10/04/2010
Colloque international à Essaouira
Après avoir été reporté,
le colloque est finalement annulé
Colloque international sur les pèlerinages circulaires à Essaouira
Apprentissages informels liées aux différentes formes de mobilité..
Du jeudi 8 au samedi 10 avril 2010, à l'occasion du passage des pèlerins-tourneurs du printemps par Essaouira, la ville abritera un colloque international sur les pèlerinages circulaires en Méditerranée et au travers le monde..
Le tensift serpentant au pays Chiadma
Nous venons de recevoir la confirmation de la participation de l'Université Paris 8 à ce colloque par le professeur Rémi Hess, directeur du Laboratoire Expérience : " Concernant la participation de Paris 8, je voudrais vous suggérer d'associer le Laboratoire Experice de l'Université de Paris 8, dont je suis le directeur. C'est dans ce laboratoire que travaillait Georges Lapassade.Quand vous l'avez contacté directement, le Président Binczak m'avait demandé de représenter Paris 8 dans votre manifestation.De plus, notre équipe de recherche s'intéresse plus particulièrement aux apprentissages informels liées aux différentes formes de mobilité...Si vous en êtes d'accord, j'informerai le Président Binczak de cette association." Remi Hess.
On s'attend aussi au parrainage de l'UNESCO et à une exposition d'ouvrages sur les pèlerinage par la bibliothèque de la Fondation Al Saoud pour les sciences humaines au Maghreb.
"La fiancée de l'eau et les gens de la caerne" de Hamza Fakir
Qui exposera sur le thème du pèlerinage lors du colloque
Le collectionneur Raïs vient de nous confirmer sa participation au colloque par l'exposition de tous les œuvres de Boujamaâ Lakhdar. .Une exposition qui s'inscrit tout à fait dans l'esprit du colloque qui rendra hommage à son ami Georges Lapassade. Il est à remarquer aussi que juste avant son décès , Boujamaâ Lakhdar avait réalisé un court métrage sur le printemps des Regraga dont il me souvient une magnifique prise de vue bleuté, où on voit s'éloigner une carriole au guet de l'oued Tensift..Il avait également publié au "Message de la Nation", un article introuvable intitulé : "le printemps des Regraga"..C'était juste avant sa participation à l'exposition universelle "Les magiciens de la terre" organisée alors par le Centre Beaubourg au quelle Boujamaâ Lakhdar était le seul participant marocain juste avant sa disparition en 1989...Parmi les autres activités parallèles, il est prévu deux expositions photographique sur le thème "Le printemps des Regraga" , l'une due à Manoel Penicaud , auteur de "Dans la peau d'un autre" éd. La Renaissance, et l'autre à Frederic Damgaard, le galeriste et critique d'art, ami de la Taïfa d'Akermoud qu'il avait pris l'habitude d'accompagner pendant de nombreuses années et qu'il accueillait chaque printemps à son Riad de derb Laâlouj, à chaque passage printanier des Regraga par la ville.
Ce pèlerinage est probablement d’origine médiévale – du début de l’islamisation ou même avant – on peut donc supposer que dans la tradition, les étapes de Moula Dourein et Diabet en constituent la forme originelle. La halte que font les Regraga à Essaouira est intéressante mais elle n’est pas enracinée dans le vieux parcours agraire du daour. D’où le caractère récréatif et récent de l’escale où l’on n’offre pas de présents contrairement à ce qui se fait à Diabet, le vieux village de Sidi Mogdoul.
Problématique :
Il s’agira, selon notre ami Jean François Clément, d’en comprendre
la signification et la dimension humaine universelles,
en répondant à des interrogations comme celles-ci :
Pour quelles raisons a-t-on imaginé de créer de tels pèlerinages
plutôt que des pèlerinages à centres uniques imposant seulement un
aller et un retour, le plus souvent par le même chemin ou un chemin
parallèle comme c'est le cas pour le pèlerinage de Saint-Jacques ? Un
pèlerinage "circulaire" est, à l'inverse, celui qui cherche à relier
un grand nombre de points composant le "cercle". S'agit-il, pour ce qui est du pèlerin, de se sacraliser le plus possible (ou de sacraliser chacun de ces points) ? S'agit-il seulement de créer un espace social, un territoire ? De quelle nature est ce territoire par rapport à un terrain seulement profane ? S'agit-il d'intégrer des espaces sauvages ou isolés, que fréquentent préférentiellement les anachorètes, à des espaces civilisés, voire urbanisés afin de dépasser l'opposition ‘umran badawî et ‘umran hadarî ? Quelle est la relation de ces cercles constitutifs d'organisations humaines avec les pouvoirs politiques ? Est-ce que tous les points du "cercle" de déplacement sont identiques entre eux ? Pourquoi certains points portent-ils le nom de ribât'-s (Kûz, déjà célèbre à l'époque romaine jusqu'en Égypte) et pas les autres ? Certains points reçoivent-ils plutôt des pèlerins femmes, des soufis, etc. ? Se rend-t-on à ces points en silence alors qu'on va à d'autres en chantant ? En quels points des miracles, et de quelle nature, se produisent-ils ? Le but n'est-il pas d'intégrer des saints récents (par exemple musulmans)à des lieux où la sacralité remonte à l'Antiquité (comme ribât' Sidi Châkir) et sont donc bien antérieurs à l'islam. L'unification est-elle dans ce cas unification de l'espace (face aux çanhaja-s ou aux Dukkala-s pour ce qui est des Ragraga) ou unification de temps hétérogènes comme ce que font les Regraga qui ne se déplacent pas dans l'espace comme on pourrait le croire naïvement, mais dans des temps divers de l'histoire marocaine ? Comment meurent de tels pèlerinages ? Donnent-ils seulement naissance, en disparaissant,à des zawiyya-s ?
La légende des sept saints s’inscrit dans une vielle tradition méditerranéenne dont la source serait celle des Sept Dormants d’Ephèse en Turquie comme le soulignait en 1957 Louis Massignon :
« En Islam, il s’agit avant tout de « vivre » la sourate XVIII du Qora’n, qui lie les VII dormants à Elie (khadir), maître de la direction spirituelle - et la résurrection des corps dont ils sont les hérauts, avant coureur du Mehdi, au seuil du jugement, avec la transfiguration des âmes, dont les règles de vie érémitiques issues d’Elie sont la clé. Ce culte a donc persisté en Islam, à la fois chez les Chiites et les Sunnites mystiques. »
a r g u m e n t a i re
Dans l’antiquité romaine, le verbe peregrinare , « voyager à l’étranger » a besoin d’être compléter par l’expression ad sacra , « vers les lieux sacrés » ; pour signifier : « faire pèlerinage ». Au Moyen Âge la plupart des déplacements avaient pour but un lieu saint : peregrinus désignait le voyageur et le pèlerins, et s’appliquait dès le IX è siècle au voyageur religieux se rendant vers quelque sanctuaire. On part en pèlerinage, on effectue un trajet, on marche vers un lieu saint, on en revient ressourcé, dans la conviction que la vie entière est une marche dans un pays étranger où nous sommes entrés par la naissance et que nous quittons par la mort. Nous sommes des passagers étrangers à la terre que nous parcourons avant d’arriver au ciel, notre véritable patrie. Nous sommes pour un moment en marche vers le sanctuaire final qui nous attend après la vie. Le pèlerinage en est le ressourcement, le réconfort, , le rappel, il nous remet en route pour un temps avant la fin des temps.
En français, les mots « pèlerin » et « pèlerinage », viennent du latin peregrinus qui nous revoie soit à per-ager, c'est-à-dire « à travers champs », soit à per-eger , c'est-à-dire « qui va par mont et par vaux ». Les Romains utilisaient le terme hospes , le citoyen auquel une convention garantissait les droits d’amitié et d’hospitalité. Le mot hôte qui vient de hospitem , désigne en même temps la personne qui la reçoit. Or il n’y a pas de pèlerinage sans hospitalité.
Le pèlerinage est une démarche universelle, présente dans toutes les civilisations. L’étude comparative montre d’un siècle à l’autre, d’une aire culturelle à l’autre, sans oublier les cultes animiste et les religions agraires, que les analogies l’emportent sur les différences. Dans la geste pèlerine, les affinités de symboles et de démarches font irrésistiblement penser à celles que décrivent les récits épiques et les textes poétiques des diverses cultures du monde. Le pèlerinage fonctionne comme une manifestation matérielle d’un itinéraire spirituel. Les pèlerins entament un parcours exceptionnel, qui marque une rupture avec leur vie antérieure et l’ouverture à une nouvelle vie.
Tout circuit de pèlerinage est un phénomène social total. Nous aimerions avoir confirmation de votre éventuelle participation ainsi que l’aspect et l’aire géographique dont traitera votre communication, pour qu’on puisse établir dés maintenant le nom des intervenants, les axes et le programme du colloque.
Ce colloque rendra hommage à Georges Lapassade, auteur “d’un marabout, l’autre”,
à Abdélkébir Khatibi auteur de “Pèlerinage d’un artiste amoureux” et
à Louis Massignon auteur du pèlerinage islamo-chrétien.
Fait à Essaouira, le vendredi 4 septembre 2009
Abdelkader M A N A
En Bretagne, Massignon notait :
« En Bretagne spécialement, le nombre des Sept Dormants raviva
une très ancienne dévotion celtique au septénaire,
seul nombre virginal dans la décade (Pythagore), chiffre archétypique du serment.
On est tenté de penser que c’est une dévotion locale aux sept d’Ephèse,
qui a précédé et provoqué les cultes locaux aux VII saints en Bretagne. »
la procession printanière
Dans son « Mounqîd min adhalâl » Al Ghazâlî déclarait à ce propos:
« En tout temps il existe des hommes qui tendent à Dieu, et que Dieu n’en sèvrera pas le monde, car ils sont les piquets de la tente terrestre ; car c’est leur bénédiction qui attire la miséricorde divine sur les peuples de la terre. Et le Prophète l’a dit : c’est grâce à eux qu’il pleut, grâce à eux que l’on récolte, eux, les saints, dont ont été les Sept Dormants ».
Dans la circonférence d’un cercle, le commencement et la fin se confondent.
Héraclite
On appelle daour le pèlerinage circulaire des Regraga.Le terme « Daour »
est ambivalent et à double sens:
Tantôt on l’utilise pour désigner l’ensemble du pèlerinage circulaire :
ça a la même connotation que l’expression française :
« Faire un tour »,tantôt on l’utilise pour désigner chacune des étapes à « tour de rôle ».
Le Daour, rite agraire accompli en vue d’obtenir une grande abondance de produits est aussi accompagné de vastes échanges intertribaux. La Kula qui se déroule dans le pacifique occidental est également une forme d’échange intertribal de grande envergure. Malinowski l’a étudié en particulier chez les Trobriandais. Les Regraga comme les Trobriands organisent un vaste circuit qui n’est au fond qu’un « potlatch intertribal », mi-cérémonial, mi-commercial. Ces deux institutions – le Daour et la Kula – se développent sur un fond de mythes et de rites magiques et unifient symboliquement une vaste étendue géographique.
D’emblée on est plongé dans la symbolique mystique des nombres ; c’est un pèlerinage circulaire effectué par treize zaouia, descendants ou affiliés des sept saints qui se déroule en quarante quatre étapes et trente huit jours. Voilà donc qui nous fait penser aux sept Dormants d’Ephèse, aux treize épées d’or, aux quarante jours du déluge et aux quarante saints cachés apotropaïques qui se relaient pour supporter mystiquement le fardeau du monde.
Actuellement la mythologie recouvre l’histoire, comme le culte des saints recouvre l’Islam des premiers khalifes et de leurs émissaires, les moines – guerriers. Mais dans la mesure où les mythes sont au fondement des rites, ils sont aussi vrais parce qu’ils vivent dans la conscience des hommes et structurent leur action. « Le témoignage le plus sûr d’un discours, écrit J. Berque, c’est celui qu’il tient sur lui-même. »
La khaïma – tente sacrée – est l’emblème de la partie est ; la taïfa, le groupe d’Akermoud avec son « aroussa » en est le pendant à l’ouest. La khaïma est rouge, la taïfa est blanche. Ce sont les deux symboles sacrés du périple. La jument et le chameau sont opposés dans le daour mais complémentaires dans les labours : on dit qu’ils forment le meilleurs attelage du printemps. Ils sont aussi dans leur opposition et leur complémentarité, l’attelage fantastique du daour.Laroussa arrose et la khaïma féconde. Laroussa intervient contre la sécheresse et la khaïma contre la stérilité. C’est l’opposition entre la fincée de l’eau et la grotte des sept Dormants dont le réveille féconde le printemps .
À propos de ces prosélytes Regraga, hommes de Dieu, faiseurs de pluie
Jacques Berque note que dans le Sud marocain,
”les Regraga font « la soudure », si j’ose dire, entre deux cycles prophétiques :
celui de Jésus et celui de Mahomet. Disciples du premier, Hawâriyyûn,
ils sont comme les baptistes du second,
qu’ils annoncent, et qu’ils vont trouver dès le début de sa mission.
Leur personnalité oscille entre une qualification confrérique
et une qualification ethnique. »
11:20 Écrit par elhajthami dans Colloque | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : colloque, pèlerinages, regraga | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Commentaires
Superbe votre texte sur le pélerinage, documenté, ouvert, sans anathèmes , universel même dirais-je... Bravo, Monsieur Abdelkader Mana, je souhaite que le colloque organisé par vos soins soit un succés.
La recherche de Dieu est une occupation à plein temps, tout au long de sa vie, mais il y a quand même une certaine prédisposition de certains individus..., puis Dieu choisit ceux qu'il considère comme ayant des coeurs purs... J'ai 75 ans,suis né catholique et mourrait catholique, mais il y a longtemps que je considère que les chemins menant à Dieu sont multiples et que dans chaque chemin , il y a des élus...http://vieillegarde.hautetfort.com/archive/2009/06/27/parcours-spirituel.html
Je bricole aussi des textes, plus ou moins inspirés.
Bonne fin de ramadan. as-salam "alaïkoum
Écrit par : maudub | 20/09/2009
Cher Monsieur,
Je vous remercie de votre invitation à ce colloque qui me semble passionnant mais auquel je ne pourrai malheureusement pas me rendre. J'en ai informé le Président de notre Association , M. André de Peretti,.au cas où lui même pourrait s'y rendre, mais il est pris par d'autres obligations et ne se déplace plus guère. De toutes façons, Manoël Pénicaud , avec lequel nous sommes en contact, nous représentera
Tous mes voeux pour le succès de votre entreprise et bien cordialement, Nicole Massignon.
Écrit par : Nicol Massignon | 25/09/2009
Whoua votre article est super intéressant ! Avec un vrai contenu et des photos de qualité pour illustrer votre propos.
Je vais essayer de faire connaître votre site à mon entourage.
Bonne continuation.
Hervé
Écrit par : Hervé Decker | 07/10/2009
Votre site est enchanteur, et le texte très bien rédigé. Vous me donnez envie de venir, mais malheureusement, comme je vous l'ai dit, je suis engagé ailleurs. Mais restons en contact.
Bien cordialement !
Eric Geoffroy
e.geoffroy7@free.fr
www.eric-geoffroy.net
Écrit par : Eric Geoffroy | 10/01/2010
Bonjour si abdelkader
Merci pour ton invitation. Je suis d’accord pour le principe s’assister en fonction du calendrier . Je vais réfléchir à une communication sur le daour des tolbas d’ida oultit dans l’Anti-Atlas.
Écrit par : Mohamed TOZY | 11/01/2010
La venue de Mohamed Tozy est une bonne nouvelle. J.-Fr.
Écrit par : Jean François Clément | 11/01/2010
L'idée d'une exposition des travaux de Boujemaa collection de M. Raïs est sans doute une proposition géniale.
Amitiés
A suivre.
A. M
Écrit par : Abdelghani Maghnia | 11/01/2010
Nouvelles participations
Cher Aldelkader Mana,
J'ai l'assurance de pouvoir faire venir à Essaouira pour le colloque sur les pèlerinages :
Barbara Michel, professeur de sociologie à l'université de Grenoble 2. Elle a dirigé le département de sociologie de Grenoble 2. Elle va proposer une communication dans les jours qui viennent, sur la notion d'errance dans le pèlerinage...
Ma fille Charlotte Hess, philosophe et chorégraphe, qui a présenté deux émissions de radios sur Georges Lapassade, serait d'accord pour venir du 31 mars au 2 avril. Elle danse le 3 à Paris et ne pourra pas rester aussi longtemps que Lucette Colin et moi-même. Elle est spécialiste de tango, et elle se propose de faire une intervention sur "Le pèlerinage à Buenos Aires".
Je continue à parler de cette manifestation.
Remi Hess.
Écrit par : Rémi Hess | 13/01/2010
Nous avons maintenant assez de monde pour réussir une belle rencontre. Il
faudra mettre en valeur nos invités quitte à nous effacer devant eux
qui acceptent de venir à Essaouira. Nous ne sommes que les oulad bled.
Jean-François
Écrit par : Jean François Clément | 13/01/2010
Le Colloque annulé
J'ai pensé à vous toute cette journée,
à votre déception (vous ayant vu marcher dans la Ville avec pour légende "Abdelkader Mana préparant le Colloque de Août 2009")...Avant d'apprendre la décevante nouvelle j'avais décidé de remonter la quarantaine de pages de votre carnet de voyage et (je lis très lentement) j'étais votre compagnon en avril 1984, je lisais la légende de ce démon qui prend l'apparence d'une vieille femme et tout autre animal pour rendre les femmes infécondes et les maris stériles...
Je n'ai pas beaucoup de temps à présent, mais je veux vous dire quelque chose :
Dieu est Grand ne l'oublions jamais peut être que certains des gens qui ont péri sous la Mosquée effondrée de Meknès avaient-ils fait de cette aventure l'aboutissement de leur vie ?
Je veux dire, la vie n'est pas grand'chose. Les déceptions sont inéluctables.Je suis en mauvaise position pour jouer les Grandes Prêtresses Moralisatrices !Nous sommes à la mi-avril, tout peut encore arriver.
A demain si Dieu veut !
Amnesy, respectueusement
Écrit par : Amnesy | 11/04/2010
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