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29/04/2010

Nuit Soufie

Nuit soufie

Le soufi doit passer par une initiation progressive, sous la direction d'un maître vivant. L'ascension des soufis se fait donc à travers les demeures ou stations, chacune est marquée par un « état spirituel »(hal) particulier. Aux progrès dans la voie spirituelle, correspondent des niveaux d'initiation : des novices, aux initiés, jusqu'aux agrées et aux parfaits. Cette quête de purification du cœur  requiert de relier les étapes à chacun des horizons. Le but ultime de ce voyage à la fois réel et symbolique est de préparer l'âme à l'union divine..

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Les soufis ont insisté sur cet aspect : la purification des cœurs et des âmes, pour consolider les vertus morales : les valeurs de tolérance , les valeurs d'amour, les valeurs de miséricorde.

A chaque fête du Mouloud, des milliers d'adeptes venus de toutes les régions du Maroc, mais aussi de Thaïlande, d'Europe, d'Amérique et d'Afrique  se retrouvent à la zaouia - mère de Madagh, pour commémorer en présence  de Sidi Hamza, leur maître spirituel vivant, la naissance du Prophète. La fête a lieu  au 1er Rabiâ Al Awal 1426, qui correspond cette année au mardi 11 avril 2006, où elle coïncide avec un printemps particulièrement florissant. Deux nuits soufies auront lieu simultanément : d'un côté celle des femmes, de l'autre celle des hommes, en présence de Sidi Hamza le guide spirituel.

En ce printemps de l'aube hégirienne, le ressac de la Méditerranée nous invite à la méditation. L'être est en quête naturel d'absolu comme le pêcheur à la ligne va à la rencontre des insondables abysses bleus. Nous sommes ici aux confluences de l'embouchure de la Moulouya , à la plage de Saïdia qui confine à la frontière algéro - marocaine où la plaine de Triffa s'étend au pied  du massif des Bni Snassen qui atteint 1665 mètres au Jbel Afoughal. La plaine de Triffa, qu'irrigue le Moulouya comprend des douars d'origine algériens. Ils s'y sont établis vers 1830, sur les traces de l'émir Abdelkader. C'est dans cette grande plaine de Triffa, doucement ondulée aux terres si fertiles  que la mise en valeur des fermes coloniales avait commencé au Maroc. La plupart des tribus de la frontière, surtout les Béni Snassen, étaient dévoués à l'émir Abdelkader, lui-même éminent soufi - sa dépouille repose à Damas près du tombeau d'Ibn Arabi. Cette résistance de la montagne des Bni Snassen à la pénétration française se poursuivit jusqu'à la capture le 31 décembre 1907, de Sidi Mokhtar Boutchich. C'est après sa reddition que ce dernier quitte la montagne des Bni Snassen pour venir s'établir dans la plaine de Triffa plus précisément au village de Madagh qui va devenir la zaouia - mère de la Tariqa Boutchichia , avec le Cheykh Abou Mediane,  mort à Madagh en 1955.Lui succédera alors jusqu'au début des années soixante dix, le Chaykh Sid El Abbas, le père de Sidi Hamza, le Chaykh actuel de la Tariqa. Cette Voie se nomme «  Qadiriya » par référence à Moulay Abdelkader Al Jilani, maître soufi qui vécu à Baghdad au 12ème siècle.

Une Voie spirituelle se présente  comme un chemin de retour à soi et à Dieu.Au cours de ce voyage initiatique sur la  « voie » de la perfection soufie, les «faqirate » et les «  foqara » - ces femmes et ces hommes ivres de Dieu-  doivent passer par plusieurs étapes appelées « ahwâl »pour atteindre les stations spirituelles appelées « maqâmât »,  Ces diverses étapes de la voie soufie, sont sensées conduire au dévoilement progressif et à la purification des coeurs.

 

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Faouzi Skally en campagnie de Sidi Hamza

La tariqa Boutchichia auquelle est affilié Monsieur Ahmed Tawfiq, l'actuel ministre des Affaires religieuses, est une pepinière d'intellectuels de haut niveau tel Faouzi Skally, auteur de nombreux ouvrages sur le soufisme et ex- directeur du festival des musiques sacrees de Fès.

La Tariqa, ou « voie soufie » s'inscrit dans une chaîne ininterrompue de maîtres spirituels, héritier chacun de ce secret, jusqu'au Prophète de l'Islam et, à travers lui, toute la chaîne des Saints et des Prophètes antérieurs. Le Shaykh Sidi Hamza est actuellement considéré par ses disciples, comme un « Maître vivant », le représentant authentique d'une tradition vivante du soufisme, voie de la réalisation intérieure en Islam. Le soufisme plonge ses racines dans le Coran, riche en allégories qui nourrissent la méditation silencieuse des soufis. Parmi les sourates qui jouèrent un rôle privilégié dans la méditation soufie, la « sourate de la lumière » est l'une des plus importantes et des plus belles :

Dieu est la lumière des cieux et de la terre. Sa lumière est semblable à une niche où se trouve une lampe. La lampe est dans un verre pareil à un astre étincelant qui s'allume grâce à un arbre béni : un olivier qui n'est ni de l'Orient ni de l'Occident et dont l'huile brillerait sans qu'un feu la touche, ou peu s'en faut.Lumière sur lumière.

Le thème de la lumière est une des constantes de l'enseignement soufi, comme du Coran : « Dieu dirige vers la lumière qui il veut. »

C'est elle qui pénètre dans les cœurs qui s'ouvrent à Dieu. Elle se présente chaque fois comme une force spirituelle, un appel à la vie intérieur.

Sidi Mounir, fils du maître spirituel de la tariqa Boudchichia nous déclare à ce propos : « Le Tassaouf tel qu'il a été défini par les soufis, depuis l'envoyé d'Allah - que la bénédiction soit sur Lui - est d'être d'une vertu noble, laissant de côté toute bassesse. Le Tassaouf , c'est comment le musulman peut-il s'accomplir à travers les relais de l'Islam. C'est-à-dire se réaliser par le perfectionnement religieux et soufi. Travailler à l'éducation spirituelle du musulman pour l'élever aux hautes sphères mystiques. Depuis l'adhésion à l'Islam qui s'accomplit par la langue, en passant par la foi et l'adhésion du cœur, jusqu'à la station du bienfait qui est la sphère de l'adoration sincère d'Allah : que tu prie Allah comme si tu le vois, car si tu ne le vois pas, Lui, il te voit.Le Tassaouf, n'est pas un intrus en Islam, comme le sous entendent les orientalistes, qui ont écrit dans nombre de leurs livres et recherches, que «  le Tassaouf est une simple rose dans un désert stérile ». Ils voulaient ainsi dépouiller l'Islam de cette dimension spirituelle essentielle qui est au fondement des vertus morales. C'est l'envoyé d'Allah - que la bénédiction soit sur Lui - qui est considéré comme le modèle parfait et la miséricorde accordée. Il est l'exemple même dont les soufis suivent la trace dans leur méthode. La définition du Tassaouf dérive également de cette citation coranique :« Et tu es certes d'une  moralité imminente  », comme se plait à la citer le guide spirituelle de la Tariqa Qadiriya Boutchichia Sidi El Haj Hamza, qu'Allah lui accorde longue vie. La vérité du Tassaouf réside dans la sincérité de l'adoration d'Allah le plus haut . A en croire Shaïkh Zerrouq, le soufi marocain, on compte plus de deux mille définitions du Tassaouf , qu'on peut subsumer en une seule : le fait d'être sincère dans l'adoration d' Allah. »

L'une des obligations de l'adepte est d'accomplir jour et nuit le  wird de la tariqae . Cela consiste à égrener au chapelet continuellement les beaux noms  d'Allah. Le Wird est le premier type de Dhikr que reçoit le disciple lorsqu'il s'engage dans la Voie. Celui-ci est constitué d'un ensemble d'invocations, que le Guide communique à son disciple.C'est la mention incessante de Dieu, l'oubli de tout ce qui n'est pas Dieu : « Remémores (udhkur) ton Seigneur quand tu auras oublié. ». Selon Ibn Âta' Allah « le Dhikr est un feu. S'il entre dans une demeure, il dit : c'est moi, non un autre ! S'il y trouve du bois, il le brûle, s'il y trouve des ténèbres, il les change en lumière ; s'il y trouve de la lumière, il y met lumière sur lumière ».

Encore lui , Sidi Mounir le lumineux :

« On peut éclairer la question relative au maître spirituel - considéré comme signe d'Allah le très haut - en le comparant au  miroir pur qui  reflète la vérité du musulman. Dans le sens où le Prophète, dit : « le croyant est le miroir du croyant ». De nombreux autres dits du Prophète confirment cette fraternité en Allah. La question qui se pose est la suivante : Pouvons nous atteindre la station de l'adoration par la science positive ? Une question que chacun de nous peut se poser, étant donné que la crainte de Dieu est une question d'intériorité, qui nécessite la foi, laquelle réside dans les cœurs.« La foi, elle est ici, elle est ici, elle est ici » disait l'envoyé de Dieu en désignant son cœur. Et ce cœur, il faut le purifier. Et je le répète, cette crainte de Dieu n'atteint que les esprits qui se sont intéressés à cette dimension spirituelle, qui est à la source de toute dévotion et de tout amour Divin. La science positive est acquise - chacun peut l'acquérir, qu'il soit musulman ou athée. Au point qu'à l'Université de la Sorbonne, il y a des professeurs qui maîtrisent la langue arabe ainsi que les sciences islamiques. Mais peuvent-ils  pour autant atteindre la station de la crainte Divine grâce à leur savoir ? La réponse est non ! La science dont il s'agit  ici est la science du cœur auquel l'envoyé de Dieu avait fait allusion par ce dit :

« Il y a deux sortes de sciences : une science dans le cœur, et c'est la science utile. Et une science dans la langue et c'est la preuve que donne Allah aux fils d'Adam. »  Le compagnon ici est celui qui conduit à Dieu. Celui dont le Prophète a dit :« Il y a parmi les hommes des clés pour se remémorer Allah. Quand on les voit on se rappelle Allah ». Par conséquent le but du compagnonnage du guide spirituel est de  t'indiquer et te faire connaître Allah, l'ineffable et le très haut. Ce compagnonnage spirituel est un devoir en Islam. Dis-moi qui accompagnes - tu, je te dirai qui tu es. »

La personnalité du soufi est comme possédée et volatilisée par Dieu. Le « choc mental » devient expérience d'une présence de Dieu nous dit Ghazali :« Les états d'extase divine, c'est Dieu qui les provoque tout entiers. L'extase, c'est une incitation, puis un regard qui croît et flambe dans les consciences. Lorsque Dieu vient l'habiter ainsi, la conscience double d'acuité. C'est un état modifié de conscience. Une transe. La conscience se tourne alors vers une Face dont le regard la ravit à tout autre spectacle.De bonne heure, ces séances évoluèrent vers le type du « concert spirituel » ou « oratorio »(samâ') : développant la partie « affections » de la méditation collective.Sidi Mounir, encore lui, toujours lui :« La Tariqa Qadiriya Boutchichia suit la Voie des congrégations mystiques dont la méthode est fondée  sur le Livre et la Sunna . Ainsi que sur  la conduite des compagnons du Prophète. Elle inculque l'amour du Prophète à ses disciples.Les soufis ont insisté sur cet aspect : la purification des cœurs et des âmes, pour consolider les vertus morales : les valeurs de tolérance , les valeurs d'amour, les valeurs de miséricorde. Les compagnons du Prophète suivaient en cela le modèle de leurs vertueux devanciers. Le Prophète, prière et bénédiction sur Lui, disait :

« Je suis la Cité des justes, et Omar est sa porte. »

Et concernant  Othmane, il disait :

« Je suis la Cité de vie, et Othmane est sa porte ».

Et de la sincérité, il disait :

« Je suis la Cité des sincères, et Abou Bakr est sa porte ».

Les compagnons  voyaient leurs états modifiés, chaque fois qu'ils quittaient les séances du Prophète. Ils vivaient alors dans une sorte d'égarement, quelque chose s'introduisait dans leur cœur les empêchant de ressentir la suave saveur de la foi, telle qu'ils la ressentaient en présence du Prophète, ou lors des séances du Dhikr. »

L'extase est un effet de la présence de Dieu. Mais l'âme au terme de son ascension mystique, peut ne plus avoir besoin de ces effets extérieurs de ravissement. Sa capacité d'amour s'est suffisamment agrandie, et maintenant

« la ferveur tout entière n'est plus que paix et amour suave. »

En Islam, le thème servant à exposer l'expérience mystique, c'est le cadre de l'ascension Nocturne :

« On sait, écrit Massignon, le rôle central de cette « extase » où Mohammed crut être transporté de la Mekke, d'abord sur l'emplacement du Temple(détruit)de Jérusalem, puis, de là, jusqu'au seuil de l'inaccessible Cité Sainte, où la gloire de Dieu réside. Cette visite, en esprit, de Mohammed à Jérusalem, est mentionnée en ces termes par la passion du Hallaj :« Celui qui cherche Dieu à la lumière de la foi est comme celui qui guette le soleil à la lumière des étoiles »

"O Nuit, que tu te prolonges ou que tu t'abrèges, ce m'est un devoir que te veiller. » s'est écrié un jour Shoshtarî, le maître des chantres du Samaâ.« La descente de Dieu ici - bas, chaque Nuit, pour réconforter les âmes ferventes », ce hadith est pour les mystiques, un symbole de la grâce. Dans son « Diwan », Hallaj écrit :

« L'aurore que j'aime se lève la nuit, resplendissante, et n'aura pas de couchant ». La « Laylat el Hajr » de Hallaj paraissant viser la nuit de l'esprit, sous d'autres symboles : l'oiseau aux ailes coupées, le papillon qui se brûle, le cœur enivré de douleur, qui reçoit.

Abdelkader Mana

03:57 Écrit par elhajthami dans religion | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : religion, soufisme, spiritualite, tariqa boudchichia | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook