ABDELKADER MANA statistiques du blog google analytic https://www.atinternet-solutions.com.

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

08/04/2012

L'ile de Mogador

cartographie.jpg

L’oued Qçob et l’île de Mogador sur la carte du Taleb Bougiman (XVIIIe s.).

Dans cette carte ancienne, le pays Haha s'étend de l'oued Tensift au Nord(il porte le nom de Goudet fleuve) à Saint Croix(l'actuel Agadir) au Sud. L'autre cours d'eau du pays Haha est l'oued ksob qui se jette dans la baie avec l'ile de Mogador au large. Au coeur du pays Haha se trouve la Montagne de Fer(le djebel Hadid).Depuis la haute antiquité le site est fréquenté, d'abord par les Phéniciens comme en témoigne la bétyle dressée au ciel qu'on a découvert sur l'île, ensuite par les Romains dont on a retrouvé, toujours sur l'île, entre autre les vestiges d'une villa, d'une mosaïque représentant un paon et d'une pièce de monnaie à l'effigie de Juba II. Et il y a encore peu de temps de cela, des marins ont remonté dans leurs filet deux amphores romaines entièrement intactes, recouvertes seulement de coquillages et d'algues. Et non loin des récifs de la Scala de la mer, où les anciens entrepôts de canons et de poudre sont actuellement occupés par les ateliers des marqueteurs, d'autres marins ont de leur barque entrevue au fond de l'eau, par temps calme et eau transparente, ce qui ressemble à une autre mosaïque romaine que celle déjà répertoriée sur l'île.

histoire,mogador

La mer, le sable et le vent...

Jusqu’en 1950, on pensait que les Phéniciens et les Romains n’avaient peut-être pas dépassé le Nord du Maroc, alors que du côté de Luxus et Volubilis on avait les preuves évidentes de leur présence, il n’y avait rien de semblable au Sud jusqu’au jour où des enseignants, MM Desjacques et koeberlé allaient entreprendre des fouilles systématiques dans l’île de Mogador, qui prouvent que le monde antique allait en réalité beaucoup plus au sud que le fameux limes, plus exactement jusqu’à l’île de Mogador qu’on peut identifier à la mythique Cerné qu’évoque le périple d’Hannon histoire,mogador En 1985,  Georges Lapassade profite du passage dans la ville de Desjacque et de sa femme pour les interroger à ce sujet, et publie le résultat de cet entretien sous le titre : « la petite histoire d’une grande découverte » : « En 1950 Desjacques et Koeberlé enseignants à Mogador, consacraient leurs loisirs à la recherche des silex taillés de l’époque préhistorique. Cette recherche les conduisit dans l’île d’Essaouira où ils trouvèrent dans le sable des fragments de poterie, des pièces de monnaie. Des fouilles plus systématiques furent entreprises aussitôt. En creusant assez profondément du côté de la plage de l’île, sur le « tertre » on a mis à jour une couche phénicienne, la plus profonde, et des couches plus récentes en particulier celle des Romains du temps de JubaII. La petite histoire de cette recherche nous était jusque là inconnue. Desjacques nous l’a racontée, la voici :- Comme il était interdit, raconte Desjacques, de chasser sur le continent en période de fermeture, la société de chasse locale Saint Hubert élevait des lapins dans l’île. Les lapins avaient brouté l’herbe et mis à nu le sol. Par le vent qui emportait le sable, par érosion, les pièces antiques étaient visibles à la surface du sol.

histoire,mogador

 Mais il fallait pour éclairer la première découverte faite dans l’île une référence que Desjacques et Koeberlé connaissaient bien : le court récit dit du « périple de Hannon », sauvé de la destruction de Carthage dit-on, par un copiste grec. Ce document décrit le parcourt du navigateur chargé de retrouver et fixer les étapes d’un parcours maritime. Le contenu du texte interprété donna à Desjacques et Koeberlé la conviction d’avoir mis à jour la preuve d’une étape phénicienne dans l’Atlantique peut être Cerné « où nous fondâmes une colonie » écrit l’auteur du périple d’Hannon. Ils organisèrent alors un petit Musée pour leurs élèves et pour la ville à la Sqala :

histoire,mogador

 - C’était une pièce minuscule qui abritait tout ce que nous ramenions de l’île : les débris de vases, les pièces de monnaies. Raconte Desjacques.Les pièces sont maintenant au Musée d’archéologie de Rabat. Desjacques et sa femme vont séjourner en vacances chez des amis qui habitent à Agadir :

-Nos amis, demeuraient près du rivage de l’Océan, raconte Odette Desjacques. Un jour de grandes marées, à l’heure où la mer était retirée loin de la côte, j’ai vu des femmes ramasser des coquillages dans les rochers. Elles cassaient les coquilles, les broyaient, les lavaient à l’eau de mer et conservaient dans de grands couffins, la partie comestible. Je me suis approchée d’elles, et j’ai remarqué alors que leurs mains étaient violettes. Or nous parlions souvent, à Mogador, avec mon mari et Koeberlé de la fameuse pourpre de Gétules pour laquelle les Romains avaient installé dans l’île des « fabriques ». On ne savait pas comment la teinture était fabriquée. Et voilà que ces femmes d’Agadir nous apportaient la solution de l’énigme ! Je me souviens que nous avons mis quelques coquillages brisés dans un tissu de coton blanc qui a toujours gardé la couleur...Il y avait, dans le coquillage, une glande jaune au moment où on la recueillait en cassant la coquille. Puis la couleur changeait au soleil et devenait verdâtre, puis violette, plus précisément « pourpre »....Nous avons apporté quelques coquillages vivants à Mogador, nous les avons déposé dans les rochers à la « plage de Safi » pour essayer de les faire reproduire. Mais le sable les a recouvert. Or sur cette même plage, nous avons trouvé des coquillages pour être précis, les purpurae haemastomae, vides avec un trou dans la coquille. C’est par cet article qu’on extrait la précieuse glande. On pourrait probablement en trouver encore aujourd’hui au même endroit. Nous en avons fait identifier, à Paris au Muséum, les résultats ont été probants.

histoire,mogador

  Le site de l’île comme lieu de fouilles a été trouvé on l’a vu, par hasard alors qu’on y cherchait des silex taillés...Le succès de cette recherche devrait inciter nos archéologues marocains à rechercher d’autres traces d’antiquité sur le littoral. » Concluait Georges qui ne croyait pas si bien dire, puisque récemment encore, des marins ont pris dans leurs fillets , deux amphores antiques, tout à fait intactes, recouvertes seulement d’algues et de coquillages...

histoire,mogador

 Sur l’île on a découvert un bétyle phénicien du nom de «Migdol ». C’est une grande pierre jadis dressée dans le ciel. Pourquoi ne pas imaginer un ancien lieu de culte, là où se trouve maintenant le sanctuaire de Sidi Mogdoul ? Ce toponyme a donné au moyen âge, « Amogdoul », transformé en « Mogador » qui est une très ancienne transcription portugaise, d’un vieux toponyme berbère, attesté dés le XIè siècle par le géographe El Bekri :« Les navires mettent trois jours à se rendre des parages de Noul jusqu’à Ouadi Souss (la rivière Souss). Ensuite, ils font route vers Amogdoul, mouillage trés sûr, qui offre un bon hivernage et qui sert de port à toutes les provinces de Souss. De là, ils se dirigent vers ce qui est le port d’Aghmat... »

     histoire,mogador Au XIIIè siècle, un autre géographe, Ibn Saïd el Maghrabi,  nous dit lui aussi que le mouillage d’Amogdoul se trouve en pays Haha : « Là se trouve une petite île séparée du fleuve d’un mille. C’est un mouillage d’hiver pour les navires. Comme Tinmel est connue dans tout le Maroc pour la qualité de son huile, le pays haha est connu pour son miel blanc, ses taureaux puissants et son arbre à l’huile parfumée. A l’Ouest du pays haha se trouvent les Regraga où l’on tisse des couvertures fines et soyeuses que portent les femmes de la ville. C’est un pays au contact de l’Océan où coule la rivière ourlée des beaux grenadiers de Chiachaoua... »

      Le mouillage d’Amogdoul servait donc à l’exportation des produits agricoles du pays haha, fraction des Masmoda qui sont, d’après Ibn Khaldoun, « les habitants du deren », qui vivent au voisinage de la mer. « Deren » est une déformation du mot berbère « adrar » qui signifie montagne.Cette montagne, a un nom berbère qu’elle porte sans interruption depuis l’époque romaine. C’est l’adrar n’idraren, la montagne des montagnes. A moins que ce ne soit la montagne du tonnerre de « nder », gronder, rugir :

                    Mer, gronde encore plus fort pour faire peur aux trembleurs !

histoire,mogador

Carte particulière des côtes de l'Afrique qui comprend le royaume de Maroc .... 1600-1699.

Il est écrit à hauteur de l'ile de Mogador: "Il y a à peu près demi lieue de distance entre cette isle et la terre.Il y peut tenir plusieurs vaisseaux à couvert du vent West et Nord West.Le Sud West n'est contraire il y a douze brasses d'eau en pleine mer."

histoire,mogador

Mouillage au large de Mogador

histoire,mogador

De tout temps, les navigateurs venaient chercher ici cette eau douce et précieuse de l’oued Ksob, comme en témoigne Pacheco Pereira dans son Esmeraldo de situ orbi : «  Entre la rivière des Aloso – de l’oued Ksob – et l’île de Mogador, la distance par mer est de sept lieues, ...de cette île à la terre ferme, il y aura la distance à laquelle une grande arbalète peut lancer une flèche en terre ferme. Il y a beaucoup d’eau douce tout près de la mer, dans laquelle cette eau douce vient se jeter. La meilleurs entrée du mouillage et du port de cette île, est celle qui se trouve du côté Nord-Est...Par cette bonne entrée peuvent pénétrer des navires de cent tonneaux ; ils s’amarrent avec une ancre et un câble, ledit câble étant attaché à l’île même, et l’on sera par six ou sept brasses, fond net, bon et sûr. »

histoire,mogador

Sanuto, Livio (1520-1576). Cartographe. Marochia / [Livio Sanuto]. 1588.

histoire,mogador

Cette carte remonte à la mort de Sidi Sliman El Jazouli et à l'avènement des Saadiens. Selon Ibn Âskar, « à la mort du cheikh, le cercueil fut déposé au milieu d’une raoudha (un cimetière) dans un endroit appelé ribât ; il ne fut pas mis en terre. Le caïd, par crainte d’un enlèvement le faisait garder : chaque nuit le caïd faisait brûler un mouddd’huile et la lumière, en atteignant au loin, éclairait les chemins et les voyageurs qui les suivaient. Le corps du cheikh reposa dans ce pays  jusqu’au jour où il fut emporté à Marrakech. Lors du transfert du corps d’Al-Jazouli à Marrakech, soixante dix sept ans après sa mort, on constata que rien n’était changé en lui. Les Saâdiens montèrent sur le trône en l’an 930(J.C. 1523-1524). C’est  Al Aâraj, le premier de cette dynastie ; qui ordonna le transfert à Marrakech  de l’imam Al-Jazouli pour qu’il soit enterré  à Riyâdh – Al- Ârous, à l’intérieur de la ville. Sur sa tombe on éleva un monument splendide et grandiose. »

histoire,mogador

Les Regraga à l'étape de Diabet au sud de Mogador

 L’influence portugaise se heurta, devant Mogador, à une résistance dont l’âme fut l’organisation maraboutique des regraga. Les affrontements entre Portugais et Berbères Haha devaient se poursuivre au  delà de 1506.L’âme de la résistance locale à l’influence portugaise fut regraga, sous la direction du mouvement jazoulite don’t le fondateur, l’imam Al Jazouli, s’établit au lieu dit Afoughal, près de Had – Draa, où il prêcha la guerre sainte contre les chrétiens, avec une telle foi qu’il eut bientôt réuni plus de douze mille disciples de toutes les tribus du Maroc. Après avoir séjourné à Fès, Tit et Safi, El Jazouli se retira à la campagne dans les tribus Haha et Chiadma, non loin du mysticisme Regraga qui depuis 771 (1370) existe à l’embouchure de l’oued Tensift.

histoire,mogador

      Le maqam de Jazouli, sur le piton rocheux de tazrout en pays Neknafa

La mémoire d’Al-Jazouli sera revendiquée de bonne heure par la dynastie saâdienne, en la personne du fondateur Mohamed El-Qâ’îm venu depuis le Draâ et se faisant enterrer à Afoughal en 927/1517, près du corps du saint martyre, empoisonné sur ordre des mérinides. Une fois devenu souverain du Maroc, le Saâdien Moulay Ahmed Al Aâraj, ordonna le transfert des dépouilles de son père et de celle de l’imam El Jazouli, du lieu dit d’Afoughal à Marrakech où ce dernier figure parmi les sept saints de la ville.

histoire,mogador

       Les Hamadcha d'Essaouira

Cette vénération particulière des Saâdiens pour El Jazouli s’explique de deux façons : c’est aux zaouia issues de ce cheikh que les Saâdiens ont dû leur élévation au trône d’une part, et d’autre part l’importance du tombeau de  El Jazouli était telle que les sultans de la nouvelle dynastie croyaient sans doute préférable d’avoir dans leur capitale un sanctuaire qui était un véritable centre de ralliement.

histoire,mogador

Sanson, Nicolas (1600-1667). Cartographe. Estats et royaumes de Fez et Maroc

histoire,mogador

Cette carte est contemporaine du règne d'Ahmed El Mansour Dahbi et de sa sucrerie saadienne de Souira Qdima au bord de l'oued Qçob.Au bord de l’oued Ksob, les Saâdiens avaient établi une ancienne Essaouira , « Souira Qdima », autour d’un pressoir de canne à sucre. Cette sucrerie qui a fonctionné régulièrement de 1576  à 1603, aurait élaboré du sucre roux (sukkar ahmar), qu’Ahmed El Mansour Dahbi expédiait en Italie en contre partie du marbre de Toscane, comme nous l’apprend « Nozhat el Hadi » d’El Ouafrani : « Le marbre apporté d’Italie était payé en sucre, poids pour poids. »

histoire,mogador

Lemplacement du broyeur principal

  On découvre les ruines de la sucrerie, près de Larbaâ des Ida Ou Gourd, au milieu des arganeraies où des dromadaires – qui semblent attendre depuis une eternité de nouvelles charges de sucre – broutent la cîme rutilante des arbres : l’arganier s’est substitué à la canne à sucre. Nulle route ne mène plus à cette ancienne fabrique saâdienne ; la voie du sucre est devenue terrain de labour et la forêt enserre les vieilles murailles en pisé.

histoire,mogador

  On voit encore l’emplacement de la chute d’eau et les traces de frottement laissées par la roue hydraulique. Sur de grandes distances, de splendides aqueducs (Targa) en pisé – actuellement desséchés – acheminaientt l’eau depuis la source chaude d’Irghane jusqu’à la sucrerie. L’eau qui faisait tourner la roue hydraulique était ensuite amené à grand frais vers « l’Oulja » du bas et distribuée aux planteurs suivant la règle des tours d’eau.

histoire,mogador

     Le broyeur principal se trouvait dans l’axe même de la roue hydraulique. Les deux broyeurs secondaires occupaient une position latérale. A la base de chaque broyeur prenaient naissance un canal d’écoulemnt destiné à recueillir les produits de trituration et à les acheminer vers la citerne en vue de la cuisson. On dénombre six fours à sucre qui servaient à la fabrication des moules en terre cuite d’une contenance de cinq kilos. Les débris de ces moules à sucre jonchent encore l’emplacement des anciens fours.

histoire,mogador

  Les Ganga de Tamanar

      La culture de la canne à sucre autour d’un système hydraulique complexe et étendu avait  réclamé l’utilisation d’esclaves, mains d’œuvre peu coûteuse : aux environs de la fabrique, il existe un cimetière d’esclaves (Roudat Laâbid) plusieurs hameaux d’Isemganes(« Les Noirs » en berbère) et on peut encore rencontrer les descendants des potiers noirs qui fabriquaient les moules à sucre en terre cuite.

histoire,mogador

Ortelius, Abraham (1527-1598). Auteur adapté. Fezzae et MarocchiregnaAfricae.

histoire,mogador

 Le sucre sous ses différentes formes (pannelles, mélasse, moscouades) était vers 1574-1576, et depuis les relations commerciales entre l’Angleterre et le Maroc, le principal produit importé de ce dernier pays. Les plantations de canne, les pressoirs, les raffineries (ingenewes, maseraws) étaient si nombreux sous Moulay Mohamed ech-Cheikh que le sucre se vendait à vil prix au Maroc(El Ouafrâni p.226). Les prix se relevèrent par suite des taxes mises sur les pressoirs (ibidem p.302). Mais le renchérissement du sucre sous Moulay Ahmed el-Mansour eut encore pour cause les spéculations du chérif et des juifs qui affermaient les sucreries. Ceux-ci profitaient de la concurrence que se faisaient les marchands anglais. On sait que les Maures avaient introduit en Espagne la culture de la canne à sucre et qu’il existait de nombreuses raffineries sur toute la côte, de Malaga à Valence. Les amandes furent, comme le sucre, l’un des produits le plus anciennement importé du Maroc en Angleterre» 

histoire,mogador

 Le carnaval masqué de Achoura à Mogador au début du XXème siècle

      Le 6 juillet 1577, un édit de Moulay Abd-el-Malek est promulgué à Marrakech en faveur des marchands anglais. Edmund Hogan ayant exposé à Moulay Abd-el-Malek les plaintes des marchands anglais contre les juifs qui ont affermé ces sucreries, le chérif ordonna que lesdits marchands, jouiront des mêmes libertés de trafic qu’autrefois, que les trois qualités de sucre leur seront rendues au prix des années passées, pesées avec le poid de la dîme royale de Marrakech.

histoire,mogador

      A Mogador, la mascarade de Achoura portait le nom de chrib Ataï(boire le thé)

Un mois plus tard le 7 juillet 1577, Moulay Abd-el- Malek promulgue un nouveau édit en faveur des marchands anglais. Les marchands anglais s’étant plaints d’avoir été lésés dans les marchés passés au Maroc pour les achats de sucre, le chérif ordonne aux juifs et autres personnes avec qui ces marchés ont été passés, de livrer dans le délai de trois ans ces commandes de sucre, à défaut de quoi, ils restitueront l’argent. 

histoire,mogador

 Cérémonie de thé à Mogador

« Otland, 2 septembre 1577, dans sa lettre la reine Elisabeth remercie Moulay Abd-el-Malek du bon accueil qu’il a fait à Hogan et des mesures qu’il a prises en faveur des marchands anglais. Grâce à ces mesures, le commerce du sucre est libéré de toute entrave et le remboursement des sommes dues par les juifs fermiers des sucreries royales est assuré aux dits marchands dans un délai de trois ans. »

histoire,mogador

Arrivée d'une caravane à Haddada à Mogador

   Les sucreries, qui étaient la base du commerce au Maroc et une grosse source de revenu pour le roi, ont été détruites à la mort de Mouay Ahmed el Mansour en 1603. Une relation d’époque nous le confirme : « On trouve au Maroc en abondance de l’or, du cuivre d’excellente qualité, du sucre, des dattes, de la gomme arabique, de l’ambre, de la cire, des peaux et des chevaux. Les articles étrangers qu’on y cherche le plus sont l’étain, les lames de sabre, les piques, les rames, le fer, le gros drap. La poudre d’or est importée du Soudan ; elle arrive en grande quantité après la conquête de ce pays par Moulay Ahmed el  Mansour en 1591.La culture de la canne à sucre fut extrêmement florissante au Maroc, notamment dans la région du Sous, jusqu’à la mort de Moulay Ahmed el Mansour en 1603, après laquelle les guerres civiles qui éclatèrent entre ses fils ruinèrent les plantations. » Effectivement à la mort de ce sultan saâdien, toutes les sucreries furent détruites probablement à la suite de révoltes d’esclaves.

histoire,mogador

Fessae et Marocchiregna. 1606.

histoire,mogador

 Anglais, Français, Espagnoles convoitaient l’île de Mogador comme le montre une plaquette espagnole qui se trouve à la Bibliotheca Nacionale, de Madrid qui expose en 1621, la nécessité d’occuper la position de Mogador en ces termes : « Dans la partie qui regarde l’Occident, face à la côte d’Afrique qui est battue par l’océan, près du cap de Ghir, entre celui-ci et le Cap cantin, se trouve le point et l’île de Mogador qui, bien qu’elle soit petite et peu connue (heureusement pour nous), est, au dire de tous les marins qui pratiquent cette côte et la route des Indes, un port très important pour la couronne d’Espagne, parce que, par sa situation, il commande ces rivages. Ce port est vaste, facile à défendre, d’une entrée et d’une sortie sûres pour les gros vaisseaux. On pourrait sortir, lors du passage ordinaire de nos flottes, et, s’il en est qui ne connaissent pas encore ce passage, il leur suffira une sortie dans ces parages pour le relever avec précision. Et si le Turc ou un autre ennemi avait cette place et cette sûre retraite, il tiendrait, comme on dit, le couteau sur la gorge à toutes nos entreprises pour les égorger ; et si cette position est importante pour eux, c’est une raison pour nous de l’occuper afin qu’ils ne l’acquièrent pas. Les ordre militaires pourraient très bien se charger de cette opération, avec le concours des navires qui croisent ordinairement  devant les autres ports de la côte d’Afrique ; et même on pourrait confier la garde de cette place à l’un de ces ordres, de même que celui de Saint Jean à celle de Malte, qui lui a été donnée de nos temps par l’empereur Charles Quint . Car, à bien éxaminer, comme il est nécessaire de le faire, une chose si importante, si une autre nation occupe cette île, que l’on dit être par elle-même très désirable, outre la place et le port qu’elle contient, il y aura dans l’Océan, près de la route ordinaire d’ici aux îles Canaries, et non loin d’elles, un obstacle fort dangereux pour la sécurité de la navigation, sur lequel repose l’existence et la richesse de l’Espagne, et qui doit principalement maintenir cette monarchie pour sa conservation.

histoire,mogador

 En effet, au dire de capitaines et marins expérimentés, Mogador occupée, c’est un Alger dans l’Océan, par sa situation, son port et sa retraite assurée, pour toutes les entreprises que l’ennemi turc ou hollandais tenterait contre nous, avec une sortie sûre et commode pour faire delà toutes ses courses et arrêter et inquiéter les flottes des Indes Orientales et Occidentales, qu’il rencontrerait forcément non loin de ce parage, quand elles passeront pour prendre hauteur ; et une fois que les ennemis auront occupé ce point, ils sont à même de détruire ou conquérir les Canaries, en coupant les communications de ces îles.

histoire,mogador

   Si le Turc tient Mogador, il peut  tenter d’étendre sa domination sur le Maroc, ainsi qu’il est devenu par Alger maître de Tunis, car celui qui est maître de la mer qui baigne un pays est fort à portée d’en conquérir l’intérieur en empêchant le peuple conquis d’être secouru par mer ; et tout ce qui établit les avantages que le Turc retirerait de ce point fait ressortir combien notre situation serait critique, s’il venait à l’acquérir...Dieu, moteur universel des choses, par la providence duquel elles se gouvernent, nous a fait la grâce que jusqu’à présent l’ennemi n’ait pas connu cette position. Autrefois les Maures n’usaient pas de vaisseaux de haut bord ; aujourd’hui, les prises qu’ils ont faites leur ont donné des forces et de la cupidité, car le gain et l’intérêt donnent de la vaillance,et c’est le profit qui nourrit les sciences. Ils voudront ne plus avoir besoin, pour opérer dans l’Océan de passer par le détroit, et voudront d’autant plus avoir un établissement sûr de ce côté-ci, d’où pourront sortir pour faire leurs prises ces corsaires Turcs si nombreux qui opèrent aujourd’hui, réunis aux Irlandais et aux Hollandais, dont nous devons nous méfier davantage. Ils se trouveront dans Mogador comme dans une tour ou un observatoir d’où ils sortiront pour fondre sur ceux qu’ils auront remarqué s’avançant sans précaution ; et maîtres de ce point, ils attaqueront tout.

histoire,mogador

    Aussi pour éviter la longueur de la route et s’assurer gratuitement une meilleure position, en ayant sous la main un port à garder et vendre ses prises, caréner ses vaisseaux, et reposer et approvisionner ses équipages et flottes. Et cette maison se trouve au milieu du bois où il chasse, qu’y aurait-il d’étonnant à ce qu’il la dispose pour y passer la nuit en sécurité, sans payer le logement, y trouvant une place d’armes pour son ravitaillement et un dépôt pour ses marchandises, avec une entrée et une sortie large et sûre, causant à l’Espagne une crainte horrible et inquiétant delà toute la chrétienté ; car, si ce qu’aujourd’hui nous pouvons posséder avec sécurité est occupé par eux, il sera nécessaire de vendre les calices des églises pour les en déloger, et nous ne sommes pas certain du succès.

histoire,mogador

 Bab Doukkala qui nous faisait rever comme symbole de voyage...

histoire,mogador

   Et quand on considère tout ce qui vient d’être dit, il est très certain qu’il n’est pas besoin de la force ni du secours du Grand Turc pour prendre ce que personne ne défend, et que si les Hollandais s’établissaient en permanence à Mogador, y descendraient à terre, s’y installaient comme dans une tente ou une baraque, entrant et sortant sur leurs navires, ils créeraient là en peu de temps une place sûre et fortifiée, et c’est une miséricorde et un miracle exprès de Dieu qu’ils ne le fassent pas. Plus on fermera le détroit et l’on en fortifiera la sortie, plus il importe aux Hollandais d’avoir là-bas un point d’appui sur l’Océan et un port où ils puissent se réunir et, après s’être rassemblés de conserve en grosse et forte compagnie, sortir pour rompre notre défense, sans qu’il y ait pour l’empêcher d’autre que Jésus-Christ. Qu’il daigne, par les mérites de son sang, faire en sorte que cette gloire revienne à la noblesse d’Espagne et à ses ordres militaires, pour l’exaltation de sa foi et l’honneur de sa bienheureuse mère qui soit louée à jamais ! Amen. »

histoire,mogador

Van der Aa, Pieter (1659-1733). Cartographe. Les Royaumes de Fez et de Maroc

     Cinq années plus tard, le 26 novembre 1626, Razilly adresse un mémoire à Richelieu, où il lui parle d’un plan d’occupation de l’île de Mogador, et des avantages commerciaux que la France retirerait de cette opération : « ...Et du même voyage que l’on aura retiré les esclaves, l’on pourra laisser cent hommes à l’île de Mogador, située à poter de canon de la terre ferme,à 32° de latitude, île très aisée à fortifier.   D’autre part, il y faudrait mettre six pièces de canons et laisser du biscuit aux cent hommes, et envoyer nombre de planches de sap pour y faire des maisons, car d’autres forteresses, il n’en est jamais besoin, d’autant que l’île est naturellement toute fortfiée. Il faudrait y étblir un commerce de toile, fer, drap, et d’autres mêmes marchandises , jusqu’à la somme de cent mille écus par ans. L’on aura de la poudre d’or en payement, dattes et plumes d’autruches. Et l’on pourrait tirer quelques chevaux barbes des plus forts et meilleurs de l’Afrique. Le profit de la vente des marchandises pourrait monter à 30 p. 100 de gain, d’autant que le voyage est fort court : car, des côtes de France, ayant bon vent, l’on y peut être en huit jours. C’est avoir un pied en Afrique pour aller s’étendre plus loin.

histoire,mogador

      Il y a quelques français qui ont trafiqué dans la rivière de Gambye. Mais dans tous ces quartiers de Guinée, l’air est très mauvais. Et pour les habitations, il n’y a lieu en Afrique propre aux Français que l’île de Mogador et Tagrin (le cap de Tagrin, sur la côte de Guinée, près de la baie de Sierra-Leone), où les Portugais avaient en diverses années, armé des vaisseaux pour y dresser des colonies. Tagrine est onze degrés nord de la ligne. Les Portugais y ont été défaits par les Français. Le pays est fort agréable. Mais le reste de l’Afrique est très malsain et en beaucoup d’endroits stérile, dont je ne parlerais pas davantage. »

 

histoire,mogador

Anville, Jean-Baptiste Bourguignon d' (1697-1782). Cartographe. [Partie de la côte de Maroc

histoire,mogador

  Sidi Bouzerktoune qu'on voit clairement mentionné sur la carte précèdante au Nord d'Essaouira

histoire,mogador

 "Jarf hmam(le rocher aux pigeons)

La silhouette du château portugais de Mogador devait, se trouver modifiée par des réfections, dont certaines dataient du règne de Moulay  Abd-el-Malek ben Zîdân, qui y séjourna au mois d’août 1628 : « Voulant voir Mogador, petite isle sur la mer Athlantique, entourée de rochers excessivement hauts, qui font des precipices espouvantables, y faisant séjour de quinze jours, son exercice fut de courir à la chasse des hommes, et, lorsqu’il en avait rencontré, les monter en haut de ces rochers et les précipiter dans la mer, en riant à gorge déployée. Et un jour se promenant en bateau autour de cette petite isle, le vent s’étant si fort eslevé qu’il estoit en danger de périr, ses alcaïds l’ayant mis à bord comme les plus experimentez de ses pilotes, pour salaire il les fit bien bastonner puis fouetter. Et après, les ayant fait boire avec luy, les prit pour compagnons, pour luy ayder au massacre de vingt deux pauvres barbares, qu’il tenoit enchaisnez auprès de luy. Sortant de ce lieu pour aller en chedma, où son frère Moulay el-Oualid lui fut livré entre les mains par un traistre, après en avoir fait les feux de joye, il luy feit mettre les fers aux pieds, le conduisant luy – mesme jusques à Marroque pour l’executer en temps convenable : celuy de la Pasque du mouton. Revenu qu’il fut en chedma, ayant envoyé au supplice plusieurs esclaves françois qui servoient à son écurie...De chedma, tournant vers Safy pour y faire quelque demeure, pour estre l’un de ses plus beaux chasteaux, en quatre mois qu’il demeura, il n’y eut jour qu’il n’y fist quelque massacre... »

histoire,mogador

       Ce passage figure dans une biographie caricaturale, de Moulay Abd el-Malek ben Zîdan, écrite l’année de sa mort le 10 mars 1631. Elle semble avoir été composée, sinon par le père François d’Angers, du moins par quelque capucin de la mission du Maroc. On noircissait le tableau à souhait pour justifier les collectes d’argent, en vue de racheter les captifs européens retenus comme esclaves au Maroc, et pour occuper l’île de Mogador qui leur semblait situer sur une position stratégique le long du litoral africain. A cette époque des Anglais étaient retenus en esclavage à Mogador par Moulay – Abd-el-Malek, comme le rapporte dans son mémoire du 8 octobre 1630 John Harisson : « Si le Sultan Moulay Abd– el–Malek refuse encore de mettre en liberté, les Anglais qu’il retient en esclavage, Charles 1er devrait s’emparer de l’île de Mogador et y fonder un établissement dans les mêmes conditions qu’à la Mamora. Ces deux places attirent tout le commerce du Maroc et permettraient de constituer des approvisionnements en vue d’attaques contre des possessions espagnoles. »

histoire,mogador

Il fallait attendre 1767 pour voir l'ile de Mogador nettement présentée dans ce plan levé de la ville établi par Théodor Cornut

  La position géographique de Mogador faisait d’elle un lieu envié au carrefour des routes marchandes, terrestres et maritimes. Dés sa fondation, elle fut menacée par l’Espagne comme le rapporte Höst : « En 1765, après que le Sultan qui s’est rendu lui-même à Essaouira, eut distribué aux consuls les terrains à bâtir, un bateau espagnol se profila à l’horizon. Un navir de guerre espagnol armé de soixante-dix canons s’approcha, et comme Mohamed crut que les Espagnols avaient l’intention de déranger ses constructions, il expulsa le consul hollandais Demetri, l’accusant de connivance avec l’Espagne, en ajoutant qu’à l’avenir il ne voulait pas de Grec comme consul de Hollande, mais d’un Hollandais. Ensuite, il envoya au roi d’Espagne un cadeau composé de lions, tigres, chevaux, accompagné de trente esclaves espagnols, afin de lui mettre d’aimables pensées en tête, et lui laisser entendre que ce geste était un pas vers la paix. La suite montra d’ailleurs que ces agissements pleins de sagesse ne demeurèrent pas sans résultat. »

histoire,mogador

       En 1767 rapporte Höst, arrivait à Marrakech un ingénieur français d’Avignon nommé Nicolas Théodore Cornut, ancien déssinateur des places fortes du Roussillon, passé à la solde des Anglais, que le sultan recruta à Gibraltar. C’est lui qui dressa le plan de la ville forte. De là ces fortifications à la Vauban, style XVIIIè siècle, qui furent armées avec des canons achetés en 1780 à la fonderie espagnole de Barcelone ou provenant de prises de mer.

histoire,mogador

 Les îles permettaient d’installer des batteries de canons à feux croisés : le « bation de surveillance » (borj el âssa), sur l’île faisait face au « bastion de la poudre » (borj el baroud) à l’embouchure de l’oued Ksob et protégeait ainsi l’entrée sud de la baie. De même le « bastion de Moulay Bennacer », toujours sur l’île, faisait face au « bastion circulaire » (borj el barmil)dans le port, défendant l’accès nord de la baie.

La bataille d’Isly

histoire,mogador

Mogador bombardée à partir de la grande île

 Lorsque l’escadre du prince de Joinville, fils du roi Louis – Philippe  est arrivée le 15 août 1844 au large d’Essaouira, la plupart des canonniers (tobjia) étaient des Alouj. Le chef des canonniers, Omar El Eulj, était le plus illustre de ces convertis : « Qu’attendez-vous pour commencer les hostilités ? » lui avait-on lancé. « Mais avec ou sans munition ? » leur avait-il répondu. (bliqama aoulla bla iqama ?).Des années plus tard, lorsqu’on rapporta cette anecdote au contrôleur civil du Protectorat, il fit appel à David Iflah, le chantre mogadorien du malhûn juif, et lui demanda de composer une qasida sur ce thème en y insérant la fameuse réplique : « Avec ou sans munition ? ».

histoire,mogador

En 1844, Mogador avait une populaton de 14000 âmes. Elle était complètement entourée d’un mur d’enceinte haut de dix mètres et couronné de créneaux dans toute sa longueur. Le système de fortfcatons dressés devant le quarter de la Marne comprenat un rempart en lignes brsées, qui se reliait à la kasbah et était flanqué, au N-O et au S-E, de tours et de batteries casematées.Voici comment s’est déroulée la bataille d’Isly à Mogador d’après les récits militaires d’Achille Filias, publié à Alger en 1881 :

histoire,mogador

Plan de la grande isle de Mogodor et ses environs de la rade du château et de la nouvelle ville de suera en Barbarie – après 1767.

histoire,mogador

La flotte française dans la rade de Mogador le 15 août 1844

« La flotte était arrivée devant Mogador, après une traversée des plus pénibles : pendant les trois jours qui suivirent ; les vaisseaux restèrent mouillés au large sans pouvoir communiquer entre eux, tant la mer était mauvaise. Enfin, le 15, le temps s’embellit et, vers les deux heures, au signal donné par l’amiral, tous les bâtiments se mirent en marche.

histoire,mogador

 Le Triton laissa tomber son ancre à 700 mètres à l’Ouest de la ville et en face des batteres de la Marine ; le Suffren et le Jemmapes venaient ensuite. Dés qu’ils furent embossés, les trois vaisseaux commencèrent le feu ; aussitôt après, ordre fut donné à la frégatte la Belle Poule et au Bricks le Cassard, le Volage et l’Argus d’entrer dans le port. La frégatte devait combattre les batteries de la Marne,et le Brickscelle de l’île.

histoire,mogador

histoire,mogador

 

Le bombardement dura deux heures, sans que le feu discontinua de part ni d’autre. Les navires tiraient à plein fouet sur le front des fortificatons et sur les ouvrages détachés ; les Marocains ripostaient  de toutes leurs pièces. C’était une véritable grêle de boulets et d’obus. Peu à peu, cependant, l’artillerie de la ville ralentit ses coups : à cinq heures, ses formidables batteries étaient pour la plupart démontées et leur canonniers battaient en retraite.

histoire,mogador

 

L’île seule tenait encore : le bateau à vapeur le Pluton, le Gassendi et le Phare, portant ensemble un détachement de 500 hommes s’avancèrent, sous une vive fusillade, vers le débarcadère : à cinq heures et demie, la troupe débarquait avec une partie des équipages et, gravissant à la course une pente assez raide, enlevait la première battere sous les yeux de l’amiral, qui avait voulu prendre sa part du danger.

histoire,mogador

La grande ile en 1844

L’île était défendue par 320 soldats, maures et kabyles, detachés de la garnison de Mogador et choisis parmi les plus résolus : attaqués avec furie, chassés à la baïonnette des positions qu’ils occupaient et poursuivis de broussaille à broussaille, ces hommes se défendaient en désespérés : 180 d’entre eux furent tués ; les autres se réfugièrent dans la mosquée et en barricadèrent l’issue. C’était un siège à faire. Les marins de l’Argus et du Pluton enfoncèrent la porte à coups de canon et pénétrèrent dans les couloirs : la lutte continua jusqu’au moment où l’amiral, voulant éviter un massacre inutile, fit sonner la retraite. On cerna la mosquée et les troupes bivaquèrent. Les vaisseaux retournèrent au mouillage à l’exception de la Belle Poule qui resta dans la passe et, durant toute la nuit, tira à intervalles inégaux sur les batteries de la Marine pour empêcher qu’on vint les réparer.Nos pertes, dans cette seule journée, s’élevèrent à 14 tués et 64 blessés. Parmi les bâtiments qui prirent part à l’acton, le Jemmapes, le Triton, le Volage et le Suffren, furent particulièrement maltraités.

histoire,mogador

 

Le 16, aux premières lueures du jour, le détachement qui cernait la mosquée reprit les armes, mais il n’eut point à en fare usage. Les assiégés se rendirent à merci. On e compta 140, dont 35 blessés. Tous s’étaient bravement battus, l’amiral leur en tint compte. Au lieu d’en faire des prisonniersde guerre, il les rendit à la liberté et donna l’ordre à Mr. Warnier de les ramener à terre. Les chefs marocains se montrèrent touchés de cet acte de miséricorde : en témoignage de reconnaissance, le Gouverneur de Mogador fit aussitôt conduire à bord du Rubis une vingtaine de sujets anglais au nombre desquels se trouvait avec sa famlle, le vice – consul Sir Wilshire, qu’il avait gardé comme ôtage malgré les pressantes réclamations des officiers du Vésivius.

histoire,mogador

 

Le prince de Jouinville eût pu s’en tenir aux succès de la veille : l lui parut cependant indispensable de ruiner de fond en comble ceux des ouvrages qui n’étaient qu’entamés, et décida qu’une pointe serait faite sur la ville : une colonne de 600 hommes, dont il prit la direction, débarqua sous la protection des feux du Pandour et de l’Asmodée et gagna rapidement le quartier de la marine. Elle y pénétra sans coup férir : tous les postes étaient désert.

-  Aussitôt, dit un témoin, les troupes se mettent à l’œuvre : les magasns à poudre sont noyés, les remparts abattus, les canons encloués et roulés à mer. C’était des pièces de bronze magnifique, moitié anglais, moitié espagnol. L’une d’elles était un chef d’œuvre de l’art ; son affût , également en métal, représentait un lion en pleine course : les quatre pattes de l’animal formaient les quatre roues ; sa tête portait la pièce.

histoire,mogador

 Le magasins de la Douane étaient encombrés de marchandises de toutes sortes : on les y laissa dans la crainte que le feu ne gagna trop vite d’immenses approvisionnements de poudre et de bombes répartis dans les casemates des forts. Quand tout le quarter ne présenta plus qu’un amas de décombre, la colonne regagna ses vaisseaux. A peine avait-elle quitter le rivage que plusieurs tribus kabyles se jetèrent dans la ville et la mirent à sac, après en avoir expulser la garnison.

          De la coquette Souira, dont Moulay Abderrahman avit fait sa résidence favorite, il ne restait plus que des muraillescriblées deboulets et noircies par la fumée : l’escadren’ayant plus rien à détruire appareilla le 22 août, partie pour Cadix et partie pour Tanger, où le prince de Jouinville devait attendre le résultat des négociations ouvertes entre les deux gouvernements au lendemain-même de la bataille d’Isly.

histoire,mogador

  Quelques vapeurs restèrent pour fermer l’entrée du port, et un bataillon de 500 hommes fit commis à la garde de l’île. Celle- ci fut évacuée le 17 septembre 1844, après la signature du traité de paix. L’équipage de la Belle Pouleencloua les canons pris à l’ennemi et brisa leurs affûts. Tout ce qui ne pouvait être enlevé fut livré aux flammes. »

histoire,mogador

 

    La tradition orale rapporte que l’un des canonniers d’Essaouira, en ce jour néfaste du 15 août, s’était étonnée : « Où étions – nous quand l’adversaire s’armait pour nous conquérir ?! » Dans la ville un chant anonyme d’époque nous en fait un récit vivace :

Ceci s’est pasé un jeudi

Le monde se voila d’obscurité

C’était avant le Dohr

Les gens étaient assis

Préparant leur déjeuner

Les canons les prirent

Pour cibles de leurs boulets,

Les hommes et les femmes vinrent

Sur les remparts.

C’était un coup venu du ciel.

La négresse se leva en criant :

« Où est mon maître ?! »

Bientôt est venu le soir

Tout le monde était terrifié

Le destin nous a frappé à l’instant

Où Omar El Eulj se baissa et où sa tête vola.histoire,mogador

 Le prince de Joinville consigna également dans ses notes le souvenir de cette bataille : « les navires Français arrivèrent devant Mogador...La mer était si houleuse qu’ils durent rester mouiller en face de la ville, sans même pouvoir communiquer entre eux. Malgré des bouées de deux cents brasses de chaînes, les ancres se cassaient comme du verre...Les combats étaient des plus violents... »

Joinville lui-même n’échappa que par miracle à la grêle de balles qui s’abattaient sur les assaillants. Accablés par le nombre, les Marocains finirent par se rendre après avoir résisté jusqu’à la dernière limite.

histoire,mogador

 On raconte que ce sont les Chiadma qui ont mis à sac la ville, et que depuis l’îles les soldats français visaient ceux des pillards que trahissaient les miroires qu’ils emportaient le long de la plage. Avant de fuir la ville dévastée, le négociant Touf El Âzz  avait dissimulé sa fortune en louis d’or sous du gravier de construction, dans le patio de sa maison. Il a pu ainsi retrouver intacte sa fortune une fois revenu à la ville  livrée au pillage.

  Un an plus tard, la paix fut conclue entre les deux gouvernements qui procédèrent à l’échange des prisonniers, comme le raconte Jacques Caillé dans la petite histoire du Maroc :« Le 4 juillet 1845, le Véloce parut devant Mogador, ramenant 123 prisonniers. Quelques uns des plus marquants, dont El Haj Larbi Torrès, se réunirent en cercle entre deux canons de la corvette. Après avoir essuyé leurs larmes, ils entonnèrent un chant d’action de grâce. Les officiers et les matelots français furent impressionnés par la joie calme et profonde avec laquelle ces hommes rendaient hommage à Dieu de leur délivrance. »

      Cinq années après ce bombardement, l’explorateur métis  Léopold Panet , qui partit de Saint Louis du Sénégal en passant par l’immense Sahara, la kasbah du Chaykh Bayrouk de Goulimine avec sa traîte négrière et enfin Mogador , signale de nombreux boullets de canon jonchant  les pieds des remparts.  Et Jusqu’ aux années 1960 je pouvais voir encore ma mère en train de moudre les épices dans l’un  de ces  boullets, que les habitants de la ville avaient recuilli au pied des remparts...Abdelkader Mana

16:20 Écrit par elhajthami | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, mogador | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Castello Real

castello réal bon.jpg

Le Castello Real d'après le plan levé du capitaine Lambrecht

histoire,mogador

Castello Real d'après le peintre Hollandais Adrien Matham(1641)

        Tout près de la mer, le pilote portugais Duarté Pacheco Pereira signale en 1506, sur la terre ferme « la ville de Mogador ». De tout temps, les navigateurs venaient chercher ici cette eau douce et précieuse de l’oued Ksob, comme en témoigne Pacheco Pereira dans son Esmeraldo de situ orbi : «  Entre la rivière des Aloso – de l’oued Ksob – et l’île de Mogador, la distance par mer est de sept lieues, ...de cette île à la terre ferme, il y aura la distance à laquelle une grande arbalète peut lancer une flèche en terre ferme. Il y a beaucoup d’eau douce tout près de la mer, dans laquelle cette eau douce vient se jeter. La meilleurs entrée du mouillage et du port de cette île, est celle qui se trouve du côté Nord-Est...Par cette bonne entrée peuvent pénétrer des navires de cent tonneaux ; ils s’amarrent avec une ancre et un câble, ledit câble étant attaché à l’île même, et l’on sera par six ou sept brasses, fond net, bon et sûr. »

histoire,mogador

 Plan du mouillage de l'ile de Mogador 1736

   Ce texte daté de 1506, prouve qu’à cette époque, des navires de cent tonneaux fréquentaient le port et l’île de Mogador. Bien plus, lorsque Emmanuel 1er  avait donné l’ordre en août 1506, d’y construire  un « Castello Réal »(château royal), il y avait déjà une ville du nom de Mogador qui existait dans la baie , comme nous le signale Pachéco :

histoire,mogador

A l'emplacement du Castello Real(1506) s'élève depuis 1767, ce bastion de la Scala du port

histoire,mogador

La ville a été batie sur un ilot rocheux entouré de dunes

histoire,mogador

Le mouillage d'Amgdoul a toujours été l'aboutissement des caravanes subsahariennes longeant les rivages de l'Atlantique

histoire,mogador

Mogador - Passage des dunes

histoire,mogador

« L’année de Notre Seigneur Jésus – Christ 1506, Votre Altesse fit élever dans la terre ferme de cette ville de Mogador, tout près de la mer, un château qui s’appelle Castello Real, et que sur votre ordre construisit et commanda Diego d’Azambuja , gentilhomme de Votre maison et commandeur de l’ordre de saint Benoît de la commanderie d’Alter Pedreso, lequel fut combattu et persécuté, autant que leur puissance le leur permettait, par la mutitude de Berbères et d’Arabes qui se réunirent pour attaquer ceux qui s’en vinrent construire cet édifice ; enfin ce château se construisit malgré eux et la gloire de la victoire resta entre les mains de Votre Majesté sacrée...Entre le Castello Réal et l’île de Mogador d’une part et le cap Sim d’autre part, la côte court suivant la direction nord-sud, avec un quart nord-est et un quart sud-ouest et la distance par mer est de cinq lieues »

histoire,mogador

Le mouillage de Mogador levé le 21 avril 1736 par le capitaine Martin Lambrecht

histoire,mogador

Au port Barj el Barmil à l'emplacement du Castello Real

histoire,mogador

L’influence portugaise se heurta, devant Mogador, à une résistance dont l’âme fut l’organisation maraboutique des Regraga. Les affrontements entre Portugais et Berbères Haha devaient se poursuivre au  delà de 1506.L’âme de la résistance locale à l’influence portugaise fut regraga, sous la direction du mouvement jazoulite dont le fondateur, l’imam Al Jazouli, s’établit au lieu dit Afoughal, près de Had – Draa, où il prêcha la guerre sainte contre les chrétiens, avec une telle foi qu’il eut bientôt réuni plus de douze mille disciples de toutes les tribus du Maroc.

histoire,mogador

un banc de sable faisait obstacle aux courants marins, en reliant l’île principale à l’embouchure de l’oued Ksob. Il est indiqué sur une ancienne carte que ce banc de sable « se couvrait et se recouvrait », ce qui laisse supposer qu’on pouvait rejoindre l’île à marée basse. Une tradition orale rapporte que les troupeaux de « Diabet » (le village des loups) allaient y paître au milieu d’une nuée de pique-bœufs. Les marins y sacrifiaient taureaux noirs et coqs bleus à leur saint patron  Sidi Mogdoul.

histoire,mogador

Plan de mouillage de l’île de Mogador - entre 1650 et 1700.

histoire,mogador

 Le Mouillage d'Amgdoul

histoire,mogador

Le sanctuaire de Sidi Mogdoul

     Devant l’hostilité des tribus, le Castello Real, n’avait pu être bâti que de vive force. Il dut rester assiégé un certain temps et la situation de ses défenseurs fut un moment assez critique pour que Simâo Gonçalves de Camara, troisième gouverneur de Funchal, leur envoyât à ses frais, de l’île de Madère, un secours de 350 hommes. Le plus ancien document relatif au Castello Real date du 5 septembre 1506 : c’est un alvara du roi ordonnant aux almoxarifesde Madère d’exécuter tout ce dont Diego d’Azambuja les requerra pour la construction de la forteresse de Mogador.On doit signaler aussi une quittance du 7 octobre 1507 qui indique « le biscuit, la viande, le bois, la chaux, la brique et les autres choses qu’on a achetées pour la construction du Castello Real que Diego d’Azambuja a fait par notre ordre à Mogador qui est au pays de Barbarie. »

histoire,mogador

histoire,mogador

       Une quittance datée de Santarem, 24 octobre 1507, concerne les achats de blé faits en 1506, sur l’ordre du roi, au Castello Réal en Barbarie, par Pero da Costa, capitaine du navire  Sâo – Symâo . Ces achats furent faits avant la fondation du château. Le 3 septembre 1507, Diego de Azambuja écrit de Safi à l’Almoxarife de Madère, pour le prier de remettre à Joâo de Rego, porteur de sa lettre, un certain nombre de choses pour le ravitaillement du Castello Réal, en particulier de l’orge pour les chevaux qui sont dans le château. La fourniture doit être prévue pour « vingt chevaux pendant huit mois ».

histoire,mogador

 Plan de la isla y puerto de Mogador situada en la costa occid(ent)al de africa a 8 grad(o)s de long.d y 31, y 35 min.s de latit.d en frente de la isla de Madera – 1795-1796.

         Le 14 octobre 1507, Joâo de Rego donne décharge de tout ce qu’il a reçu, à savoir :

Onze pipes de vin, deux de vinaigre, une d’huile, 15 muids de blé au lieu de l’avoine demandée pour les chevaux, qu’on n’a pas pu trouver, 20 autres muids au lieu de biscuits qu’on n’a pas eu le temps de faire, plus un bateau neuf à quatre rames et 3000 reis en argent pour les soldes de la garnison.

     Nous pouvons encore citer deux documents où allusion est faite à Mogador : mention de 716 varas de toile de Brabant envoyées, en 1506, de Flandre au Castello Real en Barbarie ; et quittance du 3 janvier 1518 en faveur de Joâo Lopez de Mequa, qui fut feitor (facteur) du Castello Real pendant les quatre premiers mois de 1507 et devint plu tard, feitord’Azemmour, puis de Safi.

histoire,mogador

Ysla Mogador situada en la lat 31° 42° y en la long.d 6°50’ segun el reconocimiento hecho de ord.n del rey – 1695-1696.

      Diego de Azambuja était à Abrantès le 27 juin 1507, et y reçut en don, d’Emmanuel 1er , le gouvernement du Catello Real de Mogador, en récompense de la peine que lui avait coûtée la construction de la forteresse « avec risque de sa personne et grande dépense de son argent ». Renvoyé par le roi à Safi, où il débarqua le 6 ou le 7 août 1507, Azambuja paraît y avoir ensuite résidé contamment jusque vers le milieu de l’année 1509. Son gendre, Francisco de Miranda, exerça par intérim, pendant ce temps, les fonctions de gouverneur du Castello Real.

       Pendant les premiers mois de 1510, le gouvernement du Castello Real reste uni à celui de Safi, entre les mains de D. Pedro de Azevedo. Puis Emmanuel 1er, par lettre du 1er  mai 1510, nomme Nicolau de Sousa capitaine et gouverneur du Castello Real, sa vie durant. Il est spécifié qu’au cas où le nouveau gouverneur obtiendrait la soumission de tribus dans un rayon de trois lieues autour de la forteresse, il percevrait à son profit les deux tiers des contributions versées par elles, un tiers étant retenu par le roi. D’ailleurs bien loin de soumettre les tribus des environs, Nicolau de Sousa, ne réussit même pa à conserver la forteresse.Il semble que la place ait été évacuée le 4 décembre 1510, d’après une lettre de Nuno Gato Cantador écrite de Safi, le seul texte qu’on ait à ce sujet.

 

histoire,mogador

1700 : En plus du Castello Real on reconnait l'église portugaise ainsi que l'ancienne kasbah des corsaires. On voit aussi que Borj el Baroud existait à l'embouchure de l'oued ksob existait bien avant la fondation de la ville actuelle en 1760

histoire,mogador

Eglise portugaise au noyau primitif de la ville

      Du 8 au 23 janvier 1641, le peintre hollandais Adrien Matham, séjourna en rade de Mogador et dessina un croquis de la côte et du château. Il faisait état de l’existence d’une Kasbah, abritée derrière les rochers où vivaient les corsaires  Béni – Antar :

« Le 8 janvier, au matin, nous nous sommes trouvés en vue de l’île de Mogador, et nous avons mis notre cheloupe à la mer pour voir si la rade était bonne pour nous. Nous y avons trouvé quatre toises d’eau, entre l’île aux pigeons et l’île de Mogador. Dans l’après midi, nous avons jeté l’ancre et tiré une salve de trois coups de canon, auxquels les gens de la kasbah ont répondu par un coup.

histoire,mogador

Avant l'édification des quais en 1920, la porte de la marine donnait directement sur la mer

histoire,mogador

histoire,mogador

Porte de l'ancienne kasbah, dite "porte Moulay Massaoud" du nom de son ancien portier, sur laquelle est inscrite la fondation de la ville en 1764 et sur laquelle s'élève l'horloge à partir des années 1920

 Le 9 au matin, notre cheloupe est allée à terre, par un vent nord-est, pour voir s’il y avait moyen de se procurer de l’eau fraîche, et aussi si nous pouvions trafiquer avec les Maures de la Kasbah. Ceux-ci ont accueilli amicalement nos gens et ils nous ont envoyé à bord leur interprète, un juif, en échange duquel, suivant leur coutume, un des nôtres devait rester à terre, comme otage, tant que durerait, des deux côtés, les visites de leurs gens à bord et des nôtres à terre.

La kasbah est munie de onze ou douze canons en fer, et, vue d’une certaine distance, elle a l’apparence d’un four à chaud hollandais ; mais l’île aux pigeons est inhabitée, sauf qu’on y trouve d’innombrables pigeons sauvages qui se nichent par milliers dans les rochers et qui sont si familiers qu’ils se laissent prendre avec la main. Il y avait dans un petit bosquet, à terre, un faucon qu’un de nos gens aurait pu prendre, s’il l’avait vu, car il faillit mettre le pied dessus, et c’est alors seulement que le faucon prit son vol. Pour parcourir cette île aux pigeons dans sa longueur, il faut une bonne demi-heure de marche environ : sa largeur ne dépasse pas dix fois la longueur de notre vaisseau ; mais elle est très élevée et sans eau fraîche. On trouve seulement entre les rochers de l’eau de pluie en très petite quantité.histoire,mogador

Rue du Mellah

Pour en revenir à l’île de Mogador, toujours est-il que nous avons pu y faire de l’eau. Le juif susdit nous fournit aussi du pain frais, des amandes, des raisins et des gâteaux d’olives qui avaient un goût excellent. Le costume des habitants est singulier : ils portent habituellement un long vêtement blanc – le haïk– qu’ils enroulent de diverses manières autour du corps. Le juif susdit nous a donné des renseignements sur leur mariage, etc.

histoire,mogador

 

        Le 12 janvier 1641, c’était pour les Maures leur fête de Pâques – l’aïd es-seghir qui marque la cessation du jeûne du Ramadan- qu’ils célèbrent avec une grande dévotion. Dans l’île on trouve une espèce rare de grands oies. Nous en avons acheté à la kasbah de fort belles et fort grasses, à deux stuivers pièce. Quant à l’approvisionnement d’eau, il comporte ici de grands dangers, à cause des brisants, au point que notre petite chaloupe et les gens qui la montaient pour apporter de l’eau à bord ont chaviré deux fois, le 15 et le 16 de ce mois. Nos gens se sont sauvés à grand’peine, non sans courir de grands périls. Pour chaque tonneau d’eau on devait payer au caïd de la kasbah la valeur environ d’un écu de Hollande.

       Il est aussi  à remarquer que nous avons ici trois dimanches à célébrer chaque semaine, à savoir, celui des Maures : le vendredi, celui des juifs : le samedi, et le nôtre : le dimanche.

       Le 23, nous avons fait tous nos préparatifs pour faire voile, avec l’aide de Dieu, vers Ste Croix, si le vent nous est favorable. Nous sommes sortis heureusement du port de Mogador par un vent est-nord-est et nous avons gagné la haute mer. »

histoire,mogador

Les ruines du château portugais de Mogador ne disparurent qu’aprè 1765, lors des travaux de construction du port. Les pierres du Castello Real servirent par la suite à la construction de la scala du port. A son emplacement s’élève maintenant la tour, ou bastion circulaire qui se trouve près du chantier naval et qu’on appelle  Borj el Bermil (la tour du toneau) Le Castello Réal, s’élevait au bord de la passe nord, sur la pointe rocheuse qui supporte le môle ouest du port actuel. Il figure à cette place, sur un plan levé, en octobre 1629, sur l’ordre du commandeur de Razilly et sur un autre plan daté du 25 octobre 1767, dû à Théodore Cornut.

histoire,mogador

Au port la tour en forme de tonneau(borj el barmil)a été édifié en 1764, sur les ruines du Castello Real qui date de 1506

histoire,mogador

      Mon père disait qu’au XVIIIe siècle, Essaouira était une place militaire nécessaire, parce qu’une trop grande superficie demeurait sans surveillance. Sur la côte atlantique, la distance entre Safi et Agadir était trop grande. Ce long littoral n’était pas suffisamment protégé contre les puissances étrangères, qui pouvaient s’y installer à tout moment , comme l’avait déjà montré l’occupation portugaise avec la construction du Castello Real en 1506.

     La position géographique de Mogador faisait d’elle un lieu envié au carrefour des routes marchandes, terrestres et maritimes. Dés sa fondation, elle fut menacée par l’Espagne comme le rapporte Höst :

« En 1765, après que le Sultan qui s’est rendu lui-même à Essaouira, eut distribué aux consuls les terrains à bâtir, un bateau espagnol se profila à l’horizon. Un navir de guerre espagnol armé de soixante-dix canons s’approcha, et comme Mohamed crut que les Espagnols avaient l’intention de déranger ses constructions, il expulsa le consul hollandais Demetri, l’accusant de connivance avec l’Espagne, en ajoutant qu’à l’avenir il ne voulait pas de Grec comme consul de Hollande, mais d’un Hollandais. Ensuite, il envoya au roi d’Espagne un cadeau composé de lions, tigres, chevaux, accompagné de trente esclaves espagnols, afin de lui mettre d’aimables pensées en tête, et lui laisser entendre que ce geste était un pas vers la paix. La suite montra d’ailleurs que ces agissements pleins de sagesse ne demeurèrent pas sans résultat. »

       En 1767 rapporte Höst, arrivait à Marrakech un ingénieur français d’Avignon nommé Nicolas Théodore Cornut, ancien déssinateur des places fortes du Roussillon, passé à la solde des Anglais, que le sultan recruta à Gibraltar. C’est lui qui dressa le plan de la ville forte. De là ces fortifications à la Vauban, style XVIIIè siècle, qui furent armées avec des canons achetés en 1780 à la fonderie espagnole de Barcelone ou provenant de prises de mer.

               Les îles permettaient d’installer des batteries de canons à feux croisés : le « bation de surveillance » (borj el âssa), sur l’île faisait face au « bastion de la poudre » (borj el baroud) à l’embouchure de l’oued Ksob et protégeait ainsi l’entrée sud de la baie. De même le « bastion de Moulay Bennacer », toujours sur l’île, faisait face au « bastion circulaire » (borj el barmil) dans le port, défendant l’accès nord de la baie.  histoire,mogador     L’architecte français que Sidi Mohamed Ben Abdellah chargea de construire l’actuelle Mogador, donne des renseignements encore plus précis. Le château y est décrit sous les lettres :

« O Porte d’entrée.

« P Cour,

« Ancien château construit par les Portugais, qui est très peu de chose et qu’ils ont abondonné depuis 400 ans. L’épaisseur de ses murs n’ont que six pans dans ses quatre faces. Les Mores y ont fait depuis cinq ans un parrapet sur la platte forme, dont la bâtisse tombe d’elle-même et sur la face du côté ouest-nord, il a quatre pièces de canon de 12.

« Q Magasins très faibles, mauvaises voûtes, mauvais murs de 2 pieds d’épaisseur, où il y a dix mille barrils de poudre anglaise qu’ils ne sont point en sûreté. »

Cornut établit le plan en 1769 en suivant les contours de l’îlot rocheux sur lequel la ville est construite et dont elle conserve la forme, mais il fut bientôt congédié et les fortifications de la scala de la mer furent confiées à un Gênois, selon Jacksen : « La longue batterie qui se trouve le long du côté Ouest de la ville fut construite par un Génois. Elle est peut-être plus remarquable par sa beauté que par sa force, et mieux calculée pour les opérations offensives que pour la défense. »

histoire,mogador

Plan de la grande isle de Mogodor et ses environs de la rade du château et de la nouvelle ville de suera en Barbarie – après 1767(on voit clairement dans ce plan établi par Théodor Cornut, qu'il ne concerne que l'ancienne kasbah).

histoire,mogador

De style Vauban, la Scala de la mer apparait clairement dans le plan Cornut de 1767, comme dispositif défensif de l'ancienne kasbah histoire,mogador

Mogador - Les canons de la batterie de la Scala

Le 15 décembre 1769, Louis Chénier, consul de France, souligne :

 « L’Empereur est arrivé à Mogador au commencement du mois passé. Il a vu avec toute la tendresse d’un auteur la ville dont il a posé lui-même les fondements. Il a fait établir une batterie respectable à l’entrée du port, et fait réparer tant bien que mal quelques fortifications, que le temps avait déjà dégradées. Sa Majesté doit partir à la fin de ce mois pour retourner à Maroc. »

 En  cette même année 1769, il eut la chance de récupérer Mazagan que les portugais évacuèrent.

        La ville n’a pas émergé lentement des méandres du Moyen Âge ; elle est née de la volonté du prince. En effet, pour marquer son désir de faire d’Essaouira le principal port sur l’océan, Sidi Mohamed Ben Abdellah (1757-1790) commença par bâtir un mur sur les rochers au bord de l’eau. Il fit inscrire la bénédiction du Prophète en lettres coufiques sur la pierre de taille arrachée aux flancs de cette île qui n’est rattachée au continent que par une lagune. .

La Kasbah – ce « quartier du Roy » comme l’appelait Cornut – est le plus vieux secteur de la ville. C’était le lieu où résidait « le Makhzen » (l’administration royale), les vice-consuls des pays européens, et les « Toujar Sultan » (les négociants du Roi). Le Sultan avait ordonné à tous les consuls de passer à Essaouira et d’y bâtir une maison. Comme le souligne le Danois Géorges  Höst dans son journal de 1765 : Après que Mohamed se fût rendu lui – même à Souira et eût distribué les terrains à bâtir, il ordonna à tous les consuls d’aller là bas eux aussi et d’y faire construire à leur compte, chacun une maison importante et convenable ; tous les ambassadeurs devaient arriver là, tous les pirates devaient amener leurs prises dans la même Souira, et un chantier naval devait y être fondé.

Les douanes étaient perçues par les oumananommés par le makhzen, qui résidait dans la kasbah. C’est la Kasbah qui contrôlait le port. C’est ce que symbolise la porte de la marine : le port est un passage entre la terre et la mer. Cette porte qui a l’air d’un décor avait une efficacité symbolique, parcequ’elle représente le pouvoir s’interposant entre la terre et la mer, prélevant des droits de passage en ce lieu de transit.

histoire,mogador

 Plan de la baye et de la ville de Mogadore en 1786(on y voit clairement la médina se structurant autour de ses principaux axes sous forme de croix).

histoire,mogador

histoire,mogador

Where Manchester cotton is sold- Mogador

histoire,mogador

Mogador - souk aux grains

histoire,mogador

Centrl Bazar Mogador

histoire,mogador

     Mon père me disait que les arcades de Souk Jdid ont été édifiée en deux étapes comme en témoignent les gravures en pierre de taille : la partie Ouest d’abord, édifiée en 1858 a servi de modèle pour les arcades de la façade Est, édifiées en 1945 par Abdellah Ben Tahar, alias « Jmal » (le chameau). Soit à 87 ans d’intervalle. Ce qui veut dire qu’une fois le cadre général mis en place, à savoir les quatre portes et les remparts qui structurent l’ensemble autour d’un axe sous forme de croix, l’espace a été progressivement occupé par les nouveaux arrivants : arrivée des « Ahl Agadir », en 1773, construction de la nouvelle Kasbah en 1876, mise en place de Souk Jdid en 1858, etc

histoire,mogador

Une ville multi-éthniques et multi-religieuses

histoire,mogador

Essaouira comme "Carrefour culturel"

histoire,mogador

Khoddara: rue du marché

histoire,mogador

Souk Djdid

histoire,mogador

     Bouchers cacher

Alors que dans les autres médinas, les gens s’établissent d’abord, puis les habitations sont entourées de remparts, à Essaouira, c’est le processus inverse qui s’est produit. On a commencé par la géométrie, et la démographie a dû se couler dans l’espace inscrit par un plan directeur. C’est la Kasbah qui avait induit la médina :les consuls, les négociants et l’administration avaient besoin d’artisans pour bâtir, de paysans pour les nourrir et de soldats pour les protéger. Au XVIII èmesiècle, en dehors de la Kasbah, les gens habitaient sous des tentes et dans les casemates qui donnaient à Essaouira un visage militaire, à côté du quartier administratif.

histoire,mogador

   Le sultan pensait ainsi disposer d’un port bien défendu mais accessible toute l’année à ses navires, alors que les ports du Nord étaient pratiquement inabordables en dehors de la saison des pluies à cause de leur ensablement, comme le relate Ahmed Ennaçiri Esslâouî dans son Kitab Al-Istiqçâ :

« Après avoir terminé la célébration des noces de ses enfants, le sultan Sidi Mohamed ben Abdellah (Dieu lui fasse miséricorde !) se mit en route pour le pays où se trouve Essaouira, afin de construire cette ville et de la peupler. Il s’occupa de la tracer et de faire creuser les fondations, et laissa au travail les maçons et les divers artisans. Il donna l’ordre à ses gouverneurs et à ses caïds d’y construire leurs maisons. Il retourna ensuite à Marrakech. Dans sa Rihla, le sécrétaire Aboûl’abbâs Ahmed ben Elmahdi Elghazzâl dit, en résumé, que le motif de la fondation d’Essaouira fut le suivant : Le sultan Sidi mohamed ben Abdellah était passionné pour la guerre sainte. Dans cette pensée, il avait fait construire des corsaires de guerre qui, le plus souvent, étaient ancrés dans le port des Deux – Rives et dans celui d’El’arêïch. Pendant deux mois de l’année, au moment de la saison des pluies, ces navires ne pouvaient pas prendre la mer, parce que ces ports ne faisaient qu’un avec les rivières. Dans les autres saisons, il y avait trop peu d’eau et le sable obstruait l’embouchure des rivières, de telle sorte que les bateaux ne pouvaient les franchir.Le sultan ‘Dieu lui fasse miséricorde !), après avoir réfléchi aux moyens susceptibles d’assurer le voyage de ses corsaires à n’importe quel moment de l’année, s’appliqua à construire Essaouira, dont le port ne présentait pas de pareils inconvénients.

histoire,mogador

Les douanes étaient perçues par les oumana nommés par le makhzen, qui résidait dans la kasbah. C’est la Kasbah qui contrôlait le port. C’est ce que symbolise la porte de la marine : le port est un passage entre la terre et la mer. Cette porte qui a l’air d’un décor avait une efficacité symbolique, parcequ’elle représente le pouvoir s’interposant entre la terre et la mer, prélevant des droits de passage en ce lieu de transit.

histoire,mogador

histoire,mogador

Mogador - Le commandant indigène du port (les Amines)

  Un autre qu’Elghazzâl prétend que le Sultan décida la fondation d’Essaouira pour une autre raison. La place d’Agadir était le refuge de révoltés du Sous, comme tâleb Sâlah, entre autre, qui laissaient faire par là une exportation clandestine des marchandises et conservaient pour eux les bénéfices réalisés. Le Sultan pensa qu’il ne pouvait y avoir d’autres moyens de mettre fin à cette situation que de créer un autre port, également rapproché de cette région et du centre de l’Empire, afin de diminuer petit à petit les gains qu’Agadir procurait à ces rebelles, car personne n’avait plus intérêt à s’y rendre. Il fonda donc Essaouira, la construisit solidement et s’appliqua à en faire une ville bien bâtie. Il arma de canons les deux îles, la grande et la petite, qui forment comme l’enceinte du port, et fit élever un fort bien armé sur le rocher qui avance dans la mer, de telle sorte qu’on ne peut entrer dans le port sans être à porter des canons à la fois de l’île et du fort.

histoire,mogador

   Quand la ville fut terminée, le Sultan y fait venir des négociants chrétiens pour faire du commerce et, pour les attirer, les dispensa de toute taxe douanière. Les commerçants affluèrent bientôt de tout côté et vinrent s’établir dans ce port, qui fut peuplé en peu de temps.

Abdelkader Mana

16:19 Écrit par elhajthami dans Histoire, Mogador | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : histoire, mogador | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Souvenirs de Mogador

maequeteurs.jpg

Mon père, maalem Tahar Mana, jaugeant un madrier de bois de thuya(gayza) à la coopérative des marqueteurs d'Essaouira(les années 1950)

Au tout début des années 1980, mon père avait accordé à la radio une interview où il relatait l'histoire de la marqueterie à Essaouira. Son ami maitre Abdessadek qui a conservé l'enregistrement audio m'en avait remi copie lors d'un repas communiel commémorant le quarantième jour de son décès le 13 décembre 2002.Aujourd'hui en recherchant un document qui atteste de la présence des Al Mohad au pays Haha, je suis tombé sur la transcription des propos de mon père, que je pubie ici parce qu'ils me semblent les plus appropriés pour "légender" les vieilles photos en noir et blanc du Mogador du début de ce XXème siècle où il était né vers 1912;;;

histoire,mogador

L'atelier de mon père était jadis l'un des entrepots des canoniers(tabjia) de la Scala

Dans son entretien radiophonique mon père racontait comment des éléments d'architecture de la ville l'avait influencé lui-meme ainsi qu'un de ses prédécessaurs:

histoire,mogador

"La porte de dar laachar(là où on entreposait le 1/10ème des marchandises qui transitaient par le port) a été imitée par maalam Omar El Eulj que Dieu ait son ame: il avait confectionné une table dont les pieds imitaient parfaitement cette porte monumentale avec toute sa décoration.Comme il s'agissait d'une table hexagonale, il fallait reproduire six fois la meme façade.On appela alors cette table "Du Chayla": le nom de la frégatte qui avait effectué la prise d'Essaouira par les Français en 1913 La table dite "du Chayla" de maitre Omar remonte à 1932 : on l'avait retrouvé brisée et jetée négligemment au parc municipal de la ville.Elle comportait une transcription calligraphié au feu, semblable à l'ancre de chine, mais cette brulure, cette épreuve du feu avait la particularité d'etre inscrite pour l'eternité.A l'époque on lustrait les objet avec l'huile de noix : aucun specimen n'a été malheureusement conservé, de sorte que lorsqu'on avait ouvert le Musée en 1980, l'artiste et conservateur Boujamaa Lakhdar avait trouvé la plus grande difficulté  à réunir des modèles représentatifs de l'artisanat local(bijoux, tapis, marqueterie etc.). La ville a connu pourtant de grands artistes-artisans, dont il ne reste que peu de traces pour témoigner de leurs oeuvres ...

histoire,mogador

Mogador- Caserne du Chayla

L'ancien magasin du Makhzen, qui fut une prison à la veille du protectorat et qui a été transformé en caserne par les français qui le surnommèrent "Du Chayla", du nom de la frégatte qui avait opérer la prise de la ville en 1913.

histoire,mogador

"Les français ont donné le nom de "du Chayla" à toute cette place "

histoire,mogador

Mogador-Prisonniers berbères amenés à la prison sur ordre de Moulay Abdelaziz

A la veille du Protectorat, le dar laachar, était devenue une prison où on enfermait les rebelles du bled siba.Et juste à coté, il y avait l'ancienne medersa qui dépendait de la mosquée de la kasbah.

histoire,mogador

Les troupes du nouveau sultan Moulay Hafid se préparent à marcher sur Casablanca

La marqueterie s'est développée pour répondre aux commandes des premiers habitants de l'ancienne kasbah qu'étaient le Makhzen, les négociants juifs et les consuls raconte mon père: "Maâlem Omar fabriquait de petites boites décorées de nacre ainsi que des crosse de fusils pour la fantasia à partir du bois de noyer.Dans les années 1930, le pacha Ben maalem m'avait donné à imiter un boitier à sucre en bois de noyer en me disant qu'il faisait partie du mobilier de Moulay Abdelaziz.C'était une technique souirie ancienne: de petits objets simples quant à leur décoration.Vivaient alors à Essaouira, les Amines du port, les consuls des nations européennes et les représentants du Makhzen.Ils ont commencé à faire des commandes aux artisans comme ça sera le cas avec les touristes européens par la suite: c'est la commande qui a permi à la marqueterie de se développer peu à peu.."

histoire,mogador

Défilé du "Makhzen" sur la place de la grande mosquée à la veille du Protectorat

Le maitre artisan de Omar el Eulj qui s'était inspiré de la fameuse porte de l'ancienne kasbah pour fabriquer sa table dite la "Mida du Chayla", avait pour maitre el haj Jilali el Eulj: ces Alouj dont l'un des quartiers de la ville porte le nom, sont d'anciens chrétiens issus de prises de mer au temps de la course: ainsi la porte de la Marine, on la doit à Ahmed EL EULJ, dit également Ahmed el Inglisi(l'ANGLAIS), et lors du bombardement de la ville par l'escadre de Joinville, les canoniers de la Scala de la mer était dirigés par Omar el Eulj, à la meme époque ceux de la grande ile étaient dirigé par Torrès le renégat d'origine andalouse.Et on doit la finition des travaux de la Scala de la mer à un Génois: la ville revetait donc un caractère international dés sa fondation du fait de son ouverture sur les lointaine rivages de la Méditérranée et sur les lointains confins du désert...

histoire,mogador

Le temps des caravanes dans les dunes de Mogador

"Le bois de thuya,poursuit mon père, on l'amenait qu'on travaillait d'abord au tour, pour les estrades et les balcons des maisons en construction, était amené à dos de chameaux des hrarta, au sud d'Essaouira.Auparavant on utilisait d'autre bois: le palais ensablée à l'embouchure de l'oued ksob, qui servait de résidence à Mohamed Ben Abderrahmane au milieu du XIXème siècle ou la mosquée de la kasbah, leur boiserie n'était pas en thuya..."

histoire,mogador

La boiserie de dar sultan ensablée, n'était pas en thuya

"Le Sultan avait chargé Concler ,le consul des Pays Bas, de lui construire une maison  à deux étages sur le plan de celle d’Amsterdam, mais avec un patio ; il avait indiqué le nombre de pièces, leurs dimensions,etc.., le toit devait être en plomb, les cheminées en marbre, les vitres en cristal, et non en verre ordinaire.Il était bien entendu que les bois et les fers ouvrés devaient venir des Pays-Bas.Le consul se rembourserait avec des franchises de sortie sur les blés."  Lettre de Sumbel à Concler , 28 août 1767.(Rijksarchief, Stat.-Gen., 7.121 ;Llias Barbarije, 1767-1770)

histoire,mogador

A Mogador, les caravanes de Tombouctou relayaient les caravelles de la lointaine Europe

histoire,mogador

L'un des grands fondateurs de la marqueterie locale, fut le cheikh Brik; un noire qui exécutait les commandes de "dar Makhzen"(la Maison Royale).Une fois, alors qu'il était encore jeune, Haj Mad(le maitre artisan de mon père) a aperçu le cheikh Brik en train d'administrer une fessée à l'un de ses apprentis sur un madrier.De sorte que lorsque son propre père l'a amené pour apprendre le métier à son tour, il s'en est souvenu et a tout fait pour éviter toute punission.D'ailleurs le maitre ne l'a jamais puni parce qu'il l'aidait à déchiffrer les messives qu'il recevait de dar Makhzen.

histoire,mogador

El haj Mad était étudiant dans une école coranique: une fois de retour d'une partie de chasse avec un copain, en passant l'allée des forgerons(haddada), accompagnés de sloughi et portant une tenue de chasse, son père Belaid el kouchnane s'adressa en ces terme à l'un de ses amis:

- Le voilà devenu voyou, et moi qui voulait faire de mon fils un étudiant en religion?!

Et c'est ainsi qu'il avait décidé de le faire sortir de l'école coranique pour le confier à son maitre - artisan en marqueterie.

histoire,mogador

histoire,mogador

Haddada l'allée des forgerons en 1912, où aboutissaient les caravanes

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

C'est dans cette artère de haddada que se trouvait l'atelier de l'un des premiers marqueteurs d'Essaouira, ainsi que la zaouia d'où partait en procession "la chamelle de Moulay Brahim" à chaque fete du Mouloud vers son sanctuaire dans l'Atlas au Sud de Marrakech: laquelle chamelle était conduite par notre voisin le boiteux Moulay Omar. Le local de cette zaouia existe encore à Haddada mais il semble fermé pour toujours...La chamelle était offerte àMoulay Brahim le saint qui favorise l'amour et qui fonctionne comme une agence matrimoniale auquelle s'adressent surtout les jeunes filles en mal de mariage...

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

La parade du vendredi: un moment fort où le makhzen impose son pouvoir symbolique

histoire,mogador

Le pouvoir tire sa légitimité de sa descendance du Prophète : en pays musulman une partie de la population écrase l'autre au nom de la religion...

 

histoire,mogador

Place Laachour avant la démolition de la cloison qui l'isolait de Dar Makhzen: sur les deux images précédantes on reconnait les trois portes de l'ancien tribunal qui existe toujours

histoire,mogador

L'entrée de Dar Makhzen que le Protectorat a démolithistoire,mogador

La meme entrée de Dar Makhzen où sont réunis les négociants juifs

histoire,mogador

L'ancienne "Dar Makhzen" avant sa démolition à l'avènement du Protectorat

histoire,mogador

L'emplacement de "Dar Makhen" était aussi un lieu de campement

histoire,mogador

Sur le front de mer, un grand rempart reliait l'ancienne kasbah au port

histoire,mogador

Campement au pied du Mechouar comme centre politique

histoire,mogador

Le Mechouar est au coeur des transaction économiques et politiques

histoire,mogador

Face au pouvoir central qui avait son siège dans la ville, il y avait le caidalisme qui dominait dans la campagne.

histoire,mogador

histoire,mogador

Le protectorat a joué les "caids soumis" du bled makhzen contre les "caids rebels" du bled siba.

histoire,mogador

Le caid Tigzirine des Ida Ou Tanane était l'allié du Protectorat contrairement au caid Anflous des Neknafa

histoire,mogador

 

histoire,mogador

La parade du caid et sa suite en ville

histoire,mogador

 

histoire,mogador

 

Le défilé des soldats français de la frégate du Chayla sur la place qui allait porter le nom de "Place de Chayla" et qui s'appelait jadis "Place de la grande mosquée" ou "Place Laachar".

histoire,mogador

Mogador - Place Laachour

histoire,mogador

La désormais "Place du café de France" apès le décloisonnement de l'ancienne "Place laachour"

histoire,mogador

 histoire,mogador

Place du Chayla où on venait de planter les caouatchou du genre numphéa

 

histoire,mogador

Mogador, avenue "du Chayla" avec "café de france"...

histoire,mogador

Et l'hotel "Roussillon"...

histoire,mogador

Place de "Café de France"

histoire,mogador

histoire,mogador

Le syndicat d'initiative rasée dans les années 1980 ainsi que les cabines de la plage

Jusqu'aux années 1970, était exposé à la vitrine du syndicat d'initiative une miniature de la Scala de la mer en bois de thuya fabriquée par mon père dans les années trente.On la retrouvé plus tard au parc municipale brisée et désarticulée en plusieurs morceaux.Mon père racontait en ces termes cette création de sa jeunesse dont il était fier: "La marqueterie avait connu une réelle expansion dans les années trente du fait qu'il fallait répondre aux nombreuses commandes de la communauté française de la ville.La plupart des marqueteurs travaillaient alors pour le compte du bazariste Bungal.Un jour celui - ci est venu me voire pour me commander d'exécuter une miniature en bois de thuya de la Scala de la mer me disant:

- Prends une équerre et une planche et trace un arc.

Une fois que je l'ai exécuté, il me demande:

- Qu'est ce que c'est?

C'est ainsi que j'ai commencé à exécuter la miniature de la Scala sans échelles. De ce fait le premier essai n'était pas concluant.

histoire,mogador

C'était le temps du Protectorat français sur le Maroc:les agens du controleurs civil étaient venus voir la mignature de la Scala accompagnés du minotier Sandillon.Celui-ci dit à Bungal:

-Vous ne réussirez à reproduire la Scala qu'en travaillant à l'echelle.histoire,mogador

Bungal me rejoint avec un rouleau de ficelle et me dit:

-Allons-y!

On s'est rendu à la Scala tôt le matin et nous avons commencer à prendre les mesures en faisant correspondre à chaque metre de la Scala réelle à deux centimère pour sa miniature.Pour ne pas etre l'objet de risée des gens, j'ai commencé à venir à la Scala dés la prière de l'aube, bien avant le levé du soleil pour mesurer les dimensions de la place forte dont j'avais établi le plan.La transformation du metre en centimètre a pris plusueurs jours avant que je ne commence à voir un peu de lueur.Je me rapelle que c'était en 1935, lorsque j'avais commencer à prendre les mesures de la tour ronde de "Borj el Barmil"...

histoire,mogador

histoire,mogador

histoire,mogador

 Le décor de la Scala joue un rôle essentiel dans la mise en scène de la tragédie d'Othello. Ceux de Mogador  avec sa forteresse dans les brumes avec une telle découpe sur le ciel qu'elle convient le mieux au complot Shakespearien de Lago. Au début des années cinquante, le souvenir était encore vivace du tournage d’Othello par Orson Welles à Mogador. Le soir on le voyait souvent méditer sur la grande place du syndicat d’initiative.histoire,photographie Dans le film, on reconnaît surtout « Tik-Tik » avec son luth au pied des remparts de la Scala de la mer. « Tik-Tik » est mort récemment en ivrogne à la vieille impasse d’Adouar qu’évoque en ces termes le rzoun, vieux chant de la ville : 

Ô toi qui sen vas vers Adouar 

Emporte avec toi le Nouar  

La rime est un jeu de mot entre « Adouar » (le nom de la sombre impasse supposée cacher les belles filles de la ville) et le « Nouar » (le bouquet de géranium et de basilic). 

Mon père me racontait qu’un jour Orson Welles se présenta à son atelier alors qu’il était en train de terminer une magnifique table en bois d’arar, décoré de dessins géométriques complexes et de rinceaux d’inspiration andalouse. Quand mon père dit à Orson Welles le prix de la table en question, le cinéaste américain en fut offusqué :  

À ce prix-là, lui dit-il, je briserais  cette table sur ma tête plutôt que de la vendre !

histoire,mogador

histoire,mogador

 histoire,mogador

 

histoire,mogador

La meme allée des forgerons où on avait planté des arbres sous le protectorat(1912-1956)histoire,mogador

Maalem Tahar Mana(1912-2002)

16:18 Écrit par elhajthami dans Histoire, Mogador | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, mogador | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Le crépuscule de Mogador

histoire

Le juif de Mogador, peint en 1958 par Boujamaâ Lakhdar(1941-1989),

Collection maître ABDESLAM Raïs.

Le crépuscule de Mogador …

Par Abdelkader Mana

mogador,nostalgie poésie

Femmes en haïk à Sdi Mogdoul, vénéré aussi bien par les musulmans que par les juifs d'Essaouira

« Essaouira périra par le déluge

Un vendredi ou un jour de fête,

Marrakech est un tagine brûlant,

Fès, une coupe transparente.... »

Quatrain du Mejdoub

En réaction à mon article sur "le temps des caïds", je viens de recevoir cette réaction interessante de Mr David Bensoussan concernant le caïd Oubihi des Haha :"J'ai trouvé l'info sur Bihi fort intéressante.Dans mon ouvrage "Il était une fois le Maroc", je le mentionne dans le contexte suivant:En 1844, deux tribus vinrent piller le Mellah dans l'intention de profiter du désordre général qui suivit les bombardements français. Ces deux tribus s'entre-tuèrent pour se réserver la part du lion du pillage. Celui-ci atteignit la partie Est et non juive de la ville et l'on rapporte que les dommages dus au pillage de la ville furent supérieurs à ceux causés par les bombardements des Français. L’on dénombra plus de 200 morts. Un grand nombre de juives furent enlevées et la famine régna un certain temps. Le Cheikh Abdallah Bihi de la tribu des Hahas prit l’initiative d’aller chercher des Juifs de Mogador et de les disperser dans les villages alentour, leur offrant ainsi protection jusqu’à ce que les troubles cessent."C'est troublant ce que vous me rapportez là, lui répondis-je : d'habitude, on ne rapporte que les exactions contre les juifs comme celui où on aurait obligé l'ancêtre des Afriat et ses compagnons dans le Sous à la conversion forcée à l'Islam...Alors que là, vous nous rapportez un fait à l'honneur du grand caid Oubihi des Haha,  qui aurait été le protecteur des juifs lors du pillage de la ville après le bombardement de 1844.Moi-même, je me souviens comment mes oncles maternels du pays Haha recevaient le bâtier et autres colporteurs juifs avec le rite d'hospitalité de la société berbère qui dénote d'une cohabitation millénaire sans le moindre indice d'une quelconque intolérance religieuse : Un bradiî (bâtier) juif, nous rendait alors visite sur son petit âne,et mon oncle l’installait sur une hssira (natte de jonc), à l’ombre de notre figuier préféré, lui offrait du thé et il se mettait à rafistoler les bâts éventrés d’où sortaient les touffes de pailles dorées.La récolte de l’arganier se faisait alors au prorata des ayants droit avec sacrifice de bouc et festin. Et le soir on assistait à de magnifiques fêtes de mariage avec chants de femmes aux caftans bariolés et fantasia

mogador,nostalgie poésie

 

La mort du Sultan Sidi Mohamed Ben Abdellah (1790) ouvre une période d'anarchie .Un prétendant vint du Sud , un sorcier qui s'appelait Bou Hallas "l'homme au bat".A la tête des gens du Sud, et principalement les Ait Ba A'mran, il monta vers le Nord.A Ifran , il fit massacrer tous les juifs.Les juifs d'Ifran conservent le souvenir de ce massacre qui eut lieu en 1790."Bou Hallas" disent-ils, brûla nos frère sur un bûcher dont ils apportèrent eux - mêmes le bois et sur lequel ils montèrent , sur l'ordre de leur chef , Naftali Afriat.Ces Ifrati seraient des descendants de ceux qui ne livrèrent pas leurs bijoux pour façonner le vaux d'or.Ils portaient en souvenir de ce fait un anneau d'or à l'oreille.Lors du massacre, Naftali arracha le sien et le donna en échange d'un peu d'eau pour faire ses ablutions.".Un marabout de Massa , Sidi Mohamed Ou Tsakat, se mit à la tète d'une armée qui s'opposa au prétendant.La rencontre eut lieu à El Aouina , Bou Hallas périt dans la bataille, en 1208(1793).mogador,nostalgie poésie

Lorsque transitaient par le port d'Essaouira, les caravanes de Tombouctou et les caravelles de la lointaine Europe....

mogador,nostalgie poésie

L'entrée du Mellah disparu de Mogador

mogador,nostalgie poésie

Que des ruraux, que des ruraux, du côté Nord de la ville : où sont passés les visages connus ? Que des ruraux, que des ruraux déambulant au milieu de la pacotille ! Tel est le nouveau destin de la ville ; d’un côté, la clientèle touristique de la baie, et de l’autre ce peuple anonyme déambulant dans la ville. Des hordes hilaliennes perdues. Des citadins, mon père disait : ils ont vendu les clés de la ville. En ce moment à Essaouira, c’est le temps de la foule des vacanciers : autant dire le vide. Rien à lire non plus dans les journaux, y compris dans la presse française. Il est loin le temps où les intellectuels français se manifestaient dans la presse, on dirait qu’ils ont choisi de se taire. Au Maroc, les intellectuels des années 1970, sont maintenant devenus ministres des finances et de l’enseignement, et à l’université, les islamistes ont pris la place des marxistes. Et en lieu et place des revues de réflexion s’est substituée la culture du papier glacé. Autant raconter l’histoire ancienne : lutter contre le silence et l’oubli.

mogador,nostalgie poésie

 Maâlem Tahar Mana, jaugeant une "gayza", madrier de thuya à la coopérative des marqueteurs d'Essaouira(début des années 1950)

mogador,nostalgie poésieMaître Abdellah Abibou, chantre du malhûn et faiseur de poème et de pain de la ville.Grand connaisseur et commentateur du malhûn, maître Abibou venait souvent à l'atelier de mon père pour y échanger auteur de cette poésié andalou-bédouine tellement appréciée par les artisans des vieilles médina maghrébine. Il lui citait souvent ce passage controversé quant au mot de la fin que certains interprètent comme étant "les retardataires"(ma talla) et d'autres comme étant "les amateurs"(ma tabla) du fait de l'ambivalence de la langue arabe:   Zman jaïer

Oulbdan diîfa

Oulakhlayeq ma taâdar

Man talla...

Tumultueux sont les temps

Maîgres sont les corps

Les caravaniers n'attendent pas

Les retardataires....

A ceux qui optent pour "amateurs" comme étant le mot de la fin, maître Abibou rétorquait : "Amateurs" de quoi? Du vin ou du kif? Non, il faut entendre "retardataires" par rapport à l'avancée de la caravane..."

Ce matin je rencontre un banquier, ex-footballeur d’Essaouira installé à Agadir au début des années soixante-dix (période charnière dans l’histoire de la ville : en 1967, les derniers juifs d’Essaouira quittent la ville à la suite de la guerre israélo-arabe, 1968 : arrivée massive des hippies qui s’installent au village de Diabet ; 1970 : départ massif des Souiris vers Casablanca, Marrakech et Agadir). Les « Souiris» d’Agadir sont restés les plus nostalgiques de la belle époque de Mogador du fait qu’Agadir les a moins dispersés qu’une ville comme Casablanca. Ce matin, donc, l’ex-footballeur, né en 1948, me parle de ses souvenirs d’enfance, c’est-à-dire d’Essaouira des années cinquante et soixante :

mogador,nostalgie poésie

A Gauche les remparts , à droite le muret qui entourait les jardins potagers

des jardins potagers qui entouraient la ville — en dehors des remparts il n’y avait que des cimetières et des  potagers — , des pêches fabuleuses des sardines et de thon ; de « lOcéan Sandillon » avec son rocher aux pigeons et son rocher aux plumes (Sidi Bou Richa) où les femmes venaient sacrifier aux génies de l’océan ; poules et coq aux sept couleurs des esprits : les Gnaoua leur recommandaient de se nourrir de la chair non salée de la volaille pour apaiser les entités surnaturelles qui les possèdaient.

- Les « possédées » venaient déposer là en offrande poules et coq pour Sidi Bou Richa  raconte l’ex-footballeur ; et nous profitions de l’occasion pour détourner les offrandes à notre profit en préparant de succulents tagines.

Il me raconte par la suite comment à ce même endroit réputé hanté par Aïcha Qandicha (Kadoucha, la déesse de la mer ?), la mer en se retirant laissait derrière elle, dans les interstices des rochers, de petits poissons couleur d’algues dénommés « boris » probablement par la population d’origine africaine de la ville parce qu’il existe effectivement une divinité africaine du nom de « Bori » et parce qu’au cours du rituel de la Lila, il existe un esprit possesseur (melk) où le possédé danse avec un bol d’eau de mer contenant ce petit poisson des rochers .

- Enfant, poursuit notre ami, après les avoir capturés, on les vendait au juif dénommé Ishoâ. J’avais décidé un jour de l’épier pour voir ce qu’il pouvait bien faire avec de si petits poissons de roches. Je l’ai suivi jusqu’au Mellah où il tenait une boutique en face du dépôt de vin, où on fabriquait, à base des raisins charnus du pays chiadma — dénommés « tétons de jument » (bazzoult al âouda) — un vin rouge qui était célèbre pour son nom d’« arche de Noé».

 Cette même arche de Noé avec laquelle la ville accueillait le nouvel an musulman, car le subconscient du port a toujours été hanté par la crainte du déluge. Sidi Abderrahman El Majdoub ( mort en 1569) ne prédisait-il pas dans ses quatrains qu’« Essaouira verra ses richesses venir de pays lointains et qu’elle périra sous le déluge, un vendredi ou un jour de fête »? À force de boire de cette arche de Noé, pour faire face au froid glacial du Gulf stream et des vents alizés, les marins étaient toujours ivres en montant à bord :

- En épiant le soir cet Ishouâ, je me suis rendu compte qu’il vendait les boris en petits morceaux aux juifs qui en nourrissaient leurs chats.

C’est pour cette raison que les chats et les mouettes disputaient aux humains depuis lors, les terrasses et les ruelles de la ville !

 

Mellah de mogador.jpg
Mellah de Mogador


Les juifs travaillaient à mille et un métiers : ils étaient celliers et colporteurs sillonnant les campagnes environnantes sur leurs ânes ; ils étaient tailleurs et orfèvres, cordonniers et frappeurs de monnaies. Il y en avait même parmi les marqueteurs me disait mon père : il fabriquait pour les mariées juives un secrétaire en mohagné (lacajou) dénommé « skitiriou ». Pour survivre, les juifs faméliques du Mellah acceptaient n’importe quelle rétribution :

- Je me souviens de deux aveugles qui acceptaient de nous vendre du poivron vinaigré contre de la fausse monnaie ! Et l’on pouvait se faire coiffer à deux sous chez Afriat !

 

rue du mellah de mogador.jpg
Mellah de Mogador

mogador,nostalgie poésie

Qu’on ne s’étonne pas qu’une telle communauté ait pu donner naissance à un Abraham Serfaty ; le chef du marxisme marocain, qui a payé son engagement politique par la paralysie de ses deux jambes sous la torture ; et don’t Yveline la sœur a payé de sa vie le fait d’avoir refusé, au début des années soixante-dix, d’indiquer aux policiers qui la torturaient où se trouvait caché son frère ? Ca y est, j’ai retrouvé le nom de l’unique marqueteur juif d’Essaouira selon mon père : il s’appelait David El Qayèm (son nom de famille signifie en arabe le « redressé »). Et aujourd’hui même j’ai rencontré à Imine – Tanoute, un paysan berbère du haut Seksawa qui se dénomme « Afriat », je lui demande :

- Pardon, comment se fait-il que vous portez ce nom d’Afriat, célèbre à Essaouira comme étant le nom d’un luthiste juif, amateur de Malhûn, originaire de Goulimine ?

Mon interlocuteur d’Imine –Tanoute, m’explique que le nom d’Afriat n’a rien à voir avec la langue hébraïque ; c’est en fait un mot berbère qui désigne la personne dont les gencives sont disjointes. Nous avons une autre famille d’Essaouira qui porte un nom ayant la même signification en arabe : El Form (le « disjoint »). Donc ce n’est pas le berbère qui porte un nom hébreu, mais c’est le juif qui portait un nom berbère ! « Afriat » est un mot berbère et non pas hébraïque.J’ai retrouvé au Haut-Atlas, en remontant vers le mont Toubkal, un hameau à la lisière de Tifnoute qui était anciennement habité par des judéo-berbères. Tifnout désigne ces montagnes dénudées qui entourent le lac d’Ifni : Tifnout en tant que haut lieu inhabité s’oppose comme le vide au plein, aux zones de moindre altitude où l’habitant vit à l’ombre de gigantesques noyers. Le hameau dont il s’agit est le dernier lieu habité, après quoi on pénètre dans le vide sans vie des montagnes rocheuses de Tifnout, l’équivalent du « Khla », en arabe ; c’est à dire lieu sans habitation, sans végétation et sans vie.

mogador,nostalgie poésie

Le pêcheur juif de Mogador

mogador,nostalgie poésie

Chaque année les juifs s’y rendent en pèlerinage, comme ils le font au hameau d’Aït Bayoud de la tribu Meskala dans la région d’Essaouira. Et comme ils le font à « Moulay Ighi » dans la fraction de Tisakht-Ighi, des Glawa –Nord. Ces observations que nous avons fait nous-mêmes lors de dérives au Haut-Atlas, sont confirmés par les témoignages rapportés par Haïm Zafrani :

« Nous avons recueilli auprès d’un vieux rabbin, divers renseignements sur les communautés judéo – berbères de  Beni-Sbih, dont notre informateur est originaire, celle de Ktama, de Glawa, de Tifnut et de Tamgrut. »

Deux mille ans de vie commune sur la terre marocaine ont laissé des traces. Mais ce qui est étrange, c’est comment toute cette communauté s’est évaporé d’un seul coup après la naissance d’Israël ?

15 janvier 2003 : Hier, j’étais à la municipalité pour y rencontrer Hallab, le chef du groupe folk local. Il m’a dicté une qasida de Souhoum où l’on parle du Barzakh, cette station céleste des âmes mortes.Le soir Ben Miloud m’a parlé du récit que me racontait mon père sur son grand -  père l’imam de la Grande Mosquée Ben – Youssef :

« Le prêtre de l’église locale avait l’habitude de se rendre tôt à la plage de Safi, au nord d’Essaouira. Un jour il perdit un gousset plein de louis d’or, non loin de Bab Doukkala. Le grand- père de Ben Miloud, qui était imam à la Grande Mosquée, et qui avait lui aussi l’habitude de faire sa promenade matinale au bord de la mer, découvrit le gousset de louis d’or. Le jour même, il fit appel au crieur public pour annoncer au travers les artères de la ville, que « quiconque avait perdu un gousset ; doit se présenter devant l’imam de la Grande Mosquée pour donner son signalement et son contenu, afin qu’elle lui soit restituée. Le prêtre se présenta devant l’imam et retrouva effectivement son gousset  de Louis d’or intact ».Cette anecdote sur la cohabitation des religions me rappelle un souvenir d’enfance : au cours d’un été, alors que j’étais encore en culottes courtes, le bruit courut que « Jmia » s’était noyée, que son corps avait été recueilli sur les rivages de Sidi Mogdoul et que les pompiers l’avaient déposé à la morgue de la ville. Je ne me souviens plus comment je m’étais retrouvé en train de regarder par la serrure de la morgue : c’était la première fois de ma vie que je voyais le corps nu d’une jeune femme morte. Un corps doré mais inerte. « Jmia » m’aimait beaucoup, et me chantait souvent une chanson alors en vogue :

Ô flammes brûlantes qui me dévorent les entrailles

Le lendemain, j’ai eu une autre surprise : à son enterrement était présent le mari juif de notre institutrice, Mme Cohen. Que faisait donc ce juif à l’enterrement de Jmia dans un cimetière musulman ? On avait l’impression que toute l’assistance était pleine de respect et de gratitude pour ce geste du Sieur Cohen pour l’enterrement de Jmia. Il n’y avait plus ni juifs ni musulmans, quand il s’agissait d’enterrer une part de la mémoire commune de la ville.Le Sieur Cohen a émigré par la suite avec sa famille au Canada comme ce fut le cas du bijoutier Nessim Lup : dans les années soixante mon père m’avait envoyé faire une commission chez ce dernier qui habitait alors rue Théodor Cornut : sa salle à manger disposait d’un piano importé d’angleterre comme dans toutes les maisons des négoçiants juifs de la kasbah. Au milieu une immense table en acajou, où sont servis des mets variés et raffinés, où  s’entremêlent produits de la terre et ceux de la mer.

mogador,nostalgie poésie

De part et d'autre de Bab Marrakech, le cimetière disparu en 1985, par lequel nous passions pour nous rendre à l'école...

mogador,nostalgie poésie

"C'EST UNE PHOTO INHABITYUELLE DE BAB MERRAKCH. DE MON TEMPS LES ACROBATES ET LES CHARMEURS DE SERPENTS Y PULULAIENT." David Bensoussan qui a quitté Essaouira en 1965 et qui vit depuis au Canada.

mogador,nostalgie poésie

 

La dernière année de mon enseignement à l’école primaire de l’Alliance Israelite, nous avions comme instituteur d’Arabe, un safiot sec comme une alumette avec des dents entièrement ravagées par la carie à force de fumer du kif. C’était une véritable terreur, qui en état de manque soumettait les élèves récalcitrants à de véritables séances de tortures. Un jour le père de l’un des élèves, policier de son état, est venu se plaindre à Monsieur Moïse Ohanna, le directeur de l’Alliance Israelite, paisible et rondouilmlet homme à la calvitie prononcée et au eterrnel costume gris, féru de mandoline et qui se substituait aux maîtres en mathématiques en cas d’absentéisme. Le lendemain de son entrevue avec le parent policier, il se pointa à la première heure à notre cours d’Arabe et apostropha ainsi notre instituteur colérique :

- Mais Monsieur, nous ne sommes pas ici en commissariat de police ! Vous n’avez pas à pratiquer la torture sur mes élèves ! Suivez –moi à mon bureau…Depuis lors, nous n’avons plus jamais revu cet instituteur au grand soulagement de tous les écoliers.Et maintenant Josephe Sebag m’apprend que notre directeur d’école d’alors avait quitté Mogador à la fin des années soixantes pour finir ses jours en solitaire dans une chambre d’hotel en Espagne, où il vivait de quêtes en jouant de sa mandoline à la gare de Barcelonne ! A sa mort, au début des années 1990, le seul bien qu’on avait trouvé sur lui, était une théière de Mogador ! Elle appartenait probablerment à sa mère. Il était né d’une grande famille de négoçiants de Mogador qui trafiquaient dans le henné – d’où le nom d’Ohanna- et exportaitaient les amandes et la gomme  de sardanaque. Moïse Ohanna vivait avec deux autres frères qui ne s’étaient jamais mariés comme lui, dans une demeure de Derb Laâlouj et leur père était vendeur d’épices à Attarine.

mogador,nostalgie poésie

L'allée des araucarias avec au fond à droite l'ALLIANCE

A l’alliance israélite où j’étudiais, on m’accorda alors de beaux livres pour enfant, que je n’ai pu recevoir à l’estrade, mais que Zagouri, mon institutrice, me fit alors venir chez le pâtissier Driss, où j’ai eu droit et aux Beaux Livres et à un gâteau au chocolat ! Je lui ai menti, en lui disant que je n’ai pas pu assisté à la remise des prix parce que j’étais parti à Chichaoua ! En réalité l’appel de la plage et des vacances étaient plus forts, surtout quand les élèves se mettaient à chanter à la récréation dans la cour :
« Gai gai l’écolier, c’est demain les vacances...
 Adieu ma petite maîtresse qui m’a donné le prix
Et quand je suis en classe qui m’a fait tant pleurer !
Passons par la fenêtre cassons tous les carreaux,
Cassons la gueule du maître avec des coups de belgha (babouches)

mogador,nostalgie poésie

C.P.-2 - 61-62 : Cours Préparatoire, deuxième année de l'Alliance pour l'année 1961-1962 ( l'auteur est assi au second rang(troisième à partir de la droite). Najib Lachhab, l'actuel propriétaire du restaurant "Coquillage" tient l'ardoise entre les mains. On ne voit pas Mme Bensoussan, notre sévère maîtresse qui nous terrorisait avec son nerf de boeuf et qui à l'heure de goûter - on nous distribuait une tranche de pain, une tranche de fromage Américain et du chicolat au lait bien chaud - elle épulchait invariablement sa grosse orange au point que cela émoustillait nos narines...Son mari était marchand de vins au marché aux fleurs, là où un rabin et un imam procédaient au sacrifice des poulets de ferme selon les rites respectifs des juifs et des musulmans pour que la viande soit halal pour les uns cacher pour les autres. Après le décès de sa fille dans un accident de la circulation survenu au promontoire d'Azelf, notre maîtresse Bensoussan quitta précitamment Essaouira en 1965 et mouru peu après plus par le chagrin de quitter Mogador que par vieillesse...

Mon père disait souvent qu’en ce bas monde, il ne nous restera que ce que nous avons  mangé et bu….Et à Mogador, les juifs étaient très férus des plaisirs de table, au point que certaines variétés de poissons, comme la morue, sont appelés localement « poissons juif » (ou « Iskran » en berbère ).L’air distingué, chapeau melon gris sur tête, Nessim Loeub, m’invite au partage comuniel :

- Il faut d’abord honorer ma table, on parlera de la commission de ton père par la suite....

C’était à la veille d’une mémorable visite que feu Mohamed V devait faire à la ville : Nessim Loeub avait  confectionné à cette occasion, un magnifique sabre en filigrane d’or sur fond d’argent incrusté d’émeraudes et autres pierres précieuses où s’exprimait tout l’art des orfèvres juifs de  Mogador – le fameux « dagg souiri » - et mon père devait fabriquer le coffret en bois de thya  tapissé de velour bordeau où devait reposer le sabre royal . Traditionnellement la hadiyya de la communauté juive consistait en pièce d’orfèvrerie.. Avec leur beau sabre, et son coffret en bois de thuya, Nassim Loeub et mon père s’inscrivaient ainsi dans la vieille tradition marocaine de la hadiya.

mogador,nostalgie poésie

 Nassim Loeub, l'orfèvre d'Essaouira mogador,nostalgie poésie

Evoquant le travail des métaux précieux Haïm Zafrani, qui a enseigné longtemps à Mogador et sa région  avant de s’établir en France, écrit à sujet : « Dans la division du travail qui semble s’être instauré, de longue date, entre artisans juifs et musulmans, certains métiers sont traditionnellement reservés aux juifs particulièrement ceux où l’on manipule le plus de matière de valeur : or, argent, pierres précieuses et perles fines. »


Nessim Loeb était en réalité « Chkâ’yrî » (bailleur de fonds) en métaux précieux. Il faisait travailler les artisans bijoutiers grâce à ses capitaux. Il y en avait deux sortes : les dhaybya qui travaillaient l’or, et les syagha qui travaillaient l’argent. Même lalla, notre maraine, habile cuisinière, participait aux préparatifs. Finalement cette visite royale n’a jamais pu avoir lieu puis que feu Mohamed V fut appelé au chevet des sinistrés du tremblement de terre qui frappa Agadir à vingt trois heures 40, le 20 février 1960. En dix secondes, les trois quarts de la ville sont détruits et 10 000 à 12000 personnes perdent la vie. Le poète berbère Ibn Ighil s’est fait l’écho de ce terrible tremblemnt de terre  :

Agadir a été détruit, des milliers y sont enterrés

Quelle pitié ! Tous sont morts, aucun sauvé.

Tous ceux qui y sont des tribus totalement anéanties

Ils n’ont pas atteint leurs buts, ils n’ont rien accompli

L’Arabe comme le berbère, personne n’a été épargné

Quiconque y est entré, n’en n’est plus sorti

Les juifs sont morts ce jour-là, les chrétiens aussi

Tout comme les musulmans maudits et ceux du droit chemin

Les enfants sont morts ce jour-là, les femmes aussi

Quelques mutins, tirés des décombres, gardaient encore leurs âmes

Ils espéraient se réveiller, reprendre conscience

D’autres tirés des décombres,en direction de la mort, l’eternelle....


L’onde de choque s’est propagée jusqu’au coeur d’ Essaouira, à plus de 170 kms au nord de l’épicentre du séisme. Arraché à son profond sommeil, mon père avait cru que le vacillement de notre vieille maison était dû à la violance du vent. Ne sachant pas ce qui lui arrivait, il s’est levé ,   tatonnant dans l’obscurité,  en répétant   :

- lbard ! lberd ! lberd ! (Le vent ! Le vent ! Le vent ! ).

Pendant plusieurs nuits de suite les gens ont dormi dehors : nous passions la nuit à la belle étoile,avec nos voisins, au marché aux grains ! De surcroit le desastre est survenu le jour de l’Aïd El Kébir,si ma mémoire est bonne : c’est cela « le déluge un jour de fête » dont parlait le Mejdoub ! C’était aussi l’époque de l’exode massive de la communauté juive d’Essaouira  vers Israel . Les juifs du Mellah vendaient tout leurs biens et prenaient pour la dernière fois l’ autocar de Bab Doukkala, quittant ainsi définitivement la ville qui les a vu naître. Il y avait parmi eux Rahèel, la couturière de notre quartier, que j’ai connu toujours assise à même le sol, activant sa vieille machine à coudre « Singer », pour confectioner des habits traditionnels, qu’elle vendait ensuite à la Joutia ou aux colporteurs juifs qui sillonaient les campagnes environantes. On l’appelait khiyata d’el-melf, couturière spécialisée dans la coupe et la couture des vêtements de drap et de toile. J’ai appris beaucoup  plus tard qu’elle serait morte lors de la traversée de la Méditérranée, sans avoir jamais atteint « la terre promise »... La ville abritait autant de juifs que de musulmans comme l’atteste le recencement de 1921 : sur une population de 20.309 qui habitaient alors Mogador, 10.080 étaient musulmans et 9.487 israelites. Le reste, soit 1440, étaient européens. Les juifs étaient minoritaires dans le pays, mais pas à Mogador. Et puis un jour ils sont tous partis.

 

mogador%2520musiciens%2520juifs.jpg

 Je devais avoir huit ans et j’étais le seul de mes frères et sœur à fréquenter l’alliance israelite, où on étudiait aussi bien l’Arabe et le Français que l’hebreu. Mon voisin de banc n’était autre que Jojo Bouganim, le frère cadet de l’auteur du « récit du Mellah », où celui – ci  raconte cet émouvant départ sans retour de la communauté juive de Mogador : « Ma dernière journée à Mogador, quand le vent se mit à souffler, l’océan à déborder, les palmiers à se tordre et que, comme dans un cauchemar, les sionistes se présentèrent, la nuit tombée, pour nous embarquer. »

L’exil,  la nostalgie, le crépuscule de Mogador ...Abdelkader MANA

10:55 Écrit par elhajthami dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : mogador, nostalgie poésie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook