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22/11/2011

ITINIRAIRE

arts

Le rêve rural d’El Atrach[i]

Après avoir émigré vers le Sous, en tant qu’ouvrier agricole, El Atrach est revenu au pays Chiadma , dans son village natal de Hanchane, pour y travailler en tant que plombier , sauf durant le mois sacré du Ramadan, où il se convertit en pâtissier de la « chebbakiya » . Et pendant ses heures libres, il peint. Il a toujours ressentit le besoin de peindre comme un appel intérieur, une vocation inexpliquée : « Je peignais depuis mon enfance sans but précis, jusqu’au jour où j’ai appris qu’il y avait une galerie à Essaouira. J’y ai alors apporté mes premières œuvres. C’était en 1993. »

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 Comme Tabal, il découvre la plupart de ses idées au souk. Mais il ne peint pas in situ. D’où peut être cette absence de perspective : toutes en surface les images forment un puzzle de motifs entrelacés, comme dans un tapis berbère. Il se sert des scènes de la vie quotidienne au souk, comme autant de bric – à – braque à peindre : « Même quand je parle aux gens , je « photographie » cérébralement  le porteur d’encensoir qui passe par là. Dans un tableau j’ai représenté un Regragui en train de guérir une femme en la flagellant avec des rameaux d’olivier. Si le personnage central est assis sur un félin, c’est pour montrer le pouvoir des Regraga sur les animaux. »

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 Lorsqu’on regarde de près le tableau en question, on se rend compte qu’il n’y a aucune commune mesure, entre la réalité observée – l’arrivée des Regraga à une étape donnée – et l’univers fantastique au quelle cette scène a donné lieu. Une véritable fantasmagorie du réel par l’imaginaire, qui rend peut être mieux compte du mystère du pouvoir surnaturel des Regraga sur les êtres et les choses. Il peint le cérémoniel observé non pas d’après le déroulement concret du rite, mais tel que son imagination  se le représente à travers les mythes : c’est en mythifiant le réel qu’il accède plus sûrement à l’imaginaire collectif qui le sous-tend.

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 Reflet de la complexité des représentations collectives – le rêve rural de l’artiste ne peut être rendu que faiblement par les mots : «  Mes premiers tableaux avaient un rapport avec l’environnement de la campagne. Mes tableaux actuels explorent les liens complexes qui existent entre le monde animal et le monde humain. C’est l’interdépendance entre ces deux mondes que j’essaie de montrer. » A travers son imaginaire individuel, il explore, sans le savoir, l’inconscient collectif. Ce qui est le propre des artistes réellement enracinés dans leur culture.

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 Les images à peindre surviennent comme dans un rêve , surtout la nuit , quand il est seul avec sa bougie , dans une maison en ruine , située en dehors de son village natal. La seule pièce qui n’est pas tombée , est celle dans laquelle il travaille. La maison est à ciel ouvert et on peut y observer nettement la voie lactée. Il y trouve une âme d’astronome. L’environnement nocturne et solitaire contribue à ce dialogue créatif de l’imaginaire avec la nature : « La bougie allumée sous un ciel étoilé, m’aide à exécuter ce qui me passe par la tête. Cette maison en ruine ne sert pas pour dormir : je m’y isole uniquement pour peindre. Des fois, j’y reste à peindre de trois heures de l’après-midi à une heure du matin. Pour étancher ma soif , je m’y contente d’une théière et d’une cruche d’eau. Mais l’idée que je porte me pèse lourdement. J’ai peur de la perdre ou de l’oublier. Je ne me sens vraiment soulagé qu’une fois que je l’ai exécuté. »

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 Pour représenter le ciel et la terre, le soleil et la mer, le féminin et le masculin, le diurne et le nocturne – comme autant d’oppositions fondatrices – le peintre travaille avec des couleurs naturelles, sans avoir à les mélanger les unes aux autres : le jaune de l’aube, le bleu du ciel, le blanc de la brume, le rouge du crépuscule et enfin le noir de la nuit. Ces couleurs qui constituent les teintes du jour et de la nuit, renferment la vie des humains et des animaux. C’est dire toute l’audace d’une telle démarche, qui tente, sous un ciel constellé d’étoiles, de recréer tout un univers au milieu d’une ruine. Abdelkader Mana



[i] Article paru dans l’hebdomadaire « Le Temps du Maroc » n°48 , du 27 sept . au 2 octobre 1996 Larticle est ancien mais les oeuvres sont récentes

15:42 Écrit par elhajthami dans Aïta | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : arts | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

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