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27/03/2010

Printemps 2010

Le printemps des Regraga

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La première étape du pèlerinage circulaire en images

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Reportage photographique d'Abdelkader Mana

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Le vendredi 19 mars 2010, arrivée à Sidi Ali Bou Ali, la clé du pèriple

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Le genêt, plante sacrée, grâce à laquelle les Regraga flagellent les pèlerins pour leur transmettre les énergies vitales du printemps naissant.
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La quête de l'eau , source de toute vie
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De partout affluent les pèlerins vers la clé du pèriple, particulèrement d'Essaouira, de Safi et de Casablanca
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A l'enceinte - même du sanctuaire, sous l'arganier sacré, les Regraga sont en train de bénir les pèlerins et surtout les pèlerines
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Pèlerin - tourneur du printemps, depuis de si nombreuses années, originaire de Sidi Ali Korati, guérisseur du vitiligo et seconde étape du pèriple, Korati Lahbib est la première vieille connaissance qui m'accueille sous l'arganier sacré
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Tandisque les Regraga bénissent les pèlerines en mettant leurs offrandes monétaire dans le tronc, une Casablancaise se rend compte de la prise des images et s'empresse illico de se couvrir le visage: toujours cette sampetirnelle prohibition de l'image...
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Le tronc dans lequel ces anciens moines-guerriers , qui se nourissaient d'eau et de semoule en guerroyant le jour et priant la nuit; mettent le nerf de la guerre d'aujourd'hui : l'argent, redistribué plus tard aux ayants droit (les descendants des sept saints) à la clôture du Daour, au sommet de la montagne de fer, où résidait leur sultan légendaire au 12ème, 13ème siècle
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Dans ce pèlerinage qu'on peut assimiler à un rite de rogation, le porteur d'eau est toujours de la partie
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Avec les marchands de jouets, le Daour prend toujours des allures de fête foraine: la plus importante fête annuelle pour les enfants au pays Chiadma
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Deux pèlerins - tourneurs qui passent chaque printemps leur temps à flageler les pèlerins en recueillant leurs ziara, me repèrent et me reconnaissent...
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Sous des tentes en toiles sommaires ("Guitoune"), séparés du sol pierreux par de simples nattes de jonc, les pèlerins se restaurent et prennent le thé.
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Marchand de pipes de kif : l'adjuvant rituel traditionnellement omniprésent à tous les rituels de la transe et de l'extas, aussi bien chez les Gnaoua que chez les Hamadcha, où on m'a parlé un jour de "tombour de kif"...
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"Haloua" ; gateau "dur" traditionnelle des Regraga à base de sucre de coloranrts et de fruits secs : le "sucré" comme le "salé" - nous somme ici à la saline "Lalla Chafia" la guérisseuse -, sont considérés comme dotés de grâce bénéfique: "suré", "salé"; avis au regretté Claud Lévis Strauss qui nous a quitté récemment plus que centenaire...
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A chaque étape du Daour, un haut parleur ne cesse d'annoncer l'arrivée du "toueur d'oreil": en effet, c'est au cours de ce rite initiatique que les jeunes filles trouent leurs oreilles pour la première fois et vont aussitôt chez le marchand de faux bijoux d'argent et d'or pour acheter leurs premières boucles d'oreilles...
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A l'écart de l'allée commerçante, entre sanctuaire et saline sacrée, le parc forain....
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11:10 Écrit par elhajthami dans Reportage photographique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : photographie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

18/03/2010

Colloque Migrations

Colloque Migrations, Identité et modernité au Maghreb

Essaouira du 17 au 20 mars 2010

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Journée du jeudi 18 mars 2010 : Nous publions sans tarder les images de ce colloque exceptionnel et de haute tenue en attendant d'alimenter cette note à fure et à mesure de commentaires appropriés .


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Dans son intervention, ponctuée de témoignages sonores des années 1930-1940, Driss El Yazami, souligne que la rencontre à Paris des artistes maghrébins, juifs et musulmans à contribuée d'une façon puissante à la naissance de la chanson moderne dans les trois pays du Maghreb.
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Dans son mot de bienvenue, le Conseiller Royal André Azoulay a souligné combien nous avons besoin aujourd'hui plus que jamais de nous libérer de la dictature de l'instant pour retrouver cette profondeur historique et ce recule par rapport à l'immédiat pour mieux appréhender notre diversité qui est une richesse ainsi que l'imbrication des identités culturelles et religieuse au Maghreb.
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La séance inaugurale du colloque a été dirigée par Mr.Ahmed Harzenni en tant qu'intellectuel
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André Azoulay, comme à son accoutumé abolit toutes les formes de protocole pour mettre à l'aise tout le monde et donne l'exemple du Festival des Andalousies Atlantique, dont la septième édition aura lieu le 10 octobre 2010, qui repose sur un concept simple: la rencontre entre poètes , chanteurs et musiciens juifs et musulmans dont la fusion avait fait le succès de l'Andalousie d'Averoès et de Maïmonide.

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L'une des vedettes du colloque est sans conteste, Daniel J. Schroeter, auteur du travail le plus complet sur "les Toujar Sultan" (les négoçiants du Roi). Je lui ai rappelé que dans les années 1980, je l'avais reçu chez moi à Essaouira avec Georges Lapassade: "Tu avait des allures d'étudiant, et tu venais d'offrir un exemplaire de ta thèse à Boujamaâ Lakhdar, alors conservateur du Musée!" Au bout de quelques minutes il me répond: "Oui, je me souviens". Mais maintenant m'explique-t-il, "Je ne m'interesse plus seulement aux négociants de Mogador et aux tombes juives de l'Ifran de l'Anti -Atlas comme au temps de Paul Pascon: J'ai élargi ma problèmatique à tout le Maghreb comme vous le voyez avec cette communication sur le statut des protégés juifs au 19e siècle, où le fait d'interdire aux juifs de porter le chapeau melon européen, pouvait avoir des conséquences diplomatiques et politiques infiniment plus grave..."

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L'autre vedette de cette matinée du jeudi 18 mars 2010 est sans conteste Ami Bouganim, l'auteur du "Récit du Mellah": il a produit depui de nombreux ouvrages, mais celui-là lui colle à la peau, parcequ'il est justement rempli de ces émotions induites par le départ des juifs marocains d'une terre où ils ont vécu deux mille ans: sentiments d'arrachement, nostalgie, errance, diaspora ballotée en Méditerrannée: "Essaouira, dit-il, est la terre vers laquelle je ne fini pas de revenir." Je lui apprend le décès, il y a deux ans du sculpteur Mohamed Bouada, le fils du pays avec lequel il a tourné un documentaire sur la ville. Il reste interloqué ne sachant plus quoi dire comme si la ville qu'il aime avait perdu l'une de ses cordes vocale, l'une de ses plus belles mouettes qui accompagnent d'ailleurs ce colloque de leurs cris blanc et gris: "Ce n'est pas vrai" Me -dit-il."Ce n'est pas vrai" Me dit-il. "Si, lui répondis-je, ton ami Bouada, n'est plus dans nos murs..."'
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Mais la grosse surprise va venir l'après-midi avec la communication de Sidney Corcos, littéralement HISTORIQUE: plus Mogadorien que les Corcos tu meurs! Je savais depuis déjà longtemps que mon ami l'historien Jean Louis Miège travaillait, outre les document consulaires du 19 ème siècle, sur la riche documentation des Corcos , l'une des principales famille des Toujar Sultan que Sidi Mohamed Ben Abdellah avait forcé de quitter Agadir pour venir s'établir à Essaouira, vers 1776. J'ai déjà rencontré , en tant que journaliste un des Corcos à Agadir à la fin de sa vie dans les années 1980. Mais je ne m'attendais pas à rencontrer un Corcos si jeune, si brillant chercheur...Et la façon dont il parle des familles juives d'Essaouira est si vivante que j'en ai eu le soufflecoupé au point de crier à haute voix en plein public: "C'est magnifique!". Je m'interesse à l'histoire de ma ville depuis 30 ans, croyant en avoir fait le tour, mais jamais au grand jamais je n'i entendu de récit historique plus complet sur la ville. Je me précipite vers André Azoulay en lui chuchutant: " Il faut que Corcos restitue cette belle histoire à la ville". Je devais aller voir mon dentiste cette après midi mais je ne tiens plu debout, je suis impatient de parler à Sidney CORCOS. Je lui fait signe , en venant vers moi, je lui demande de m'envoyer copie de son texte pour ce blog...
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En entendant mon exclamation admirative, Hassan Rachik qui dirige la séance de cette après-midi mémorable, me répond: "Personne n'a dit que la communication de Sidney CORCOS, n'est pas magnifique..."
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Pour signifier aux chercheurs qu'ils ont toute lattitude et toute liberté de penser et de dire ce que seule la science et leur conscience leur dictent, André Azoulay se retire du devant de la scène et se mêle ainsi au public. Mais il a une telle présence et un tel aura, qu'on peut le reconnaitre à dix mille lieues de là. Parmi les illustres familles juives d'Essaouira, le chercheur CORCOS a cité les Azoulay  et les Brami dont est issue Katia sa compagne qui a finit par rejoindre la séance de cette après midi quoique tardivement, en s'excusant très poliment de ne pas être là, la matinée...
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Le colloque est accompagné d'une exposition-hommage, à l'écrivain tunisien Albert Memmi: "Mes origines, écrivait-il, remontent si loin qu'elles ont fini par se dissoudre dans l'histoire de cette terre tunisienne qui a brassé tant de cultures. Mimmi signifie "petit homme", cela pour dire combien il importe d'être humble en toute chose..."
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L'exposition Albert Mémmi qui s'intitule "Ecrivain d'un monde englouti" est accompagnée de cette citation de l'auteur: "L'écrivain est un archéologue de lui - même, et, par ricochet, des autres. Il fouille les âmes mortes. Il restitue des souvenirs eternels."

Reportage photographique d'Abdelkader MANA

21:22 Écrit par elhajthami dans Colloque | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : colloque, photographie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Calligraphie

Mohammed TIFARDINE

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Le calligraphe d'Essaouira

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Le tatouage de la mémoire par les couleurs du destin

Le souvenir de mon ami défunt Larbi Slith m'a été suggéré d'écrire ce texte sur les calligraphes d'Essaouira pour deux raisons : la mue du printemps et le départ de « la fiancée de l'eau » des Regraga, demain jeudi 18 mars 2010, qu'il visitait à la fin des années 1980 en espérant que leurs prières apaiseront les douleurs du cancer qui le tenayait à la gorge et qui a fini par l'emporter. La seconde raison est ma rencontre fortuite, avec le calligraphe Mohammed Tifardine, lors de ma dérive d'hier au cœur d'Essaouira, où il tient  un atelier de calligraphe rue des ruines.

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J'ai pris quelques images de ses œuvres les plus récentes. Sur lui, j'écrivais il y a déjà si longtemps, juste avant l'effondrement du mur de Berlin , ce texte intitulé « l'anagramme comme cri de l'extase », texte illustré, pour des raisons évidentes d'économie de papier, par une seule calligraphie : c'était avant l'avènement d'Internet et des appareilles numériques qui permettent maintenant de publier instantanément et à profusion textes et images : à l'époque, il fallait attendre l'arrivée des journaux antidatés en début d'après midi et pour la parution d'un livre ou d'un catalogue, galeristes, éditeurs et imprimeurs, pouvaient se délecter de leur immense pouvoir de décider de la forme, du contenu et du moment opportum de la publication selon leur bon plaisir. Entre temps Tifardine a fait d'immenses progrés comme le prouvent les calligraphies ici publiées et qui sont toutes de lui: nous n'avons malheureusement plus de trace de celles publiées jadis par Larbi Slith, auquel nous tenons néomoins à rendre hommage tout en l'illustrant lui aussi par l'oeuvre foisonante de ce fabuleux calligraphe qu'est Tifardine dont la modestie et la gentillesse ne font que le grandir à nos yeux.

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Les premiers rudiments de l'art islamique, on les apprend à l'école coranique : en lavant sa planche d'une sourate apprise pour la remplir d'une sourate nouvelle, l'enfant musulman fait progressivement le lien entre le chant sacré qui illumine son cœur et la belle forme qui éblouit son regard. Les belles lettres ne sont jamais muettes ; elles sont la voix céleste qui illumine le monde, le sens sans lequel la vie n'a pas de sens. L'artiste garde ainsi, au fond de lui-même, cette nostalgie du paradis de l'innocence, cette première découverte inouï du divin. Au temps de cette plongée initiatique, dans le bain d'une civilisation sémite qui magnifie les symboles et glorifie les mots, on lui apprend que c'est de la parole divine qu'est né le monde.

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La calligraphie orne ainsi le ciel de la toile comme une nuée d'oiseaux migrateurs, empreintes de caravanes errantes dans le désert, odes arabes rythmant le déhanchement des chameaux, procession cosmique dans les hauteurs stellaires, célébration de l'aube du temps, stèle funéraire :

« J'écris sur ma toile, disait le peintre mystique Larbi Slith, en miniature, les mots qui ouvrent chaque sourate et qui représentent l'invisibilité et la puissance de Dieu. J'orne mes toiles d'un alphabet dansant, chantant, un alphabet qui parle, il parle d'horizons lointains, il parle de moi, embryon au milieu de la sphère tendre et chaleureuse. »

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L'artiste ne vie pas ici à reprendre un seul sens, le « sens unique », il brouille les cartes pour multiplier les sens possibles. L'art est ici proche de ces pratiques mystiques où l'on pensait que la perfection nominale consiste à conjurer les esprits des sphères et des astres. Plus une forme est belle, plus elle a de la chance de faire sortir l'artiste de son île où souffle un vent de crabe, pour le livrer à l'univers éblouissant des idées.

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Né au cœur - même de la médina d'Essaouira - qu'il a rarement quitté- Larbi Slith était un oiseau de mer, un être fragile au milieu des tempêtes. Il portait en lui, l'extrême sensibilité du musicien, la tendresse du peintre et la détresse de l'artiste. Il incarna, pour nous, l'éternelle jeunesse des « fiancées du paradis », leur errance sauvage, leur douleur solitaire.

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Après avoir raclé les guitares des années soixante dix, il s'était mis à communiquer avec les formes cosmiques : il peint la rumeur de la ville, la baie immense et lumineuse, les haïks immobiles, les sphères de la marginalité et du silence, les prières de la nuit et le soupire de l'océan. Chaque toile était pour lui une épreuve de la purification et une prière. Son art était une lutte continue contre les souillures de ce monde et l'épaisseur de son oubli. Son microcosme de signes et de symboles archaïques sont la « trace » de la transfiguration du monde par les visions oniriques. Pour lui, la peinture fut une trace, et la « trace » est la forme suprême de la lutte contre la fuite du temps. Il était habité par l'urgence de créer, par le désir d'éternité. Chez lui, la peinture devenait un tatouage de la mémoire par les couleurs du destin, une procession des saints vers les soleils éclatés...Et les lumières énigmatiques du rêve émanaient de ses couleurs étranges. Les couleurs que prend l'âme à l'approche des énergies telluriques de la montagne.

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Mais la douleur retira avec les énergies vitales, les couleurs chaude de sa dernière toile ; il y mit un éclipse du soleil, un ciel de linceul, des racines aériennes emportées par le vent vers l'au-delà des êtres et des choses. Il était notre Rimbaud de la peinture, une fleur de la morte saison pour qui les aubes d'hiver sont cruelles et navrantes entre toutes : « Mais vrai, j'ai trop pleuré, les aubes sont navrantes... ». Peintre mystique, l'art fut pour lui, une secrète hégire vers Dieu. Par nos larmes intérieures, au cœur de l'hiver - le 4 octobre 1989 - nous confiâmes une part de nous-mêmes, à la colline du bon Dieu. « M'cha zine Oukhalla H'roufou » : le beau est parti mais il a laissé ses alphabets , ses traces...

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Plus on regarde les anagrammes de Tifardine, plus la combinaison de leurs voyelles  et consonnes, explosent en de nouvelles significations. L'assemblage et la permutation des voyelles par diade, triade et tétrade, permettent la multiplication des sens possibles. Ce potentiel de sens est en quelque sorte « augmenté » par l'emploi de l'accentuation et de la consonance implicite  qui renforcent l'ambivalence de la langue arabe. Par exemple les voyelles « H » et « M », peuvent former avec leur consonance implicite, soit le pronom pluriel « houm » (eux), soit le qualificatif « ham » (souci), ou encore l'accentuation de la voyelle « M », le participe passé « hamma »(s'est dressé).

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Le calligraphe Mohamed TIFARDINE dans son atelier

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C'est donc une calligraphie ouverte sur l'infini, en particulier sur l'idée de Dieu. L'une d'entre elles, composée de triades et appelée « cris de l'extase ». Le calligraphe y a mis l'accent sur les syllabes « Ha » et « Wa » qui, assemblées, forment « hawa » (air), mais comme la consonance reste implicite, la règle de l'ambivalence veut qu'on puise aussi lire « houwa » , le transitif indirect « lui » qui désigne Dieu sans le nommer, parce qu'il est innommable. Cette évocation elliptique de l'unique, les mystiques la répètent en soufflant, jusqu'à ce que la flamme de l'extase divine s'allume.

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Pour les sémites, le verbe , le logos descent du ciel

Les calligraphie sphériques de Tifardine - nom de berbère de pure souche s'il en est - n'ont pas de centre, elles s'orientent vers le divin axe, par déclinaison et génuflexion du sud vers le nord et de l'ouest vers l'est. Dans l'une d'entre elles, l'agrégat alphabétique  est généré par deux lettres principales qui, en s'entrecroisant, séparent et lient organiquement les autres lettres, tout en les voilant partiellement. Le signe d'accentuation signifie que les mots portent en eux-mêmes une « densité ». Il ne s'agit pas là d'une « densité démographique », mais de quelque chose d'autre, à la fois plus puissant et plus solide. Le calligraphe a voulu montrer le lien organique qui existe entre les lettres en tant que « masse ». Car la langue arabe n'est pas une masse inerte ou morte ; elle reste vivante en donnant sens aux êtres et aux choses.

Abdelkader Mana

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15:16 Écrit par elhajthami dans Arts | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : arts, arts islamiques, calligraphie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook