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21/10/2010

Vie pastorale

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V i e   P a s t o r a l e en arrière pays de Taza

En haute montagne, aux environs de Bou - Iblân, en arrière pays de Taza, le paysage respire l'agréable fraîcheur de petits sites alpestres. Le montagnard ne parle jamais sans émotion involontaire des opulentes prairies de Meskeddâl, qu'embaume le parfum subtil et puissant d'innombrables fleurs champêtre. En langue berbère de haute montagne,  « Meskeddâl » signifie « répartir les pâturages », il s'applique à l'ensemble des prairies ainsi réparties entre diverses fractions de tribus Bni Waraïn.La montagne, c'est le domaine de la transhumance d'été, qui commence au mois de mai et s'achève avec la tombée des premières neiges, qui oblige les transhumants à descendre vers la plaine. C'est au mois de mai que les bergers avaient commencé de s'installer sur ses plantureux pâturages au vert sombre encore frangé de neige éblouissante.

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". C'est de l'Algérie voisine que provient la grosse  flûte saharienne que pratiquent les transhumants à l'Est du Maroc :

Ô mon cœur n'espère plus la revoir !

Ô mon cœur, épargnes - moi autant de souffrances !

J'ai peur que tu me jettes dans un puits sans fond !

Il erre ainsi perdu par sa douleur... »

Cheïkh Mohamed Jerrar

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Les transhumants quittent la montagne dés les premières neiges

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Le chant du pays se rythme au tambourin

Le rythme  de Bou Iblân scintille au firmament

La danse pastorale  est une  ondulation de la montagne

Hautes sont les cimes, limpides sont les sources

Drues, les  vallées de la montagne à Meskaddal

Où chaque année, on  célèbre les pâturages d'été...

Vertes, les prairies de la plaine d'Azaghar

Où chaque année, On  célèbre les pâturages d'hiver...

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Par petits groupes les transhumants gagnent lentement l'aval et vont planter les piquets de leurs tentes,les uns sur les bords du Melloulou, les autres sur les rives de la Moulouya, ou encore - sur le haut plateau de la Gada de Debdou.Dans cette migration périodique dont l'amplitude n'excède jamais soixante quinze kilomètres, ils sont suivi peu de temps après par la tribu presque toute entière, qui vient hiverner sur ces pâturages de plaine.

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Dés les premières chutes de neige au début d'octobre, on commence de voir les transhumants se répandre dans les steppes de Taïzirt dans la plaine de Tafrata et sur les plateaux de la Gada, que les pluies d'automne ont fait timidement verdoyer. Nous en avons rencontre l'un d'entre eux en train de descendre des cimes enneigees de Bou Iblan avec son troupeau :

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« Je suis de Tamjilt  fraction Bni Smint. Nous descendons maintenant vers Taïzirt. Nous fuyons pluies et neiges. Nous passons cinq mois à Taïzîrt, et à partir de mars on monte vers les pâturages de montagne. Mais maintenant que l'hiver est là, nous descendons vers les pâturages de plaine : cinq mois Là - haut, cinq autres en bas. »

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Le mouvement de la transhumance d'éte et d'hiver

En  hiver, le froid très vif et la neige qui couvre tous les sommets ne permettent plus au transhumant de continuer à vivre en montagne : chassé par les intempéries autant que par les disettes des pâturages, moutons et chèvres doivent descendre en plaine sous la conduite des bergers, à la recherche de l'herbe et d'une température plus clémente. Dés que l'on constate l'appauvrissement du terrain de pacage ou l'assèchement des points d'eau, ou qu'on estime les conditions météorologiques préjudiciables aux troupeaux,

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La pratique des pactes pastoraux est ici monaie courante comme nous l'explique l'éleveur Tahiri Hammou Ben Arafa  :

« En tant qu'éleveur, j'ai conclu un pacte pastoral avec un pâtre. Au terme de la  saison pastorale de six mois, je lui accorde trente six agneaux, en plus de sa provision mensuelle et d'une tente pour la garde du troupeau. Il ne prélève sa part que sur les nouvelles naissances : ce pacte pastoral court du mois de juin de l'année en cours au mois de juin de l'année suivante. Le berger bénéficie en plus du lait, du beurre et des fromages.En raison du manque de troupeau le pacte pastoral n'est plus conclu à 10%, mais seulement à 5% voir à 3%. C'est en cela que consiste le salaire du berger dans la région de Bou Iblân, où la transhumance d'été dure du mois de juin au mois d'octobre, et où la transhumance d'hiver dure du mois de novembre au mois de mars. En ce moment elle se déroule soit dans la région de Guercif soit dans celle de Tahla : ce sont là nos principaux pâturages d'hiver ; nous autres pasteurs - éleveurs de Bou Iblân. »

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les propriétaires se mettent en quête d'autres pâturages où se situera l'emplacement d'un nouveau bivouac. Le 15 novembre, le 20 au plus tard, on se met en route. A mesure que chaque tente est prête, bêtes et gens partent sans ordre et sans autrement tarder. Le convoi s'échelonne dans la montagne.

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La Gaâda de Debdou

La Gada de Debdou domine en falaise la plaine de Tafrata. Cette zone est située dans le prolongement du haut atlas qu'elle raccorde à l'Atlas Saharien d'Algérie, de sorte que par inadvertance, les transhumants marocains se retrouvent parfois de l'autre côté de la frontière, dans la partie de la « meseta Oranaise ».

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 Le transhumant doit fuir la neige et s'abriter du froid de l'hiver, se rapprocher des ses terres, les fumer les ensemencer de maïs, procéder aux emblavures d'automne. Les hommes achèvent à la hâte les labours d'automne, tandis que par petites étapes les Iâzzaben se sont rapprocher des grandes tentes ramenant du  Jbel  les moutons ayant brouter l'herbe fine et recherchée de la montagne.

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Ce sont les bédouins arabes qui ont jadis introduit l'usage de la tente chez les transhumants berbères. L'établissement des grandes tentes dans un bivac nouveau s'accompagne d'un ensemble de pratiques magiques à l'observance desquelles le transhumant attache un grand prix. Une vie nouvelle semble renaître à chaque fois pour lui.

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L'éleveur Ben Omar Qaddour nous décrit ainsi la tente de ces transhumants Zénètes : "La tente de la transhumance est faite de quoi ? Elle est faite de la laine , que les femmes tissent après la tante des moutons. Elle est aussi faite en partie d'alfa. De l'intérieur elle est soulevée par deux poutres faîtières, qui soutiennent la Triga. C'est celle - ci qui est au fondement de la khaïma(la tente du transhumant) . Au milieu un pan appelé Rhal sépare la partie de la tente où vivent les femmes de celle où se trouvent les hommes. Le lieu où se trouve le foyer est appelé Al Handour. A l'extérieur, les bandelettes sont en alfa et la toiture en laine. »

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Des rites président au renouvellement du foyer. Chacun ravive son propre feu et en garde jalousement la flamme. Le souper sera plus abandon que de coutume, et l'hospitalité somptueuse pour ceux qui peuvent égorger un mouton.

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La toiture de la tente est généralement agrémentée sur sa face interne de caractères tifinagh. La première nuit qu'on passe au nouveau bivac, les femmes, avant toute chose, jettent du sel sur le terrain réservé à la tente et à ses dépendances. Elles fumigent avec du charbon à glu (Addad), l'emplacement destiné aux jarres de lait.Ce travail fini, l'une d'elles dit :

« Que Dieu fasse du nouveau bivac un emplacement de paix ! »

Une autre répond :

« Que Dieu vous le procure ! »

Les pasteurs de tous les pays observent des usages identiques.

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Mazza Ben Youssef :"Jadis la forêt couvrait toute cette région, d'essences forestières diverses, tel le thuya, le genévrier, le chêne vert, le pistachier que vous voyez autour de moi. A partir de son fruit on prépare localement une concoction administrée pour les maux de l'estomac. C'est une essence dont les clercs tirent l'ancre dont ils écrivent leurs hagiographies et leurs talismans. »

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La fleur de pistachier dont on se sert pour raviver la mémoire

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Cheïkh Abdellah Yahya :

 « Quand la France a commencé par occuper le Maroc du côté Est, ils se sont d'abord établis à Mahiridja, d'après ce que nous ont raconté nos anciens. Les montagnards de Tamjilt, Bni Smint, Bni Abdellah, Bni Bou Raïs, transhumaient vers cette direction. De la montagne, ils partaient vers la plaine avec leurs tentes et leurs troupeaux. Les deux premières années ils descendaient vers la plaine sans qu'ils soient inquiétés. Mais au bout de la deuxième année de leur établissement à Mahiridja, les troupes françaises les ont appréhendé ainsi que leurs troupeaux[1]. On a emprisonné les gens. On les a enchaîné. Ce qui est resté de la chaîne, on l'a mis au capuchon du burnous de l'un des prisonniers, puis on les a conduit au lieu où se rencontrent les oueds, près de Taourirt. Ils sont restés emprisonnés là pendant deux ans. Parmi ceux qui ont été emprisonnés à Mahiridja, il y avait mon grand père ; on l'appelait Mohamed Ou Ali Yahya et son frère Ali Yahya. De notre douar, il y avait aussi Moummouh Ou Rahhou.Mon grand père est arrivé à s'enfuir en creusant un trou dans le mur de la prison. Il avait laissé derrière lui, son frère et son compagnon : tous deux sont morts en captivité, et ont été ensevelis au cimetière de Mahiridja. Deux autres , également originaires du douar Bni Smint, ont été exécuté sur place : l'un s'appelait Benali Ou Rahhou, et son frère qui s'appelait M'hand Ou Rahhou. Ils ne les ont pas fusillé ; ils les ont exécuté aux sabres. Morts enchaînés.Ils sont restés enterrés la -bas  pendant deux ans.

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Deux villageoises Bni Smint

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Leurs sœurs se sont rendues à la plaine , les ont déterré et ont ramené leurs dépouilles à la montagne. L'une des sœurs s'appelait Rqia Ali, et l'autre Zahra Ali. Elles ont ramené leurs dépouilles encore intactes où elles ont été enterrées à Bni Smint."

M A H I R I D J A

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Vers la fin de 1913, le commandement décide d'installer un poste provisoire à Mahiridja, qui sera achevé, comme l'indique la plaque commémorative, deux ans plus tard, en 1915. Cette mesure a pour but d'interdire les pâturages d'automne du Maârouf des Bni Waraïn.

C'est de la Gada de Debdou que les troupes françaises sont arrivées à la plaine de Tafrata, où ils bâtirent une forteresse à Mahiridja, bloquant ainsi l'accès aux pâturages d'hiver, que les transhumants ont de tout temps effectué vers la plaine.Les Aït Maqbal , et les Aït Bou Illoul ont ainsi perdu plus du tiers de leurs troupeaux du fait du blocus systématique inauguré à leur encontre en 1923 par les avants postes français.

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Dans le programme de l'année 1918, le général Lyautey prévoit des actions des troupes de Taza contre les Bni Waraïn, en particulier contre la très remuante tribu des Bni Bou N'çor.

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L'entrée principale du poste de Mahiridja, achevé en 1915

Tout avait commencé le 30 avril 1911, lorsqu'une petite colonne française, suit la lisière Nord des Hauts Plateaux, de manière à gagner la vallée de la Moulouya. Une autre, forte d'environ 3000 hommes, quitte Taourirt, deux jours plus tard, elle traverse la plaine de Tafrata .

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Au début du printemps 1912, les Bni Waraïn de l'Est se sont installés entre la Moulouya et Debdou, pour interdire aux français la plaine de Tafrata. Un goum est attaqué au cours de la reconnaissance sur la Gada. Les Français concentrent toutes les unités disponibles à Fritissa, en Tafrata.

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Avant de regagner Guercif, le groupe mobile laisse à Mahiridja un détachement auquel incombe le soins d'organiser le nouveau poste desservi par une ligne de chemin de fer pour l'approvisionnement des militaires.

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Malgré un brouillard épais, le capitaine Labordette croit pouvoir descendre avec sa compagnie l'étroite vallée d'Alouana ; il tombe dans une embuscade. Les marocains fusillent les légionnaires à bout portant, en peu de temps, ceux-ci ont 28 tués dont un capitaine et sept blessés dont un lieutenant. Les survivants se replient sur le col avec beaucoup de peine. Dés que la nouvelle parvint au général Gerardot, il expédie en toute hâte les renforts. Les unités de secours escaladent la montagne ; elles recueillent les débris de la compagnie et vont ramasser les morts.

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Les opérations militaires françaises étaient prévus dans les premiers jours d'avril 1923 de façon à précéder la transhumance en montagne des fractions qui sont venus passer l'hier dans la vallée de la Moulouya. De cette façon on empêche tout renforcement des dissidents par des ralliés. Le lieutenant Kasdir note : « Les populations montagnardes auxquelles nous nous sommes heurtés en 1923 sont toujours restes insoumises. Habitués à une vie rude, elles sont résolues farouchement à conserver leur indépendance. Rejetés dans le pays de la neige et du froid, privés de pâturages d'hiver indispensables à leurs troupeaux, éloignés des terrains de culture de la plaine ; ils sont acculés à se soumettre. »

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Les Français parcourent la région avec un groupe de 2300 hommes. Pourtant cela n'intimide pas les Bni Waraïn : le 9 avril 1912, à la pointe du jour, environ 2500 guerriers foncent sur la reconnaissance de Mahiridja. Dés le début le combat prend une allure très violente, l'action s'étend peu à peu sur un fond de huit kilomètres : 200 morts côté marocain et 28 tués côté français. Les Bni Waraïn restent déterminés et très hostiles, et ne songent nullement à dissoudre leur rassemblement à Bou Yaâcoubat. D'ailleurs une Harka des Ghiata et Houwara, formée dans la région Taza - Msoun, vient les appuyer ; en fin avril 1912 ; elle s'installe à Safsafat sur le Melloulou , puis vers le 10 mai 1912, elle atteint la Moulouya à Sidi Bou Jaâfar. Les forces des dissidents s'élèvent alors à environ 4500 combattants.

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Bajghit Qasso : « Un certain Ou Hammou vivait dans une grotte. Quand le colonialisme est arrivé, ils ont voulu négocier sa reddition. Sa réponse fut un niet catégorique à l'occupation. Il est resté retranché obstinément jusqu'à ce que les chrétiens ont fini par le tuer au fond de sa grotte à Bou Iblân »

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Maâzouz Mohamed : « Le pont que vous voyez derrière moi a été édifié par le protectorat. Il était traversé par le train à charbon, qui ne fonctionnait ni au mazout , ni à l'essence, ni à l'électricité. Il reliait Guercif à Midelt. Il n'y avait pas de wagons pour les voyageurs comme aujourd'hui : voyageurs et marchandises étaient à découvert.Mon père, que Dieu ait son âme conduisait la locomotive de ce train. Je me souviens encore quand je l'avais accompagné à Guercif à maintes reprises, à l'allée comme au retour.  Les rails ont été enlevés vers les années quarante ; aux environs de 1938 - 1939.Je m'en souviens comme si c'était aujourd'hui.Au quartier militaire, il y avait la légion française, les Sénégalais et les goumiers. Ils étaient quatre à cinq compagnies. Je me souviens qu'ils étaient restés longtemps par ici. Ils ont quitté les lieux au début des années quarante sans que je sache où ils sont partis. »

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Finalement le relief complexe et fortement acceidenté a joué le rôle de la cinquième colonne dans la lutte de ces montagnards aguerris contre la pénétration coloniale .

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Semi-nomades, semi-sédentaires, certains Bni Wuaraïn de l'Est étaient obligés de composer avec les troupes Françaises pendant l'hiver pour permettre à leurs troupeaux de pâturer dans la plaine  du Melloulou et de la Moulouya. Vaguement ralliés pendant l'hiver, ils deviennent de véritables ennemis pendant l'été et les Djiouch Bni Jellidacène pillaient les populations soumises. La première guerre mondiale, et la guerre du Rif ralentissent l'activité militaire dans la région.

 Abdelkader MANA

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02:37 Écrit par elhajthami dans Le couloir de Taza | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : le couloir de taza, histoire, vie pastorale | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

15/10/2010

La montagne magique

Bou - Iblâne

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La montagne légendaire

 

Souffle !Souffle ô Bou - Iblâne !

Rafraîchit l'air du plat pays

Car la belle n'est pas habituée à une telle chaleur !

Ô Bou - Iblâne ! N'était le froid, j'aurai planté ma tente sur ton sommet !

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Le « Moussa Ou Saleh », le plus haut sommet de Bou-Iblân, culmine à 3215 mètres .

Tout un cycle de légende est lié au massif de Bou-Iblâne, enneigé et inhabitable en hiver.  D'après une vieille légende « Moussa Ou Saleh » habitait Tlemcen. Il possédait un cheval et faisait preuve de prodiges. Un jour une fourmi l'a piqué. Il l'enferma alors dans un étui en roseau avec un grain de blé tendre. Au bout d'un an, elle n'a consommé que l'équivalent de sa tête de fourmi. Quand le Roi de l'époque l'a su, il ordonna séance tenante qu'on fasse venir « Moussa Ou Saleh ». Il s'adressa à ce dernier en ces termes :

- Puisque tu as emprisonné une fourmi innocente , tu seras emprisonné pendant un an !

-  A vos ordres, Roi du Temps : jugez comme bon vous semble ! lui rétorqua « Moussa ou Saleh ».

C'est ainsi qu'il demeura en prison pendant un an. Il demanda à sa mère de bien prendre soin de son cheval, de ne l'engraisser que de blé, en le gardant  à l'ombre, loin du soleil.

Le Roi, lui demande de choisir l'aliment qui sera le sien.

- Le lait dont je peux boire l'eau et manger le fromage..

Un jour, il leur dit :

- Il faudrait qu'on organise une fantasia !

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Au jour de la fête,il sella son beau coursier couleur d'ébène et prit d'assaut les remparts. Observant  son manège un gardien se met à crier :

-  Moussa s'enfuit ! Moussa s'enfuit !

A chaque étape ses poursuivants demandent aux gens :

- Un cavalier, est- il passé par là ?!

Invariablement, on leur répond:

- Nous n'avons vu passer qu'un corbeau portant une laine blanche à son bec !

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Le cavalier blanc continua ainsi sur son coursier noir jusqu'à la grande mosquée de Taza, où il fit ses prières. Il se dirigea ensuite vers le plus haut sommet de la région, où deux fossoyeurs ont déjà creusé une tombe :

- Que faites - vous ? leur demanda -t-il.

- Nous venons de creuser la tombe d'un homme de votre taille,. Veux - tu t'y mettre pour qu'on puisse mesurer si elle lui convient ?

- D'accord ! dit - il, en s'y glissant illico.

Ils lui firent alors sentir une fleur sauvage, et il en mourut d'une mort subite.

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Voilà pourquoi, à en croire la légende, on appela ce sommet du nom de « Moussa Ou Saleh ». Historiquement le nom de « Moussa Ou Saleh » évoque la vieille rivalité entre le roi fatimide de Tlemcen et les Baou Saleh du royaume de Nokour, qui florissait sur la basse Moulouya au 10ème siècle. Cette lutte inégale, n'est sans doute pas étrangère au développement de la légende de « Moussa Ou Saleh »,le plus haut sommet du Moyen Atlas. La renommée laissée par Moussa est telle, que cinq cent ans après sa mort, il se trouve encore cité par Ibn Khaldoun au nombre des illustrations du peuple berbère.

Le chant du pays se rythme au tambourin

Le rythme  de Bou Iblân scintille au firmament

La danse pastorale  est une  ondulation de la montagne

Hautes sont les cimes, limpides sont les sources

Drues, les  vallées de la montagne à Meskaddal

Où chaque année, on  célèbre les pâturages d'été...

Vertes, les prairies de la plaine d'Azaghar

Où chaque année, On  célèbre les pâturages d'hiver...

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Danse de la fraction Bni Waraïn des Bni Smint aux abords de Bou Iblân

La danse chantée  symbolise tout l'art musical berbère et se nomme  Ahidous , chez les Braber. Sa caractéristique est d'être une ligne ondulante. Cela symbolise - t- il l'ondulation des blés ? Ou bien plutôt celle des chaînes des montagnes ? L'Ahidous est la manifestation musicale et chorégraphique la plus complète de la montagne berbère dans le Moyen Atlas. Chez les Bni Waraïn, comme dans le reste du Moyen Atlas, le principal divertissement des adultes réside dans les réunions d'Ahidous, qui se forment parfois les soirs d'été au centre du village. Outre la rangée des participants, il y a le compositeur qui leur souffle le refrain qu'ils répètent indéfiniment, dénommé « Bou- izlân »,« bou-walloun ». Les danseurs esquivent rythmiquement les figures de l'Ahidous, entraînés par les « Bou-walloûn » - panctuant la courte et roque mélopée des notes brèves et sèches de leurs tambourins. Les joueurs se saisissent mutuellement les mains pour s'agiter ensuite en cadence avec frénésie.

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« On ne pratique cet Ahidus , nous dit Raho Qafo qu'à la saison des fêtes qui a lieu aux mois de juillets, août, septembre. Le chant que nous venons d'exécuter fait allusion aux pigeons que nous élevons à la maison et que nous dérobe l'aigle de la montagne. »

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« Notre Ahidus renchérit pour sa part Halbaj Bennacer, appartient à la région Maghraoua - Bni Waraïn. Son ère d'extension englobe Ras - Laksar, Berkine et Bou - Iblâne. Arabisé dans les années cinquante, notre Ahidus allait mourir. Nous l'avons ressuscité dans sa langue d'origine. Symboliquement, il se distingue, par la tenue, la mélodie et le rythme. On se distingue surtout par la langue amazigh. Et même si nous faisons partie du Moyen - Atlas, notre berbère est différent de celui du Moyen - Atlas. Mais l'Ahidus des Maghraoua et du Moyen -Atlas sont identique ou presque. »

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La similitude est frappante entre les belles mosaïques romaines de Volubilis et les tapis Bni Waraïn. Déjà, au 12ème siècle, Al Idrisi signale la qualité des laines produites en ce Moyen Atlas Oriental. Sous le règne du Sultan mérinide Abû Inan, les chroniqueurs vantent la beauté du tapis marocain, comparé aux parterres fleuris. C'est à l'art de tisser que se réduit toute l'éducation de la jeune fille Bni Waraïn . En ce Maroc des hauteurs enneigées, le tapis qui constitue le principal élément du trousseau de la mariée, permet une meilleurs isolation du sol. Au seuil de chaque maison, une air à battre. Au milieu de chaque air à battre, un poteau en bois de cèdre, auquel sont attachés, ânes et mulets, qui piétinent les gerbes en tournant en rond. C'est là, un procédé fort ancien, qu'on retrouve sur les bas-reliefs égyptiens. Pour séparer le bon grain de l'ivraie, on procède à l'aide de fourches au vannage, en lançant en l'air la paille que le vent porte au loin. Pour cette opération, le vent d'Ouest est considéré comme favorable : il n'y a pas de baraka dans les autres vents.

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Les premiers Almohades semblent s'être intéressés à la surveillance du couloir de Taza, séparant le Gharb de l'Oriental, en fondant et entretenant régulièrement le ribât de Taza, considéré alors comme véritable plaque tournante séparant le Maghreb central du Maghreb extrême. C'est là que le pouvoir Béni Mérine fut instauré. Les troupes Almohades furent attaquées et poursuivis à Guercif. Après une telle déroute, la prise de Taza « verrou du Gharb et maintenant sa clé », devenait une simple formalité ouvrant la voie à la prise de Fès par les mérinides au mois d'août 1248. C'est au 12ème siècle que s'amorce l'invasion Zénètienne , s'avançant des Hauts Plateaux et de Figuig vers la Moulouya : c'est ainsi que sont arrivés à l'Est de Taza et dans la basse Moulouya, les Maghraoua, les Bni Waraïn, ainsi que les autres tribus Zénètes, dans le sillage des pasteurs - nomades Béni Mérines. Le  territoire de ce qui reste des Maghraoua, se situe actuellement  entre Taza au nord et le massif de Bou - Iblâne au sud. C'est Ziri Ben Âtia, chef des pasteurs Maghraoua, qui a fondé Oujda, en 994. Les Maghraoua formaient jadis, une principauté alliée aux mérinides, au temps d'Abû Al Hassan et d'Abû Inan, les fondateurs des médersas de Taza et de Fès. Ce qui reste des vestiges Maghraoua, ne constitue qu'une fraction des tribus Zénètes Bni Waraïn. Au 13ème siècle, le territoire des Bni Waraïn, qui s'adonnaient alors au pastoralisme, s'étendait, entre Figuig au Sud et la vallée de la Moulouya au Nord. Mohamed El Mardi nous raconte ainsi comment les Bni Waraïn s'étaient établis d'abord au aux Tankraramt,en haut de Bou Iblân: : "D'après nos anciens, les Bni Waraïn, étaient venus à  l'origine de la région de Figuig et se sont établis au Tankraramt. Après y avoir séjourné là-haut des années et des années, ils ont commencé à se disperser :  Certains en direction de Tazarine, d'autres ont descendu vers Matmata, ou sont restés au sommet de cette montagne. Il y a aussi ceux qui ont pris la direction des Maghraoua ou sont allés s'établir aux rivages du Melloulou. Ils ont essaimé dans toutes les directions. C'est pour cette raison qu'un vieux dicton dit : « celui qui n'est pas passé par Tankraramt n'est pas waraïni. » Et ce n'est à partir du 16ème siècle, qu'on retrouve enfin les Bni Waraïn fixés dans ce Moyen Atlas Oriental, à l'Ouest de Bou - Iblâne, sur l'emplacement précis où vivent encore aujourd'hui leurs descendants.

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Maghraoua au sud de Taza

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Cheikh Abdellah Yahya des Bni Smint

Chez ces anciens pasteurs - nomades, le nom de « Douar », éveille l'idée d'un groupement de tentes disposées en rond. C'est au pied de Bou - Iblâne et de son ancien volcan éteint, que se situe Bni Smint, le village des hauteurs où nous a accueilli Cheïkh Abdellah Yahya :« Douar Bni Smint comprend trois fractions qu'on appelle ainsi : Aït Messaoud, Aït Hammad, Aït Âbboud. D'après ce qu'on nous a toujours raconté, ces trois fractions avaient un ancêtre commun. Trois fractions issues d'un seul ancêtre. Le douar Bni Smint est au pied du mont « Moussa Ou Saleh ». Il se situe entre les monts « Moussa ou Saleh » et Bennacer. Ici la maison a deux niveaux : le rez de chaussée, réservé à l'étable et aux fourrages. Et l'étage réservé à l'habitation et au magasin de stockage des céréales et de la nourriture. Le bétail est parqué dans la partie inférieure de la maison dénommée « Ifri », là où on stock les fourrages. Dans la partie supérieure se trouve Thanout, où on stock les grains, et Akham où se trouve la cuisine et la chambre où vit la famille. On donne à cette partie habitable de la maison le même nom qu'on donne à la tente de la transhumance. On accède par un étroit et rude escalier aux chambres de l'étage : l'une sert de cuisine, l'autre de grenier, et une troisième, Tamsrît, où l'on reçoit les invités. »

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Chez les Bni Waraïn, Taddart est le nom habituel de la maison. L'Arabe de la période anté - islamique employait déjà dar avec le sens de « bivouac ». L'importation du mot en Afrique serait le fait de tribus bédouines. Les Zénètes l'auraient adopté et transmis à leur tour aux populations transhumantes.

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Si ailleurs, dans le sud marocain notamment, l'air à batte est établi à la lisière des champs, ici, pour des raisons de sécurité, il est au seuil des habitations.C'est la Jmaâ qui nomme le fqih, chargé de recevoir et de conserver en dépôt les revenus de la mosquée. Située à la lisière du village, la vieille mosquée Bni Smint, est entièrement construite en bois de cèdre. Ce n'est pas uniquement un lieu de prières. Elle est tout à la fois une petite école, un refuge pour les passager, la demeure du taleb. Elle est dédiée à Sidna Jibril, l'archange Gabriel : c'est le patron des transhumants comme Sidi Bel Abbès est le patron des cultivateurs. Si pauvre qu'elle paraisse, elle possède des biens, un trésor, que gère un moqadam. Elle a ses troupeaux, ses terres, dont le produit permet de pourvoir à son entretien, à la rétribution du taleb. C'est sur ses fonds qu'on rachetait jadis au guerrier le cheval qu'il avait perdu au combat, et qu'on s'armait pour le jihad , et qu'aujourd'hui encore on fait des avances au cultivateur qui manque de semences, au pasteur dont la maladie a décimé le troupeau, au malheureux qu'une infortune a touché.

La vieille mosquée en bois de cèdre des Bni Smint

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La vieille mosquée en bois de cèdre des Bni Smint

Le transhumant considère la mosquée comme le « pieu du douar », son soutient moral et spirituel. Le proscrit est assuré de trouver avec un refuge, sa subsistance, et le pauvre, à sa mort, un linceul et des funérailles décentes. Elle l'avertit de tout danger, et à ce titre, il la révère autant qu'il la craint.

En plus des terrains de culture à la lisière du douar, les Bni Smint, disposent là haut au Jbal Jarrah, de terrain de parcours pour tout le monde, ainsi que des terrains de culture pour chacun. Quand arrive le froid, ils quittent la tente pastorale pour la maison en pisée. Et dés les prémices des premières neiges, ils se replient à nouveau sur leur douar, où commencent les préparatifs de la transhumance d'hiver vers la plaine, où seront entamés les labours.

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Selon la légende de la vieille bergère pétrifiée de froid avec ses vaux, pour avoir transgresser le tabou pastoral, en renversant le cycle naturel de la transhumance d'hiver:

La vieille bergère se déplaçait avec son troupeau vers la steppe de Taïzirt. En compagne de son mari, de son berger et de ses nombreux vaux. Quand les sept nuits froides de Hyân sont arrivées, elle dit à son mari :

-Il faut qu'on monte en haute montagne.(où ils possédaient une bergerie au Moussa Ou Saleh).

-On ne quittera ici, que si le grain est mûr, lui répond son mari.

Elle ordonne alors au berger :

- Vas en pâture, sur les terres de laboure, et ramènes - moi une vieille épis pour que je puisse faire croire à mon mari que la période des moissons est déjà là, et que nous devons entreprendre la transhumance d'été.

Après avoir  tâté la vieille épis, son aveugle de mari, il  lui dit :

- Il est temps en effet de transhumer au « Moussa Ou Saleh ».

Au bout d'un séjour de trois jours  là -haut,  Hyân est allé voir mars :

- Ô mars, toi qui préside au printemps ! Peux - tu me prêter trois jours de mauvaises augures, pour que j'en pétrifie la vieille ogresses ?!

C'est ainsi que mars avait accordé à Hyân, les trois jours de mauvaises augures, qui pétrifièrent, la vieille , son mari, son berger, et ses vaux.

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Le vieux genevrier du village Bni Smit, dénommé Taqqa en berbère

Un vieux genévrier est au cœur de ce village des hauteurs « Au milieu du douar, il y a un arbre dénommé « Taqqa » en berbère, nous explique notre hôte. Cet arbre a toujours été au milieu du douar, peut - être depuis quatre, cinq, voir six siècles au moins. C'est un arbre destiné aux prières de la petite et de la grande fête. Il est toujours au centre de la vie sociale du douar. » C'est sous ce genévrier millénaire, arbre à palabre consacré par les usages séculaires que la Jmaâ décidait aussi bien des affaires courantes que de la guerre.

Ces transhumants sont de farouches guerriers qui s'étaient toujours opposés aux envahisseurs venus de l'Est, les hordes hilaliennes et Maqil du Moyen Âge, les incursions turcs et au tout début du 20ème siècle, l'arrivée des colonisateurs Français comme le relate notre hôte Cheïkh Abdellah Yahya :« Il y avait un homme du nom de Mohamed Ou Qasso, originaire de douar Tighza, qui s'était réfugié ici, à l'arrivée des Français. Il a résidé ici avec sa famille jusqu'à la prise de Tamjilt. Une fois montés jusqu'ici, les soldats français ont commencé à égorger et à dilapider le troupeau du vieil homme sous ses propres yeux. Ses enfants prirent la fuite vers le Sahara. D'après ce que nous ont raconté les témoins oculaires, en partant d'ici, ils affrontèrent les français sur leur chemin à Oulad Ali. De là, ils continuèrent en direction du Sahara, mais à nouveau les français leur barrèrent la route au lieu dit « Tazegzaout », au djebel Aïachi : des indicateurs les ont trahi. Encerclés par l'armée françaises, ils ont lutté jusqu'à la mort. Les femmes et les enfants qui ont survécu, les français les ont ramené ici à Berkine. »

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Le cèdre de l'Atlas, espèce essentiellement montagnarde, garnît le sommet de Bou - Iblâne à plus de 2000 mètres d'altitude.

Arbre au port majestueux et à la vie séculaire, le cèdre peut atteindre jusqu'à 40 mètres de hauteur et 2 à 3 mètres de circonférence.

Arbre millénaire sur montagne légendaire, le cèdre est le symbole de l'éternelle jeunesse, puisqu'on en trouve des spécimens qui datent de 1200 ans. En raison de sa longévité, les anneaux transversaux du cèdre - qui témoignent des années sèches et des années humides -  ont permis aux chercheurs d'établir une chronologie pour mille ans d'histoire climatique du Maroc.

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Au Maroc, l'utilisation du bois de cèdre, comme matériel de construction et de décoration, remonte à l'introduction de l'art islamique avec les Idrissides, comme en témoignes les mosquées Qaraouyne et Al Andalous de Fès. La sculpture et la gravure sur cèdre, éclosent  à Marrakech avec la dynastie Almoravide. Mais il a fallu attendre le 13ème siècle et les mérinides, venus des steppes orientales, pour que le travail sculpté du bois de cèdre devienne un art à part entière. De nombreux éléments de boiserie, peints, sculptés , ou tournés, ornent mosquées, medersa, palais...Le travail du bois de cèdre à usage monumental attesté dès l'époque Idrisside, prend un développement considérable sous la dynastie mérinide. C'est l'époque des médersa, ces collèges du Moyen - Âge : c'est la période où triomphe l'art du bois de cèdre sculpté et peint.Il ne reste que îlots, de belles forêts de cèdres, qui s'étendaient autrefois aux alentours des hauts sommets : ils ont été décimés par des incendies dont certains sont restés légendaires. Selon une vieille légende qu'on nous raconte dans ces hauteurs de Bou Iblan, ; c'était un ogre qui aurait incendié la forêt de cèdre. Cet ogre vivait dans une grotte. Les gens de l'époque ne parvenaient pas à l'en déloger. Ils l'avaient affronté avec des armes. En vain. Ils décidèrent alors de recoure au feu. Asphyxié, il fut contraint de quitter son repère. En sortant le feu a pris dans sa fourrure. Et c'est ainsi qu'il mit le feu à la cédraie en période estivale. C'est ce qu'on nous raconte pour expliquer la dissémination de la cédraie de Bou - Iblâne.

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A mesure que l'on s'élève, on continue de voir jusqu'à 2000 mètres environ, le chêne vert mélangé à l'if, au genévrier oxycèdre - Taqqa en berbère - et la sabine thurifère - Awal en berbère - puis cette essence disparaît, et elle est remplacée par le cèdre : idîl en berbère.

Abdelkader Mana

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03/10/2010

La Tache de Taza

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La réduction de la « Tache de Taza »

1923 - 1926

Fait exceptionnel au Moyen Atlas : la chaîne de Bou Iblan forme, dans sa partie centrale, une véritable séparation, isolant nettement de la région de Taza, le pays des Marmoucha: un pays montagneux, imposant par ses dimensions, son altitude, et par le nombre et la valeur des ses farouches guerriers Marmoucha,  décidés à se défendre à outrance. « Tribu obstinée entre toutes de la montagne berbère, n'entendront pour finir, que la seule voix qui répond au bouillonnement de leur cœur ; l'appel au combat, souligne le chef des opérations militaires. L'attachement à leur indépendance l'emporte toujours. Et lorsque nos colonnes s'apprêtent à lever le camp, pour pénétrer dans le pays insoumis, c'est chaque fois l'âme guerrière de ces tribus qui a le dernier mot. »

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Bou Iblan

Dans la région de Marrakech, le développement de la politique coloniale s'appuyant sur les « Grands Caïds » - Glaoui, Goundafi, Mtouggui - a  permis de limiter les opérations militaires au strict minimum. Dans le Nord, à la limite des trois régions  de Taza, Fès et Meknès, la zone montagneuse insoumise du Moyen Atlas appelée « tache de Taza » a nécessité la mise en œuvre de la majorité des moyens militaires dont a disposé la France au Maroc en 1923.

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Ahmed Mezred

« Je suis né au mois de mars de 1926, nous dit Ahmed Mezred, notre hôte.L'année où la France a attaqué Tamghilt et Talzemt. Ils avaient déjà attaqué en 1925, mais on les a repoussé. Ils sont revenus à la montagne. L'occupation eut lieu en 1926. Sept bataillons s'étaient retrouvés à Meskeddal. Un bataillon est arrivé d'Ahermoummou, un autre par Meghraoua, un troisième par Berkine, un quatrième par Oulad Ali, un cinquième par Immouzer des Marmoucha , et un autre par Aderj. Ils eurent des accrochages avec la population et brûlèrent Talzemt. Ils ont brûlé toutes les maisons. Les gens se sont enfuis dans la montagne. Certains sont morts, d'autres ont pu revenir. Ils sont passés par Tamghilt pour rentrer à Talzemt. C'est là qu'avaient converger tous les bataillons. Après quoi, tout le pays était occupé. »

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Garouaou

  Le Moyen Atlas et l'Atlas central préoccupaient particulièrement le résident général Lyautey et ses collaborateurs. Les opérations des années 1920 à 1923 leur furent entièrement consacrées, sans que toutefois la dissidence s'effondrât. Jusqu'en 1926, la région montagneuse située au sud de Taza et s'étendant jusqu'à la haute plaine du Guigou restait dissidente, sous le nom de Tache de Taza.Le programme des opérations militaires de 1923, ne consistait pas à occuper intégralement toute la Tache de Taza. Mais à n'y laisser, comme bled inviolé que des îlots où les conditions d'existence pour les familles et les troupeaux, et les besoins de relations entre tribus, rendus impossibles par le réseau d'ouvrages militaires, devront fatalement, amener la soumission de ces irréductibles Marmoucha. 

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La Tache de Taza

Dans son ouvrage sur « la pacification de l'Atlas central », le général Guillaume, note que « les communications avec l'Algérie ne peuvent être garanties, tant que le Moyen Atlas, au sud de Taza, n'est pas maîtrisé. »Il s'agissait pour Lyautey, d'empêcher à tout prix, la jonction entre les groupes insoumis les plus importants de la Tache de Taza, en particulier les Bni Waraïn et les Marmoucha, et la dissidence rifaine d'Abd El Krim. En 1925 Abd el-krim activait sa propagande auprès des Beni Waraïn au Sud de Taza, auquel il envoyait même des subsides en argent pour les encourager à  monter une attaque sur le front Beni Waraïn en liaison avec l'offensive déclenchée par les Rifains sur le Haut Leben. Des essais de harka sont tentés par Sidi Raho, Sidi Ali Seghrouchni, et Sidi Mohamed Belgacem Azeroual, mais s'ils trouvent quelques échos dans le Nord, les efforts échouent dans le Sud où le Tichoukt(10 juillet 1925), le Tagrout N'Aït Saïd(20 août) sont occupés.

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Boukamouj

La valée de Tamghilt, attaquée à deux reprises par les troupes coloniales: en 1923 et en 1926.Cette valée porte le nom de loued Tamghilt qui la traverse après avoir passé par la cuvette de Talzemt

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Au loin le djebel Ayad où eurent lieu d'importants cambats en 1925

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Les combats de mont Bou Kamouj qui finirent en 1923 en une confrontation brutale avec les Marmoucha dans la vallée de Tamghilt 

 
 Au mois de juillet 1923, le groupe mobile de Meknès, fort de 13 bataillons, se porte directement à l'attaque des murettes construites par les Marmoucha sur le Djebel Bou Khamoudj. Il s'agit de séparer cette tribu de celle des Aït Seghrouchen.Le groupe mobile comporte deux colonnes et un énorme convoi de 3000 mulets.  Cette lourde formation ne peut évoluer que dans la plaine de la Sghina, qui s'étale entre deux massifs et aboutit à la ride montagne de Bou Khamoudj.Quand l'infanterie installe son bivouac, le 21 juillet 1923, chez les Aït Messaâd, les Marmoucha accourent en nombre, s'embusquent derrière les crêtes et criblent les légionnaires de balles. Le feu ne cesse qu'aux aux approches de la nuit. Les légionnaires déplorent 5 tués et 18 blessés.

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L'agitation suit les rythmes des mouvements rifains Un ancien spahi Bou Nouala, qui a déserté chez les Beni Waraïn insoumis se fait reconnaître comme chef par eux, leur désigne des caïds sans que son autorité semble dépasser l'arrêt de Bou Iblane au Sud tandis que vers le Nord de nombreux émissaires assurent la liaison avec le Rif.A la mort de Bou Nouala tué en mars 1925, on distingue dans la Tache de Taza :

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a) Le front des Beni Wuaraïn de l'Est(Beni Jellidassen) qui suscita sous l'intense propagande d'Abd el krim, la formation de Harkas chez les Ahl Taïda et dans les Hautes vallées des oueds Beni Bou Nçor et Beni Mansour.

b) Le front de Tichoukt devant lequel, les dissidents Aït Seghrouchen, enserrés par un système de postes qui entourent complètement la montagne tendent à se désagréger.

c) Le front des Mamoucha ou groupe dissident des Oulad Ali et des Beni Hassan reste intact. Après la disparition du chérif Moulay M'hamed Seghrouchni mort le 23 janvier 1925, son deuxième fils, Sidi Akka, hérita de sa « baraka », mais non de son  influence et n'a pu empêcher Moulay Abdellah, dernier fils de Moulay M'hamed, de faire sa soumission le 15 février.

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Juste après la reddition d'Abd El Krim, le 20 mai 1926, l'aviation française a effectué plusieurs bombardements dans la région de Tichoukt : la reddition d'Abd el Krim, a permis d'envisager, dés la fin de mai, d'achever les opérations commencées depuis 1923 dans la Tache de Taza, qui représente un pays montagneux, imposant par ses dimensions, son altitude et par le nombre et la valeur de ses guerriers : 3000 Bni Waraïn et Marmoucha, guerriers farouches, sont décidés à se défendre à outrance.

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 C'est seulement en 1926, après l'écroulement d'Abd-el-krim que la France se trouve en mesure de réduire la « Tache de Taza » avec de gros effectifs. Mais le plus dur restait à faire. La chaîne de Bou - Iblane a, en effet, une longueur d'environ soixante-dix kilomètres sur soixante de largeur, avec des altitudes dépassant 2000 mètres ; elle est défendue par 3000 guerriers bien déterminés. L'opération principale  doit être réalisée par deux colonnes , qui partiront de Berkine et d'Imouzzer pour se rejoindre sur le plateau de Meskedal.

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Non loin de la cuvette de Talzemt se trouve la très belle forêt de Taffert peuplée de cèdres presque purs. On ne peut douter que ce Moyen Atlas oriental a été couvert d'admirables forêts que les pasteurs ont incendié. On a le cœur serré devant cette dévastation insensée qui, se traduit rapidement par un dessèchement du sol et la ruine du tapis végétal. Ainsi dépouillée de sa parure de forêt, la haute montagne apparaît de loin, très désolée.

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Cédraie de Tafferte

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Aux abords de Meskeddal, Ahmed Mezred nous décrit en vieux pâtre la transhumance dans la tache de Taza :

 « Nous autres, fraction Aït Ben Aïssa des Marmoucha, nous transhumons l'été à Meskeddal, au mont Guerrouaou et à Talzemt. Et l'hiver, on s'en va vers les pâturages d'Ahermemmou, du Manzal, et des Bni Yazgha. On va aussi à Tahla, chez les Bni Waraïn et à Matmata. On transhume dans tous ces endroits. A l'époque il n'y avait pas de camions, les transhumants se déplaçaient à pieds durant huit à dix jours avec leurs troupeaux, leurs bêtes de somme et leurs tentes. Ils transportaient leur blé et leur fourrage. Les uns se dirigeaient vers l'Ouest, les autres vers l'Est. D'autres vont vers la Moulouya. C'est ainsi que se déroulait la transhumance. Maintenant le transport se fait par camions. Dés que le climat se réchauffe, on monte là haut et chacun rejoint son pâquis : les pâturages des Aït Abdellah s'étendent de tel endroit à tel autre. Ceux des Aït Ben Aïssa, de tel autre borne à telle autre. Voici les pâturages des Aït Lahcen et voilà ceux des Bni Smint. Ou encore ceux des Aït Bou Illoul, des Aït Lahcen et d'Almis. Chacun dispose de son propre pâturage, d'une superficie clairement délimitée. Et quand quelqu'un manque de quoi que ce soit, nous l'accueillons s'il vient chez nous. »

Meskeddal, haut lieu de la transhumance d'été des Marmoucha et des Bni Waraïn

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Meskedal est un immense plateau sur les pentes Ouest de Bou Iblane, qui jouit d'un climat tempéré en toutes saisons ; herbeux et bien arrosé, il est le lieu d'élection des transhumants montagnards, leur capital.

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Comme partout ailleurs en haute montagne , en occupant Meskeddal par deux colonnes qui s'y sont retrouvées en 1926, l'une en provenance de Berkine à l'Est et l'autre en provenance d'Immouzer des Marmoucha à l'Oust; la stratégie de l'état major établi à Meknès que dirigeait alors le général Poymerau,visait à interrompre le mouvement saisonnier  pleine - montagne si vital pour la survie des transhumants Marmoucha - Bni Waraïne.

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Habitat de pasteurs-nomade sur les platureux paquis de Mekeddal

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Ainsi donc tout le monde se retrouve pour la transhumance d’été à Meskeddal et à Guerrouaou et quand l’hiver arrive, les uns descendent vers les bord de la Moulouya à l’Est de Bou Iblan et les autre se dirigent vers les bords de l’Innaouen et de l’oued Sebou, à l'Ouest de cette même montagne.

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A cette altitude, on s'imagine que des massifs de plus de trois mille mètres devaient déterminer d'abondantes précipitations. Cette illusion est fortifiée par la vue de la neige qui couvre les cimes pendant plusieurs mois. Il semble en réalité que les conditions soient plus favorables à la conservation de la neige tombée, qu'à la fréquence des chutes. Ainsi s'explique la dure situation des Marmoucha dont les troupeaux doivent quitter le pays en hiver, parce qu'il fait trop froid, et  en été parce qu'il fait trop sec.

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En 1926, la cuvette de Talzemt fut l'objet d'attaques convergentes de sept bataillons français, à travers les cols de Tizi Ouidal, de Tizi N'tmalout, de Tizi N'Taïda et de Tizi N'trial. A la lisière des Bni Waraïn et des Marmoucha, Talzemt occupe en effet un verrou stratégique, par où transite obligatoirement toute transhumance. C'est une brèche transversale où confluent trois oueds pour former la rivière principale de Tamghilt. Ces troupes qui visaient ainsi à réduire cette ultime poche de résistance de la Tache de Taza, provenaient principalement de Meknès, mais aussi de Taza et de Guercif.   Trois colonnes combinées, ayant pour objectif les trois points vitaux de la dissidence, sont organisées et entrent en action dés le 7 juillet 1926. Vingt jours de luttes acharnées et d'efforts opiniâtres rendent les français maîtres de la grande Tache dissidente de Taza.

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  Quand la France avait occupé ce pays, elle y tait arrivé avec le caïd Âmar. Ils étaient arrivés ici par Meskeddal et par Guerouaou. C'est eux qui avaient brûlé toutes les maisons de Talzemt. Comment ?

A cause des luttes intertribales qui remontent à avant l'arrivée de la France : les nôtres avaient alors attaqué la tribu du caïd Âmar, en brûlant ses maisons. Ils étaient revenus de cette expédition punitive avec du miel, du beurre ronce, des sacrifices, des troupeaux, et avaient tué des gens là bas. Et quand ceux-ci étaient arrivés ici dans le sillage de l'armée française, ils s'étaient dits : nous aussi on va ruiner leurs demeures. C'est ainsi qu'ils avaient brûlé tous nos maisons. Puis est venu à Tizi Ouidal, le caïd Ali Ou Assou des Alaham. C'est là qu'eut lieu la bataille. Le colonel était à la montagne de Tamghilt, avec ses tanks et son arsenal .Un déserteur marocain nous a rejoint ici, en venant de je ne sais où ; d'Ifran, de Meknès, ou de Fès ? Il avait déserté l'armée française, pour venir combattre du côté de la dissidence avec son fusil mitrailleuse. C'est lui qui a fait tomber l'avion. Il s'est attaqué au colonel et à l'armée française. Il tirait sur eux au mont Tamghilt. Il tuait 15 à 20 soldats ennemis d'un coup. Une centaine. Jusqu'à ce que périrent 3000 soldats.

Tous ceux qui étaient venus d'Ahermoummou, de Maghraoua, d'Oulad Ali, d'Immouzer des Marmoucha, d'Aderj et de Berkin, se sont retrouvés ici, d'où les nôtres s'étaient enfuis vers la montagne. Ils avaient tout emporter avec eux dans cette montagne : leurs moissons, leurs tentes, leurs réserves de beurre ronce. Ils sont parti là bas sur ce piton qu'on appelle le rocher roux. Ils s'étaient réfugiés là bas jusqu'à ce qu'à l'occupation de tout le pays par la France.

Ce qui est mort est mort, et ce qui est blessé est blessé. Mon grand père figurait parmi les blessés. A l'époque, ils ont voulu le nommer caïd. Les Français étaient bien renseignés sur la situation à Marmoucha. Dés leur arrive, ils ont dit : qui devrons nous nommer caïd à Talzemt ? On leur a répondu : un tel, parce qu'il est le plus connu de sa communauté.  On amena alors grand père qui était blessé, dans la seule pièce qui n'a pas été brûlée. C'est là que le médecin venait le soigner sur ordre du colonel.. En attendant son rétablissement l'intérim fut assuré par un dénommé Moulay Lahcen. Dés son rétablissement, il était devenu Cheikh. Voilà tout ce que je peux vous dire sur la bataille.

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Il existe encore dans la cuvette de Talzemt, une bombe vestige des combats de 1926. Mais la décision de réduire la Tache de Taza, remonte à 1923. En effet, au mois de juillet de 1923, le général Poeymirau  passe à l'attaque dans le sud de la Tache de Taza. Jusqu'alors le poids de la lutte a principalement pesé sur les Aït Seghrouchen. Les Marmoucha, moins éprouvés, paraissent hésitants, néanmoins, ils ne cèderont pas.L'offensive est déclenchée le 17 juillet 1923. Les bataillons de légion occupent les crêtes, mais les escarmouches avec les Marmoucha dégénèrent peu à peu en un violent corps à corps. La légion avance avec peine sous un feu nourri. Au piton d'Issouka, les légionnaires eurent 31 tués et 101 blessés dont 6 officiers.

Cuvette de Talzemt, assise territoriale des Aït Benaïssa, fraction Marmoucha

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Quand la France est arrive, les tribus s'entredéchiraient entre elles. Quand les Marmoucha transhumaient, ils étaient attaqués par les autres tribus. En plus tous ceux qui fuyaient l'avancée de l'armée Française convergeaient ici, en venant de toutes les directions : de l'ouest, de l'est, du nord, du sud, parce que cette montagne était le dernier réduit de la dissidence en 1926. Ils s'étaient retrouver ici à Tizi Ouidal, où se déroulèrent les plus violents combats. Il y avait les Aït Seghrouchen, les Marmoucha, les Oulad Ali, les gens de Berkine qui fuyaient l'avancée des troupes Françaises. Il y avait ceux d'Ahermoummou, des Maghraoua et des Beni Waraïn. Et il y avait les Bni Âllaham. Tous se sont retrouvés ici. Alors, ceux qui étaient alliés à la France attaquaient ceux qui étaient avec la dissidence. Les Bni Âllaham avec à leur tête le caïd Ali Ou Assou s'étaient alliés à la France. Les combats eurent lieu à Tizi Ouidal. La soldatesque des Bni Âllaham alliés aux troupes Françaises, ont réquisitionné les troupeaux de mon père et de mon grand père : quelques quatre cent têtes d'ovins. Ils ont arrêté mon père au col de Tamghilt, et ont emporté avec eux son élevage. Ce n'est qu'une fois le pays occupé par la France qu'on lui a rendu trois cent à quatre cent ovins à titre de compensation, de ce que les militaires lui avaient dérobé.

L'encerclement d'Abadie et de ses troupes

 En 1925, les français ont attaqué les Aït Wallagh. Sont venus en renfort à ces derniers, les Aït Benaïssa, et les Aït Youb. La bataille s'est déroulée de nuit . Au levée du jour, on a desserrer l'étau et inonder d'eau, le village encerclé, pour qu'à leur sortie les assiégés s'embourbent. Dés qu'ils ont tenté de fuir la bataille a repris de plus belle. Ils ont tué quelques 120 goums de l'armée française. Ainsi que le lieutenant Abadie. Après quoi ils sont remontés au mont Ayad. 

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On peut lire sur la stèle commémorative :

« Le 10 septembre 1925, au combat du Djebel Ayad, cerné dans un ksar avec un groupe de partisans et Mokhaznis, le lieutenant ABADIE, a sacrifié sa vie pour sauver celle des hommes de son groupe. Officier d'une bravoure légendaire, maintes fois manifestée depuis trois ans, dans tous les combats du sud de la Tache de Taza. »

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C'est dans ce village que le lieutenant Abadie et ses hommes, s'étaient retranchés, tandis que les Marmoucha les encerclaient. On voit encore les traces des combats sur les murs du hameau.

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Les Aït Benaïssa sont arrivés en brandissant un drapeau. En arrivant ici ils sommèrent Lieutenant Abadie en lui disant de quitter la maison des gens. Mais il ne voulait pas sortir. Les goums lui dirent que ces gens ne vont pas tirer, on va se diriger vers Dar Bouâzza, en emportant avec nous le bois et tout le reste. Ils n'ont plus de quoi tirer sur nous. Ils vont même nous immoler un taureau en guise de soumission. Mais eux ont refusé la réconciliation. Une fois passée la nuit, ils ont lâché les eaux le lendemain matin. Les goums dirent à leur lieutenant Abadie : essaie de sortir pour vérifier s'ils sont toujours là. Mais eux se cachaient. Il est effectivement sorti sans qu'ils lui tirent dessus. Une fois qu'il a traversé de l'autre côté, il tira une détonation comme signale pour que les autres sortent aussi. Dés que les goums ont quitté leur cachette, on se mit alors à leur tirer dessus. Rares sont ceux qui ont pu s'échapper. Ils ont tué Abadie et ont brûlé sa dépouille ici, comme c'est indiqué dans la stèle commémorative qu'on vient de voir.

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Le vieux Ben Aïssa se souvient :

« Que Dieu bénisse cette femme qui a allumé le bûcher et jeté dans la marmite, les grenades et les munitions, qui ont explosés au milieu de la soldatesque les obligeant à sortir dehors. Il y en a qui ont été blessés ou touchés. Ce n'est qu'après l'explosion qu'ils ont  tué cette femme courageuse. En sortant dehors, ils se sont embourbés dans la boue et l'eau lâchée par la dissidence. Ne pouvant plus fuir, ils ont été massacré : peu d'entre eux ont pu rejoindre là haut, leur caserne. Le lieutenant Abadie était fait prisonnier. C'est quelqu'un de chez nous à Talzemt qui l'avait tué. Il s'agit d'un certain Âssou. C'est lui qui avait emporté avec lui son fusil au manche couvert d'argent. Quand la France est arrivée, il l'ont amené jusqu'ici et l'ont fusillé. Il est originaire de chez nous à Talzemt, du hameau des Aït Mahraz. »

 

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Partout en Atlas, le tombourin sert de modulateur de voix

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Au soir , devant l'étable en bois de cèdre de notre hôte Ahmed Mezred, l'Amdyaz (chansonnier) des Marmoucha improvisa une chanson qui raconte l'encerclement et la mise à mort d'Abadie par ce fusil a la crosse d'argent ainsi que cette femme Marmoucha qui a jeté dans la marmite, les grenades et les munitions, qui ont explosés au milieu de la soldatesque les obligeant à déguérpir de son village... 

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L'oued Tamghilt qui prolonge celui de Meskeddal, traverse la fraction Marmoucha des Aït Mama, et se déverse dans l'oued Sebou. C'est là qu'avait eu lieu la bataille avec la France : il y eu des morts et des prisonniers. Les nationalistes ont lutté. Les français sont revenus et ont établi trois ouvrages militaires : l'un à Talzemt, un autre à Immouzer des Marmoucha et un troisième à Almis Marmoucha. Trois ouvrages. Ils nous ont colonisé jusqu'en 1955, l'année où ils ont té attaqué par l'Armée de Libération, et enfin la France est partie.Les Français qui avaient réussi en 1926, d'empêcher la jonction entre  dissidence rifaine et celle de la Tache de Taza, ont échoué à le faire à la veille de l'indépendance du Maroc. En effet, le soulèvement simultané du 2 octobre 1955, chez les Gzenaya du Rif et les Marmoucha, avait précipité l'indépendance du Maroc.

Abdelkader MANA 

09:39 Écrit par elhajthami dans Le couloir de Taza | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : le couloir de taza, histoire, moyen atlas oriental, marmoucha | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook