on choisissait les caïds qui gouvernaient le pays. Les gens pratiquaient uniquement la céréaliculture : blé tendre, seigle, maïs. Mon père récoltait mille quintaux de blé tendre, autant de maïs et quantité de seigle.. Il fallait attendre l'arrivée des vulgarisateurs agricoles, après l'indépendance du Maroc pour pratiquer l'oléiculture. C'est eux qui nous ont conseillé de planter l'olivier. Parmi les quatre premiers oléiculteurs de Guercif, il y avait Mohamed Baghdadi, Hihi Hammou , le caïd Ramadan, et Mohamed Belmahjoub,que Dieu ait leurs âmes.  Ils étaient les pionniers oléiculteurs de la région. »

Ô joueur de flûte au bord de l'oued

Tu as ensorcelé toutes les filles de ces rivages

En ce creuset de l'émigration internationale, qu'est l'Oriental marocain, le thème de la séparation est un leitmotiv des distiques du genre « Sseff » où celle qu'on appelle la « semeuse » est la seule apte à proférer un distique, les autres lui répliquent jusqu'à ce qu'elle en profère un autre. Plaisir du chant « semé » puis « récolté » : le thème de la fécondation est au cœur même de ce chant des femmes de l'oriental.

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Au bord de la Moulouya, nous avons assisté au genre Sseff que pratique à Guercif une troupe mixte à l'occasion des fêtes de mariages, de baptêmes et autres rites de passage. Fatima Guercifia et sa troupe nous ont  ainsi chanté le thème de la séparation, si caractéristique de ce creuset de l'émigration :

L'espagnole m'a pris mon aimé

Je l'ai un mois et elle l'a toute l'année

Vous qui avez émigré en Espagne, pourquoi revenir

Si vous repartez sitôt qu'à votre présence

Notre cœur s'est à nouveau accoutumé ?

Pourquoi pleurer et laisser le chagrin envahir mon cœur ?

Il nous revient toujours celui qui pour la France nous a quitté.

Le bus  a emmené mon aimé à l'aube

J'ai retenu mes larmes mais j'ai le cœur brisé

Du regard j'ai accompagné mon aimé

Jusqu'au rivage, puis la mer l'a englouti

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Le Sseff est ce chant où les femmes de l'Oriental, de Guercif à Oujda en passant par Taourirt,  évoquent leurs séparations d'avec leurs maris, qui  émigrent, qui s'exilent laissant derrière eux, femmes et enfants. Ces chants évoquent également ce fils, parti en zodiac ou en patera vers l'autre rive et l'autre vent et qui fini par être dévoré ,à la fleur de l'âge, par le détroit de Gibraltar : «  J'ai moi-même chanté cette brûlure, nous dit Guercifia. J'ai chanté ce départ de toute une jeunesse vers l'inconnu.... »

O Guercif, entouré de ces steppes désertes !

Ô mamy ! La lecture de sa lettre a blanchi ma chevelure

Tous les garçons, l'Espagne les a emportée

Ô mamy ! La lecture de sa lettre a blanchi ma chevelure

Viens voir ce qu'est devenue ta mère

Ô mamy ! La lecture de sa lettre a blanchi ma chevelure

Tu ne m'as laissé que ta photo accrochée au mur

Ô mamy ! La lecture de sa lettre a blanchi ma chevelure

Voyez où l'a emporté la frégate ?

Ô mamy ! La lecture de sa lettre a blanchi ma chevelure

La frégate m'a laissé les mômes sans leurs pères !

Ô mamy ! La lecture de sa lettre a blanchi ma chevelure

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Au bord de la Moulouya, du côté des oliveraies de Safsafat,  M'hamed Bachara  nous a parlé de cette danse du genre Saff en ces termes :

"La danse que nous venons d'exécuter, s'appelle « Ras el Oued » (le bout de la rivière). Pourquoi l'appelle - t - on ainsi ? Primo, c'est parce que c'est une « musique sur fleuve ». C'est-à-dire qu'elle concerne les régions traversées par le Moulouya, tel Outat  El Haj, Missour, et Midelt. On remonte ainsi, jusqu'à la source du fleuve. C'est une danse caractéristique des affluents du Moulouya, tel le Melloulou et le Zobzît, où l'on pratique également cette musique sur fleuve dénommée « Ras El Oued».Selon les régions elle est dénommée soit « Ras el Oued », « lamtallat »(trois pas de danse) ou le « Tazi ». Cette dernière appellation concerne les environs de Taza, les Tsoul et les Branès en particulier. Dans l'Oriental - Taourirte , Oujda, Berkane - on l'appelle laâroubi (ou  danse campagnarde). Et chez nous, à Guercif et à Hawwâra, on l'appelle plutôt «Ras el Oued, qu'on peut aussi traduire par « musique sur fleuve », qu'on exécute aux fêtes de mariages, et aux cérémonies officielles et religieuses. »

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Musicalement, ce qui prédomine ici, ce sont plutôt des aires venus de l’Est. D’abord la danse populaire dite Ras el oued, issue des hauts plateaux Oranais, milieu steppique et semi – nomade. Ensuite le Sseffe , chant des femmes de l’Oriental, appelé par ailleurs l’aroubi (le campagnard). C’est de lui qu’est issue le raï oranais qui a également ses émules à Guercif.

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   C'est à la kasbah de M'soun que les français, en provenance d'Algérie vont établir leur premier campement à l'aube du 20ème siècle.La Kasbah de M'soun est occupée à son tour le 11 mai 1912. Avec l'occupation de la kasbah de M'soun, une réaction se produit chez les Mtalsa ; des feux apparaissent dans la montagne, et le soir - même les français subissent une attaque. A la fin du mois d'avril 1912, les émeutes de Fès provoquent l'effervescence sur la rive gauche de la Moulouya ; les tribus sont rassemblées à M'soun. Le 26 juin 1912, les troupes françaises s'installent à Guercif. C'est dans ces conditions, qu'il était devenu possible aux troupes coloniales de réaliser la jonction tant souhaitée entre le Maroc Oriental et le Maroc Occidental.

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Au loin se profile le mont Guiliz, limite entre le plat pays des Hawwâra et les premiers escarpements  Bni Bou Yahi, domaine rifain par excellence. C'est au pied même de ce Jbel Guiliz, que le 20 avril 1912 au petit jour, les troupes françaises abordèrent la Harka marocaine. Les Bni Bou Yahi, tiennent tête aux envahisseurs jusqu'à une heure de l'après midi. Renforcés par les Mtalsa, ils font preuve d'un courage remarquable, et se réfugient en zone espagnole, à la fin des combats.En effet, après l'occupation de Debdou, le 4 mai 1911, les troupes françaises s'installent au gué de Mérada, à une dizaine de kilomètre en aval de Guercif. Le camp est établi sur la rive droite de la Moulouya. Le 6 mai 1911, des Bni Waraïn tirent sur les tentes ; Comme ils trouvent refuge à Guercif, les troupes coloniales la bombarde le 10 mai au matin. Les tribus fuient les obus, mais réoccupent le centre de Guercif, après le départ de la colonne. Les harcèlements des troupes coloniales continuent dans la vallée de la Moulouya, infligeant fréquemment des pertes aux français. A mérada - même une harka se jette sur le camp dans la nuit du 17 au 18 mai 1911. Les rebelles n'hésitent pas à multiplier les coups de main, car ils se sont vite rendu compte de l'inviolabilité du fleuve.

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De nos jours, on trouve les Hawwâra  sur les deux rives du cours inférieur de l'oued Sous et sur la rive droite de la Moulouya. Ces derniers sont attestés à l'Est de Taza, bien avant l'avènement des Idrissides. Dans les deux cas, les Hawwâra constituent des îlots arabophone en milieu berbérophone : celui des Masmoda pour ceux de Sous et celui des Zénata pour ceux de l'Oriental marocain. Les premiers s'adonnent à l'agrumiculture, les seconds à l'oléiculture.

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La tribu des Hawwâra Oulad Rahou est l'une des plus hospitalières de l'Oriental Marocain. Ici « la table servie » prend l'allure d'un méchoui dans tous ses états. Chez eux, à la manière des anciens bédouins du désert, le sacrifice est le symbole suprême de l'hospitalité et le salon où ils reçoivent les invités est la pièce la plus importantes de leur foyer : en arrière plan, toutes les autres dépendances sont mobilisées, pour satisfaire les invités .Au point qu'autrefois, l'homme mal accueilli faisait un feu de brindilles d'armoise qui, en dégageant un long filet de fumée, signifiait qu'il n'avait pas été reçu par un membre de la Jmaâ . Cette pratique visait à jeter l'opprobre sur le hameau auquel appartient l'inhospitalier. De passage chez les Hawwâra Oulad Rahou au mois d'avril 1666, Roland de Fréjus, qui était porteur d'un message de Louis XIV à Moulay Rachid, qui résidait alors à Taza, témoigner de leur hospitalité en ces termes:

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« Incontinent les Cheqs Ulad Rahou, qui sont trois frères, vinrent me saluer et faire offre de leur service, ce que je n'eut point désagréable. Ils nous logent donc sous la tente de Mohamout, More, et nous envoyèrent des moutons, poulets, beurre, couscous et autres rafraîchissements pour souper ; et, en reconnaissance, je leur fit présenter du tabac du Brésil, étuis et couteaux, qu'ils reçurent fort agréablement et avec des remerciements particuliers. »

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Les pasteurs -nomades  Hawwâra, vivaient au bord de la Moulouya aux environs de Guercif jusqu'au coeur de la fertile plaine de Triffa, plus à l'Est, là où le fleuve se jette en  Méditerranée. Ils faisaient partie du Leff des Krarma, qui s'opposait en permanence au keff des Ahlaf, ensembles de tribus situées plus à l'Est autour de Taourirt. Pour faire face aux Ahlaf de Taourirt, les Hawwara de Guercif avaient  fait appel à une fraction Hawwâra qui nomadisait chez les Bni Snassen et aux Oulad Rahou, signalés au Rif depuis le 16ème siècle  De ces évènements du Maroc prè -colonial,  le pasteur Mohamed El Qadi se souvient encore: "Nos ancêtres Hawwâra sont originaires d'Orient, et les Oulad Rahou  du Rif. Les Hawwâra étaient en lutte permanente contre les Ahlaf. Un jour que la bataille était rude entre les deux leffs, les Oulad Rahou sont venus du Rif pour nous soutenir . La bataille eut lieu au tell de « Hbiss Loul », à la frontière entre les Ahlaf de Taourirt et les Hawwâra de Guercif. » Après ces évènements les Oulad Rahou s'établirent également autour de Guercif, d'où le nom composite de « Hawwâra Oulad Rahou ».

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Une autre fraction Hawwâra qui nomadisait jadis chez les Béni Snassen,  s'étaient également jointe à ces luttes entre leffs, nous relate le Pasteur Hihi Mohamed Belbaqal devenu depuis oléiculteur :

« Des raisons pour lesquelles nous avons quitté  l'Oriental pour venir s'établir  à Guercif ? Les conflits intertribaux du temps de la Siba, où les uns razziaient les autres au baroud. Les Ahlaf de Taourirt avaient encerclé nos proches parents qui habitaient à Guercif. Ces derniers chevauchèrent alors 40 à 50 chevaux et sont venus nous chercher à Madagh, dans la plaine Triffz, chez les Bni Snassen :

-  Ô nos frères ! Le malheur est arrivé chez nous, venez nous aidé à nous défendre ! Nous ont-ils dit.

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Chevauchant à leur tour chameaux et bêtes de sommes, les nôtres les accompagnèrent en conduisant leurs troupeaux d'ovins, de bovins, et de camelin, jusqu'ici à Guercif où ils ont fini par s'établir. Ils étaient accompagnés de leurs sloughis de chasse, se déplaçant à dos de chameaux et de chevaux. Celui qui en était capable achetait un fusil. Le troupeau avançait et les cavaliers le suivaient. Une fois à Guercif, ils montèrent leurs tentes au nouveau campement, et s'invitèrent mutuellement : depuis lors, les échanges de visites  n'ont jamais cessé entre ces fractions alliées. »

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Ils se fixèrent à Guercif de la manière suivante : dans les plaines de Tafrata et du Jell : les Hawwâra occupent les 4/5ème du territoire tandis que les  Oulad Rahou en occupent le 1/5ème .Sédentarisés  ainsi au bord de la Moulouya, ces anciens pasteurs - nomades, se livrent désormais aux cultures maraîchères, à l'oléiculture irriguée en particulier.

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Dans la région Taza - Guercif , l'olivier est déjà attesté sous les Almohades, comme le soulignait Ibn Ghâzi, auteur du 15ème siècle :« Dans les bonnes années, écrivait - t - il , et avant que les Banou Marîn, eussent commencer à ruiner le Maghreb extrême, lors de l'affaiblissement de l'autorité des Almohades, la récolte des olives au ribât de Taza, se vendait environ 25 000 dinars. » Ibn khaldoun, nous dit qu'à leur avènement, les mérinides ont  détruit l'une des principales ressource de la région ; l'oléiculture.

L'olivier porte le nom berbère d'« Azemmour ».C'est donc un arbre d'une antiquité respectable,puisqu'il s'est fixé comme toponyme dans des régions où le berbère n'est plus parlé comme Zemmoura en Algérie et Azemmour, au bord de l'oued Oum R'bia (la mère du printemps).

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La récolte des olives a lieu après l'Ennaïr, elle bénéficie, croit- on, de la baraka attachée aux fêtes dont le renouvellement de l'année est l'occasion. Dés que l'olivier arrive à maturation, on gaule avec de longues baguettes flexibles, les olives des hautes branches. Les glaneuses ramassent dans des coffres, les olives abattues et vont les porter au pied de l'arbre où chacun établit séparément son tas. Le soir chaque tas est mesuré par les soins du maître de l'olivette, et les ouvrières sont payées en conséquence. C'est une tâche délicate qui incombe en priorité aux femmes : Elles cueillent à la main les olives qui sont à porter en tirant sur chaque brindille, sans en faire tomber en même temps les feuilles.

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Avant de commencer la trituration des olives, on jette du sel gemme dans la meule de gré calcaire, qu'on a fabriqué à Oued Amlil . Elle se meut grâce à la force motrice des bêtes de somme. En plus de cet appareil qui triture les olives, le moulin se compose d'un pressoir : l'un et l'autre établis à demeure dans une construction couverte en terrasse.Une obscurité presque absolue règne dans ces locaux : si le travail de l'huile doit s'effectuer à l'abris de la lumière, c'est parce que, selon une superstition ; l'huile nouvelle ne doit pas voir la lumière du jour.

Lorsque les olives ont été réduites en pâte par la meule, on entasse cette pâte dans des escourtins en alfa, qu'on place les uns sur les autres au milieu de la table du pressoir. Le propriétaire du moulin ne se contente pas de fabriquer l'huile de sa récolte, il travaille aussi à sa façon les olives de ses voisins,  moyennant un prélèvement à son profit d'un dixième du produit.

« Au passé, se souvient Hmida Amine, il y avait à Guercif entre 50 à 60 pressoir traditionnels avec les bêtes de somme, comme unique force motrice. »

C'est à partir de 1930, qu'on a commencé à planter l'olivier dans toute  la région de Guercif. Maintenant, chaque année, on plante 7000, 8000, jusqu'à 10 000 arbres. La superficie plantée ne cesse de croître, aux  Ranates, à Mahiridja, Berkine, Ras Laqsar et Taddart. Avec le déclin du pastoralisme, les Hawwâra ont commencé à s'intéresser à l'oléiculture qui est maintenant leur principale activité.

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La récente exploitation des nappes phréatiques, a rendu possible le développement de l'olivier irrigué qui a pu ainsi gagner du terrain sur la steppe, jadis réservée au pastoralisme. Maintenant il faut chercher cette eau précieuse à des profondeurs de plus en plus grandes :

 

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« En raison de la faiblesse des précipitations dans cette région, nous sommes en train d'épuiser la nappe phréatique, nous explique Mr. Amine Hmida. Au début om pompait l'eau à vingt mètres, maintenant il faut la chercher  à soixante dix mètres de profondeur. Nous n'avons qu'une seule source et elle est largement insuffisante. Cela fait trente ans qu'on nous parle d'un barrage au col de Tmaqant : depuis mon enfance, je n'ai pas cessé d'entendre parler de la prochaine réalisation de ce barrage. Deux études lui ont déjà été consacrées, nous- dit- on, mais toujours pas de financement. »

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Steppique en surface, la région est riche en nappes phréatiques, dont les racines se trouvent au cœur de la chaîne rifaine. Ce sont ces nappes qui ont formé le seuil de Taza. Mais la baisse constante de leur réserve en eau, constitue désormais une menace redoutable pour l'oléiculture irriguée comme nous l'explique pour sa part Mr .Hihi Mohamed Belbaqal:

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«Nous souffrons du manque d'eau. Nous ne disons pas « pourquoi on ne construit pas de barrage chez nous ? », car nous savons que cela coûte cher. Mais alors qu'à Outat El Haj, un quintal d'olives donne 30 litres d'huile , chez nous à Guercif il n'en produit que seize à dix sept. Ma propre production se limite à 15 litres le quintal, en raison du manque d'eau. On ne commence à irriguer l'olivier qu'à l'approche du mois d'octobre, quand il est déjà trop tard. C'est pour cette raison que la productivité est faible par ici. »

Les olivettes, on les trouve essentiellement au bord de la Moulouya et de ses affluents. Les oliviers sont parfois si dense que la culture sous bois n'est plus possible. Tout un système de petits canaux  amène l'eau de l'irrigation dans des cuvettes creusées au pied de chaque arbre. Mais sans irrigation pas d'olive.D'où la demande lancinante d'un barrage qui revient comme une litanie dans la bouche des oléiculteurs :

« L'olivier pousse en abondance à Guercif, nous dit Baghdadi Jelloul :. C'est l'or noir de Guercif. Des tribus entières en vivent. Des ouvriers viennent travailler à sa cueillette, de Marrakech et de tout le reste du Maroc. Quand le moussem de l'olivier arrive, même celui qui ne possède qu'un lopin de terre , peut espérer gagner  un million de centimes pour nourrir sa famille grâce à la cueillette d'olives. Notre problème ? La soif, le manque d'eau. Le jour où la région disposerait d'un barrage, Guercif pouvait satisfaire tout l'Oriental marocain en matière d'olives. »

C'est vers la mi - novembre 2008 au moment du moussem de la cueillette et de la trituration des olives, que nous nous sommes rendu chez les Hawwâra Oulad rahou à Guercif, pour le tournage du documentaire « Au bord de la Moulouya », dont nous publions aujourd'hui, les commentaires agencés autrement pour ce blog.

Abdelkader Mana

15:56 Écrit par elhajthami dans Le couloir de Taza | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : le couloir de taza | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook