08/06/2011
Poème de la mer
Poème de la mer
Poème du Raïs Belaïd, pionnier de l’amerg qui a introduit le rebab
(Traduction de Saïd Khalil, faculté des lettres et sciences humaines, Agadir)
Ceci est un poème que je viens d’écrire
Poème à propos de tassort (Essaouira) et de ceux qui s’y promènent.
Ô Sidi Mogdoul ! Je t’implore !
Ne me laisse jamais seul au milieu des mers.
Ô tassort(Essaouira) ! Combien ta mer est dangereuse !
Si nombreux sont ceux qui y sont disparu !
Toute ta mer n’est autre que vagues immenses, insurmontables.
Montagnes au sein même des flots !
Sont pris pour néant, ceux, malheureux qui y voguent.
Ce bout de monde de tassort à Agadir
N’est autre qu’un monde des ténèbres
Seule l’eau y prend parole.
Ce bout de monde de tassort à Agadir,
Qui d’autre aurait l’audace de le traverser
Si ce n’est l’aventurier insensé ?
Cette mer emporta bateaux et ce qui s’y trouvait,
Cette mer emporta barque et poisson.
Elle mit son ancre en pièce pour l’ensabler.
De même, matelots qui s’y trouvaient ont tous péri.
Laissant derrière eux, épouse et femmes seules
Faire faces seules, à leur propre sort.
Ô ensorcelé par les charmes de tassort !
Amoureux de plage et de ceux qui s’y baladent,
Des allées, et de ceux qui s’y promènent,
Ne prends plus jamais le large !
Vois-tu ces navires entrants, que tu prendrais pour le retour à midi,
D’un troupeau de petit bétail ?
Le début d’une tempête peut les disperser toutes et les faire disparaître
Seraient alors réduits à néant tous ceux malheureux qui s’y trouvaient !
Eau de mer et vie ne vont point de pair,
Et point ne tient à la vie celui qui s’y attache encore.
Mieux vaut pour lui, commercer « même » de la menthe,
Se contenter du bonheur d’un pain d’orge au repas,
Ne pas s’empresser de faire fortune
Et prendre garde à errer, de crainte enfin de s’égarer.
Poème du Raïs Belaïd, pionnier de l’amerg qui a introduit le rebab
(Traduction de Saïd Khalil, faculté des lettres et sciences humaines, Agadir)
Eloge à mon Rebab
Du Raïs Aïsar du pays haha
Poéme traduit du berbère par Abdelkader Mana assisté de Raja Mohamed
Je te dépose ô Rebab puisque personne ne veut plus de toi
Et si tu es fatigué, moi aussi je n’en peux mais
Le banjo et le luth t’ont privé de ton sel
Ta déchéance retombe finalement sur moi
A force de t’accompagner aux fêtes champêtres:
Je n’ai pu être parmi les miens ne serais-ce qu’une semaine
Seigneur ! Sauvez la langue tachelhit de son état déplorable !
Où sont passés ceux avec qui, j’ai la parole en partage ?
Je te dépose ô Rebab puisque personne ne veut plus de toi
Et si tu es fatigué, moi aussi je n’en peux mais
Je suis le parieur qui ne perd jamais
Si le sommeil vient à nous manquer
On peut toujours récupérer
Et si je meurs, c’est cette parole que je vous lègue
Je la transcris dans les livres
S’il y a quelqu’un pour la lire
S’il n’existe pas aujourd’hui
Il existera demain
Celui qui la lira priera pour ma miséricorde
Il saura alors quels effrois m'ont fait périr
Je te dépose ô Rebab puisque personne ne veut plus de toi
Et si tu es fatigué, moi aussi je n’en peux mais
Seigneur ! Venez au secours de ma pauvre pirogue
Car nous ne saurons nager,
Au milieu de la houle qui s’avance à vive allure
Et des eaux agitées
Si nos mains et nos pieds en viennent à geler
De quel secours pouvons-nous, nous prévaloir,
Avant que les poissons ne nous dévorent?
Dieu seul voit clairement en ces profondeurs insondables
Mon Dieu venez donc au secours de cet orphelin
Car la mère qui prodiguait consolations n’est plus
C’est désormais à toi seul qu’il s’en remet.
Je te dépose ô Ribab puisque personne ne veut plus de toi
Et si tu es fatigué, moi aussi je n’en peux mais
Reportage photographique d'Abdelkader mana
Essaouira, jeudi 26 mai 2011
11:22 Écrit par elhajthami dans Reportage photographique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie | | del.icio.us | | Digg | Facebook
29/05/2011
Lieux de mémoire
La vieille médina est maintenant transformée en une énorme hôtellerie comme on le voit avec cette enseigne annonçant un "Riad"....
En traversant le vieux Mellah (mellah QDIM) on aboutit à "jamaâ Bihi" l'école coranique où chaque matin, mon père maâlem Tahar MANA, devait quitter son atelier de marqueteur en face du cinéma Skala pour nous ramener des baignets tout chaud en guise de petit déjeuner. Le fiqih Si Bihi qui nous enseignait alors avait une longue barbe blanche et la mine sévère: il recourait àouvent à la bastonnade en guise de correction : un jour il m'ordonna d'épeler l'alphabet arabe tandis que les autres enfants devaient répéter après moi. Mais je n'arrivait pas à aller au-delà de la lettre "JIM" et invariablement il faisait tomber son énorme baton sur mon crâne. Depuis lors je me suis mis à fuire l'école coranique pour aller écouter le savoureux conteurde Bab Marrakech : ma mère avait toutes la peine du monde à me faire revenir à cette école coranique.qui représentait pour moi le chatiment Elle devait me trainer au point de voir son haïk défait en pleine rue : j'en ai gardé pendant des années une bosses au sommet du crâne....
Le mur où était accroché la planche coranique où je devais épeler les lettres arabe
A l’alliance israélite où j’étudiais, on m’accorda alors de beaux livres pour enfant, que je n’ai pu recevoir à l’estrade, mais que Zagouri, mon institutrice, me fit alors venir chez le pâtissier Driss, où j’ai eu droit et aux Beaux Livres et à un gâteau au chocolat ! Je lui ai menti, en lui disant que je n’ai pas pu assisté à la remise des prix parce que j’étais parti à Chichaoua ! En réalité l’appel de la plage et des vacances étaient plus forts, surtout quand les élèves se mettaient à chanter à la récréation dans la cour :
« Gai gai l’écolier, c’est demain les vacances...
Adieu ma petite maîtresse qui m’a donné le prix
Et quand je suis en classe qui m’a fait tant pleurer !
Passons par la fenêtre cassons tous les carreaux,
Cassons la gueule du maître avec des coups de belgha (babouches)
Le témoignage de maâlem Mtirek
Sur le samaâ judéo - musulman d'Essaouira
Aujourd'hui, le mercredi 13 janvier 2010, vers la mi-journée (journée brumeuse mais lumineuse) alors que je prenais un thé à la menthe à la terrasse du café Bachir qui donne sur la mer, je vois venir sur une chaise roulante, maâlem Mtirek, ami à mon père. Il est presque centenaire maintenant, mais sa mémoire reste vivace. Il se souvient de la veillée funèbre du 13 janvier 2003, organisée à la Zaouia de Moulay Abdelkader Jilali pour le quarantième jour du décès de mon père : « C'est là, me dit-il, qu'est enterré maâlem Mad, le maître artisan de ton père. Après avoir accompli son apprentissage auprès de lui, ton père était venu travailler chez Bungal dans les années 1930. Mon établi ( manjra), le sien et celui de Ba Antar étaient mitoyens. Un jour, je me suis mis à déclamer des mawal (oratorios) . Une fois apaisé de mon extase, ton père qui écoutait à l'entrée de l'atelier est venu vers moi pour me dire sur le ton de la plaisanterie :
- Maâlem ! Laisse les gens travailler au lieu de les extasier par ton mawal ! le chantier s'est arrêté à cause de tes mawal !
C'est ce mawal que je déclamais alors sur le mode de la Sika andalouse :
Ya Mawlay koun li wahdi,Li annani laka wahdaka
Wa biqalbika îndi,Min Jamâlikoum
la yandourou illa siwaakoum
Seigneur, soit pour moi tout seul
Parce que c'est à toi seul que je me suis dévoué !
Et mon cœur n'a plus de regards que pour ta splendeur !
A l'époque , poursuit maâlem Mtirek, tout le monde était mordu de mawal à Essaouira : le vendredi on allait animer des séances de samaâ, d'une zaouia, l'autre : la kettaniya, la darkaouiya, celle des Ghazaoua et celle de Moulay Abdelkader Jilali. Les Aïssaoua et les Hamadcha faisaient de même avec leur dhikr et leur hadhra à base de hautbois et d'instruments de percussion. On allait aussi chez les Gnaoua dont la zaouia était dirigée par El Kabrane (le caporal), un ancien militaire noir, qui parlait sénégalais et qui gardait l'hôpital du temps du docteur Bouvret. C'était un type très physique qui servait en même temps de videur lors des lila des Gnaoua : si quelqu'un sentait l'alcool en arrivant à la zaouia de Sidna Boulal ; il le prenait à bras le corps comme un simple poulet et le jetait au loin, hors de l'enceinte sacrée. Les gens étaient véritablement « Ahl Allah » (des hommes ivres de Dieu). Nous avions notre propre orchestre de la musique andalouse, dont faisait partie Si Boujamaâ Aït Chelh, El Mahi, El Mamoune et un barbier . Les juifs avaient leur propre orchestre de musique andalouse: Chez eux un dénommé Solika faisait office de joueur de trier, il y avait aussi un rabbin qui jouait de la kamanja et un autre du luth. On allait aussi écouter les mawal chez la communauté israélite de la ville. Une fois alors que j'étais au mellah, au vestibule d'une maison juive où se déroulait un mariage, je me suis mis à déclamer un mawal à haute vois - j'avais alors une voix très forte qui porte au loin - et tout le monde s'est mis à courir dans tous les sens en disant : « Venez écouter cette belle voix d'un musulman ! ». A l'époque il y avait un tailleur parmi les musulmans dont j'ai oublié le nom, qui avait une voix tellement attendrissante, qu'elle paralysait quiconque venait à l'entendre. »
L'atelier de Simohamed BEN M'barek, dit "lamine", l'un des marqueteurs les plus raffiné de la ville est devenu une boutique d'herboriste!
Enfant du pays l'herboriste va recueillir lui même les plantes médicinales aux environs d'Essaouira en s'inspirant des vieilles recettes de grand'mère: pour l'efficacité de la thérapie, le moment de la cueillette est très important, nous explique-t-il.
A l'intérieur, des femmes triturent de l'huile d'argan à l'ancienne au prix de 150 dhs le litre alors qu'a travers la ville de nombreuses boutiques de coopérative dédiée à l'huile d'argan le vende à 300 dhs le litre. l'un des principaux bazar de la ville fait faire de l'huile d'argan par des femmes rurales qu'on peut observer sur place au prix de 300 dhs le litre également...
L'une des femmes travaillant pour l'herboriste, m'apprend qu'elle est originaire de Bni Lent fraction Tsoul de la région de Taza, région que je connais bien. Nombreuses sont les femmes qui cherchent leur autonomie financière en travaillant dans les Riads de la médina, dans le commerce et maintenant dans quelques salles de massage et d'esthétique qui viennent d'ouvrir leurporte pour répondre à la demande touristique: il parait maintenant que les touristes se rendent même dans la campagne environnante pour se marier : les parents n'hésitent plus à confier leur fille même à de vieux touristes, pourvu que leur fille trouve un meilleur sort en Europe....Le lendemain de ma visite à l'herboriste j'ai pris tôt le matin du samedi 28 mai 2011, la direction de Marrakech...Les deux villes sont maintenant reliées par autoroute: un appréciable gain de temps. En ce fin mai, il pleut sur le pays des rhamna: ce pays de vieux nomades et de transhuman semble inhabituellement verdoyant. Un vieux proverbe dit: "Quand le pays Rhamna est verdoyant, c'est qu'il y aura une belle moisson dans tout le Maroc."
Abdelkader Mana, fin mai 2011
17:01 Écrit par elhajthami dans Reportage photographique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie | | del.icio.us | | Digg | Facebook
27/05/2011
Voyage
Le jeudi 19 mai 2011, je prends le train à Casa -voyageur pour me rendre à Essaouira via Marrakech: dans la plaine de la Chaouia, les moissons sont déjà mûres, mais le ciel est couvert et il pleut alors qu'on est déjà au seuil de l'été...Un temps brumeux que je retrouve curieusement lors de ma première dérive à l'embouchure de l'oued ksob...
J'aperçois des silhouettes de chameaux de l'autre côté de l'oued
Puis l'île et son minaret qui me font signe...
Envol gracieux malgré le frimat matinal
Toilette matinale
Geaité...
Le palais ensablé au milieu des tamaris...
Une ruine qui fait encore rêver par tant de souvenirs
Brouillard
Estompe
Ciel doré et brumeux
A l'Est, le soleil se lève aussi
18:23 Écrit par elhajthami dans Reportage photographique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie | | del.icio.us | | Digg | Facebook