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22/08/2010

Dédicace à Bouganim Ami

L'ami Bouganim

La tolérance vient d'abord de l'éducation: le fait que nous avons partagé le même banc d'école, les mêmes éducteurs, le même enseignement de l'Arabe et de l'Hébreux avait grandement contribué aux respect mutuel entre juifs et musulmans de Mogador.Paléstiens et Israéliens ne peuvent coéxister pacifiquement en Terre Sainte que  s'ils envoient leurs enfants étudier à la même école maternelle où on apprend l'hébreux aussi bien que l'Arabe , où on apprend à reconnaitre l'humanité de l'autre...De sorte qu'en grandissant on n'oserait plus le haïr et encore moins le tuer...

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Classe de première année de l'école pimaire de l'Alliance israélite de Mogador où étudiaient juifs et musulmans : 1961 - 1962

Je viens de publier sur mon blog une note sur le pays montagneux des Glaoua où il est question d'un saint judéo - berbère du nom de Moulay Ighi qui est situé dans la fraction Glaoua de Tisakht Ighi. Et ce matin je m'apprête à écrire une nouvelle note sur le Haut Atlas central mais j'hésite sur le titre: hier soir déjà je me disais que le titre qui conviendrait le mieux c'est celui du bouffon-musicien qui joue à la double flûte de roseau (aghanim en langue tamazight) qui porte de ce fait le nom de "Boughanim". Et juste avant de dormir j'ai fait le lien entre "Boughanim" et "Bouganim" et je me suis dit que peut-être ce rapprochement sémantique n'est pas le fruit du pur hasard....  Consulté à ce sujet; aujourd'hui; Bouganim Ami me réconforte dans cette hypothèse :

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L'élève Abdelkader Mana; premier en bas à droite

Très cher Albdekader,

J'ai toujours été un homme roseau. Frêle et délicat. Solidement enraciné dans mon terreau et résistant aux vents. Tous les vents. Philosophiques, religieux, poétiques. Je ne ploie pas, je plie. Puis je me redresse, comme le dit un midrash. Quand j'ai quitté Mogador pour Casablanca, je me suis retrouvé au théâtre du parc des jeux. J'étais à la fois prince et… clown. Ca n'a duré que deux ans, c'était assez pour me marquer pour la vie. Prince par-ci, clown par-là. Ne me posant pas en prince sans être pris pour un clown, ne me livrant pas à mes clowneries sans m'attirer des attentions princières. Mes souvenirs de théâtre sont consignés dans un livre intitulé Le Cid qui n'a pas encore paru, mes illuminations de roseau pensant et rieur sont consignées dans un dossier que je reprendrai peut-être un jour et qui s'intitule : "Ainsi parlait Derbala…"

Tu vois que n'es pas loin.

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Entre-temps, je travaille sur mon manifeste poétique de Mogador. Tu es mentionné toutes les cinq pages environ. Sans parler de ton portrait. C'est te dire que je suis un des meilleurs connaisseurs de ton site. Peut-être passerai-je deux ou trois semaines en novembre à Mogador. Pour rencontrer Hussein Miloudi, découvrir l'arrière-pays, prendre des notes pour un roman que j'ai en tête et compléter le manifeste.

Me permets-tu de reprendre cette correspondance dans mon propre blog ?

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Mais bien sûr et avec grand plaisir : à cause de ton frère cadet; Jojo mon copain de classe chez notre maîtresse Benssoussan, j'ai un rapport très mystérieux avec les Bouganim. Disant un rapport fraternelle . Quand tu m'avais conduit à la maison où tu étais né à Mogador ; il s'est trouvé que c'est dans cette même maison que j'ai passé les plus heureuses années de mon enfance...Quand plus tard j'ai pleuré d'émotion en lisant ton récit du Mellah...Maintenant que tout ce que nous aimons n'est plus là-bas, maintenant que nos retrouvailles avec notre villes sont peuplés de déceptions...Maintenant que le passage devant notre école et notre vieux cimetière ne nous fait plus frémire de nostalgie...Maintenant que la ville ne nous appartient plus. Maintenant... Abdelkader Mana

P.S. Ma tante maternelle habitait alors dans la médina d’Essaouira du côté de la Scala de la mer — la maison même où était né Bouganim Ami, l’auteur du « Récit du Mellah », comme il me l’a indiqué lui-même lors de son bref séjour de 1998. Une maison avec patio où la lumière venait d’en haut. Et moi tout petit au deuxième étage regardant le vide à travers des moucharabiehs et répétant la chanson en vogue à la radio :

Cest pour toi que je chante

Ô fille de la médina !

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Comment de la plaine resurgirait Mogador
Comment pourrait-on haïr qui l'on aime?
Je t'aime Mogador, je t'aime!

A l’alliance israélite où j’étudiais, on m’accorda alors de beaux livres pour enfant, que je n’ai pu recevoir à l’estrade, mais que Zagouri, mon institutrice, me fit alors venir chez le pâtissier Driss, où j’ai eu droit et aux Beaux Livres et à un gâteau au chocolat ! Je lui ai menti, en lui disant que je n’ai pas pu assisté à la remise des prix parce que j’étais parti à Chichaoua ! En réalité l’appel de la plage et des vacances étaient plus forts, surtout quand les élèves se mettaient à chanter à la récréation dans la cour :

« Gai gai l’écolier, c’est demain les vacances...

Adieu ma petite maîtresse qui m’a donné le prix

Et quand je suis en classe qui m’a fait tant pleurer !

Passons par la fenêtre cassons tous les carreaux,

Cassons la gueule du maître avec des coups de belgha (babouches)

De cette vieille maison que nous avons en partage Bouganim Ami  écrit  :

" De Mogador, je conserve surtout le souvenir d'une maison lézardée qui menaçait de céder et de s'écrouler. Les marches étaient si vieilles qu'elles craquaient sous nos pieds. Les monter ou les descendre relevaient d'une prouesse acrobatique. L'escalier était si obscur, de jour et de nuit, hanté de gnomes, de démons et de génies qu'on ne savait qui l'on croisait. Les carreaux de la verrière, contre laquelle le vent s'acharnait, ne cessaient de casser et de s'écraser dans la cour. Les balustrades des fenêtres étaient si fragiles qu'il nous était interdit de nous y appuyer. Les portes et les volets ne cessaient de claquer, secouant toute la bâtisse. Les souris et les chats s'introduisaient librement par la porte entrouverte en permanence ; les hirondelles ne se glissaient malencontreusement par la verrière que pour se heurter aux murs en quête d'une introuvable issue de secours. Les mouches, les abeilles et les hannetons voltigeaient tout autour jusqu'à ce que, par distraction, ils échouent dans l'une des nombreuses toiles d'araignées qui dentelaient les coins. Pourtant, c'était le paradis, ça l'est resté, malgré la riche galerie des esprits ou grâce à eux, et à l'occasion du  tournage d'un documentaire sur Mogador, j'ai découvert sans grand étonnement que des promoteurs sagement avisés s'apprêtaient à en faire une maison d'hôte."

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Il y a quelque jours Marta , l'ami Française m'écrivait: "Vous Mana, vous êtes un intellectuel, un cérébral, et un érudit, et avec une ouverture d'esprit peu commune." Je crois savoir aujourd'hui que mon ouverture d'esprit me vient de mon passage par l'école Israélite de Mogador..

Avec la nostalgie d'une humanité pastorale, le souvenir d'une humanité tatouée, la hantise d'une humanité robotisée,comme l'écrit Bouganim par ailleurs , je lui dédierai le texte sur le pastoralisme du Haut Atlas que je suis en train d’écrire et que parcourent depuis toujours les Boughanim au son de leur double clarinette de roseau….Abdelkader Manamoi.JPG

 

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Pratiquement à la même fameuse allée des arocarias, qui borde l'alliance Israélite d'une part et le vieux cimetière musulman d'autre part, à des années lumières d'interval: l'auteur en 1961 et en 2009....

17:34 Écrit par elhajthami dans Mogador, Poésie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : poèsie, mogador | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Commentaires

Je vous complimente pour votre éditorial. c'est un vrai boulot d'écriture. Poursuivez .

Écrit par : cliquez ici | 11/08/2014

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