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23/05/2010

Le secrêt des rêves

Le secrêt est dans les rêves

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Le secrêt des rêves de Regraguia BENHILA

Hommage à Regraguia BENHILA et à Sadya BAYROU

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Regraguia  BENHILA

Deux artistes peintres d'Essaouira, viennent de nous quitté, on leur a renduhommage cette après midi, du vendredi 21 mai 2010,au Musée, par la projectiond'un film Allemand intitulé "Le secrêt est dans les rêves", avec une exposition des oeuvres de deux amies Allemandes de Frankfort :  la photographe Roswitha Pross qui a présenté une série de portraits de femmes avec haïk, comme Regraguia Benhila et sans haïk comme Sadya Bayrou. Et une exposition de peintures au Murex d'où on extrayait la pourpre, de l'artiste Hanne Kiroher...Le poète Moubarak Raji, très affecté par leurs disparition leur a rendu hommage quant à lui par ce poème..

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Bonjour mon beau pinceau!...

De la majestueuse noirceur à la précieuse lumière enfantine, à la spontanéité joyeuse de ta gestuelle qui voit avec l'oeil du coeur. Face à tes peintures je suis saisi de la sensation de faire partie de ces enfants qui semblent surgir de tes toiles.Ils s'amusent , discutent à l'air libre, se chuchottent à l'ombre et à la lumière de créatures minuscules. Une relation secrête, éthérée, se crée alors entre ton chevalet et la toile qu'il porte. Il n'était pas évident que tu puisses frayer secrètement , ton cheminement parmi les galaxies et les étoiles ...C'est pourtant ce ciel  qui donne accès à ton univers intérieur...Celui des rêves brisées de ces femmes artistes qui viennent de nous quitter..Allez-y , entrez sur la pointe des pieds au coeurs de ces deux symboles d'amour... Bonjour mon beau pinceau, bonjour ma belle plume! Bonsoir ma beauté, à Dieu l'heureux instant qui a vu naître ton oeuvre aux couleurs d'un bleu qui dépasse l'imagination...d'un jet de pinceau inouï et maritime...qui ne mourra jamais...Oui, maintenant  tu es juste ésseulé dans le couloir de l'éternité...

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Le magique univers de Regraguia BENHILA

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Esquisse du temps qui passe
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Le henné, l'oeil et la main
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La reine de Saba
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Vénéneux comme l'amour et beaux sont les serpents aussi...
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Les marks de café pour prédire l'avenir...
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L'arbre du paradis
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Labyrinthe des lymbes
A Dieu Regraguia BENHILA, bien aimée, à Dieu Sadya Bayrou qui nous a quitté à la force de l'âge...


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Sadya Bayrou

11:44 Écrit par elhajthami dans Arts | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : arts | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

21/05/2010

Regraguia BENHILA

Regraguia BENHILA

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Ph. Youssef Amchir

Elle peignait l’aube à la fois étrange et belle
lorsque les brouillards de la nuit font danser la lumière du jour

Au plus profond de l’hiver, en cette période de la saison morte où les nuits sont les plus sombres et les plus longues, et où le froid de la boulda atteint les cœurs, Regraguia Benhila nous a quitté ce mardi 10 novembre 2009 sur la pointe des pieds, au milieu de cette arganeraie des hrarta aux environs d’Essaouira où elle s’est retirée ces dernières années pour vivre dans la dignité loin des regards et des incompréhensions. Loin d’une ville où les solidarités traditionnelles qu’elle y a connues dans sa jeunesse, n’existent plus.

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La peinture de Benhila est d’une générosité exubérante. D’une grande fraîcheur. La fraîcheur du ciel et de la mer. Elle peint l’aube à la fois étrange et belle lorsque les brouillards de la nuit font danser la lumière du jour. C’est le monde qui renaît au bout du rêve. Elle peint le ciel de la fertilité quand le jour enfante la nuit :

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« Au moment où la nuit pénètre dans le jour, dit-elle, je te jure au nom d’Allah tout puissant que je vois défiler tout l’univers. J’adore le ciel quand le soleil décline. Je vois les nuages qui se meuvent et j’imagine un autre monde au dessus de nous. Je vois dans le ciel comme des arbres, des oueds, des oiseaux, des animaux. Les labyrinthes que je peins sont comme les ruelles de la vieille médina : tu vas dans une direction mais tu aboutis à une autre. Je peins les chats qui rodent sur les terrasses. Les enfants qui jouent dans les ruelles étroites, les femmes voilées au haïk , leurs yeux qui sont les miroirs des hommes et notre « mère – poisson » qui est une nymphe très belle, une gazelle qui mugit de beauté avec ses cheveux balayant la terre. Je n ‘oublie pas l’île et les monuments, symboles d’une histoire révolue. Tout cela m’apparaît dans les nuages ou me revient dans les rêves. »

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Ses tableaux, elle les voit d’abord dans le spectre des couleurs qui illuminent le crépuscule au dessus de l’île et de la mer. Elle fixe ces projections poétiques dès qu’elles réapparaissent sur la toile blanche, dès qu’elle en saisit le bout du fil. Ce sont souvent des représentations symboliques du rêve, aux connotations très freudiennes :

 

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« Quand je peins, je me sens malade comme une femme sur le point d’accoucher. Ça m’arrive à des moments de silence. L’enfantement est la seule sensation que je n’ai pas encore expérimentée. J’exprime l’idée du foutus dans ma peinture. Inconsciemment, je peins la matrice des femmes et leur état de grossesse. Je peins le diable que j’avais vu dans une forêt lorsque j’étais toute petite : j’arrachais avec mes dents le palmier nain dont j’aimais le cœur, quand il m’apparut sous la forme d’un chameau à cornes. Il était de très grande taille croisant les bras sur la poitrine. Il me regardait avec des yeux fissurés au milieu et qui louvoyaient dans tous les sens. Je m’éloignais en rampant sur mon ventre. Je rêvais souvent d’un chameau qui me poursuit. Il se transforme en une boule qui rebondit de colère jusqu’au ciel lorsque je me dérobe à sa vue. Je peins aussi le serpent, parce que, dans les temps anciens, les gens avaient peur du serpent. Les hommes étaient très beaux. Les serpents aussi. Mais, s’ils te foudroient, tu ne peux plus guérir. C’est le serpent de l’amour, car l’amour ressemble au venin. Mais je prie Allah pour que les cœurs des hommes soient aussi blancs que les colombes. »

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Regraguia Benhila(en haïk) avec ses amies Allemandes

 

La mer est peuplée d’esprits. C’est delà que provient Aïcha Kandicha, symbole démoniaque de la séduction féminine, que les hommes rejettent aussitôt dans le brouillard de l’oubli et des flots. Le dialogue avec la mer est zébré de craintes chimériques que l’artiste exprime sous la forme de la « mère - poisson » - sirène mugissante de beauté avec sa chevelure d’algues balayant la surface de l’océan – de piranhas et de monstres marins. Pour l’imaginaire traditionnel, l’océan est un cimetière où vient se jeter l’oued en crue avec ses cadavres de végétaux et d’animaux. Notre imaginaire n’aborde la mer, qu’en y ajoutant notre propre effroi, que véhiculait la procession carnavalesque de l’achoura où l’on chantait entre autre :

Ô toi qui s’en va vers Adouar
Emporte avec toi le Nouar

Jeux de mots sur le « Nouar » (bouquet de géranium et de basilic) que le soupirant doit porter à « derb Adouar » (l’impasse au cœur de la médina où résidait Benhila avant d’aller mourir en dehors de la ville qu’elle n’aurait du jamais quitter). Dans sa peinture la mer n’est point nommée mais sa fraîcheur est présente : azur ! Terre blanche éclaboussée de soleil ! Œil- poisson pour conjurer le mauvais sort ! Cris blanc et gris des goélands, par delà l’autre rive et l’autre vent ! Coquillage pourpre et sang sacrificiel à la foi ! La palette magique aux couleurs des jours finissants s’est retirée à l’intérieur des terres pour s’éteindre dans la dignité comme ces oiseaux qui se cachent pour mourir.
Abdelkader MANA

Artiste autodidacte, elle est née à Essaouira en 1940. Et ce n’est que tardivement, en 1988 qu’elle a commencé à produire ses premières esquisses si caractéristiques par leur univers labyrinthique et tourmenté aux thématiques extravagantes et aux couleurs chatoyantes où s’expriment son imaginaire, sa féminité et sa forte personnalité. Elle est la première femme peintre d’Essaouira.Ses œuvres ont été présentées pour la première fois, à la galerie Frederic Damgaard le 3 mars 1989,à l’occasion de la fête du Trône. Elle a ensuite exposé place de l’horloge et à Beit Allatif face aux batteries de la Scala de la mer.. Par la suite, elle s’est liée d’amitié à l’écrivain Fatima Mernissi et à un groupe de femmes Allemandes qui exposèrent ses œuvres à Cologne, francfort et ailleurs.

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C’est une figure emblématique des femmes d’Essaouira, dont elle portait le haîk, qui disparaît aujourd’hui. Et c’est en 1989, que je l’avais rencontré au cœur de la médina où elle résidait . A l’issue de l’entretien qu’elle m’avait accordé alors, je lui avais consacré le texte qui precede qui paru au catalogue bleu « Artistes d’Essaouira » paru en 1990, sous le titre : « La quête de la fertilité »

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19:02 Écrit par elhajthami dans Arts, hommage, Mogador | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : arts | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

20/05/2010

Belle demeure d'Essaouira

Essaouira, ville à vivre
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Où séjourner à Essaouira?

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Maison d'hôte au coeur de la médina

Avec vue panoramique sur la baie et les terrasse d'Essaouira

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Donnant sur l'horloge...et

Sur la baie....

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Avec vue sur les terrasse d'Essaouira

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La belle demeure , rue d'Agadir

On est rue d'Agadir, l'un des quartiers les plus anciens de la médina, puisqu'il remonte à quelques années de 1764 , date de la fondation du port et de la kasbah  : en 1773, Agadir qui résistait encore à la pression du souverain, et où se maintenaient d'importants marchands chrétiens et juifs fut puissamment attaquée par une armée venue de Marrakech. La ville ne put résister, ses fortifications furent détruites. Sidi Mohamed Ben Abdellah n'accorda qu'un temps très bref à ses habitants pour ramasser ce qu'ils possédaient et leur ordonna de se transporter à Essaouira où un quartier « derb Ahl Agadir », leur fut attribué.

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Abdelmajid Mana: GSM(Maroc) :(212.6.70.27.14.12).e-mail: mana35@hotmail.fr

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Maison du 18ème siècle  sis rue Agadir : l'appartement situé au 2ème étage avec entrée indépendante,comprend: 4 chambres, 1 grand salon, 1 cuisine équipée,3 salles de bain. Avec une capacité d'accueil de 10 personnes. Selon les saisons le tarif est le suivant: A) Bassa saison: 700 Euros par semaine B) Haute saison: 900 Euro par semaine

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Maison traditionnelle d'Essaouira :

Riad ou plutôt Menzeh(vue panoramique sur la mer) ?

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Par Abdelmajid MANA

Depuis maintenant une quinzaine d'années, s'est développée au Maroc, la formule touristique, d'habiter les Riad dans la médina.  Cela permet d'une part d'être au cœur de la culture de la médina marocaine, que ce soit Fès, Marrakech ou Essaouira, et d'autre part de sortir de l'anonymat du tourisme industriel de masse. Cependant, , comme on le voit dans tous les sites Internet, il y a un abus de langage concernant  l'utilisation du mot « Riad ». Un  terme mal défini qui prête à confusion, surtout pour ce qui concerne les maisons du 18ème et 19ème siècle d'Essaouira. Les gens qui ont acquis ces maisons,  les appellent abusivement « Riad ». Or je vis justement dans l'une de ces vieilles maisons  qui n'est pas un Riad et que quelqu'un qui ne connait pas  l'histoire de la ville serait tenté de l'appeler ainsi.

On est rue d'Agadir, l'un des quartiers les plus anciens de la médina, puisqu'il remonte à quelques années de 1764 , date de la fondation du port et de la kasbah  : en 1773, Agadir qui résistait encore à la pression du souverain, et où se maintenaient d'importants marchands chrétiens et juifs fut puissamment attaquée par une armée venue de Marrakech. La ville ne put résister, ses fortifications furent détruites. Sidi Mohamed Ben Abdellah n'accorda qu'un temps très bref à ses habitants pour ramasser ce qu'ils possédaient et leur ordonna de se transporter à Essaouira où un quartier « derb Ahl Agadir », leur fut attribué.

Ces négociants juifs ou berbères originaires de Sous - les fameux « toujar sultan » (négociants du roi)-  qui s'établirent dans la kasbah et à « derb Ahl Agadir », construisirent des maisons à deux niveaux plus une terrasse. Le rez - de Chaussée était réservé à l'entrepôt des  marchandises. Ce type de demeure comportait deux entrées : ce qui montre bien qu'on ne mélangeait pas négoce et vie privé. La première porte  donne  accès au lieu du travail qui est l'entrepot des marchandises destinées à l'exportation via le port : des sacs empilés les uns sur les autres jusqu'au plafond d'amendes décortiquées, du blé, de peaux,  de caroubes et surtout de  gomme (lagracha), d'où le nom " lahraya dyal lagracha "(entrepôt de la gomme). D'après ma tante maternelle,  qui accompagnait sa maman , dans ces entrepôts, où  les femmes la filtraient et  nettoyaient  la gomme » durant la grande famine de fin  1920-début  1930 :  c'est de l'immense forêt de thuya de béribérie, au sud d'Essaouira, qu'on ramenait cette gomme qu'on appelait lagracha.

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La deuxième porte donnait sur les  étages : Le premier pour la famille, le second pour les invités  . Ce dernier était souvent  le plus beau avec vue sur la baie . On l'appelait manzah, mot qui signifie "vue panoramique" justement. A l'époque, il n'y avait pas d'hôtels et les voyageurs de passage étaient reçus : soit au  manzah des négociants , soit à la « douiriya »(, maisonette mitoyenne à la maison proprement  ou dar). En effet, partout ailleurs dans l'ancienne médina, chaque  foyer disposait de deux maisons adjacentes : dar(ou maison) pour la famille et et douiriya (maisonnette)pour les célibataires et les invités.

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Le rez- de - chaussé des maisons - entrepôt, se caractérisait par d'énormes arcades en  pierres de taille (manjour) , matériau  au fondement de l'ancienne kasbah et des fortifications du port. Dans l'hinterland d'Essaouira, on retrouve encore aujourd'hui d'excellents tailleurs de cette roche de sable, à Had Dra, Akermoud et Tamanar en particulier. Ces rez-de-chaussée étaient hauts de six à huit mètres  pour y entreposer suffisemment de marchandises. Il faut donc que ça soit grand mais aussi que ça soit solide : leurs plafonds étaient en bois de thuya, qu'on appelle tassiout en berbère. Ce dont  les européens raffolent maintenant en les imitant même pour leurs salons. C'est le plafond berbère par excellence, à base de baguettes en thuya de soixante centimètres soutenues transversalement par des poutres en madriers de thuya également.

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Le meilleurs exemple de ce type d'entrepôt à Essaouira, c'est le restaurant  El Menzeh : avec ses énormes arcades en pierres de taille, son très haut plafond en tassiout ,le mur badigeonné en blanc. C'est à la fois simple et beau. Il n'y a pas cette profusion de Zellidj , de couleurs, de calligraphie, et de dessins géométriques et floraux qui caractérisent les Riad de Fès ou de Marrakech. Aujourd'hui, paradoxe des paradoxes, les européens préfèrent de loin ces lieux rustiques et simples, que sont les anciens entrepôts d'Essaouira aux soi-disant Riad avec des tas de zellidj et de décorations.

Maintenant, on a installé un restaurant  dans ce rez - de - chaussé en ajoutant de la déco ,de la lumière, et à l'étage, on a mis des chambres un peu partout. C'est cela qu'on appelé abusivement Riad. Or Essaouira est une ville récente et maritime et le vrai Riad est un legs andalous caractéristique des villes impériales comme Fès et Marrakech. C'est quoi un Riad ? C'est un mot arabe qui dérive de « Raoud » qui signifie « jardin » ou encore mieux « jardin de l'Eden ». Le modèle est andalou : il s'agit d'un patio avec jardin et fontaine . Carré magique, sourate Coranique : de l'eau, on a crée toute chose vivante. Le Riad est une demeure à patio avec arcades entourant jardin et fontaine où la lumière descend d'en haut. Lumière de la lune, des étoiles et du soleil, mais aussi lumière divine inspiratrice de rêverie et de méditation en ce lieu où chantent les oiseaux dans les arbres et où ruisselle l'eau dans la fontaine. Ciel ouvert avec oliviers, orangers, figuiers et palmiers. Les arbres du paradis et de la méditerranée par excellence. Mais aussi bananier et pomiers venus d'ailleurs.

Comme pour le modèle musical médini (M.M.M), le Riad est  d'inspiration andalouse. J'irai encore plus loin que les andalous. Tu trouve cela chez les romains, en fait : la structure de cette maison en carré avec à l'intérieur un jardin et en dessous une citerne - comme la citerne portugaise d'El Jadida. Dans notre maisons d'Essaouira , on a aussi, des citernes avec arcades. Petit, je suis descendu à sa citerne située au sous sol et j'ai vu des arcades en pierres de taille comme le reste de la maison. Ce modèle d'architecture est romain : avant de mettre un jardin au-dessus de cette réserve d'eau, on mettait en place toute un système ingénieux et invisible de canalisation qui conduit délicatement les eaux de ruissèlement de la terrasse jusqu'àu sous sol c'où on puisait l'eau pour arroser le jardin. A Essaouira, les seuls véritables Riad appartenaient au caïds de la région et le savoir faire venait de Marrakech qui n'est pas loin. Les véritables maisons d'Essaouira avaient certes une citerne au sous sol, pour laver le linge et autres travaux ménagers, mais sans jardin ni fontaine.

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Un Riad est donc « un jardin intérieur » à ciel ouvert. Autour du carré de ce jardin  s'organisent toute une série d'arcades et de chambres. Son rez-de chaussé  se distingue par la présence d'une cuisine et d'une immense pièce où le maître de la maison reçoit ses amis et ses invités. Les femmes et les enfants sont à l'étage. Or, nous avons une situation tout à fait inversée dans la cas de la maison-entrepôt d'Essaouira, où la réception des amis et des invités se fait plutôt au deuxième étage, avec son menzeh et sa vue panoramique sur mer. Le spectacle qui repose les sens et invite à la méditation n'est pas le jardin de l'Eden, mais l'océan de lumière. A Essaouira, il s'agira plutôt d'un jardin suspendu dans les hauteurs : pots de basilics et de géranium avec vue sur la baie. Au Riad classique  de Marrakech ou de Fès, le lieu de villégiature et de spectacle ; c'est le rez-de-chaussé. Au menzeh d'Essaouira, il faut monter plus haut pour voir la mer. Là -bas, c'est le Riad, à Essaouira, c'est plutôt le menzeh (vue panoramique et aérienne sur mer).

Quand on est dans la médina, bien souvent, les maisons n'ont aucune ouverture sur l'extérieur. La lumière descend d'en haut. Or dans les maisons juives d'Essaouira : partout les fenêtres sont grandes ouvertes au dessus du niveau des remparts et donnent sur la mer. Car, on n'avait pas à cacher la femme. Dans certaines rues importantes comme celle des Alouj (les anciens convertis issus des prises de mer de la piraterie barbaresque  qui travaillaient comme canonniers à la scala du port et de la mer) , il y a même des balcons. C'est la maison typique des négociants juifs et des consuls chrétiens établis à Essaouira dés sa fondation en 1764.  Alors que les maisons musulmanes se caractérisent par des façades aveugles, avec petite porte d'entrée, donnant sur un véritable paradis, avec son puits de lumière venant d'en haut. expression de cette pudeur selon laquelle, la femme ne doit pas se montrer, se dévoiler.

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Maâlam Tahar Mana, doyen des marqueteurs d'Essaouira, mon père

D'où vient donc le mot Riad ? Dans le Coran, il signifie « jardin du paradis ». Par ces jardins intérieurs, les hommes veulent reconstituer en quelque sorte  un petit bout de paradis sur terre. Ils vont  y mettre des plantes exotiques et  sacrées qu'on retrouve dans le Coran. Souvent un olivier ,un figuier et un pommier. Les fruits dont on se nourrira dans l'Eden.  Ils reconstituent ainsi, quelque part,  ce bout de paradis dont chacun rêve après sa mort. Le cimetière porte aussi le nom de jardin : Raouda. D'ailleurs les cimetières qui se trouvaient au pied des remparts de l'ancienne médina - comme ceux de Bab Marrakech malheureusement rasés par la municipalité d'Essaouira au tout début des années 1980 - étaient tellement couverts de végétaux qu'on ne voiyait plus les tombes. Le cimetière était un véritable jardin. On laisse les plantes folles l'envahir  . Cela était vrai pour les anciennes médina comme Essaouira,  Marrakech ou  Fès , mais cela l'est aussi pour la  campagne : au cimetière d'Aït Daoud, le souk du miel de thym, que j'ai visité récemment et dont j'ai les photos, on permet à toutes les plantes de se développer à leur guise.

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Si Mohamed Mana qui a pris la relève dans l'atelier de notre père...

Chez nous, on désigne donc le cimetière  par le mot « jardin » et non pas maqbara (lieu d'ensevelissement) comme c'est le cas dans d'autres villes. Mais je trouve très beau qu'à Essaouira, on dise Raouda (jardin). Alors qu'à Casablanca qui est une ville anonyme, on dit plutôt maqbara (lieu d'ensevellissement). On dit maqbara Chouhada (sépulture des martyres), mais pas Raouda (jardin), un mot beaucoup plus apaisant et moins dramatique. A Essaouira, qui est une ville enracinée, souvent, le cimetière est un jardin.  Et quand on dit « jardin », dans l'inconscient collectif, on met tous les morts à égalité et on leur souhaite à tous de rejoindre le paradis.

Abdelmajid Mana


[1] Vue panoramique sur la mer

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10:35 Écrit par elhajthami dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : maison d'hôte à essaouira | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook