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09/05/2012

Eclaircie

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Jour de lumière à Essaouira
Je republie ce reportage photographique du Lundi 1er mars 2010 où j'ai vraiment découvert ma  vocation de photographe. Plus qu'une question de technique, la photographie est d'abord une affaire de "feeling" et de présence: il fallait être là au bon moment...Je republie également cette note en raison de ce message que je viens de recevoire de jeunes musiciens Français  :
Bonjour,
 
Je suis Pierre-Marie Sangouard, chanteur du groupe français Adrugan. Lors d'un séjour à Essaouira en avril 2009, j'ai composé une chanson hommage à cette ville incroyable dont je suis tombé amoureux.Depuis nous jouons cette chanson sur scène, et elle figurera sur notre prochain album intitulé "les Lunes Rousses".Je tenais à vous faire découvrir cette chanson en avant première.N'hésitez pas à nous écrire ce que vous en pensez et à la faire écouter à votre entourage.Vous pouvez trouver les informations sur notre groupe à cette adresse :www.adrugan.fr Bien à vous.
"Merci pour cette belle chanson qui finit par le soupire des vagues.." Leur avais - je répondu....
 

 
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Petite par son espace, grande par son temps mouvant; Essaouira se prête au regard poétique.

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Par Abdelkader Mana
Après la tempête des derniers jours de février 2010, l'éclaircie de ce lundi 1er mars : jour de lumière à Essaouira. Au sortir de l'aube je me dis : ce jour est différent, c'est le premier jour de lumière transparente, translucide qui mettra en valeur le blanc et le bleu d'Essaouira. Ni ciel, ni mer, un seul bleu éclat de lumière.Et puis les mouettes, encore et toujours. Elles occupent maintenant le cœur même de la médina. Se chamaillant pour une bouchée de pain endurcie maintenant que la tempête des derniers jours a empêché les arrivages au port et forcé les bateaux bleus à rester à sec sur les quais du port. Elles n'ont plus peur de l'homme, elles sont partout, cependant que se lève le soleil à l'Est des îles purpuraires.

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Première prise de vue : la porte du lion : en ce jour qui point, par delà l'horizon le soleil se profile derrière le rideau des branchages d'araucarias. Cet arbre venu d'Amérique Latine s'est tellement bien acclimaté au ville côtière du Maroc qu'il donne l'impression de faire partie du paysage depuis toujours.Je regarde ma montre, il est 7h.17. et je me rends compte qu'on est déjà au premier jour de mars : les tempêtes de février sont déjà loin derrière nous. Je note la lumière du soleil levant sur les crêtes des vaguelettes, les vieilles pierres ocres du port, l'île reverdissante au loin, le flamboiement des minarets et des araucarias se dressant au ciel comme autant de lances de chevaliers Donquichottesques en marche. L'aube et ses humeurs. L'aube et ses lumières.
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Oui, aujourd'hui, la lumière sera bonne et le ciel serein. Avant de m'engager sur la baie immense et lumineuse, j'ai pris des baignées croustillons au « Sefnaj » - un mot arabe qui dérive du persan «isfanj » probablement parce que ces baignées sont originaires d'Ispahan - puis une soupe de fèves (bissara) à khobbaza, marchants de pein de seigle bien chaud en cet heure matinale, où d'habitude se retrouvent, à chaque aube naissante, les marins du vieux port, pour partager un bon thé d'absinthe (chiba) qui a la réputation de réchauffer le corps et les cœurs juste avant d'affronter les embruns et les frimas de haute mer. Mais aujourd'hui, aux cafés maures de khobbaza, rares sont les marins parmi la clientèle de l'aube : là aussi c'est signe qu'il n'y a pas de sortie en mer ; comme si la ville et le pays - un minaret, en s'effondrant vient de faire quarante et un morts à Meknès - se remettent lentement des blessures de la dernière tempête de ce mois de février 2010.
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Sur la plage, je croise quelques promeneurs solitaires et romantique comme j'en ai connu du temps de mon adolescence amoureuse, où je suivais moi aussi la ligne de partage des eaux en ces beaux rivages. Rêvassant aux rencontres impossibles et interdite. Divaguant au gré des vagues.Au loin un voilier insaisissable, au voisinage de la grande île où poussent drues les première prémices du printemps. Mon objectif saisi sa verdâtre fraîcheur entre le bleu sombre des eaux où se diluent  progressivement les alluvionnements des récentes inondations de l'oued ksob et le bleu transparent et limpide du ciel lavé par les eaux de pluie. Je m'approche de la lisière luisante des vaguelettes et de leur rumeur et je zoom sur l'îlot de firaoun (Pharaon) où niche le faucon migrateur d'Eléonore.La mer a de moins en moins cette couleur pourpre que lui donnaient les déversements impétueux des dernières inondations. Mais ce qui reste de brindilles et de branchages, couleur d'algues sombres, soulignent, comme des cils de beauté l'immense regard bleuâtre du beau rivage.Plus je m'approche de Borj El Baroud, cette tour de feu, plus elle prend les allures d'une œuvre d'art sculptée par les vagues et les vents. Elle n'a plus la forme de la tour de guet qu'elle avait au début du siècle dernier avec ses créneaux et ses arcades. Elle semble s'effondrer sur elle-même au milieu des dunes de sable.Elle est maintenant à l'embouchure de l'oued ksob, le lieu de rencontre privilégié de nué d'oiseau après avoir été le lieu des rencontres amoureuses au temps des hippies. En en faisant le tour brusquement deux bétyles phéniciens se dressèrent devant mon objectif ! Une découverte ! Une révélation toute fraîche concernant un lieu visité et revisité depuis mon enfance ! Je n'aurais probablement jamais remarqué une si évidente parenté avec les bétyles phéniciennes de l'île d'en face. C'est la prise de vue qui orienta ainsi mon regard, ma perception et mon analyse. La photographie comme outil de recherche...La lumière de l'aube, c'et aussi la lumière sur le passé phénicien d'Essaouira.Je garde le meilleur pour la fin: ma découverte des bétyles phéniciennes d'Essaouira. Comme disait Hegel: "Au début toutes les vaches sont noires, ce n'est qu'à la fin que l'oiseau de minèvre se lève." Ce n'est qu'à la fin que l'éclaircie permet à la lumière d'éclater.

Reflets

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De « Borj el Baroud » (la Tour de Feu) à TANGARO

Au XVI ème siècle, avant la découverte des Amériques, au Maroc, les Saâdiens avaient le monopole du sucre en Méditerranée Occidentale. Et c'est essentiellement pour acquérir ce produit précieux et rare à l'époque que les Européens mouillaient  en rade de Mogador et au large de Santa - Cruz (Agadir) : ces deux port étaient le débouché naturel des sucreries Saâdiennes situées dans l'hinterland en amont de l'oued ksob de l'oued Sous et de Chichaoua.Les Saâdiens ont édifié leur fort de « Borj et Baroud », sur les ruines   du sémaphore Phéniciens établi là pour orienter  les bateaux ronds de l'antiquité qui jetaient l'ancre à ce mouillage d'Amogdoul (mot qui dérive de « Migdol » qui signifie « petite rempart » en phénicien, mais aussi en hébreux et en arabe avec le toponyme de « Souira »), par les flammes qu'on y attisait par nuit sombre au fond de la baie.

Depuis la haute antiquité le site est fréquenté, d'abord par les Phéniciens comme en témoigne la bétyle dressée au ciel qu'on a découvert sur l'île, ensuite par les Romains dont on a retrouvé, toujours sur l'île, entre autre les vestiges d'une villa, d'une mosaïque représentant un paon et d'une pièce de monnaie à l'effigie de Juba II. Et il y a encore peu de temps de cela, des marins ont remonté dans leurs filet deux amphores romaines entièrement intactes, recouvertes seulement de coquillages et d'algues. Et non loin des récifs de la Scala de la mer, où les anciens entrepôts de canons et de poudre sont actuellement occupés par les ateliers des marqueteurs, d'autres marins ont de leur barque entrevue au fond de l'eau, par temps calme et eau transparente, ce qui ressemble à une autre mosaïque romaine que celle déjà répertoriée sur l'île.

Une piste romaine reliait d'ailleurs Tangaro sur les hauteurs Sud de Diabet à « Karkora » au bord de lamer via une magnifique forêt de thuya, de mimosa grouillant de perdrix, de lièvres et de sangliers : aujourd'hui toute cette faune et toute cette flore a disparu sous le green du nouveau golfe qui occupe une superficie supérieure en hectares à celle de la ville. Cet immense espace aujourd'hui entièrement grillagé et interdit d'accès , était sauvage et servait depuis le XVIème siècle comme pâquis où venaient brouter librement les troupeaux  de Diabet et où les gens de la ville organisaient leurs « Nzaha » (pique - nique rituel) à l'ombre des ruine de Dar Sultan ensablée. Les marins de Diabet, avec leurs filets de pêche pour rejoindre le front de mer empruntaient jusqu'à une période récente cette lumineuse et sauvage piste blanche disparue sous le green. Cette ancienne piste romaine aboutissait à « Karkora », là où sont établies, sur le récif, les huttes des récolteurs d'algues. Cette piste blanche, disparue sous le green, reliait jadis l'antique puits de TANGARO aux digues de KARKORA , ces bassins de pierres dont se servaient jadis les Romains pour y piéger les poissons quand lamer se retire à marrée basse. C'est une technique qui est encore utilisée de nos jours, là où il y a de fortes marées : en se retirant , la mer laisse derrière elle les poissons, qui sont ainsi pris au piège par ces anciens bassins de pierres, dénommés ici « KARKORA », le féminin de « KARKOR », le tas de pierres sacrées en langage vernaculaire.

Cet immense site des îles purpuraires abritait en effet deux fabriques romaines : l'une sur la plage de l'île au niveau du tertre produisait la pourpre à base du gland du Murex, coquillage auquel les romains donnaient le nom de Purpura Haemastom (d'où le nom des îles purpuraires que portait Mogador de Juba II). La seconde fabrique est celle du garum. Elle était située sur le continent à l'emplacement actuel du lieu - dit « KARKORA », des récolteurs d'algues, soit à mis - chemin entre la Tour de Feu Phénicienne ;le « Borj El Baroud » des Saâdiens et Cap Sim.

Le garum est une sauce de poisson - pourri , dont les romains étaient friands, qui était concocté à la manière du Nyak -Nyam  Vietnamien. Une fois pris au piège au bassin de pierre de KARKORA, les romains transportaient ce poisson à dos de mulets et de chameau,à travers la piste blanche disparue sous le green, jusqu'aux hauteurs de Diabet où se trouvait le puits de « Tan - garum », devenu plus tard « TANGARO » où se situe l'auberge du même nom. Les romains puisaient là, l'eau douce dont ils avaient besoin pour se désaltérer et pour fabriquer le garum.

Or en berbère le puits se dit « Tanout » : Imin - Tanout signifie la margelle du puits chez les sédentaires Masmoda dont font partie les Haha au Sud d'Essaouira et « Anou Ou Kchod » qui a donné Nouakchott, l'actuelle capital de Mauritanie, signifie le « puits du bois » en langue Sanhaja, les premiers nomades berbères du Sahara. Le toponyme de « TANGARO » dérive donc d'un mot composé du nom du puits en berbère Haha « Tan » et du poisson - pourri romain « Garum » ; ce qui donnera plus tard le toponyme de « TANGARO », lieu - dit situé à l'emplacement de l'auberge du même nom où trône d'ailleurs au milieu des cactus et autres genêt, une vieille éolienne dont les pales métalliques bruissent perpétuellement sous la fureur des vents alizés.

Essaouira , le vendredi 5 mars 2010

Abdelkader MANA

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Sculpture du vent et des vagues
"Borj El Baroud" (la Tour de Feu) est la batterie utillisée par le sultan pour fermer la passe Sud de la baie par des tir croisées avec une autre batterie située juste en face sur l'île. C'est cette vieille ruines situées près de Diabet à l'embouchure de l'oued ksobqu'on appelle "fort portugais". La partie supérieure est musulmane (1432), les gros blocs qui ont servis de base à la construction musulmane peuvent être les vestiges de "Mogdoul", la tour punique qui a dû être construite par Hannon au fond de la baie de Mogador et a fourni l'ancien nom d'Amogdoul cité par le géographe El Békri. ils sont battus par les brèches à chaque marée par les vagues.
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Oiseaux
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Envolée
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Alluvionnements de l'oued Ksob
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Les îles purpuraires
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Les bétyles phéniciennes d'Essaouira

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Créneaux
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Reportage photogaphique d'Abdelkader Mana du Lundi 1 mars 2010

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09:37 Écrit par elhajthami dans Reportage photographique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : photographie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Commentaires

Sam 10 avril 2010, 10 h 13 min 08 s
Les bétyles phéniciennes d'Essaouira

Bonjour Monsieur Abdelkader !

J'ai lu votre texte, celui où vous longez la plage, la nostalgie tendre, bleue et blanche, nostalgique en croisant des amoureux, et passionné de l'histoire de ce pays (je suppose que vous êtes Marocain),

j'ai regardé ces photos qui envoient l'odeur des embruns

je n'avais pas eu l'information que vous notez ; le Minaret de Meknès qui s'est effondré lors de la tempête, faisant une quarantaine de morts.

J'ai donc essayé de laisser une note sobre (genre : très impressionnée par les bétyles phéniciennes et les rochers "créneaux", amitiés de amnesy), mais encore une fois cela ne fonctionne pas.
Je voulais vous le signaler, vous avez peut être coché par erreur une case qui interdit les commentaires ?
Amitiés et à bientôt sur votre blog qui pour moi est attachant et émouvant, et mérite une large diffusion pour la connaissance de l'histoire du Maghreb
Respectueusement,
Amnesy

Écrit par : Amnesy | 10/04/2010

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